Hs : Chapitre court mais la suite demain J'espère que vous aimez toujours, car d'ici deux ou trois chapitres le scénario sera beaucoup plus clair.



Bien coiffé. Les cheveux imbibés de cire. Rasé. Un nez retroussé vers l'extérieur, des yeux gris très clairs, une barbe rasée au millimètre près. Vêtu d'un costume noir et d'une cravate rouge aux rayures blanches en diagonale. Des chaussures de ville. Une montre argentée au poignet droit. Modèle inconnu. Et, détail plutôt percutant, il était sec. Pas la moindre goutte d'eau. Ses cheveux n'étaient pas mouillés, son costume non plus. Et il tirait des lattes sur sa cigarette toutes les dix secondes. Treeves leur faisait face et l'homme au caban gisait dans son sang à ses pieds. Il était mort, manifestement.

"Salut les jeunes. Vous avez mis le temps ! "

Mehdi était figé, et ses amis ne pouvaient pas faire le moindre geste, atteints de la même paralysie. Treeves auscultait ses visiteurs.

"Lâchez donc ces couteaux, vous pourriez blesser quelqu'un. Ou alors... "

Il laissa tomber quelques cendres dans le cendrier puis reprit.

"Vous pouvez toujours les garder en main. Après tout, vous êtes plus nombreux que moi, et je tiens une cigarette. A cette distance, toi, -dit il désignant Mehdi du doigt- tu pourrais me trancher la jugulaire en trois secondes et deux pas vers l'avant, j'aurais à peine le temps de tenter un réflexe de recul que mon sang coulerait déjà sur le sol. Vous pourriez aussi tous vous ruer sur moi, me maitriser serait un jeu d'enfant, je suis seul, vous êtes en supériorité numérique. Cela dit vous ne bougez pas puisqu'un cadavre git à mes pieds. Vous n'en avez jamais vu, vous êtes en état de choc, c'est normal. "

Il écrasa sa cigarette puis désigna le cadavre du doigt.

"Oh, et, peut-être avez vous remarqué les impacts de balles dans le dos d'Aaron ? Si c'est le cas, vous en déduirez donc que je suis armé, probablement dangereux compte tenu du fait que je suis son meurtrier, et peut-être un peu fou, puisque je m'en grille une en me servant de son dos comme repose pied. Cela dit, ce dernier point, je peux vous assurer qu'il est incorrect, ce n'est qu'un simple réflexe pour améliorer mon confort. J'aime avoir les pieds surélevés. Rien de plus normal, non ? "

Les membres de Mehdi s'entrechoquaient. Une telle cruauté, et un sang froid pareil... Qui sont ces gens ? Et l'homme au caban, Aaron, qui prêchait l'arrivée d'un ordre nouveau... vraisemblablement lié à Fermi, le voilà mort. Et devant lui, son assassin, lié aux gens qui les ont attaqué à l'entrepôt il y a quelques heures. Mais quel lien entre ces gens et Fermi ? Sont-ils avec lui ? Contre lui ? Jouent-ils un quelconque rôle dans toute cette histoire ? Ces types ont en après le code. Mais pourquoi ? Et à quoi correspond-il, ce code ? Les évènements devenaient flous, trop flous, et hors de portée de ces adolescents, car plus le temps passait, plus les gens semblaient en savoir beaucoup plus qu'eux.

Treeves, semblant intouchable, tranquillement installé sur son piédestal, repris en main la conversation, les adolescents ne daignant pas émettre le moindre son.

"Enfin, evidemment, vous n'allez rien faire. Rien de plus naturel étant en état de choc. Six U, vingt U, vous avez le début du code. 18, ce nombre, c'est la fin de la première partie du code. C'est tout, mon rôle était simplement de vous donner le dernier morceau du code. Désolé de devoir vous infliger ça, mais vous êtes arrivé un peu tôt. Pas eu le temps de tout nettoyer, j'étais en pause clope, en fait, vous m'avez surpris, coquins. Remarque, je vous attendais aussi, donc disons que vous tombiez à pic,mais pas trop ! "

Eloquent. Treeves semblait captivé parce qu'il faisait, et, par définition, tout cela ne semblait représenter qu'un immense jeu pour lui.

"Il... est..."

Mehdi parvenait enfin à laisser échapper des sons. Sa bouche avait au moins prononcée un sujet et un verbe. C'était un bon début.

"Oui ? "

Prononça Treeves, laissant sa fumée imprégner la pièce toute entière. Mehdi inspira profondément puis parvint enfin à parler sans interruptions.

"L'homme au caban... Aaron. Qui est-il ? Pourquoi l'avez vous tué ? Qui êtes-vous ? Quel lien avez vous avec Fermi ?! "

D'un ton calme, ce fut presque une explosion de rage qui jaillit de l'adolescent. Incompréhension. Trop d'incompréhensions, de choses qui ne coïncidaient pas, d'étrangetés, de questions, de bizarreries, de surnaturel. D'absurde, aussi.

Treeves s'apprêtait à répondre, ou, du moins, à remballer le pauvre enfant, mais sa montre sonna soudainement. Trois tics plus tard, il tira une dernière latte sur sa cigarette avant de l'écraser sur la nuque du cadavre d'Aaron, puis se leva et fit face aux adolescents.

"Ecoutez, tout ce que je peux vous dire, c'est je ne bosse pas avec "Fermi". J'appartiens à une équipe chargée de l'éliminer, lui, et tous ses acolytes. Et toi, petite tête, ainsi que tes potes, vous jouerez un rôle capital dans tout ça. Mais pour l'instant, je m'en tiens aux ordres. dix-huit, et "Fermi" comme vous l'appelez, c'est George Scherff. Le "vrai" "Fermi", tout du moins. Réfléchissez, et le puzzle se résoudra de lui-même. "

Il s'approcha de la porte du hall et les adolescents s'écartèrent pour le laisser passer, rasant les murs pour ne pas l'effleurer. Sur le pas de la porte, Treeves se retourna une dernière fois avant de disparaître dans la tempête.

"Une dernière chose... je ne suis pas contre vous. Je veille sur vous. Et, Mehdi, crois-moi, tu as bien fait de ne pas recroiser Aaron de son vivant. "

Il se retourna et fit quelques pas sous la pluie. Son costume sec se trempa aussitôt.

"A bientôt. Oh, et, surveillez l'heure. Le soleil se lève bientôt. "