Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

La cage de faraday


Par : Diabolo
Genre : Horreur, Nawak
Statut : Terminée



Chapitre 7 : Dans le feu de l'action


Publié le 20/02/2013 à 00:13:21 par Diabolo

L’Algérien contemple sa victime. Il essuie délicatement son couteau sur un coté de sa veste militaire, laissant une longue trace rougeâtre, avant de ranger cette maudite arme dans sa ceinture. Il jette un œil aux alentours, et les gens ont stoppé leur respiration de peur. La cour est silencieuse, comme déserte. Soudainement, il prend son fusil à deux mains et tire quelques balles perdues en l'air, en vociférant de sa voix tonitruante :

- Vous avez pas compris le message, c'est pas assez clair ? (Il pousse le corps d'Ethan qui roule de quelques centimètres sur le goudron). Réagissez bande d'attardés, battez-vous !

La foule se dissout immédiatement accompagnée de cris et de pleurs, les même qui résonnent désormais dans ma tête depuis quelques temps. Les gens, apeurés, s'écrasent littéralement pour fuir vers les bâtiments, les professeurs essayent vainement de les calmer, mais rien n'y fait, l'instinct animal reprend le dessus sur chacun d'eux. Ils ont compris le message, et ils vont se battre pour leur survie, bien que certains partent déjà avec un malus dans cette compétition sordide. Je reste à terre, je me fiche de me faire écraser, peut-être même j'apprécierais. Un moyen de quitter cet enfer rapidement. Je pose ma tête sur le goudron qui est toujours aussi froid, je fixe les yeux d'Ethan. Ils sont à demi-clos, perdus, inexpressifs. Soudain, ils se ferment douloureusement, et la tête de mon homme tourne légèrement avant d'ouvrir ses beaux yeux verts pour me voir. Je crois apercevoir un sourire et je lui rends ce sourire presque niais. Je cligne des yeux, je constate que la tête d'Ethan n'a pas tourné dans ma direction, et ses yeux sont toujours à demi fermés. Je soupire. Tout le monde s'agite autour de moi, mais je fais abstraction des mouvements et des bousculades, des bruits, je ne ressens que les vibrations du sol. Ma main est recouverte de sang, je la pose à plat sur du goudron encore noir à coté de la flaque, laissant une empreinte lugubre. Deux bras puissants me retirent de ce goudron si revigorant. Ben me remet sur mes pieds et m'assène quelques claques légères mais rapides pour me faire revenir à la dure réalité. Je tourne la tête, encore cloîtrée dans mon monde, non loin de nous et de cette pagaille, Maël se relève en se tenant l'épaule, et un Algérien le vise. Affolé, il prend la fuite vers le bâtiment A. Je le suis des yeux, puis je surveille l'Algérien comme si je pouvais l’empêcher d’abattre mon meilleur ami comme un lapin. Dans mon esprit, Maël est en sécurité, alors je cherche Élodie du regard. Sans que je ne l'ai vue, elle prend la relève et me soutient pour que je reste debout. Ben s'élance sur le tronc d'un arbre et arrache une des branches principales. Il ramasse un couteau par terre, toujours en guettant ses arrières tel une proie. Nous sommes tous des proies, enchaînées les unes aux autres par cette chasse cruelle et sanguinaire. Élodie m'entraîne vers les préfabriqués car elle sait que si ça ne tenait qu'à moi, je serais restée plantée là dans ce chaos, espérant sagement qu'un fêlé me coupe en deux. Quand nous atteignons la porte principale des préfabriqués, j'ai totalement repris mes esprits, je jette un dernier coup d’œil à la cour supérieure avant de rentrer dans les petites salles. Coup d’œil que je regrette car les gens qui ont encore deux jambes prennent désormais part aux combats particulièrement violents. Les soldats algériens tirent en direction des salles, brisant les vitres, et de nombreux élèves se battent à mains nues ou même avec des armes confectionnées par eux-même ou trouvées. Un affrontement attire mon regard, c'est un jeune 4° attrapant sauvagement la tête d'un 6° qu'il explose sur le goudron, sans scrupules. L'enfant convulse sur le sol, et son crâne fracassé m'offre une vue plus que répugnante sur son cerveau. Je frissonne et manque de tomber en syncope devant la violence inouïe du combat auquel je viens d'assister, et qui s'est clôturé en un dixième de seconde. Élodie, s'impatientant, me tire à l'intérieur. On s'installe dans la salle P1, je me sens vraiment pas bien, j'ai envie de vomir, de me frapper la tête contre le mur, de manger, de boire surtout, ma gorge est extrêmement sèche. Élodie, elle, n'ose pas parler, sûrement que la peur a bloqué les muscles de son visage, mais j'entame la conversation tout de même pour essayer de me calmer, de souligner la réalité :

- On va tous mourir.
- Arrête Joy, me répond Élodie, en jetant un regard inquiet à l'extérieur.
- C'est plutôt triste comme manière de mourir. Et moi qui voulais quitter ce monde aux cotés de l'homme que j'aime, je vais devoir le rejoindre, seule.
- Joy, arrête, rien n'est fini, les flics vont arriver et tout va s'arranger, tu... tu vas voir.
- Tu dis ça pour te rassurer. Pour moi, tout semble scellé sans Ethan. Et les flics ne seront pas prévenus, personne ne sait que nous sommes là, pris au piège comme des cons. Le collège est trop loin des habitations pour qu'on nous entende.
- Arrête Joy putain !!!

Cette fois-ci Élodie a hurlé, me sortant de ma léthargie, étonnée par une telle réaction. Elle se ferme immédiatement la bouche avec les mains, regrettant son excès de colère. Nous tendons l'oreille, je distingue un bruit de pas qui monte l'escalier des préfabriqués. La poignée de la salle s'abaisse et je me colle à ma meilleure amie, terrifiée, voyant ma vie défiler devant mes yeux.
Deux 6° tremblants rentrent dans la classe et courent vers le fond. Je recommence à respirer, ils ne semblent pas être armés ni vouloir nous attaquer. Je reste tout de même collée à Élodie et pose ma tête sur son épaule. Je reprends, en murmurant :

- Ethan savait.
- Quoi ?
- Ethan savait tout. Le massacre, les Algériens, les morts. Et moi, tu sais comment j'ai réagi ? Je ne l'ai pas cru. Et non, j'étais incapable de lui faire confiance, ces propos me paraissaient incohérents. Mais il disait vrai, oui, il disait la vérité et moi j'ai... moi j'ai fais comme s'il était fou, je... je l'ai laissé dans son truc pensant qu'il essayait de me faire peur et...
- Oh, Joy calme-toi, c'est pas de ta faute, personne pouvait savoir...
- Élodie... ?
- Oui ?
- Je suis désolée. Si j'avais cru Ethan, il serait vivant et toi et moi nous serions aux Olympiques des collèges.
- Dis pas ça, c'est pas toi.

Comme les deux gamins ne sont pas vraiment bavards, je finis par m'endormir. Une voix douce et harmonieuse me réveille.

- Joy …? Joy debout !
- Hm ?
- Joy, ça fait 6 heures qu'on est là, il va faire nuit et faudrait qu'on bouge, on a trop dormi je crois !

J'ouvre les yeux et je vois le visage de mon amie, penchée sur moi. Elle m'aide à me relever, mes jambes sont douloureuses, j'ai de sacrées crampes. Les deux 6° n'ont pas bougés d'un millimètre, et une flaque jaunâtre m'indique qu'un des deux n'a pas tenu le coup sous la pression. Nous sortons discrètement de la salle, je suis Élodie dans la cour. Celle-ci est déjà jonchée de cadavres, mon ventre se resserre atrocement, et je rendrai bien mon petit déjeuner. La plupart des salles de classes sont allumées, mais la cour est obscure.

- Joy, on devrait monter dans les salles de techno, se foutre dans un de ces grands placards plein de bordel et , et... et se faire toutes petites, murmure Élodie, pas rassurée car sa phobie du noir lui prend la gorge, limitant son vocabulaire.
- Euh... D'accord...

Nous longeons le mur de la cour en marchant à pas de velours, vérifiant à chaque fois qu'une issue se présente si elle est barricadée. Nous arrivons presque à la porte du bâtiment C, notre destination, lorsque que je distingue des gémissements, mais pas n'importe quels gémissements, ceux-ci sont émis par une voix que je connais. Je m'arrête net reviens immédiatement sur mes pas, mais Élodie me rattrape :

- Hé mais tu fous quoi là ?! Proteste-t-elle.
- Attends... Je crois que c'est Maël, dans les chiottes là, il... il est pas bien, faut l'aider.
- Maël ? Raison de plus pour se barrer, allez viens, arrête de déconner.

Elle me tire par le bras mais je résiste. Élodie a toujours détesté mon meilleur ami, elle pense qu'il n'est pas fréquentable. Elle le voit en permanence comme un être malsain, vulgaire, pathétique, et une longue liste d'adjectifs péjoratifs en plus.

- Je ne le laisserais pas, il faut l'aider je te dis.
- Mais t'es folle ?! C'est un massacre ici, il est perdu, comme nous aussi si on traîne encore dans le coin !
- On n'a qu'à l'emmener avec nous ! Allez Élodie, s'il te plaît... je lui supplie en faisant mine de rentrer dans les chiottes.
- Mais il est malade ce mec, malsain, tu t'en rends pas compte ! C'est un putain de manipulateur, on peut pas s'attarder sur son cas il va nous tuer ou nous faire tuer !

Il y a quelques mois, Maël et Élodie formaient un couple parfait. Ils s'aimaient, toujours dans les bras l'un de l'autre à se susurrer des trucs à l'oreille, mais Élodie était jalouse car l'homme aimait séduire et avait surtout de quoi séduire, du charisme. Après, Maël aurait brusqué Élodie sans raison, et elle l'aurait quitté. Il serait parti, fier de lui en se pavanant devant ces potes, en l'insultant. Il aurait continuer de la qualifier de catin devant ses potes. Mais moi, j'ai rien vu de tout ça. Cette version est sûrement exagérée, car je sais que Maël n'est pas comme ça. En tout cas, jamais avec moi.
Élodie s'impatiente, et jette pour la dixième fois un regard inquiet sur la cour presque vide :

- Joy, crois-moi, on doit monter tout de suite et faire comme si on l'avait pas vu ...
- Je refuse. Monte, toi, je vais aider Maël, puisque t'as décidé de faire ta pétasse égoïste. Maël avait raison, je comprends pourquoi vous vous êtes séparés.

Élodie ne répond rien, visiblement surprise par ce que je viens de lui dire. J'ai touché juste, la corde sensible. Son visage s'assombrit, et elle me jette un regard si noir, plein de haine que je regretterais presque les paroles que je viens de prononcer. Elle me lâche le bras et elle rentre dans le bâtiment C, sans même jeter un regard en arrière. Je me ressaisis et me dis que j'ai fais le bon choix. Je rentre sans bruit dans les toilettes. J'hésite entre deux portes car les gémissements sont vraiment faibles, presque inaudibles. Je pousse celle de gauche et je tombe effectivement sur Maël. Il est assis contre le mur, une jambe tendue devant lui et l'autre légèrement repliée. Il ouvre les yeux, et malgré la pâleur de son iris, je perçois un soulagement extrême. Je me jette à son cou et le serre tellement fort qu'il crachote. Je me recule un instant pour analyser la situation. Sa doudoune blanche est rouge, et il se tient l'épaule, le visage crispé. Je retire son blouson délicatement, il tressaille mais se laisse faire sans broncher. Ses yeux bleus suivent le moindre de les mouvements, ce qui me perturbe. Je dois aussi retirer son T-shirt pour limiter les dégâts, mais j'hésite. Je sais que la situation est critique, que des malades armés shootent tout ce qui bouge, que Maël est blessé, mais pourtant la situation est un peu gênante. Soudainement, la main de Maël se resserre sur son T-shirt pour contenir la douleur du frottement du tissu avec la blessure. Je retire son habit délicatement et je le jette plus loin, Maël se détend. Je pousse la porte des toilettes pour éviter qu'un soldat vienne nous buter. Un instant, mon regard se fige sur son torse, fin mais musclé, comme je l'imaginais, comme j'aime. Une chaleur rarement éprouvée auparavant me traverse le corps et mes mains sont électriques. Je les soulève tremblotantes, et sans que je le choisisse vraiment, elles se posent délicatement sur ses pectoraux. Le corps de Maël est chaud, mes mains doivent être froides car il tressaille immédiatement. Il regarde mes mains, son regard suit mes bras pour remonter jusqu'à mon visage. Gênée par ce regard bleu pâle qui me transperce l'âme, je les retire immédiatement, et je meuble mon embarras en cherchant de quoi faire un pansement compressif, essayant d'oublier sa beauté envoûtante, dangereuse. J’attrape son T-shirt d'un mouvement vif mais celui-ci n'est pas assez long pour faire le tour de son épaule et de son torse. Je réfléchis un instant, mais la solution semble évidente, je n'en trouve pas d'autre. Je retire mon T-shirt et commence mon pansement compressif sur la blessure de Maël. Celui-ci grimace au début, mais se détend rapidement. Sa blessure ne saigne plus, mais je grelotte en soutien-gorge dans la cour du collège. Maël m'examine. Ses lèvres bougent, on dirait qu'il veux dire quelque chose, mais il pose juste délicatement sa main sur ma cuisse. Il se redresse un peu, toujours appuyé contre le mur, et son autre main se pose sur ma joue. Il plonge ses yeux dans les miens, et pendant un instant j'ai l'impression qu'il lit en moi, qu'il perce tous mes secrets, mes rêves, mes angoisses et mes cauchemars. Sa tête se rapproche de moi, et nos lèvres se joignent. Les siennes sont chaudes et douces, empreintes de désir. Je me laisse faire, encore une fois bercée par sa beauté fascinante. Je sens la main de Maël qui remonte légèrement sur ma cuisse, et celui-ci se redresse encore, il me dépasse désormais de quelques centimètres en position assise.


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