Note de la fic :
Le Cycle Des Calepins Oubliés
Par : Tacitus42
Genre : Science-Fiction, Action
Statut : Terminée
Chapitre 20 : Question d'Hospitalité
Publié le 22/02/2012 à 23:32:33 par Tacitus42
0. Question d’hospitalité.
Changement de programme (et ce n’était pas du luxe)…
J’étais tout content parce qu’en fin de compte, ce brave Stanton s’était débrouillé tout seul (comme un grand).
Je m’éloignais donc avec diligence de la scène du crime (conformément aux ordres qui venaient de tomber par le biais de mon intercom).
Notre nouvelle « mission » avait attrait à la patrouille des sections jouxtant l’hôpital de Notre Dame De La Providence (où j’ai officié il y a plusieurs années déjà, si vous voulez tout savoir).
Le Q.G. entendait éviter tout risque d’émeutes suite à une rixe ayant impliqué des envoyés diplomatiques de la citée 42 (lesquels étaient sur nos terres afin d’enquêter sur la perte suspecte de contact avec l’un des leurs : j’ai bien peur de savoir lequel).
La dite altercation avait eu lieu dans le courant de la matinée, mais l’état-major craignait pour les infrastructures chrétiennes dans l’enceinte du premier secteur (surtout après l’autre « incident » survenu au Neuvième Cercle)…
Raison pour laquelle nous gardions les rues aux abords de la plus proche d’entres-elles.
Mais il avait fallu attendre au préalable que Stanton en eut fini avec son labeur de criminologue amateur dans le bar proprement dit.
Pour le reste, l’affaire suivrait normalement son cours (et, pensais-je, sans avoir à m’entremettre).
Notre présente affectation tenait de la routine (pour ne pas dire de la glandouille) : une bonne petite patrouille pour finir bien pénard une journée rondement menée (et fort bien rétribuée).
Pour ceux qui en douteraient : je hais travailler.
Qui plus est, j’étais débarrassé de mon érotomane de caporal (laquelle officiait de l’autre côté de la tour hospitalière)… Jusque-là, une journée pas trop « mauvaise » donc.
(Quelle journée pourrait ne fut-ce que sembler bonne quand manque ma belle ?)
La soirée s’annonçait tranquille tout du moins…
Mais ça ne se passe jamais aussi facilement : un malheur n’arrive jamais seul après tout.
On est quand même tombé sur une gentille damoiselle en détresse…
Ou plutôt c’est elle qui est tombée sur nous (et manque de bol pour la donzelle, c’était surtout sur les trois abrutis qui me servent de sous-fifres pour être tout à fait précis).
Elle était à moitié nue, portant pour tout vêtement la tunique caractéristique des patients de l’hôpital (laquelle laissait entrevoir tout l’arrière, du fessier à la nuque).
Et elle avait la trouille…
Et je la comprends fort bien : moi-même, je n’apprécie guère la compagnie des gens de mon unité.
Mais je ne pouvais pas encore les voir pour lors : elle baignait dans la lumière d’un réverbère au coin d’un carrefour qui les dissimulaient encore. J’ai juste vaguement entendu ce que les trois autres tramaient…
- « Elle doit venir du département psychiatrique de l’hôpital. »
Je reconnu le timbre aigu de la voix de Lili.
- « Tu crois qu’on pourrait s’amuser un peu?! »
Cette fois, c’était le ton nasillard de Charon.
Je suppose que je suis arrivé juste à temps en somme : Brut avait beau être un peu bête, il était fort sensible à la nudité féminine… Surtout si les deux autres cons l’encourageaient un peu plus dans le sens d’une forme de larcin malsain.
« Qu’est-ce vous foutez bordel??! » demandais-je, une fois arrivé à hauteur du coin…
La dame s’est retournée subitement en prenant conscience de mon existence. Elle a du étouffer un rire nerveux.
Je suppose que je lui ai fait peur.
Elle a opéré trois pas loin de notre direction…
Faut croire qu’elle a fait le mauvais amalgame, qu’elle m’a additionné au mauvais lot des trois (je portais mon masque après tout).
De toute manière, personne n’apprécie vraiment les flics par les temps qui courent (et je ne donne tort à personne sur ce sujet).
« Et elle, c’est qui ?! » ajoutais-je à l’adresse des trois autres qui se raidirent eux aussi en m’apercevant soudain.
- « Heu… »
« Aucune idée sergent… »
« Hem : on allait voir à l’hosto si elle faisait pas partie du lot! »
L’excuse bidon venait de messire Charon.
La jeune femme, visiblement en état de choc, hochait désespérément de la tête en dénégation tout en essayant de bredouiller une réponse intelligible…
- « Non, je ne veux pas y retourner » fit-elle en me regardant (comprenant vraisemblablement que j’étais le plus gradé des quatre).
« Ils veulent me manger! » finit-elle par dire d’un air accablé : son regard effrayé se portait d’une tête à l’autre à présent.
- « J’t’avais dis qu’elle venait de chez les tarés! » intervint Charon.
- « Nan, j’crois plutôt qu’elle vient de l’aile des revenants! » prétendit Lili d’un air qui se voulait sérieux.
C’était débile…
Mais plausible.
La plupart des résurgents (comme on les appelle hypocritement) en revenaient effectivement aux instincts primaux (manger : et manger « tout et n’importe quoi » en l’occurrence, quitte à bouffer ses congénères)…
Enfin : pour peu que leur conscience morale se soit fait la malle avec le manque d’oxygène qui grille les neurones qui la sous-tendent (comme c’est le cas pour Charon, qui dit à qui veut bien l’entendre qu’il est un « vrai » vampire).
Mais ils ne sont pas tous méchants (il n’y a que moi qui me coltine les pires).
La plupart son simplement de bons et inoffensifs légumes…
Mais il faut moins que ça pour susciter l’acharnement médical qui pousse certains médecins à maintenir en vie des êtres vivants décapités (souvent des paramilitaires qui jouent avec des grenades artisanales) par le biais de rajouts cybernétiques…
Une forme de résurgence artificielle (ce n’est pas la seule et pas la première).
Tant qu’ils parviennent à relancer le cœur, ils se font forts de forcer dame Nature au nom de dame Lascience (surtout quand rien n’a été stipulé à l’avance pour empêcher ce genre de dérives et bien que la conscience primordiale soit belle et bien morte)…
C’est aussi une manière légale de conserver une banque d’organes frais mais montées sur pattes…
Je dois avouer que j’ai halluciné quand j’ai vu pour la première fois un de ces trucs se balader sans sa trogne (l’ordinateur pend soit devant, soit derrière : il n’est pas toujours fixé entre les deux épaules).
Après tout « pourquoi pas » (j’ai vu pire qui plus est).
Mais le problème était ailleurs en l’occurrence.
- « Où est Archy?! » demandais-je.
Dana nous l’avait gentiment prêté à ma demande (parce que quatre hommes, c’est juste assez pour deux groupes de patrouille mais surtout parce que je comptais sur lui pour garder un œil sur les trois autres).
Nota bene : je patrouille toujours tout seul (je préfère).
- « Inspection des égouts ! » assura Lili
- « Qu’est-ce qu’il branle dans les égouts?! »
- « Sais pas : c’est le lieutenant qui a demandé. »
« Paraît qu’y a de l’activité suspecte. »
- « Et pourquoi vous n’êtes pas avec lui?! »
- « Parce que le lieutenant a bien précisé : lui tout seul! »
…
Un ange passa…
- « C’est vrai qu’il ne l’a pas à la bonne… »
...
Je venais de dire tout haut ce que je pensais pourtant tout bas.
La chose n’avait d’importance que parce que je risquais fort de perdre bêtement un excellent garde-fou pour la persistance d’un ressentiment inutile. Et ça m’aurait fait mal de faire ça à Dana qui nous l’avait si gentiment confié : les soldats de valeurs se font rares par les temps qui courent (cf. Butor).
En vérité, le lieutenant Patterson avait moyennement apprécié le refus de l’adjudant Samson de mener « ses » hommes au combat peu avant une mission délicate (il n’y pas si longtemps en fait).
Grâce à ce bon vieux Archy, l’opération qu’il avait jugée trop dangereuse (pour nous, « ses » hommes toujours) est donc tombée à l’eau (Dieu merci)…
Et l’adjudant, dégradé au rang de seconde classe (parce que la mission aurait quand même permis de redorer notre blason)…
Pour info, l’unité qui s’y est collée a quand même merdé : ce qui a rendu le lieut’nant sensiblement plus amer envers le susnommé seconde classe de grade (lequel fut depuis souvent assigné aux corvées les plus pénibles, ou de mise pour des missions dangereuses voir débiles, mais toujours seul).
Pour ma part, je m’en foutais un peu étant donné qu’en règle générale, on se la coulait douce sous les ordres de Patterson (même si je suis le premier à avouer qu’Archibald aurait certainement fait un meilleur lieutenant).
Ces deux-là ne s’aiment pas pour sûr…
- « Tout juste Auguste ! » rétorqua Johnny auquel je n’avais pas prêté attention (tout perdu que j’étais dans mes premières pensées)…
- « M’appelles pas Auguste… » Répondis-je d’un air peu avenant.
- « Nan, c’était une boutade » tenta Charon d’un air qui se voulait conciliant pour un type qui avait tenté de me dézinguer trois semaines plus tôt (le jour du décès de Butor plus précisément)…
- « Justement : tu gardes tes blagues foireuses pour ta mère ».
- « Sergent… »
Le visage de Johnny venait de se décomposer…
« Elle est morte » confia-t-il d’un ton dépité.
- « Et je suppose que c’est toi qui l’a butée » fis-je froidement…
Le ton de la réplique que je venais de laisser à son adresse se voulait mesuré (sinon lent).
Il n’a pas réussi à articuler quoique ce soit en réponse, mais j’ai bien vu à son regard qu’il n’avait nullement envie de parler.
(Je sais : pas la famille…
Ca ne se fait pas !)
Et il ne pouvait qu’hésiter avant de risquer d’essayer de me tuer devant témoin (ce qui, j’en suis certain, n’est pourtant pas la raison qui le retint).
Il aurait peut-être tenté quelque chose si je ne l’avais pas coupé dans son élan : j’étais encore son supérieur hiérarchique après tout…
- « Bon, on la ramène et on s’casse » conclus-je finalement.
- « Non, je vous en prie! » supplia la patiente qui venait malgré-elle de ressurgir dans la discussion.
- « T’inquiètes pas : on trouvera bien un moyen de te faire admettre ailleurs que chez les cannibales! » assurais-je (sans en être certain pour autant).
Et puis, tous les résurgents ne sont pas anthropophages comme je l’ai dit : sieur Alexander Butor était lui juste amoindri intellectuellement par exemple.
La seule vraie tâche de la journée fut donc de ramener la demoiselle à l’entrée, en la remettant aux mains de deux gardes (forts aimables au demeurant) qui nous assurèrent qu’elles disposeraient des soins adaptés (sans en préciser la nature).
La demoiselle objecta fatalement de toutes ses forces (puisqu’elle n’avait finalement aucune assurance d’être entendue).
Elle ne se rasséréna (un peu) que quand l’un des médecins de service (par l’entremise de l’émetteur/récepteur d’un des deux gardiens) lui promit sur l’honneur qu’elle changerait immédiatement de département…
Sans en préciser la spécificité : ça pouvait tout aussi bien être un passage en psychiatrie en fin de compte.
(Et oui pour ceux qui en doutent : dans ce monde, il ne vaut mieux pas être malade, non plus).
« Faites quand même bien attention à elle » dis-je par acquis de conscience à l’un des deux gardes en armure qui était occupé à lui ouvrir la porte…
(Une façon débile de déculpabiliser !)
Changement de programme (et ce n’était pas du luxe)…
J’étais tout content parce qu’en fin de compte, ce brave Stanton s’était débrouillé tout seul (comme un grand).
Je m’éloignais donc avec diligence de la scène du crime (conformément aux ordres qui venaient de tomber par le biais de mon intercom).
Notre nouvelle « mission » avait attrait à la patrouille des sections jouxtant l’hôpital de Notre Dame De La Providence (où j’ai officié il y a plusieurs années déjà, si vous voulez tout savoir).
Le Q.G. entendait éviter tout risque d’émeutes suite à une rixe ayant impliqué des envoyés diplomatiques de la citée 42 (lesquels étaient sur nos terres afin d’enquêter sur la perte suspecte de contact avec l’un des leurs : j’ai bien peur de savoir lequel).
La dite altercation avait eu lieu dans le courant de la matinée, mais l’état-major craignait pour les infrastructures chrétiennes dans l’enceinte du premier secteur (surtout après l’autre « incident » survenu au Neuvième Cercle)…
Raison pour laquelle nous gardions les rues aux abords de la plus proche d’entres-elles.
Mais il avait fallu attendre au préalable que Stanton en eut fini avec son labeur de criminologue amateur dans le bar proprement dit.
Pour le reste, l’affaire suivrait normalement son cours (et, pensais-je, sans avoir à m’entremettre).
Notre présente affectation tenait de la routine (pour ne pas dire de la glandouille) : une bonne petite patrouille pour finir bien pénard une journée rondement menée (et fort bien rétribuée).
Pour ceux qui en douteraient : je hais travailler.
Qui plus est, j’étais débarrassé de mon érotomane de caporal (laquelle officiait de l’autre côté de la tour hospitalière)… Jusque-là, une journée pas trop « mauvaise » donc.
(Quelle journée pourrait ne fut-ce que sembler bonne quand manque ma belle ?)
La soirée s’annonçait tranquille tout du moins…
Mais ça ne se passe jamais aussi facilement : un malheur n’arrive jamais seul après tout.
On est quand même tombé sur une gentille damoiselle en détresse…
Ou plutôt c’est elle qui est tombée sur nous (et manque de bol pour la donzelle, c’était surtout sur les trois abrutis qui me servent de sous-fifres pour être tout à fait précis).
Elle était à moitié nue, portant pour tout vêtement la tunique caractéristique des patients de l’hôpital (laquelle laissait entrevoir tout l’arrière, du fessier à la nuque).
Et elle avait la trouille…
Et je la comprends fort bien : moi-même, je n’apprécie guère la compagnie des gens de mon unité.
Mais je ne pouvais pas encore les voir pour lors : elle baignait dans la lumière d’un réverbère au coin d’un carrefour qui les dissimulaient encore. J’ai juste vaguement entendu ce que les trois autres tramaient…
- « Elle doit venir du département psychiatrique de l’hôpital. »
Je reconnu le timbre aigu de la voix de Lili.
- « Tu crois qu’on pourrait s’amuser un peu?! »
Cette fois, c’était le ton nasillard de Charon.
Je suppose que je suis arrivé juste à temps en somme : Brut avait beau être un peu bête, il était fort sensible à la nudité féminine… Surtout si les deux autres cons l’encourageaient un peu plus dans le sens d’une forme de larcin malsain.
« Qu’est-ce vous foutez bordel??! » demandais-je, une fois arrivé à hauteur du coin…
La dame s’est retournée subitement en prenant conscience de mon existence. Elle a du étouffer un rire nerveux.
Je suppose que je lui ai fait peur.
Elle a opéré trois pas loin de notre direction…
Faut croire qu’elle a fait le mauvais amalgame, qu’elle m’a additionné au mauvais lot des trois (je portais mon masque après tout).
De toute manière, personne n’apprécie vraiment les flics par les temps qui courent (et je ne donne tort à personne sur ce sujet).
« Et elle, c’est qui ?! » ajoutais-je à l’adresse des trois autres qui se raidirent eux aussi en m’apercevant soudain.
- « Heu… »
« Aucune idée sergent… »
« Hem : on allait voir à l’hosto si elle faisait pas partie du lot! »
L’excuse bidon venait de messire Charon.
La jeune femme, visiblement en état de choc, hochait désespérément de la tête en dénégation tout en essayant de bredouiller une réponse intelligible…
- « Non, je ne veux pas y retourner » fit-elle en me regardant (comprenant vraisemblablement que j’étais le plus gradé des quatre).
« Ils veulent me manger! » finit-elle par dire d’un air accablé : son regard effrayé se portait d’une tête à l’autre à présent.
- « J’t’avais dis qu’elle venait de chez les tarés! » intervint Charon.
- « Nan, j’crois plutôt qu’elle vient de l’aile des revenants! » prétendit Lili d’un air qui se voulait sérieux.
C’était débile…
Mais plausible.
La plupart des résurgents (comme on les appelle hypocritement) en revenaient effectivement aux instincts primaux (manger : et manger « tout et n’importe quoi » en l’occurrence, quitte à bouffer ses congénères)…
Enfin : pour peu que leur conscience morale se soit fait la malle avec le manque d’oxygène qui grille les neurones qui la sous-tendent (comme c’est le cas pour Charon, qui dit à qui veut bien l’entendre qu’il est un « vrai » vampire).
Mais ils ne sont pas tous méchants (il n’y a que moi qui me coltine les pires).
La plupart son simplement de bons et inoffensifs légumes…
Mais il faut moins que ça pour susciter l’acharnement médical qui pousse certains médecins à maintenir en vie des êtres vivants décapités (souvent des paramilitaires qui jouent avec des grenades artisanales) par le biais de rajouts cybernétiques…
Une forme de résurgence artificielle (ce n’est pas la seule et pas la première).
Tant qu’ils parviennent à relancer le cœur, ils se font forts de forcer dame Nature au nom de dame Lascience (surtout quand rien n’a été stipulé à l’avance pour empêcher ce genre de dérives et bien que la conscience primordiale soit belle et bien morte)…
C’est aussi une manière légale de conserver une banque d’organes frais mais montées sur pattes…
Je dois avouer que j’ai halluciné quand j’ai vu pour la première fois un de ces trucs se balader sans sa trogne (l’ordinateur pend soit devant, soit derrière : il n’est pas toujours fixé entre les deux épaules).
Après tout « pourquoi pas » (j’ai vu pire qui plus est).
Mais le problème était ailleurs en l’occurrence.
- « Où est Archy?! » demandais-je.
Dana nous l’avait gentiment prêté à ma demande (parce que quatre hommes, c’est juste assez pour deux groupes de patrouille mais surtout parce que je comptais sur lui pour garder un œil sur les trois autres).
Nota bene : je patrouille toujours tout seul (je préfère).
- « Inspection des égouts ! » assura Lili
- « Qu’est-ce qu’il branle dans les égouts?! »
- « Sais pas : c’est le lieutenant qui a demandé. »
« Paraît qu’y a de l’activité suspecte. »
- « Et pourquoi vous n’êtes pas avec lui?! »
- « Parce que le lieutenant a bien précisé : lui tout seul! »
…
Un ange passa…
- « C’est vrai qu’il ne l’a pas à la bonne… »
...
Je venais de dire tout haut ce que je pensais pourtant tout bas.
La chose n’avait d’importance que parce que je risquais fort de perdre bêtement un excellent garde-fou pour la persistance d’un ressentiment inutile. Et ça m’aurait fait mal de faire ça à Dana qui nous l’avait si gentiment confié : les soldats de valeurs se font rares par les temps qui courent (cf. Butor).
En vérité, le lieutenant Patterson avait moyennement apprécié le refus de l’adjudant Samson de mener « ses » hommes au combat peu avant une mission délicate (il n’y pas si longtemps en fait).
Grâce à ce bon vieux Archy, l’opération qu’il avait jugée trop dangereuse (pour nous, « ses » hommes toujours) est donc tombée à l’eau (Dieu merci)…
Et l’adjudant, dégradé au rang de seconde classe (parce que la mission aurait quand même permis de redorer notre blason)…
Pour info, l’unité qui s’y est collée a quand même merdé : ce qui a rendu le lieut’nant sensiblement plus amer envers le susnommé seconde classe de grade (lequel fut depuis souvent assigné aux corvées les plus pénibles, ou de mise pour des missions dangereuses voir débiles, mais toujours seul).
Pour ma part, je m’en foutais un peu étant donné qu’en règle générale, on se la coulait douce sous les ordres de Patterson (même si je suis le premier à avouer qu’Archibald aurait certainement fait un meilleur lieutenant).
Ces deux-là ne s’aiment pas pour sûr…
- « Tout juste Auguste ! » rétorqua Johnny auquel je n’avais pas prêté attention (tout perdu que j’étais dans mes premières pensées)…
- « M’appelles pas Auguste… » Répondis-je d’un air peu avenant.
- « Nan, c’était une boutade » tenta Charon d’un air qui se voulait conciliant pour un type qui avait tenté de me dézinguer trois semaines plus tôt (le jour du décès de Butor plus précisément)…
- « Justement : tu gardes tes blagues foireuses pour ta mère ».
- « Sergent… »
Le visage de Johnny venait de se décomposer…
« Elle est morte » confia-t-il d’un ton dépité.
- « Et je suppose que c’est toi qui l’a butée » fis-je froidement…
Le ton de la réplique que je venais de laisser à son adresse se voulait mesuré (sinon lent).
Il n’a pas réussi à articuler quoique ce soit en réponse, mais j’ai bien vu à son regard qu’il n’avait nullement envie de parler.
(Je sais : pas la famille…
Ca ne se fait pas !)
Et il ne pouvait qu’hésiter avant de risquer d’essayer de me tuer devant témoin (ce qui, j’en suis certain, n’est pourtant pas la raison qui le retint).
Il aurait peut-être tenté quelque chose si je ne l’avais pas coupé dans son élan : j’étais encore son supérieur hiérarchique après tout…
- « Bon, on la ramène et on s’casse » conclus-je finalement.
- « Non, je vous en prie! » supplia la patiente qui venait malgré-elle de ressurgir dans la discussion.
- « T’inquiètes pas : on trouvera bien un moyen de te faire admettre ailleurs que chez les cannibales! » assurais-je (sans en être certain pour autant).
Et puis, tous les résurgents ne sont pas anthropophages comme je l’ai dit : sieur Alexander Butor était lui juste amoindri intellectuellement par exemple.
La seule vraie tâche de la journée fut donc de ramener la demoiselle à l’entrée, en la remettant aux mains de deux gardes (forts aimables au demeurant) qui nous assurèrent qu’elles disposeraient des soins adaptés (sans en préciser la nature).
La demoiselle objecta fatalement de toutes ses forces (puisqu’elle n’avait finalement aucune assurance d’être entendue).
Elle ne se rasséréna (un peu) que quand l’un des médecins de service (par l’entremise de l’émetteur/récepteur d’un des deux gardiens) lui promit sur l’honneur qu’elle changerait immédiatement de département…
Sans en préciser la spécificité : ça pouvait tout aussi bien être un passage en psychiatrie en fin de compte.
(Et oui pour ceux qui en doutent : dans ce monde, il ne vaut mieux pas être malade, non plus).
« Faites quand même bien attention à elle » dis-je par acquis de conscience à l’un des deux gardes en armure qui était occupé à lui ouvrir la porte…
(Une façon débile de déculpabiliser !)