Note de la fic :
Le Cycle Des Calepins Oubliés
Par : Tacitus42
Genre : Science-Fiction, Action
Statut : Terminée
Chapitre 16 : Question De Principes
Publié le 13/02/2012 à 20:59:10 par Tacitus42
6. Question de principes.
J’ai tiqué quand elle m’a tendu le minuscule bocal.
Je venais de lui demander comment descendre moi-même aux plus bas niveaux (à supposer que j’eusse fait son affaire à Tobiack).
Roxane s’en fut alors avant de réapparaître avec un simple verre operculé dans lequel baignait un œil dans son chloroforme.
« C’est celui de Catherine » me confia-t-elle en ajoutant que la dite jeune dame l’avait perdu suite à une infection due à un œdème : épanchement derrière la cornée sans doute causé lors d’une altercation pour ne vague affaire de tricherie (rapport à des dés pipés). Oui, on peut tricher dans le treizième (mais pas prétendre le contraire).
L’infection déclarée deux jours auparavant aurait contraint les androïdes médicaux à l’ablation de l’œil droit (qu’on a cloné et regreffé depuis).
« Et je suis sensé faire quoi avec ça ? » dis-je perplexe.
- « Bin : c’est le pass ! » m’assura-t-elle d’une voix presque neutre.
J’ai vaguement compris que les élévateurs ne descendaient pas plus loin que le quatrième sans identification d’iris…
Ou alors il fallait être accompagné de quelqu’un de moins d’un mètre vingt (un enfant de moins de dix ans donc). Les nains passaient aussi je suppose, mais je n’ai pas connaissance que le treizième en compta (une chance pour eux).
Je ne savais pas encore le pourquoi de pareilles mesures et m’en fichai complètement je dois dire.
Pour lors, j’avais plus important à faire.
Je donnai quand même un coup d’œil à l’organe (histoire d’éviter de me trouver con une fois dans l’élévateur).
Par chance, l’iris n’avait rien…
…
Iris n’avait rien…
…
« Il vous reste deux heures… »
Haggis se raidit aussitôt à cette annonce (chose que je peux comprendre).
Nous étions dehors quand nous avons entendu le bref rappel passé vraisemblablement par le biais de tous les haut-parleurs que pouvait comprendre cette ville (« comment » : là était la question).
La réplique de Tobiack faisait redondance sous l’effet de résonance de la coupole. L’écho semblait même sensiblement plus clair que la prime sentence…
Haggis et moi connaissions tous deux les pratiques de l’Homme-Armada.
Il n’y avait pas trente-six solutions pour passer le dédalle de pièges qu’Edric avait préparé à notre attention.
Haggis venait de me faire part de son plan en prévision de la confrontation quand nous avons entendu la première explosion (ce qui eut pour effet de faire sursauter derechef mon estimé compagnon d’arme).
Comme prévu, le localiser fut le moins difficile.
Hagerald était vaguement courageux mais en aucun cas téméraire. Aussi avait-il clairement spécifié que j’allais devoir me farcir seul la partie baston après qu’il se fut coltiné le traquenard.
Qu’importe, du moment qu’il fit son office.
Je me rappelle m’être dit que nous avions de la « chance » que Tobiack ait choisi de se battre à « ciel ouvert » si je puis dire (sans quoi nous n’aurions pu entendre les déflagrations) ou même qu’il était « heureux » (pensais-je) qu’il fut si narcissique (bien plus que ne l’aurait jamais été Hagerald, malgré son surnom).
Haggis et moi nous rendîmes donc à pieds au plus près de l’endroit supposé de la détonation. Nous étions escortés par une série d’androïdes (chouravés au département médical) et par notre voiture (elle-même conduite par un de nos robots).
Le tout était piloté par mon collègue du génie via mon unité portable (pour les grandes lignes du moins : il n’y avait pas grand-chose à pirater pour se faire, ces unités étant conçues pour obéir).
Le premier accès du labyrinthe de Clotho n’était pas loin du reste.
Nous avons facilement trouvé la petite fourgonnette qu’il avait du voler pour ses déplacements et l’emport de son matériel : les trois dernières caisses qu’il lui restait si mon souvenir est bon.
L’engin était vide à présent et garé non loin du premier corridor menant à la toile de l’Arachnide.
Les dégâts visibles sur les cloisons attestaient du passage d’un malheureux (et si Tobiack avait jugé bon d’activer une charge si loin de l’épicentre de son traquenard c’était précisément pour en marquer l’entrée).
Nous savions pertinemment qu’Edric désactivait systématiquement la ligne de défense la plus éloignée pour piéger ses victimes, nous nous sommes donc simplement servi des androïdes comme démineurs volontaires. J’avoue d’ailleurs avec grande honte que je n’aurais pu parvenir à les commander tout seul (étant alors un ignare fini en programmation et bien que mes connaissances en la matière aient sensiblement évolué depuis).
A la vérité, la première idée d’Haggis était de pirater directement le réseau de charges qui dépendaient des détonateurs à faisceau pour les faire sauter en une fois.
Les androïdes n’étaient que le protocole secondaire (pour éliminer les charges reliées par fil). Mais il s’est avéré que le réseau d’explosif était verrouillé d’une manière trop complexe (ce qui était déjà anormal).
La chose n’avait pas d’importance : cela nous prendrait certes plus de temps mais nous avions rameuté plus de robots que nécessaire (on gagne toujours à être prudent).
Leur rôle se résumait à enlever les charges dès qu’ils en voyaient une (pour les éloigner le plus possible de nous) ou de sauter avec si c’était le bon plaisir de Tobiack de réactiver le détonateur à ce moment (ce dont nous n’avions toutefois strictement rien à fiche).
Nota bene : Pandora me fait savoir qu’elle ne cautionne pas ce genre de pratiques…
(C’est bien dommage)…
Le détonateur était vraiment trop petit pour qu’on puisse le manipuler dans le cadre d’un désamorçage (lequel aurait pris trois plombes qui plus est).
La méthode d’Haggis était radicale mais rudement efficace.
Pour info, le matériel qu’utilisait l’Homme-Armada datait de bien avant la seconde guerre froide (mais il avait surtout fait ses preuves durant les Guerres Institutionnelles).
Et pour ceux qui n’y comprennent rien (tout comme moi à une époque), à ce que j’ai cru comprendre, les faisceaux des détonateurs qu’utilisait Tobiack marchaient dans les deux sens (quand ils étaient activés à distance) : la longueur du rayon lumineux (bleu foncé) se délimitait automatiquement (grâce à un senseur qui enregistrait le diamètre de la projection du rayon sur un mur par exemple) dès que le détonateur était activé (tant devant que derrière l’engin).
Si un mouvement coupait le faisceau ou que l’on retirait le détonateur (faisant de facto varier le cercle lumineux d’un côté ou de l’autre), la charge explosait.
En outre, ils avaient l’avantage d’être sans fils directs avec la charge : ce qui permettait à Edric d’en faire ce qu’il voulait (compliquant aussi un hypothétique déminage).
Il pouvait à loisir utiliser les charges de manière conventionnelle (couplées aux détonateurs) ou en les planquant à des endroits stratégiques (comme le revers des plaques d’égouts par exemple) étant donné que nos ruelles étaient généralement crades (facilitant le camouflage de ce genre de dispositif) même si pour des raisons évidentes la charge n’était jamais bien loin de son détonateur.
Malheureusement pour Tobiack (et heureusement pour nous), les rues du treizième étaient particulièrement bien entretenues.
La corvée de nettoyage était d’ailleurs la peine minimale dans le code judiciaire de cette citée bien que l’essentiel du travail fût laissé aux robots de maintenance (dont l’usine n’avait pratiquement pas souffert des affres de la Faucheuse).
=> Comme je l’ai déjà dit précédemment, le secteur treize était un de ceux qui s’en sortait le mieux (avant l’arrivée de Lilith).
Mais pour en revenir à notre affaire, la bagnole lancée à fond de caisse a pratiquement fini le travail.
Conduite par l’une des dernières unités robotisées (sous la direction d’Haggis), elle emprunta un ou deux tronçons de route (déjà ravagés) avant d’atteindre la première des lignes défensives restantes.
L’engin coupa tout ce qu’il trouva de fibres de carbones sur sa trajectoire (soit dans sa course ou lors des tonneaux qui s’en suivirent lorsqu’il se souleva sous le coup des premiers impacts).
Tout ce qui restait de charges (pour la partie de rue que je devais arpenter moi-même) avait normalement du sauté sous l’effet de cette seule mesure (puisqu’il n’en restait déjà plus beaucoup après le passage de nombreux imbéciles piégés dans la toile de l’Arachnide).
La voiture (qui reposait à présent sur son toit) avait traversé la dernière section transversale à la coursive menant au repaire d’Edric (couloir qu’elle avait dépassé dans sa chute : elle ne risquait donc pas d’obstruer le passage).
Un dernier androïde se présenta sans encombre devant le corridor et un tueur qui l’aligna dès qu’il le vit.
Le robot s’effondra de côté à l’angle de la ruelle sous l’impact d’une balle d’un calibre 9mm.
Ses jambes continuaient de gesticuler malgré tout alors que le rire d’exultation de Tobiack se faisait entendre…
Je crois pouvoir dire avec certitude que c’est parce que ce taré pensait avoir trouvé un adversaire à sa mesure (alors que je ne serais arrivé à rien sans mon brave Hagerald).
« Je peux partir maintenant ? » fit Haggis un brin paniqué en entendant Tobiack s’esclaffer.
- « Oui… »
« Mais préviens le Q.G. de la situation et rejoins les autres dans les sous-sols ! »
Il avait mon unité portable pour se faire : elle était en relais permanent avec les ordinateurs de notre planque (et avec la Pythie : théoriquement) mais pouvait aussi servir d’une sorte de G.P.S. (ce qui ne servait à rien sous un dôme).
Roxane devait l’attendre.
Nous avions déjà lancé un avertissement par l’intranet de l’imminence de la catastrophe mais il était peu probable qu’il fut suivi.
Nous avions aussi lancé des appels par les mégaphones des trois tours…
Je ne sais si nous aurions du : ils étaient encore nos ennemis après tout (et ils auraient eu une chance de mourir sans la terreur au ventre surtout).
Enfin, je crois qu’on peut dire que j’avais aussi des scrupules à risquer de voir mourir dans le tas des gens qui n’avaient pas vraiment choisi (un peu comme les parents de Cassandre si vous voulez).
Après tout, qui pouvaient se targuer d’avoir eu le choix dans le Treizième ?
…
Il ne pouvait pas pleuvoir : forcément. Il ne pleuvait jamais sous le dôme du secteur de Lilith puisqu’il était en place depuis plus de cent ans…
Je ne sais pas pourquoi cette pensée m’a traversé l’esprit…
Sans doute parce que beaucoup d’entre les gens de cette mégapole vide aux trois quart (comme la plupart des citées de l’état global) ne la verraient jamais tomber en définitive.
« Connais-tu les trois principes de l’Homme-Armada ? »
Les paroles étaient celles de Tobiack, bien à l’abri au fond de sa ruelle n’attendant précisément qu’une chose : qu’on le retrouve…
Il donnait de sa voix pour se faire clairement entendre.
J’étais quant à moi toujours à couvert à l’angle du mur, au carrefour de deux ruelles.
Nous n’étions séparés que de quinze mètres à peine : il se tenait fatalement quelque part sur ma droite. La voiture-bélier continuait de cramer à environ septante pieds en face de moi (les réservoirs avaient déjà explosé de toute manière).
« Des règles simples, presque dignes d’un enfant… »
Comment aurais-je pu connaître ses foutus principes puisqu’il se ventait de descendre systématiquement toute personne qu’il entretenait à ce sujet ?
Je ne crus pas utile de répondre, raison pour laquelle il continua le monologue.
« Certains sont pourtant morts dans l’espoir d’en connaître une seule » précisa-t-il d’un ton qui trahissait l’ironie.
Je ne pouvais en déduire qu’une seule : celui qui tue l’Homme-Armada devient l’Homme-Armada.
Il ne peut y en avoir qu’un par conséquent.
(Mais je me trompais en l’occurrence).
« Chaque principe entraîne un certain nombre de corollaires et des cas particuliers : et je ne les connais pas tous moi-même (étant donné qu’on peut toujours innover) ! »
…
« Premier principe : principe général… »
« Aucune victoire n’est définitive ! »
Des évidences, effectivement…
Mais il avait envie de continuer :
« La guerre est totale ! »
« La guerre est perpétuelle ! »
« L’homme qui choisit la guerre doit accepter le fait de mourir seul comme un goret qu’on mène à l’abattoir : nulle gloire, nul honneur à pourvoir ! »
J’étais partiellement d’accord avec celle-là (pour la dernière partie en tout cas).
« Deuxième principe : au sujet du combat à distance (dans toutes guerres modernes) ! »
Apparemment, il avait du temps à perdre en palabres…
Bah : tant qu’il n’appuyait pas sur la gâchette nucléaire.
« A compétence individuelle égale, la probabilité de toucher augmente proportionnellement avec le nombre d’opposants sur un champ et est inversement proportionnelle au nombre d’alliés présents (gênant surtout en tirailleurs). »
« En conséquence, les chances de toucher sont maximale à l’entame ! »
« Par ailleurs, l’Homme-Armada se bat toujours seul contre tous jusqu’au duel (où les chances reviennent virtuellement à cinquante pour cent de chaque côté) ! »
« Un homme isolé qui élimine plus d’un adversaire est potentiellement sujet à la frénésie. »
« Un homme isolé qui voit ses partenaires se faire tuer est potentiellement sujet à la panique. »
« L’adrénaline s’accumulant joue contre n’importe quel individu (si le combat s’éternise)… »
Son charabia débile commençait sensiblement à me saouler en fait.
« Le troisième et dernier principe traite du combat rapproché! »
Comme s’il avait quelque chose à m’apprendre sur le corps à corps.
« Un instant t de mort commune pour au moins deux êtres est improbable lors d’une même action (même avec une arme d’éradication de masse) ! »
« Le combat s’articule donc nécessairement sur une campagne séquencée en rixe utiles. »
« Chaque adversaire est potentiellement un bouclier. »
Il n’y a jamais eu que la pratique qui fonctionna avec moi : quelle utilité à savoir ce genre de conneries ?
Tobiack aimait jouer : ce baratin, c’était pour provoquer plus qu’autre chose.
(Même si j’avoue que ça m’est resté depuis).
J’avais donc plus ou moins opté pour la prudence : mon fusil dans une main, mon 9 mm Pacificator dans l’autre.
Il n’y avait aucune chance qu’il s’en sortir : je n’avais qu’à arroser la zone…
Si mon semi-automatique ne le touchait pas, mon fusil le faucherait à coup sûr dans cette ruelle de cinq pieds de section maximum…
(A moins qu’il ne fut près d’une porte).
Ce que je ne savais pas encore, c’est qu’il était devant l’entrée d’une antenne médicale.
Pour le reste, il me semblait bien qu’il en avait fini avec ses tirades à en juger par le silence qui venait de s’installer.
Personne ne semblait se décider, et ce même si j’avais l’avantage certain d’avoir un couvert : ce qui n’était peut-être pas son cas (étant donné qu’il s’enfermait souvent délibérément dans des voies sans issues, précisément pour tenter l’ennemi).
Il l’avait si bien dit : maintenant c’était cinquante/ cinquante.
Mais le premier qui se lancerait à l’assaut risquait gros.
Il ne me fallait que sa position exacte. Raison pour laquelle j’avais opté pour l’arme de chasse : j’avais une marge d’erreur plus mince dans un couloir si étroit.
C’est pratiquement au moment de me lancer qu’il s’est lui-même décidé.
Je crois avoir bien entendu le choc des deux armes tombant sur le sol : ses deux semi-automatiques (qui étaient les armes de poings de bases de n’importe quel fantassin des sept brigades).
C’aurait simplement pu être leur chargeur en fait. Il aurait donc disposé de deux coups logés dans les chambres de chacune de ses armes : une sorte de leurre (mais je savais qu’il n’en était rien).
Qui plus est, il venait de me donner sa position.
Je n’ai hésité que parce que cela ne lui ressemblait pas. Cela ne correspondait en rien à sa réputation en tout les cas.
Il était méthodique à l’extrême : maniaque (il ne laissait rien au hasard).
« Et pourquoi pas un bon vieux duel ? » ai-je entendu.
Un ange passa…
Mon problème réside en cela : je suis un nostalgique des pratiques honorables (raison pour laquelle j’ai toujours fidèlement suivi Gretchencko)…
« Au couteau ! » a-t-il crié.
Je ne pouvais qu’accepter : il avait les cartes en main avec la bombe dans sa poche.
J’ai donc rengainé mon fusil dans son étui (logé dans mon dos) avant de me présenter sans autre précaution.
…
Je n’ai pas tout de suite compris : je n’ai capté qu’au dernier moment.
J’ai failli le tuer d’un coup : j’ai failli me tuer d’un coup.
Il a juste feinté (de trop loin) pour tenter ensuite une parodie de frappe à hauteur de la tête, et je me suis senti bête en me disant que le combat allait finir si vite (trop vite).
Ma lame s’est arrêtée avant le contact de la peau, bien avant de toucher le cœur.
J’ai alors décoché un crochet du gauche dans son abdomen pour pouvoir m’éloigner tranquillement.
Et il souriait malgré le fait qu’il avait le souffle coupé, la main libre portée à son ventre (par réflexe plus que par quelconque constat d’une douleur qu’il ne ressentait pas).
Je crois qu’il comptait volontairement se laisser abattre.
Je venais juste de réaliser que le détonateur principal était vraisemblablement sa mort (même si je n’en connaissais pas les conditions exactes)… Et moi de demander :
« Où veux-tu en venir ? »
Sans quitter son sourire il me dit placidement : « tu vas bien voir ! »
Il ne pouvait pas rire : le « blocage » irradiait encore beaucoup trop sous le thorax, mais son rictus dénotait l’autosatisfaction.
Il n’avait pas de diode : j’ai pu penser qu’il en avait sous son pourpoint côtelé pour prendre les battements de son cœur mais je me suis ravisé. Il avait un bracelet au poignet (qui pouvait s’apparenter à une montre) : c’était suffisant (pour le pouls tout du moins).
A posteriori je me dis qu’il avait simplement du s’injecter des nano robots par pistolet via intraveineuse : des émetteurs/ récepteurs qui avaient migrés vers les régions de son choix et qui devaient retransmettre en temps réel soit le tracé de son encéphalogramme, soit les pulsations cardiaques (voir les deux).
Comme disait Gretchencko : « on n’est jamais sûr de rien ! »…
Mais c’était le genre de scénario pondu et sur-repompé dans la grande majorité d’antiques séries télévisées retransmises encore aujourd’hui (et déjà alors) : c’est même les rares archives que nous avions en abondance bizarrement (parce qu’en dures souvent).
Et je loue le seigneur de m’avoir fait découvrir si tôt quelque chose comme les sitcoms (née mi-vingtième et plus si affinité) : elles m’auront sauvé la vie pour sûr.
« Il te reste une demi-heure » affirma l’incendiaire qui venait de faire l’erreur de regarder la montre dont j’ai fait mention (et qui n’indiquait certainement pas que l’heure, ni le décompte d’ailleurs).
Mais il pouvait désormais se permettre ce genre de « petite » bourde : il gagnait sur tous les tableaux de toute façon.
La bombe n’était pas là et je savais qu’il avait du la placer quelque part tout près des trois tours (pour un maximum de ravages).
Je n’avais pas le temps de chercher, ni de tergiverser de toute façon.
Et devant mon hésitation, lui de dire :
« Allons bon : j’attendais d’avantage de ta part… »
« Peut mieux faire ! » railla-t-il ensuite.
Mais il n’y avait pas trente-six solutions à cette foutue équation :
« Je veux bien accéder à ta requête » dis-je alors, avant d’ajouter « Promets-moi seulement de ne pas te laisser mourir ! »
Ma demande le surprit de prime abord et parut le ravir ensuite : « d’accord ! » assura-t-il d’un ton enjoué (presque magnanime)…
Enfoiré !
J’aurais pu me contenter de me barrer et le laisser crever tout seul mais quelque chose me disait qu’il avait encore un bouton rouge en réserve si je n’allais pas dans le sens de ce jeu morbide…
Et il fallait donner un maximum de temps aux gens qui étaient encore à l’intérieur.
Mais j’avais aussi une promesse à tenir.
Une demi-heure : c’était amplement suffisant.
Du reste, je crois qu’il avait compris lui aussi où je voulais en venir (et il allait devoir se défendre de son mieux à présent).
J’ai tiqué quand elle m’a tendu le minuscule bocal.
Je venais de lui demander comment descendre moi-même aux plus bas niveaux (à supposer que j’eusse fait son affaire à Tobiack).
Roxane s’en fut alors avant de réapparaître avec un simple verre operculé dans lequel baignait un œil dans son chloroforme.
« C’est celui de Catherine » me confia-t-elle en ajoutant que la dite jeune dame l’avait perdu suite à une infection due à un œdème : épanchement derrière la cornée sans doute causé lors d’une altercation pour ne vague affaire de tricherie (rapport à des dés pipés). Oui, on peut tricher dans le treizième (mais pas prétendre le contraire).
L’infection déclarée deux jours auparavant aurait contraint les androïdes médicaux à l’ablation de l’œil droit (qu’on a cloné et regreffé depuis).
« Et je suis sensé faire quoi avec ça ? » dis-je perplexe.
- « Bin : c’est le pass ! » m’assura-t-elle d’une voix presque neutre.
J’ai vaguement compris que les élévateurs ne descendaient pas plus loin que le quatrième sans identification d’iris…
Ou alors il fallait être accompagné de quelqu’un de moins d’un mètre vingt (un enfant de moins de dix ans donc). Les nains passaient aussi je suppose, mais je n’ai pas connaissance que le treizième en compta (une chance pour eux).
Je ne savais pas encore le pourquoi de pareilles mesures et m’en fichai complètement je dois dire.
Pour lors, j’avais plus important à faire.
Je donnai quand même un coup d’œil à l’organe (histoire d’éviter de me trouver con une fois dans l’élévateur).
Par chance, l’iris n’avait rien…
…
Iris n’avait rien…
…
« Il vous reste deux heures… »
Haggis se raidit aussitôt à cette annonce (chose que je peux comprendre).
Nous étions dehors quand nous avons entendu le bref rappel passé vraisemblablement par le biais de tous les haut-parleurs que pouvait comprendre cette ville (« comment » : là était la question).
La réplique de Tobiack faisait redondance sous l’effet de résonance de la coupole. L’écho semblait même sensiblement plus clair que la prime sentence…
Haggis et moi connaissions tous deux les pratiques de l’Homme-Armada.
Il n’y avait pas trente-six solutions pour passer le dédalle de pièges qu’Edric avait préparé à notre attention.
Haggis venait de me faire part de son plan en prévision de la confrontation quand nous avons entendu la première explosion (ce qui eut pour effet de faire sursauter derechef mon estimé compagnon d’arme).
Comme prévu, le localiser fut le moins difficile.
Hagerald était vaguement courageux mais en aucun cas téméraire. Aussi avait-il clairement spécifié que j’allais devoir me farcir seul la partie baston après qu’il se fut coltiné le traquenard.
Qu’importe, du moment qu’il fit son office.
Je me rappelle m’être dit que nous avions de la « chance » que Tobiack ait choisi de se battre à « ciel ouvert » si je puis dire (sans quoi nous n’aurions pu entendre les déflagrations) ou même qu’il était « heureux » (pensais-je) qu’il fut si narcissique (bien plus que ne l’aurait jamais été Hagerald, malgré son surnom).
Haggis et moi nous rendîmes donc à pieds au plus près de l’endroit supposé de la détonation. Nous étions escortés par une série d’androïdes (chouravés au département médical) et par notre voiture (elle-même conduite par un de nos robots).
Le tout était piloté par mon collègue du génie via mon unité portable (pour les grandes lignes du moins : il n’y avait pas grand-chose à pirater pour se faire, ces unités étant conçues pour obéir).
Le premier accès du labyrinthe de Clotho n’était pas loin du reste.
Nous avons facilement trouvé la petite fourgonnette qu’il avait du voler pour ses déplacements et l’emport de son matériel : les trois dernières caisses qu’il lui restait si mon souvenir est bon.
L’engin était vide à présent et garé non loin du premier corridor menant à la toile de l’Arachnide.
Les dégâts visibles sur les cloisons attestaient du passage d’un malheureux (et si Tobiack avait jugé bon d’activer une charge si loin de l’épicentre de son traquenard c’était précisément pour en marquer l’entrée).
Nous savions pertinemment qu’Edric désactivait systématiquement la ligne de défense la plus éloignée pour piéger ses victimes, nous nous sommes donc simplement servi des androïdes comme démineurs volontaires. J’avoue d’ailleurs avec grande honte que je n’aurais pu parvenir à les commander tout seul (étant alors un ignare fini en programmation et bien que mes connaissances en la matière aient sensiblement évolué depuis).
A la vérité, la première idée d’Haggis était de pirater directement le réseau de charges qui dépendaient des détonateurs à faisceau pour les faire sauter en une fois.
Les androïdes n’étaient que le protocole secondaire (pour éliminer les charges reliées par fil). Mais il s’est avéré que le réseau d’explosif était verrouillé d’une manière trop complexe (ce qui était déjà anormal).
La chose n’avait pas d’importance : cela nous prendrait certes plus de temps mais nous avions rameuté plus de robots que nécessaire (on gagne toujours à être prudent).
Leur rôle se résumait à enlever les charges dès qu’ils en voyaient une (pour les éloigner le plus possible de nous) ou de sauter avec si c’était le bon plaisir de Tobiack de réactiver le détonateur à ce moment (ce dont nous n’avions toutefois strictement rien à fiche).
Nota bene : Pandora me fait savoir qu’elle ne cautionne pas ce genre de pratiques…
(C’est bien dommage)…
Le détonateur était vraiment trop petit pour qu’on puisse le manipuler dans le cadre d’un désamorçage (lequel aurait pris trois plombes qui plus est).
La méthode d’Haggis était radicale mais rudement efficace.
Pour info, le matériel qu’utilisait l’Homme-Armada datait de bien avant la seconde guerre froide (mais il avait surtout fait ses preuves durant les Guerres Institutionnelles).
Et pour ceux qui n’y comprennent rien (tout comme moi à une époque), à ce que j’ai cru comprendre, les faisceaux des détonateurs qu’utilisait Tobiack marchaient dans les deux sens (quand ils étaient activés à distance) : la longueur du rayon lumineux (bleu foncé) se délimitait automatiquement (grâce à un senseur qui enregistrait le diamètre de la projection du rayon sur un mur par exemple) dès que le détonateur était activé (tant devant que derrière l’engin).
Si un mouvement coupait le faisceau ou que l’on retirait le détonateur (faisant de facto varier le cercle lumineux d’un côté ou de l’autre), la charge explosait.
En outre, ils avaient l’avantage d’être sans fils directs avec la charge : ce qui permettait à Edric d’en faire ce qu’il voulait (compliquant aussi un hypothétique déminage).
Il pouvait à loisir utiliser les charges de manière conventionnelle (couplées aux détonateurs) ou en les planquant à des endroits stratégiques (comme le revers des plaques d’égouts par exemple) étant donné que nos ruelles étaient généralement crades (facilitant le camouflage de ce genre de dispositif) même si pour des raisons évidentes la charge n’était jamais bien loin de son détonateur.
Malheureusement pour Tobiack (et heureusement pour nous), les rues du treizième étaient particulièrement bien entretenues.
La corvée de nettoyage était d’ailleurs la peine minimale dans le code judiciaire de cette citée bien que l’essentiel du travail fût laissé aux robots de maintenance (dont l’usine n’avait pratiquement pas souffert des affres de la Faucheuse).
=> Comme je l’ai déjà dit précédemment, le secteur treize était un de ceux qui s’en sortait le mieux (avant l’arrivée de Lilith).
Mais pour en revenir à notre affaire, la bagnole lancée à fond de caisse a pratiquement fini le travail.
Conduite par l’une des dernières unités robotisées (sous la direction d’Haggis), elle emprunta un ou deux tronçons de route (déjà ravagés) avant d’atteindre la première des lignes défensives restantes.
L’engin coupa tout ce qu’il trouva de fibres de carbones sur sa trajectoire (soit dans sa course ou lors des tonneaux qui s’en suivirent lorsqu’il se souleva sous le coup des premiers impacts).
Tout ce qui restait de charges (pour la partie de rue que je devais arpenter moi-même) avait normalement du sauté sous l’effet de cette seule mesure (puisqu’il n’en restait déjà plus beaucoup après le passage de nombreux imbéciles piégés dans la toile de l’Arachnide).
La voiture (qui reposait à présent sur son toit) avait traversé la dernière section transversale à la coursive menant au repaire d’Edric (couloir qu’elle avait dépassé dans sa chute : elle ne risquait donc pas d’obstruer le passage).
Un dernier androïde se présenta sans encombre devant le corridor et un tueur qui l’aligna dès qu’il le vit.
Le robot s’effondra de côté à l’angle de la ruelle sous l’impact d’une balle d’un calibre 9mm.
Ses jambes continuaient de gesticuler malgré tout alors que le rire d’exultation de Tobiack se faisait entendre…
Je crois pouvoir dire avec certitude que c’est parce que ce taré pensait avoir trouvé un adversaire à sa mesure (alors que je ne serais arrivé à rien sans mon brave Hagerald).
« Je peux partir maintenant ? » fit Haggis un brin paniqué en entendant Tobiack s’esclaffer.
- « Oui… »
« Mais préviens le Q.G. de la situation et rejoins les autres dans les sous-sols ! »
Il avait mon unité portable pour se faire : elle était en relais permanent avec les ordinateurs de notre planque (et avec la Pythie : théoriquement) mais pouvait aussi servir d’une sorte de G.P.S. (ce qui ne servait à rien sous un dôme).
Roxane devait l’attendre.
Nous avions déjà lancé un avertissement par l’intranet de l’imminence de la catastrophe mais il était peu probable qu’il fut suivi.
Nous avions aussi lancé des appels par les mégaphones des trois tours…
Je ne sais si nous aurions du : ils étaient encore nos ennemis après tout (et ils auraient eu une chance de mourir sans la terreur au ventre surtout).
Enfin, je crois qu’on peut dire que j’avais aussi des scrupules à risquer de voir mourir dans le tas des gens qui n’avaient pas vraiment choisi (un peu comme les parents de Cassandre si vous voulez).
Après tout, qui pouvaient se targuer d’avoir eu le choix dans le Treizième ?
…
Il ne pouvait pas pleuvoir : forcément. Il ne pleuvait jamais sous le dôme du secteur de Lilith puisqu’il était en place depuis plus de cent ans…
Je ne sais pas pourquoi cette pensée m’a traversé l’esprit…
Sans doute parce que beaucoup d’entre les gens de cette mégapole vide aux trois quart (comme la plupart des citées de l’état global) ne la verraient jamais tomber en définitive.
« Connais-tu les trois principes de l’Homme-Armada ? »
Les paroles étaient celles de Tobiack, bien à l’abri au fond de sa ruelle n’attendant précisément qu’une chose : qu’on le retrouve…
Il donnait de sa voix pour se faire clairement entendre.
J’étais quant à moi toujours à couvert à l’angle du mur, au carrefour de deux ruelles.
Nous n’étions séparés que de quinze mètres à peine : il se tenait fatalement quelque part sur ma droite. La voiture-bélier continuait de cramer à environ septante pieds en face de moi (les réservoirs avaient déjà explosé de toute manière).
« Des règles simples, presque dignes d’un enfant… »
Comment aurais-je pu connaître ses foutus principes puisqu’il se ventait de descendre systématiquement toute personne qu’il entretenait à ce sujet ?
Je ne crus pas utile de répondre, raison pour laquelle il continua le monologue.
« Certains sont pourtant morts dans l’espoir d’en connaître une seule » précisa-t-il d’un ton qui trahissait l’ironie.
Je ne pouvais en déduire qu’une seule : celui qui tue l’Homme-Armada devient l’Homme-Armada.
Il ne peut y en avoir qu’un par conséquent.
(Mais je me trompais en l’occurrence).
« Chaque principe entraîne un certain nombre de corollaires et des cas particuliers : et je ne les connais pas tous moi-même (étant donné qu’on peut toujours innover) ! »
…
« Premier principe : principe général… »
« Aucune victoire n’est définitive ! »
Des évidences, effectivement…
Mais il avait envie de continuer :
« La guerre est totale ! »
« La guerre est perpétuelle ! »
« L’homme qui choisit la guerre doit accepter le fait de mourir seul comme un goret qu’on mène à l’abattoir : nulle gloire, nul honneur à pourvoir ! »
J’étais partiellement d’accord avec celle-là (pour la dernière partie en tout cas).
« Deuxième principe : au sujet du combat à distance (dans toutes guerres modernes) ! »
Apparemment, il avait du temps à perdre en palabres…
Bah : tant qu’il n’appuyait pas sur la gâchette nucléaire.
« A compétence individuelle égale, la probabilité de toucher augmente proportionnellement avec le nombre d’opposants sur un champ et est inversement proportionnelle au nombre d’alliés présents (gênant surtout en tirailleurs). »
« En conséquence, les chances de toucher sont maximale à l’entame ! »
« Par ailleurs, l’Homme-Armada se bat toujours seul contre tous jusqu’au duel (où les chances reviennent virtuellement à cinquante pour cent de chaque côté) ! »
« Un homme isolé qui élimine plus d’un adversaire est potentiellement sujet à la frénésie. »
« Un homme isolé qui voit ses partenaires se faire tuer est potentiellement sujet à la panique. »
« L’adrénaline s’accumulant joue contre n’importe quel individu (si le combat s’éternise)… »
Son charabia débile commençait sensiblement à me saouler en fait.
« Le troisième et dernier principe traite du combat rapproché! »
Comme s’il avait quelque chose à m’apprendre sur le corps à corps.
« Un instant t de mort commune pour au moins deux êtres est improbable lors d’une même action (même avec une arme d’éradication de masse) ! »
« Le combat s’articule donc nécessairement sur une campagne séquencée en rixe utiles. »
« Chaque adversaire est potentiellement un bouclier. »
Il n’y a jamais eu que la pratique qui fonctionna avec moi : quelle utilité à savoir ce genre de conneries ?
Tobiack aimait jouer : ce baratin, c’était pour provoquer plus qu’autre chose.
(Même si j’avoue que ça m’est resté depuis).
J’avais donc plus ou moins opté pour la prudence : mon fusil dans une main, mon 9 mm Pacificator dans l’autre.
Il n’y avait aucune chance qu’il s’en sortir : je n’avais qu’à arroser la zone…
Si mon semi-automatique ne le touchait pas, mon fusil le faucherait à coup sûr dans cette ruelle de cinq pieds de section maximum…
(A moins qu’il ne fut près d’une porte).
Ce que je ne savais pas encore, c’est qu’il était devant l’entrée d’une antenne médicale.
Pour le reste, il me semblait bien qu’il en avait fini avec ses tirades à en juger par le silence qui venait de s’installer.
Personne ne semblait se décider, et ce même si j’avais l’avantage certain d’avoir un couvert : ce qui n’était peut-être pas son cas (étant donné qu’il s’enfermait souvent délibérément dans des voies sans issues, précisément pour tenter l’ennemi).
Il l’avait si bien dit : maintenant c’était cinquante/ cinquante.
Mais le premier qui se lancerait à l’assaut risquait gros.
Il ne me fallait que sa position exacte. Raison pour laquelle j’avais opté pour l’arme de chasse : j’avais une marge d’erreur plus mince dans un couloir si étroit.
C’est pratiquement au moment de me lancer qu’il s’est lui-même décidé.
Je crois avoir bien entendu le choc des deux armes tombant sur le sol : ses deux semi-automatiques (qui étaient les armes de poings de bases de n’importe quel fantassin des sept brigades).
C’aurait simplement pu être leur chargeur en fait. Il aurait donc disposé de deux coups logés dans les chambres de chacune de ses armes : une sorte de leurre (mais je savais qu’il n’en était rien).
Qui plus est, il venait de me donner sa position.
Je n’ai hésité que parce que cela ne lui ressemblait pas. Cela ne correspondait en rien à sa réputation en tout les cas.
Il était méthodique à l’extrême : maniaque (il ne laissait rien au hasard).
« Et pourquoi pas un bon vieux duel ? » ai-je entendu.
Un ange passa…
Mon problème réside en cela : je suis un nostalgique des pratiques honorables (raison pour laquelle j’ai toujours fidèlement suivi Gretchencko)…
« Au couteau ! » a-t-il crié.
Je ne pouvais qu’accepter : il avait les cartes en main avec la bombe dans sa poche.
J’ai donc rengainé mon fusil dans son étui (logé dans mon dos) avant de me présenter sans autre précaution.
…
Je n’ai pas tout de suite compris : je n’ai capté qu’au dernier moment.
J’ai failli le tuer d’un coup : j’ai failli me tuer d’un coup.
Il a juste feinté (de trop loin) pour tenter ensuite une parodie de frappe à hauteur de la tête, et je me suis senti bête en me disant que le combat allait finir si vite (trop vite).
Ma lame s’est arrêtée avant le contact de la peau, bien avant de toucher le cœur.
J’ai alors décoché un crochet du gauche dans son abdomen pour pouvoir m’éloigner tranquillement.
Et il souriait malgré le fait qu’il avait le souffle coupé, la main libre portée à son ventre (par réflexe plus que par quelconque constat d’une douleur qu’il ne ressentait pas).
Je crois qu’il comptait volontairement se laisser abattre.
Je venais juste de réaliser que le détonateur principal était vraisemblablement sa mort (même si je n’en connaissais pas les conditions exactes)… Et moi de demander :
« Où veux-tu en venir ? »
Sans quitter son sourire il me dit placidement : « tu vas bien voir ! »
Il ne pouvait pas rire : le « blocage » irradiait encore beaucoup trop sous le thorax, mais son rictus dénotait l’autosatisfaction.
Il n’avait pas de diode : j’ai pu penser qu’il en avait sous son pourpoint côtelé pour prendre les battements de son cœur mais je me suis ravisé. Il avait un bracelet au poignet (qui pouvait s’apparenter à une montre) : c’était suffisant (pour le pouls tout du moins).
A posteriori je me dis qu’il avait simplement du s’injecter des nano robots par pistolet via intraveineuse : des émetteurs/ récepteurs qui avaient migrés vers les régions de son choix et qui devaient retransmettre en temps réel soit le tracé de son encéphalogramme, soit les pulsations cardiaques (voir les deux).
Comme disait Gretchencko : « on n’est jamais sûr de rien ! »…
Mais c’était le genre de scénario pondu et sur-repompé dans la grande majorité d’antiques séries télévisées retransmises encore aujourd’hui (et déjà alors) : c’est même les rares archives que nous avions en abondance bizarrement (parce qu’en dures souvent).
Et je loue le seigneur de m’avoir fait découvrir si tôt quelque chose comme les sitcoms (née mi-vingtième et plus si affinité) : elles m’auront sauvé la vie pour sûr.
« Il te reste une demi-heure » affirma l’incendiaire qui venait de faire l’erreur de regarder la montre dont j’ai fait mention (et qui n’indiquait certainement pas que l’heure, ni le décompte d’ailleurs).
Mais il pouvait désormais se permettre ce genre de « petite » bourde : il gagnait sur tous les tableaux de toute façon.
La bombe n’était pas là et je savais qu’il avait du la placer quelque part tout près des trois tours (pour un maximum de ravages).
Je n’avais pas le temps de chercher, ni de tergiverser de toute façon.
Et devant mon hésitation, lui de dire :
« Allons bon : j’attendais d’avantage de ta part… »
« Peut mieux faire ! » railla-t-il ensuite.
Mais il n’y avait pas trente-six solutions à cette foutue équation :
« Je veux bien accéder à ta requête » dis-je alors, avant d’ajouter « Promets-moi seulement de ne pas te laisser mourir ! »
Ma demande le surprit de prime abord et parut le ravir ensuite : « d’accord ! » assura-t-il d’un ton enjoué (presque magnanime)…
Enfoiré !
J’aurais pu me contenter de me barrer et le laisser crever tout seul mais quelque chose me disait qu’il avait encore un bouton rouge en réserve si je n’allais pas dans le sens de ce jeu morbide…
Et il fallait donner un maximum de temps aux gens qui étaient encore à l’intérieur.
Mais j’avais aussi une promesse à tenir.
Une demi-heure : c’était amplement suffisant.
Du reste, je crois qu’il avait compris lui aussi où je voulais en venir (et il allait devoir se défendre de son mieux à présent).