Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Structure lacunaire


Par : Jean_Qule
Genre : Sentimental
Statut : Abandonnée



Chapitre 12


Publié le 14/04/2011 à 00:19:31 par Jean_Qule

"-... Non... Elle va quand-même pas...
-Bah si.
-Mais... MAIS QU'EST-CE QUE TU ATTENDS, BORDEL?!?"

Sam me saisit le bras et me tire vers la porte. J'essaie de le repousser, mais il résiste, bien décidé à me secouer. J'arrache de nouveau sa main de mon bras. Sam se retourne alors, le poing serré, direction mon visage.
J'évite de justesse son coup et profite de son manque d'appui pour le faire trébucher.
Je reste soufflé par ce qui vient de se passer: Sam, ce gros nounours inoffensif qui ne ferait pas de mal à une mouche, a essayé de me frapper.
Il se relève et m'attrape par le col.

"-...Pourquoi... POURQUOI LES CHOSES SONT TOUJOURS COMPLIQUÉES AVEC TOI?!?"

Je vois son poing revenir. Je le laisse faire.
J'encaisse, difficilement, et recule de quelques pas. Pas de répit, Sam me plaque contre un mur et serre mon cou, prêt à m'étrangler. Je vois que son prochain coup tarde à partir.

"-... Vas-y, tu attends quoi?... Je ne suis plus à un échec près..."

Il me regarde fixement avec ses yeux plissés, et relâche sa pression. Je retombe sur mes genoux, essoufflé. Ce qu'il lui manque en souplesse, il le rattrape en force.
Il se dirige vers le balcon, et me fait signe de le rejoindre. Je m'approche de la fenêtre, et le voit lutter pour sortir un paquet de cigarettes de sa poche.

"-... Je croyais que tu voulais arrêter de fumer.
-Et moi, je croyais que tu aimais Adelle.
-Moi aussi. On fait tous des erreurs.
-Alors, finalement... Tu abandonnes, comme ça?...
-Oui. De toute évidence, je n'éprouve plus rien pour elle.
-... La semaine dernière, tu as explosé Julien parce qu'il disait du mal d'elle...
-Ce même Julien m'a fait prendre conscience d'une chose.
-Quoi?
-J'avais honte de mes sentiments. Honte d'aimer. C'est d'autant plus remarquable depuis que je suis au courant de son départ. C'est simple: je ne réagissais pas. J'étais là, en train de déprimer en bon fataliste que je suis. Est-ce que c'est ça, aimer? Je ne crois pas. Penser à cette fille ne m'a apporté que problèmes et chagrins.

Sam me regarde, médusé.

-...Andy...
-Sincèrement... Tu n'en as pas marre, de me voir me lamenter sur mon sort? De me retrouver tout les soirs avec plusieurs grammes d'alcool dans le sang? Voir cette espèce de merde avachi sur le canapé qui ne pense qu'au passé?
-...
-Pardonne-moi. Tu en as vu de toutes les couleurs, avec moi. C'est pas comme ça qu'on traîte ses amis. Je ne viendrais plus pleurer sur ton épaule, promis! Je vais changer! La chiffe molle coincé dans les années lycées que tu as connu ne viendra plus t'envahir!
-...
-Tu a tant fait pour moi... Merci. Mais maintenant, il est temps de penser un peu à toi. Crois-moi, c'est mieux pour tout le monde qu'Adelle sorte de ma vie. Ça fait 15 ans, Sam, 15 ans qu'elle occupe mes pensées... Adelle par-ci, Adelle par-là... Tu ne trouves pas ça usant, à force?...
-... Si, mais...
-Toi, Julien, tout le monde... Vous vous préoccupez trop de ma situation. Je ne peux pas accepter ça. Pensez à vous, plutôt. Je n'ai pas à parasiter votre vie avec mes états d'âmes. J'ai mis trop de temps à le comprendre. Mais c'est fini, maintenant. Il est temps pour moi de me reconstruire. Et laissez-moi faire, à 30 balais faut se prendre en main tout seul.
-... C'est bien toi, Andy?...
-Oh que oui, c'est bel et bien moi. Plus que jamais, d'ailleurs. J'ai compris que ce n'est pas aux côtés d'Adelle que je dois rattraper le temps perdu, mais avec mes amis. Je lui ai consacré près de la moitié de mon existence... C'est largement suffisant."

Je sors de ma poche un briquet et allume la cigarette que Sam avait gardé éteinte à sa bouche, stupéfait par mes propos.
Il baisse les yeux un moment, écrase sa cigarette entière dans le cendrier et dit en souriant:

"-Très bien. On fait comme ça."

Je lui souris en retour, et prends route vers ma chambre.
Je sais que ce sourire était plus crispé qu'autre chose. Il n'arrive pas à se faire à l'idée que, après 15 ans de surplace, je me décide enfin à lever le pied. Je le comprends. À vrai dire, j'ai du mal à me convaincre moi-même. Mais le changement va bel et bien s'opérer.
Je fouille dans des tas de classeurs, de documents, de tiroirs, de cartons, à la recherche de tout ce qui se rapporte de près ou de loin à Adelle. Je trouve des portrais, des photos, des poèmes, des mangas... Je dispose tout en un tas assez conséquent au centre de ma chambre.
Après avoir retourné ma chambre dans tout les sens, je m'assis face à ce tas, et prend la photo disposée au sommet.
C'est en fait une série de clichés prise dans un photomaton avec Adelle. On faisait des grimaces, on portait des couvres-chefs improbables... Souvenirs plus qu'inutiles. Je prend mon briquet et enflamme la photo, que je repose délicatement sur le tas, qui s'embrase aussitôt.
J'observe attentivement ce foyer, presque hypnotisé. J'associe ce tas à ma mémoire, comme si je formatais le disque dur de mon cerveau. J'aimerai tellement oublier, devenir amnésique... Comme ceci n'est pas faisable normalement, et faute d'avoir trouvé mieux, je vais me contenter d'enfouir le passé. Cette représentation physique va surement m'aider, au moins à m'inciter de prendre un nouveau départ. Si j'arrive à penser à autre chose qu'à Adelle, un énorme cap aura été franchi.
Brûle, Adelle...
Je reste là pendant une bonne heure, à assister à ce spectacle étrange et envoutant. Au bout d'un moment, pour éviter d'alerter le voisinage, je mets fin à la représentation. Rideau.
Je ramasse les cendres de mon passé, en espérant qu'il ne ressucite pas, tel le Phénix.
Je les jette par la fenêtre, comme on répend les cendres d'un défunt.

Je me sens étrangement bien malgré le côté morbide de la situation.

Ceci n'est que la première étape d'un long processus de reconstruction. Je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin.

Bientôt, ces 15 ans de souffrances, de désillusions et de défaites ne seront plus qu'un vague souvenir...


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