"-J'ai bien aimé ta présentation... Andy."
Bordel, mais qui me parle? Mais c'est...

L'otaku aux cheveux flamboyants.

"-... Bah tant mieux.
-Surtout le 'ET QU'ON ME FOUTE LA PAIX', c'était plutôt amusant. T'as l'air d'être assez direct comme gars.
-Ça dépend.
-De quoi?
-De mon degré d'intolérance. Fais gaffe, parce que là il monte en flèche.
-Ah ah ah ah! C'est pas mal, ça!

D'habitude, quand je fais une réflexion de ce genre mon interlocuteur s'arrête, complétement mal à l'aise. Mais là ça marche pas. Pire, cette fille se fout de moi.
Elle tourne pas rond celle-là.

-... Je vois pas ce qu'il y a de drôle.
-Nan, c'est juste qu'en disant ça, tu prends un air faussement menaçant...
-Faussement?
-T'es pas crédible!
-Te... Te fout pas de moi!
-Oh non! Tu rougis! Ah ah ah ah ah!"

C'est pas possible, elle est complétement givrée cette pauvre fille!
Je peux pas expliquer ce qui m'arrive, normalement j'ai toujours le dernier mot, mais là j'arrive pas à répliquer. J'ai l'impression que tout ce que je dis et fais se retourne contre moi. Lui coller une beigne me soulagerai grandement, mais c'est bien connu, on frappe pas les filles. Faute d'avoir trouvé mieux, je joue la carte de l'indifférence, peut-être qu'elle me laissera tranquille ce coup-ci.

"-Ahhhh... Je rêve ou tu es en train de bouder?
-...
-Et ça a 16 ans... Pouuuce!
-... Hein?
-C'est pas comme ça qu'on suspend un jeu quand on est gosse? En disant 'pouce'?"

Je vois mon bus arriver. Sauvé. Ni une ni deux, je fonce vers l'abribus pour lui faire signe de s'arrêter.

"-Et un 'au revoir', ça t'arracherait la langue?
-TA GUEEUUUUUUULLLLE!!!"

Ça fait du bien de crier un bon coup. Les passants me prennent surement pour un fou furieux, mais je me fous bien de ce que peuvent penser les gens.
Ce bus tombe à pic, c'est rare de pouvoir dire ça d'un transport en commun. Comme d'hab', je me cale au fond du bus et m'allonge sur les sièges. Mais je peux pas m'empêcher de regarder cette fille par la fenêtre. Cette naine aux cheveux rouges qui s'est payée ma tête. Elle aussi me regarde, avec ses yeux grand ouverts. Elle affiche un large sourire. Sa présence même me gêne, j'arrive pas à me concentrer sur le son que crache mes écouteurs. Tout ce que je remarque, c'est ces yeux. Et ce sourire. Elle est imperturbable, celle-là. Je pose la tête sur la vitre d'à côté, et ferme les yeux pour ne plus voir cette chose.
Elle m'a complétement court-circuité, j'ai été incapable de la remettre à sa place. Et encore, là ce n'est que le début: elle a encore toute une année pour me ridiculiser. Faut vraiment que je me fasse oublier, comme les années précédentes. Mais là, j'ai tellement fait bonne impression que je vais pas retomber dans l'anonymat de sitôt.
Déjà je sens que ce prof principal va me coller au train arrière, pire encore que ses prédecesseurs. Et comme mon instinct ne m'a pas trompé jusque là, c'est sans me mouiller que je peux dire que l'année sera merdique.

"-Alors, ta journée?
-Pas mal.
-Tu t'es fait de nouveaux amis?
-Nan, trop tôt.
-Bah oui, suis-je bête. On a pas le temps de sympathiser le jour de la rentrée!
-Ouais.
-Tu as des papiers à me rendre?
-Ouais, accroche-toi à ton stylo.
-Ah oui, et n'oublie pas! Tu commence dès demain!
-Ouaaais..."

Je sais pas si c'est un truc propre aux établissements privés, mais commencer les cours le lendemain de la rentrée, c'est abusé. Même au collège, on commençait 2 ou 3 jours après. J'ai même pas le temps de me remettre de cette journée bien pourrie finalement. Dire que je vais devoir rempiler demain...

Je m'affale sur mon pouf, saisit la télécommande et mets en marche le lecteur Blu-Ray. Advent Children est toujours dans mon lecteur, j'ai plus qu'à appuyer sur un bouton pour le faire tourner.
Ça me permettra au moins d'oublier cette journée.

Et l'autre tarée.

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Mal...

Mal à la tête. C'est affreux. J'ai du mal à ouvrir les yeux, mais comme aucune source de lumière ne vient m'agresser la rétine, il semblerait qu'il fasse encore nuit.
J'essaie de me redresser. J'ESSAIE. Une vive céphalée m'étourdit à ce moment-là. Je replonge ma tête dans l'oreiller. J'ai apparemment dormi sur un canapé, mais lequel? Tel est la question. Il peut m'arriver n'importe quoi en état d'ébriété.
Je retente un redressement. J'aurais pu réussir si mes jambes étaient fichus de maintenir mon corps en équilibre. C'est en rampant que je continue mon escapade nocturne.
Je ne me rappelle plus trop de cette soirée, la seule chose dont je me souvienne... C'est le départ d'Adelle. L'alcool, ça sert à rien. Promis, j'arrête.
Je vois un peu plus clairement maintenant, je distingue une lumière, tamisée. Je reconnais quelques meubles, et des bibelots... Je suis chez Julien. Je m'approche tant bien que mal de cette lumière, qui vient de la cuisine. Je vois Bianca, en peignoir, en train de lire un livre une tasse à la main. Nouvelle tentative de redressement. Encore ratée, je retombe lourdement sur le parquet. Bianca m'a remarqué, et se précipite vers moi.

"-Tu devrais pas, dans l'état où tu es... Je vais t'aider à rejoindre le canapé.
-...Nan, ça ira. Chuis pas foutu de me rendormir de toutes façons.

Elle m'aide à me relever, et tire une chaise pour que je m'assoie.

-Tiens, un peu d'aspirine ne te fera pas de mal.
-Merci.
-Ah oui, et tu peux enlever les cotons que tu as dans tes narines.
-Hein?

Je me disais aussi, j'avais du mal à respirer par le nez.

-Tu t'es battu avec Julien pour je ne sais quelle histoire...
-Sérieux? Il va bien?
-Tu l'as massacré! Il est à l'hôpital!
-MERDE!... Désolé...
-Ne t'inquiète pas, ça ne fait rien.
-...Et Sam?
-Il s'est endormi sur le fauteuil. Il était sobre, mais très fatigué, tu dois t'en douter.
-Tant mieux... Pourquoi tu dors pas?
-J'ai toujours du mal à dormir. Je fais toujours des cauchemars. Et avec Julien qui est à l'hôpital...
-Oui, je comprends.
-... Alors comme ça tu aimes encore Adelle?
-D'où tu sors ça?
-Sam m'a confié qu'elle était le sujet de la dispute.
-Hem... Peut-être. Bon, j'y vais.
-Où ça?
-Bah chez moi, tiens.
-Tu n'arrives pas à tenir sur tes deux jambes!
-Ça va mieux, merci. J'ai envie de rentrer chez moi.
-Tu veux que je te dépose?
-Non merci, ça ira."

Je me lève brusquement de ma chaise, saisi ma veste pendue sur le porte-manteau, et... M'arrête dans ma lancée parce que j'ai trop mal à la tête. Fais chier.

"-... Bon, attends-moi ici, je vais te déposer."

Merde, elle va surement me bombarder de questions concernant Adelle...

Pitié.