Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Le chevalier lapin


Par : Cérate
Genre : Nawak
Statut : C'est compliqué



Chapitre 8


Publié le 05/08/2010 à 00:40:16 par Cérate

Pendant ce temps-là, la fille du bourgeois apprenait les mathématiques auprès de son précepteur, et avait l'esprit plus occupé par sa fête d'anniversaire que par la comptabilité.
Rien d'intéressant à raconter, son rôle viendra un peu plus tard dans l'histoire.

Julie, quant à elle, était une demoiselle tout ce qu'il y a plus de quelconque, ni belle, ni laide, qui était occupée en ce jour d'anniversaire à fouiller les cadavres sur le champ de bataille, avec l'aide d'une tripotée d'autres marmots. Comme elle était très débrouillarde, c'était elle qui menait les opérations : les gamins avançaient en ligne sur le terrain, ratissant chaque touffe d'herbe à la recherche de butin, qu'elle récupérait ensuite pour une distribution - presque - équitable à la fin de la journée. Il fallait faire vite, car les agents du Roi et les prêtres arriveraient bientôt pour s'occuper de l'âme immortelle des soldats décédés - c'est-à-dire les enterrer, allez comprendre la logique. Il n'y avait aucune trace des monstres de la sorcière parmi les cadavres, qui s'étaient tous évaporés en une nuée bleue aussitôt après que le dernier d'entre eux ait succombé.
Le travail fut fini plus vite que prévu. Julie en profita pour aller faire un tour dans les bois aux alentours, à la recherche de myrtilles pour le dîner, laissant à son frère et à ses six sœurs le soin de ramener sa part des pillages à la maison.
C'est là qu'elle fit la découverte qui devait changer sa vie pour toujours, et en faire la sorcière la plus puissante que le monde n'ait jamais portée.
À quelques lieues de la plaine, près d'un buisson de mures, Julie repéra par hasard des traces de branches brisées et de sol retourné, comme si un homme en lourde armure s'était péniblement traîné pour aller faire on ne sait quoi dans la forêt. La fille était maligne, et elle pensa tout de suite à un chevalier blessé qui aurait décidé de s'en aller mourir au calme. C'était en effet une manie assez fréquente chez les hommes d'arme un peu romantiques, qui croyaient sans doute que trépasser en écoutant les petits oiseaux gazouiller et en regardant les écureuils s'élancer de branche en branche à la recherche de noisettes était moins douloureux que mourir sur un lit de camp entre les mains des médecins - ce qui, au vu des capacités des physiciens de l'époque, et de leur fâcheuse tendance à faire des saignées, n'était pas totalement faux. Cette mode convenait tout à fait à Julie, plus pragmatique, qui y voyait surtout la possibilité de détrousser de la tête aux pieds un des nobles de la cour. Calculant mentalement le prix qu'elle pourrait tirer d'un équipement complet de soldat, elle repoussa une branche qui s'aventurait un peu trop près de son visage, puis s'enfonça sans hésiter dans les profondeurs de la forêt.
La piste était mauvaise et les sapins ne lui facilitaient pas la tâche, griffant sans cesse sa peau de leurs doigts crochus. Elle marcha plus d'une heure, et Julie commençait à perdre patience - on n'a pas idée de mourir aussi loin des zones civilisées ! - lorsqu'elle aperçut enfin le chevalier.
Il gisait dans une clairière, le visage tourné vers le ciel. Il portait une armure d'un noir légèrement rouillé, tachée par endroits de traces de terres plus claires et de mousses vertes, qui encadrait un corps à l'allure humaine. Le casque était posé à quelques pieds de là, et Julie étouffa un léger cri en voyant sa forme étrange, cri qui s'échappa tout à fait de sa gorge lorsqu'elle poussa plus loin son exploration visuelle : la tête du gisant était celle d'un lapin. Et même d'un lapin très mignon, brun avec un museau légèrement plus clair, muni d'immenses oreilles rembourrées de duvet blanc.
Julie était prudente, mais la créature semblait morte. Elle lança quelques cailloux sur l'armure pour s'en assurer, et comme la silhouette ne bougeait toujours pas, elle s'approcha. Le trésor n'était pas aussi grand qu'espéré, car personne n'accepterait de payer pour porter cette cuirasse difforme. Mais bon, elle pouvait toujours revendre les pièces au prix du métal ? ce qui, au final, représentait une somme correspondant à presque deux ans de récolte de concombres, ce qui n'était pas négligeable. La déception de la jeune fille diminua un peu. Elle comptait ôter l'armure, la cacher un peu plus loin au creux d'un buisson, puis aller chercher sa famille pour l'aider à la porter, mais elle n'en eut pas l'occasion : une grosse main gantée de fer se referma brutalement sur sa cheville.
Le lapin était vivant.


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