Note de la fic :
Quand Viendra l'An Mille après l'An Mille (Vae Victis)
Par : Conan
Genre : Action, Réaliste
Statut : C'est compliqué
Chapitre 11
Publié le 07/01/2014 à 18:00:45 par Conan
A peine arrivés, les hommes de la première compagnie se rassemblent pour embarquer dans les véhicules. Et quels véhicules ! Un amas de tas de ferraille, datant pour certains de la dernière guerre avant celle-ci. Des camion militaires de tous types, de toutes formes, usés jusqu'à la moelle. La rouille ronge leurs carrosseries bringuebalantes, les pièces sont réparées à l'aide de fil de fer, de soudures grossières et dégoulinantes de métal. Les bâches trouées et rapiécées tiennent avec des tendeurs ou de vulgaires élastiques prêts à péter. Les chauffeurs sentent le graillon, le tabac et le mazout. Leur chef, un bon gros adjudant du Train coiffé d'une vieille casquette de l'armée Américaine et fumant un cigare branlant, se porte au niveau de Louis.
-Capitaine Berger ?
-Oui ? Se retourne Louis, qui était occupé à lire le tracé d'itinéraire sur une carte routière datant des années soixante.
-J'suis l'adjudant Bougnac, chef de rame. Je suis l'responsable des cinquante camions que vous avez là.
-Et donc ?
-C'est vot'compagnie qui doit embarquer en premier, dans les véhicules de tête. Vous êtes bien le CDU de la première ?
-Oui, c'est ça.
-Les big boss veulent que le convoi soit constitué selon l'ordre des compagnies, et j'dois personnellement vérifier l'embarquement de chacun de mes bahuts.
-Encore une idée géniale de nos chefs, hein. Je fais embarquer mes gars.
Dans la foulée, les sections se dispersent pour monter à l'arrière des camions de transport. Les hommes s'aident à monter, font passer sacs et musettes, et s'installent sur les banc en fer vissés sur le sol en bois des camions, serrant leurs armes entre leurs cuisses pour faire de la place aux suivants.
-Ça roule encore ces vieux machins ? S'interroge Nolet en montant dans le premier camion, un vieux GMC de l'armée Américaine, relique du débarquement de 1944. Il est rejoint par Bernac, qui se colle contre lui afin de pouvoir fermer la remorque.
Chaque caisse doit porter au moins vingt hommes afin que tous puissent monter. Avec leur équipement et leurs affaires, les soldats se retrouvent serrés comme des sardines à l'arrière des véhicules. Une fois que tous sont installés dans le premier camion, l'adjudant Bougnac, accompagné de Louis, les passe en revue.
-Comptez-vous ! Ordonne-t-il.
De l'arrière vers l'avant de la caisse, les hommes se numérotent les uns après les autres, du ''un'' jusqu'au ''vingt, fin de caisse !''
Ainsi de suite, tous les véhicules de la tête du convoi sont inspectés, et au fur et à mesure que Bougnac fait ses passages, Louis vérifie que toutes ses brebis soient rassemblées et que personne ne manque à l'appel. Une fois que toute la rame eut été vérifiée, Bougnac monte dans la cabine du camion de tête et s'installe au volant, suivi de Louis qui s'assied à la place du mort.
-C'est moi vot'chauffeur personnel, mon capitaine ! Ri bruyamment le rugueux sous-officier.
Tous les camions démarrent dans le même laps de temps, les moteurs pétaradent, les pots d'échappement hurlent et crachent des colonnes de fumée noire et poisseuse. Les châssis se mettent à trembler, les tiges de fer vibrent. Un à un, les véhicules se mettent en route.
Louis frémit. Ce sont là cinquante camions, près de neuf-cent hommes, qui vont rouler en colonne vers le nord. La route s'ouvre face à lui, direction Orléans. Cette ville qui l'a toujours mis mal à l'aise. A vrai dire, il n'en est jamais ressorti sans être pris de nausées et de maux de tête, alors qu'à coté de lui, Bougnac décroche son poste radio pour communiquer avec les conducteurs des autres camtards, tandis qu'a l'arrière, les hommes qui ne sont pas tombés dans un sommeil aussi lourd que soudain chantent des chansons paillardes ou s'échangent des biscuits ou des cartes à jouer contre des cigarettes ou des grigris. Seul Paul, à l'arrière, accoudé, contemple le paysage magnifique et terrible qui s'éloigne de lui. Ses yeux sont rivés sur le Puy de Dôme, à moitié pelé par le nuage chimique. Le géant de granit est perdu dans des nuages stagnants, semblant à bout de forces et prêt à s’effondrer sous son propre poids, menaçant de sa taille la ville de Clermont tout entière. Cet embarquement précipité, chargé de stress, cette lourde atmosphère, ce sentiment de monter vers le front, vers la mort et la misère. Tout cela lui rappelle de mauvais souvenirs. Un cauchemar vieux de dix ans, dans lequel il se sent replonger. Il fait ses adieux à son pays du regard. Jamais plus il ne le retrouvera.
Du bout des lèvres, il murmure une prière perdue.
-Capitaine Berger ?
-Oui ? Se retourne Louis, qui était occupé à lire le tracé d'itinéraire sur une carte routière datant des années soixante.
-J'suis l'adjudant Bougnac, chef de rame. Je suis l'responsable des cinquante camions que vous avez là.
-Et donc ?
-C'est vot'compagnie qui doit embarquer en premier, dans les véhicules de tête. Vous êtes bien le CDU de la première ?
-Oui, c'est ça.
-Les big boss veulent que le convoi soit constitué selon l'ordre des compagnies, et j'dois personnellement vérifier l'embarquement de chacun de mes bahuts.
-Encore une idée géniale de nos chefs, hein. Je fais embarquer mes gars.
Dans la foulée, les sections se dispersent pour monter à l'arrière des camions de transport. Les hommes s'aident à monter, font passer sacs et musettes, et s'installent sur les banc en fer vissés sur le sol en bois des camions, serrant leurs armes entre leurs cuisses pour faire de la place aux suivants.
-Ça roule encore ces vieux machins ? S'interroge Nolet en montant dans le premier camion, un vieux GMC de l'armée Américaine, relique du débarquement de 1944. Il est rejoint par Bernac, qui se colle contre lui afin de pouvoir fermer la remorque.
Chaque caisse doit porter au moins vingt hommes afin que tous puissent monter. Avec leur équipement et leurs affaires, les soldats se retrouvent serrés comme des sardines à l'arrière des véhicules. Une fois que tous sont installés dans le premier camion, l'adjudant Bougnac, accompagné de Louis, les passe en revue.
-Comptez-vous ! Ordonne-t-il.
De l'arrière vers l'avant de la caisse, les hommes se numérotent les uns après les autres, du ''un'' jusqu'au ''vingt, fin de caisse !''
Ainsi de suite, tous les véhicules de la tête du convoi sont inspectés, et au fur et à mesure que Bougnac fait ses passages, Louis vérifie que toutes ses brebis soient rassemblées et que personne ne manque à l'appel. Une fois que toute la rame eut été vérifiée, Bougnac monte dans la cabine du camion de tête et s'installe au volant, suivi de Louis qui s'assied à la place du mort.
-C'est moi vot'chauffeur personnel, mon capitaine ! Ri bruyamment le rugueux sous-officier.
Tous les camions démarrent dans le même laps de temps, les moteurs pétaradent, les pots d'échappement hurlent et crachent des colonnes de fumée noire et poisseuse. Les châssis se mettent à trembler, les tiges de fer vibrent. Un à un, les véhicules se mettent en route.
Louis frémit. Ce sont là cinquante camions, près de neuf-cent hommes, qui vont rouler en colonne vers le nord. La route s'ouvre face à lui, direction Orléans. Cette ville qui l'a toujours mis mal à l'aise. A vrai dire, il n'en est jamais ressorti sans être pris de nausées et de maux de tête, alors qu'à coté de lui, Bougnac décroche son poste radio pour communiquer avec les conducteurs des autres camtards, tandis qu'a l'arrière, les hommes qui ne sont pas tombés dans un sommeil aussi lourd que soudain chantent des chansons paillardes ou s'échangent des biscuits ou des cartes à jouer contre des cigarettes ou des grigris. Seul Paul, à l'arrière, accoudé, contemple le paysage magnifique et terrible qui s'éloigne de lui. Ses yeux sont rivés sur le Puy de Dôme, à moitié pelé par le nuage chimique. Le géant de granit est perdu dans des nuages stagnants, semblant à bout de forces et prêt à s’effondrer sous son propre poids, menaçant de sa taille la ville de Clermont tout entière. Cet embarquement précipité, chargé de stress, cette lourde atmosphère, ce sentiment de monter vers le front, vers la mort et la misère. Tout cela lui rappelle de mauvais souvenirs. Un cauchemar vieux de dix ans, dans lequel il se sent replonger. Il fait ses adieux à son pays du regard. Jamais plus il ne le retrouvera.
Du bout des lèvres, il murmure une prière perdue.