Note de la fic :
Conjuring Book #1
Par : MrBlackOrigami
Genre : Action, Fantastique
Statut : Terminée
Chapitre 1 : LES LIMBES
Publié le 28/06/2012 à 04:44:12 par MrBlackOrigami
CHAPITRE 1 : LES LIMBES
He walked along a dusty road
Up to a man and said
"Where am I, I have never been here before.."
"I'm sorry, son, you're dead."
"But there's blood in my veins,
When I'm cut there is red rain - "
"So here we are now,
Here we are now you and me.
Is it heaven?
It looks like a ghost city."
( Neutralize ft Veela - Crayen )
Je ne sentais plus le froid glacial ni la douleur irradiante. Je ne voyais plus les pâles lumières de ce monde. Je n'entendais plus le son de la bataille et celui de la guerre qui résonnait dans l'obscurité gelée. Mon corps était à mes côtés, allongé dans un linceul de neige, se vidant de sa vie tel le feu qui mourrait pour ne devenir que braises et cendres. Je voyais tout. Mon regard s'étendait sur le monde tout entier. Je ne me souciais plus de rien : je m'en allais, le coeur plus léger que jamais. Mes yeux morts me fixaient sans me regarder et je m'élevais au-dessus de ce corps qui jadis avait été mien. Je m'élevais doucement, très doucement, en contemplant cette ville qui m'avait vu naître et mourir. Chaque flocon du blizzard qui m'enveloppait m'apparaissait dans toute sa beauté géométrique, comme si le temps s'était arrêté et que le monde ne tournait plus qu'autour de moi même. Je m'éloignais de Londres et de ses infamies, de mes rêves perdus et de ma vie. Lassé de ce spectacle, je me mis à regarder le ciel, la lune, les étoiles, puis l'univers. En poursuivant mon ascension céleste, je vis un point déversant une lumière dorée et pleine de douceur. Le monde qui m'entourait n'était qu'une nuit infinie à présent. Plus je me rapprochais de cette lumière et plus je me sentais heureux. Une joie indescriptible emplissait la moindre parcelle de mon être. J'étais maintenant devant l'entrée d'un tunnel, le tunnel au bout duquel m'attendait ce soleil d'un autre monde. Avais-je mis une seconde ou bien mille ans pour l'atteindre ? Je n'aurais su le dire. Il me tardait d'arriver devant cette porte et de quitter tout ce que j'avais connu, de me perdre dans les limbes gorgés d'amour et de ne plus jamais revenir. La nuit fit place au jour, une lumière immaculée m'enveloppait et me transportait vers celle qui devait me libérer des chaînes me raccrochant à la vie. J'apercevais des silhouettes floues qui faisaient rejaillir d'anciens souvenirs à la surface de ma mémoire, telles des épaves qui réapparaissaient alors que l'astre incandescent disparaissait dans l'océan. Père, mère, était-ce vous qui m'appeliez ? Je n'ai pas eu le temps, on ne m'a pas laissé le temps de vous reconnaître. Si j'avais pu vous voir, ne serait qu'en l'espace d'un battement de cils, j'aurais été l'homme le plus serein devant la mort et le plus heureux des cadavres jonchant cette terre.
Tout s'arrêta. Brusquement, la nuit engloutit le jour et le tunnel se perdit dans l'immensité des ténèbres. La douleur et la tristesse remplacèrent la joie et l'allégresse. Un homme me faisait face, enveloppé dans une immense cape dont la couleur évoquait un poison. Son visage semblait figé, comme celui d'une statue. Il n'était en rien comparable aux autres silhouettes que j'avais aperçues. Ses cheveux argentés étaient rassemblés en une gigantesque queue de cheval qui lui arrivait jusqu'aux genoux. Ses yeux s'ouvrirent, des yeux reptiliens, verts comme une émeraude et brulants comme une épée plongée dans la lave. Il releva la tête et dévoila un sourire terrifiant qui s'élargissait au fur et à mesure qu'il s'approchait de moi. Cette créature semblait irréelle, comme si elle ne pouvait appartenir qu'à ce qui n'existait pas : ce n'était pas un homme mais un démon. Un démon qui avait été exilé ici depuis des siècles et qui attendait dans ces ténèbres, loin du tunnel étincelant. Je ne pouvais pas bouger, seulement l'observer. Il mesurait au moins deux mètres et me dominait de toute sa taille. Une main blanche et dont la peau semblait cacher des griffes m'étrangla et me souleva du sol. Je ne ressentais pas la douleur et, en y réfléchissant bien, je ne ressentais rien, absolument rien. L'habitant hantant les limbes me souleva à sa hauteur de sorte à ceux que son regard transperce mes yeux. Il dévoila des rangées de dents et hurla de rire. Un rire semblable au cri d'un millier de corbeaux pris dans une tempête, un rire de dément :
« - Elle croit qu'elle peut tous nous faucher mais cette fille doit être si naïve dans le fond, tu ne crois pas ? Allons Daniel, ne me dit pas que tu ne sais pas où tu es ! Tu as passé ta vie à lire des livres qui auraient dû être brûlés et tu n'es même pas capable d'éviter la faux sans aide ? C'est risible mon cher et sincèrement, j'ai hésité à embêter cette pauvre fille qui ne faisait que son travail. Que peux tu lire à présent ? Que voulais dire ceux qui noircissait ses pages jaunis par le temps ? Tu n'auras jamais rien su. Moi je le sais mieux que quiconque car j'y suis allé et j'y demeure. Et maintenant ? N'es tu rien d'autre que ce qui se présente à toi ? Tu vois Daniel, le simple fait que tu existes, le simple fait que ton âme soit arrivée ici est tellement divertissant que je me devais de faire en sorte que tu comprennes. Tu as compris n'est-ce pas ? Toute ta vie tu as cherché à comprendre et maintenant tu as les réponses sous les yeux. Allez, va ! Je t'en ai assez dit pour le moment... Au fait, quand tu seras redescendu, passe le bonjour à mon petit couple... Enfin surtout à lui : elle je la vois assez souvent... trop souvent... »
Il desserra son étreinte et me laissa tomber. Je me mis à chuter dans cet abyme sans fin. Des milliers d'images jaillirent devant mes yeux, tout ce qui s'était passé après ma mort, je l'avais vu : la milice massacrée, un sabre ensanglanté et un revolver qui brulait, le son d'un harmonica, le blizzard, les buildings entourés de vapeur, la ville, mon sang, un manoir gigantesque, une sorte de bloc opératoire puis finalement le noire total. Mon corps. Je le voyais étendu dans une chambre baigné d'une lumière blafarde, bardé de capteurs et de transfusions. Le noir total, un long sommeil sans rêve. Tous mes souvenirs me furent rendus.
Je me réveillai en me redressant brusquement dans mon lit. J'avais du mal à respirer, mon corps me faisait souffrir le martyre. Je jetais un coup d'oeil à celui que j'avais abandonné en cette froide nuit d'hiver : des bandages m'enserraient toute la poitrine et l'abdomen. Je devinais des cicatrices béantes à l'endroit où les carreaux m'avaient ôté la vie, pour quelque temps du moins. Combien de jours s'étaient-ils écoulés ? On perdait toutes notions avec son âme. Je m'arrêtais de penser un instant. L'âme ! Il ne pouvait n'y avoir que son nom qui incarnait cette évidence. L'inconnu de toutes les équations, ce symbole représenté par le signe de l'infini, ce facteur qui devait tout expliquer, l'unique chose qui n'était pas réel mais pouvait agir sur le plan physique, la source de la puissance décrite dans tous les grimoires, c'était l'âme ! Impossible me disais-je, ce n'était pas ce que j'aurai du trouver. Ce n'était pas un raisonnement logique et scientifique. Ce n'était que démence... et pourtant j'avais toutes les preuves maintenant. Il me fallait du temps pour digérer et assimiler tout ce que j'avais appris. La seule façon de découvrir le secret de cette science proscrite pour le royaume entier était de mourir ? La raison n'avait elle donc point sa place ici ? L'homme à la cape mauve disait vrai, c'était risible. J'avais besoin de me reposer mais avant cela, je devais savoir ce qu'il m'était arrivé. Mon... "âme", mon moi en dehors de mon corps avait tout vu mais toutes ces images m'apparaissaient floues. Qui m'avait sauvé et soigné ? Pourquoi ? Comment ?
J'entendis un léger tintement dans la pièce d'à côté. La porte de ma chambre s'ouvrit et quelqu'un entra accompagné d'une légère mélodie désordonnée de clochettes. Nous nous figeâmes à la vue l'un de l'autre. Lui devait être surpris de me voir éveillé. Moi j'étais choqué de reconnaître la personne qui se tenait devant moi : c'était l'homme qui m'avait demandé une pièce la nuit où j'avais péri. Il portait la même tenue, si ce n'est que je pouvais voir clairement son visage à présent. Il n'était toujours pas rasé et des mèches de cheveux bruns tombaient sur ses épaules de manière anarchique. La couleur de ses yeux évoquait celle des saphirs marins que les nobles et les riches bourgeois appréciaient tant. Il semblait assez jeune : je lui donnais un peu plus de vingt ans. Peut-être avions nous le même âge. Il ôta son chapeau et vint s'asseoir en face de moi. Il se mit à sourire. Sincèrement, qu'est-ce qu'ils avaient tous à sourire en regardant un type à demi-mort ?
« - Alors on se réveille enfin princesse ? railla un ténor ténébreux.
- Depuis combien de temps suis-je ici ? toussai-je en laissant difficilement couler les mots entre mes lèvres.
- Trois semaines, plus ou moins. Si tu savais comme j'ai galéré pour t'amener ici et convaincre les autres de te garder, crois-moi, tu me dois la vie mon gars !
- Je me force à comprendre mais ça n'a aucun sens... Pourquoi m'avoir sauvé ? dis-je avec un étonnement non feint.
- Hey ! Parce que tu m'as donné une pièce ?
- Franchement !
- Parce que les ennemis de mes ennemis sont mes amis mais c'est la dernière fois que je sauve un abruti comme toi. souffla il comme si ce qu'il disait était censé me faire rire.
Il me jeta un livre à la figure, mon carnet où je notais mes recherches et mes observations ainsi que mes analyses de grimoires, en langage crypté bien entendu. Je l'avais sur moi ce soir-là.
- Il faut être suicidaire pour s'intéresser à ces choses-là, ça ne te mènera à rien si ce n'est à ta perte et je peux te dire que t'es passé à ça de crever. Ta vie tenait plus qu'à un fil, c'est peu de le dire. continuait mon interlocuteur sur le ton d'un adulte qui fait la moral à un enfant.
- Mais t'es qui toi en fait ? m'exclamais-je
- Un type qui loge ici.
- Et on est où ? insistai-je
- T'as pas à le savoir. dit il sèchement.
- Oh c'est secret ? Alors comme ça on me soigne et on me jette dehors après, c'est ça ? On ne veut pas d'un opposant au régime sous son toit j'imagine? lui répondis-je sarcastiquement.
- Tsss, cherche pas à en savoir plus : moins t'en sauras et mieux ce sera pour toi. Abandonne tes recherches et part loin d'ici. Ouaip. Une personne sur un milliard pourrait maîtriser la science que t'essayes d'étudier et le royaume a une bonne raison de réduire au silence ceux qui savent ce qu'ils ne devraient pas savoir. Moi je sais ce que c'est et je suis, tout comme toi, radicalement opposé au gouvernement de ce maudit pays mais je te jure, même si tu cherches à comprendre, laisse tomber tout ça. Ca n'en vaut pas la peine, vraiment pas...
C'est en l'écoutant que je me rendais compte que j'étais bel et bien mort. Que je ne ressentais plus aucune chaleur ni aucune sensations qui m'étaient familières. En réalité je n'avais pas regagné mon corps : je ne faisais que m'y cacher.
Des milliers d'équations et de théories me venaient à l'esprit.
- Et tu... la maîtrises ? articulai-je.
- Je sais comment ça marche, mais je t'ai dit que seules quelques personnes dans ce monde savent vraiment s'en servir.
- Alors regarde ça...
Kangitsar observa Daniel, se demandant ce que ce fou pouvait bien lui montrer dans son état actuel. Il détestait ce genre de types, si naïfs. On trouve un vieux livre dans un grenier que la milice n'a pas inspecté et on se prend à rêver de puissance et de pouvoir, on pense pouvoir mettre fin à cette dictature, maîtriser la pensée et devenir le maître du monde. « Philosophie », il détestait aussi ce mot, tout le monde le haïssait ici. C'est le terme qu'employait le roi pour caractériser ses opposants de nuisibles, de sorciers, de psychopathes...
Ces pensées furent soudainement interrompues. Les yeux de Daniel se révulsèrent. Il allait retomber dans le coma ? C'était comme lorsque Zéphyre utilisait... Non. Impossible. C'était tout simplement impossible. Ce type serait capable de le faire ? Kangitsar n'eut pas le temps de mettre son bras gauche devant lui pour se protéger, une onde de choc le propulsa avec une violence inouïe contre le mur. Il voulait juste lui montrer, ah, petit con va... L'homme au chapeau se mit à rire. On accouru dans la chambre :
- Bordel Kan' ! Qu'est ce qui se passe ici !?
- ...
- Ca annonce jamais rien de bon quand tu te mets à rire...
[ Note de l'auteur : L'expérience vécue par Daniel au début de ce chapitre se nomme EFM ou NDE pour Expériences aux Frontières de la Mort ou Near Death Experience. C'est tout à fait sérieux et bien réel, je vous invite à regarder les témoignages en cherchant sur Google. Le reste du récit en revanche, n'est bien sûr que pur fiction ]
He walked along a dusty road
Up to a man and said
"Where am I, I have never been here before.."
"I'm sorry, son, you're dead."
"But there's blood in my veins,
When I'm cut there is red rain - "
"So here we are now,
Here we are now you and me.
Is it heaven?
It looks like a ghost city."
( Neutralize ft Veela - Crayen )
Je ne sentais plus le froid glacial ni la douleur irradiante. Je ne voyais plus les pâles lumières de ce monde. Je n'entendais plus le son de la bataille et celui de la guerre qui résonnait dans l'obscurité gelée. Mon corps était à mes côtés, allongé dans un linceul de neige, se vidant de sa vie tel le feu qui mourrait pour ne devenir que braises et cendres. Je voyais tout. Mon regard s'étendait sur le monde tout entier. Je ne me souciais plus de rien : je m'en allais, le coeur plus léger que jamais. Mes yeux morts me fixaient sans me regarder et je m'élevais au-dessus de ce corps qui jadis avait été mien. Je m'élevais doucement, très doucement, en contemplant cette ville qui m'avait vu naître et mourir. Chaque flocon du blizzard qui m'enveloppait m'apparaissait dans toute sa beauté géométrique, comme si le temps s'était arrêté et que le monde ne tournait plus qu'autour de moi même. Je m'éloignais de Londres et de ses infamies, de mes rêves perdus et de ma vie. Lassé de ce spectacle, je me mis à regarder le ciel, la lune, les étoiles, puis l'univers. En poursuivant mon ascension céleste, je vis un point déversant une lumière dorée et pleine de douceur. Le monde qui m'entourait n'était qu'une nuit infinie à présent. Plus je me rapprochais de cette lumière et plus je me sentais heureux. Une joie indescriptible emplissait la moindre parcelle de mon être. J'étais maintenant devant l'entrée d'un tunnel, le tunnel au bout duquel m'attendait ce soleil d'un autre monde. Avais-je mis une seconde ou bien mille ans pour l'atteindre ? Je n'aurais su le dire. Il me tardait d'arriver devant cette porte et de quitter tout ce que j'avais connu, de me perdre dans les limbes gorgés d'amour et de ne plus jamais revenir. La nuit fit place au jour, une lumière immaculée m'enveloppait et me transportait vers celle qui devait me libérer des chaînes me raccrochant à la vie. J'apercevais des silhouettes floues qui faisaient rejaillir d'anciens souvenirs à la surface de ma mémoire, telles des épaves qui réapparaissaient alors que l'astre incandescent disparaissait dans l'océan. Père, mère, était-ce vous qui m'appeliez ? Je n'ai pas eu le temps, on ne m'a pas laissé le temps de vous reconnaître. Si j'avais pu vous voir, ne serait qu'en l'espace d'un battement de cils, j'aurais été l'homme le plus serein devant la mort et le plus heureux des cadavres jonchant cette terre.
Tout s'arrêta. Brusquement, la nuit engloutit le jour et le tunnel se perdit dans l'immensité des ténèbres. La douleur et la tristesse remplacèrent la joie et l'allégresse. Un homme me faisait face, enveloppé dans une immense cape dont la couleur évoquait un poison. Son visage semblait figé, comme celui d'une statue. Il n'était en rien comparable aux autres silhouettes que j'avais aperçues. Ses cheveux argentés étaient rassemblés en une gigantesque queue de cheval qui lui arrivait jusqu'aux genoux. Ses yeux s'ouvrirent, des yeux reptiliens, verts comme une émeraude et brulants comme une épée plongée dans la lave. Il releva la tête et dévoila un sourire terrifiant qui s'élargissait au fur et à mesure qu'il s'approchait de moi. Cette créature semblait irréelle, comme si elle ne pouvait appartenir qu'à ce qui n'existait pas : ce n'était pas un homme mais un démon. Un démon qui avait été exilé ici depuis des siècles et qui attendait dans ces ténèbres, loin du tunnel étincelant. Je ne pouvais pas bouger, seulement l'observer. Il mesurait au moins deux mètres et me dominait de toute sa taille. Une main blanche et dont la peau semblait cacher des griffes m'étrangla et me souleva du sol. Je ne ressentais pas la douleur et, en y réfléchissant bien, je ne ressentais rien, absolument rien. L'habitant hantant les limbes me souleva à sa hauteur de sorte à ceux que son regard transperce mes yeux. Il dévoila des rangées de dents et hurla de rire. Un rire semblable au cri d'un millier de corbeaux pris dans une tempête, un rire de dément :
« - Elle croit qu'elle peut tous nous faucher mais cette fille doit être si naïve dans le fond, tu ne crois pas ? Allons Daniel, ne me dit pas que tu ne sais pas où tu es ! Tu as passé ta vie à lire des livres qui auraient dû être brûlés et tu n'es même pas capable d'éviter la faux sans aide ? C'est risible mon cher et sincèrement, j'ai hésité à embêter cette pauvre fille qui ne faisait que son travail. Que peux tu lire à présent ? Que voulais dire ceux qui noircissait ses pages jaunis par le temps ? Tu n'auras jamais rien su. Moi je le sais mieux que quiconque car j'y suis allé et j'y demeure. Et maintenant ? N'es tu rien d'autre que ce qui se présente à toi ? Tu vois Daniel, le simple fait que tu existes, le simple fait que ton âme soit arrivée ici est tellement divertissant que je me devais de faire en sorte que tu comprennes. Tu as compris n'est-ce pas ? Toute ta vie tu as cherché à comprendre et maintenant tu as les réponses sous les yeux. Allez, va ! Je t'en ai assez dit pour le moment... Au fait, quand tu seras redescendu, passe le bonjour à mon petit couple... Enfin surtout à lui : elle je la vois assez souvent... trop souvent... »
Il desserra son étreinte et me laissa tomber. Je me mis à chuter dans cet abyme sans fin. Des milliers d'images jaillirent devant mes yeux, tout ce qui s'était passé après ma mort, je l'avais vu : la milice massacrée, un sabre ensanglanté et un revolver qui brulait, le son d'un harmonica, le blizzard, les buildings entourés de vapeur, la ville, mon sang, un manoir gigantesque, une sorte de bloc opératoire puis finalement le noire total. Mon corps. Je le voyais étendu dans une chambre baigné d'une lumière blafarde, bardé de capteurs et de transfusions. Le noir total, un long sommeil sans rêve. Tous mes souvenirs me furent rendus.
Je me réveillai en me redressant brusquement dans mon lit. J'avais du mal à respirer, mon corps me faisait souffrir le martyre. Je jetais un coup d'oeil à celui que j'avais abandonné en cette froide nuit d'hiver : des bandages m'enserraient toute la poitrine et l'abdomen. Je devinais des cicatrices béantes à l'endroit où les carreaux m'avaient ôté la vie, pour quelque temps du moins. Combien de jours s'étaient-ils écoulés ? On perdait toutes notions avec son âme. Je m'arrêtais de penser un instant. L'âme ! Il ne pouvait n'y avoir que son nom qui incarnait cette évidence. L'inconnu de toutes les équations, ce symbole représenté par le signe de l'infini, ce facteur qui devait tout expliquer, l'unique chose qui n'était pas réel mais pouvait agir sur le plan physique, la source de la puissance décrite dans tous les grimoires, c'était l'âme ! Impossible me disais-je, ce n'était pas ce que j'aurai du trouver. Ce n'était pas un raisonnement logique et scientifique. Ce n'était que démence... et pourtant j'avais toutes les preuves maintenant. Il me fallait du temps pour digérer et assimiler tout ce que j'avais appris. La seule façon de découvrir le secret de cette science proscrite pour le royaume entier était de mourir ? La raison n'avait elle donc point sa place ici ? L'homme à la cape mauve disait vrai, c'était risible. J'avais besoin de me reposer mais avant cela, je devais savoir ce qu'il m'était arrivé. Mon... "âme", mon moi en dehors de mon corps avait tout vu mais toutes ces images m'apparaissaient floues. Qui m'avait sauvé et soigné ? Pourquoi ? Comment ?
J'entendis un léger tintement dans la pièce d'à côté. La porte de ma chambre s'ouvrit et quelqu'un entra accompagné d'une légère mélodie désordonnée de clochettes. Nous nous figeâmes à la vue l'un de l'autre. Lui devait être surpris de me voir éveillé. Moi j'étais choqué de reconnaître la personne qui se tenait devant moi : c'était l'homme qui m'avait demandé une pièce la nuit où j'avais péri. Il portait la même tenue, si ce n'est que je pouvais voir clairement son visage à présent. Il n'était toujours pas rasé et des mèches de cheveux bruns tombaient sur ses épaules de manière anarchique. La couleur de ses yeux évoquait celle des saphirs marins que les nobles et les riches bourgeois appréciaient tant. Il semblait assez jeune : je lui donnais un peu plus de vingt ans. Peut-être avions nous le même âge. Il ôta son chapeau et vint s'asseoir en face de moi. Il se mit à sourire. Sincèrement, qu'est-ce qu'ils avaient tous à sourire en regardant un type à demi-mort ?
« - Alors on se réveille enfin princesse ? railla un ténor ténébreux.
- Depuis combien de temps suis-je ici ? toussai-je en laissant difficilement couler les mots entre mes lèvres.
- Trois semaines, plus ou moins. Si tu savais comme j'ai galéré pour t'amener ici et convaincre les autres de te garder, crois-moi, tu me dois la vie mon gars !
- Je me force à comprendre mais ça n'a aucun sens... Pourquoi m'avoir sauvé ? dis-je avec un étonnement non feint.
- Hey ! Parce que tu m'as donné une pièce ?
- Franchement !
- Parce que les ennemis de mes ennemis sont mes amis mais c'est la dernière fois que je sauve un abruti comme toi. souffla il comme si ce qu'il disait était censé me faire rire.
Il me jeta un livre à la figure, mon carnet où je notais mes recherches et mes observations ainsi que mes analyses de grimoires, en langage crypté bien entendu. Je l'avais sur moi ce soir-là.
- Il faut être suicidaire pour s'intéresser à ces choses-là, ça ne te mènera à rien si ce n'est à ta perte et je peux te dire que t'es passé à ça de crever. Ta vie tenait plus qu'à un fil, c'est peu de le dire. continuait mon interlocuteur sur le ton d'un adulte qui fait la moral à un enfant.
- Mais t'es qui toi en fait ? m'exclamais-je
- Un type qui loge ici.
- Et on est où ? insistai-je
- T'as pas à le savoir. dit il sèchement.
- Oh c'est secret ? Alors comme ça on me soigne et on me jette dehors après, c'est ça ? On ne veut pas d'un opposant au régime sous son toit j'imagine? lui répondis-je sarcastiquement.
- Tsss, cherche pas à en savoir plus : moins t'en sauras et mieux ce sera pour toi. Abandonne tes recherches et part loin d'ici. Ouaip. Une personne sur un milliard pourrait maîtriser la science que t'essayes d'étudier et le royaume a une bonne raison de réduire au silence ceux qui savent ce qu'ils ne devraient pas savoir. Moi je sais ce que c'est et je suis, tout comme toi, radicalement opposé au gouvernement de ce maudit pays mais je te jure, même si tu cherches à comprendre, laisse tomber tout ça. Ca n'en vaut pas la peine, vraiment pas...
C'est en l'écoutant que je me rendais compte que j'étais bel et bien mort. Que je ne ressentais plus aucune chaleur ni aucune sensations qui m'étaient familières. En réalité je n'avais pas regagné mon corps : je ne faisais que m'y cacher.
Des milliers d'équations et de théories me venaient à l'esprit.
- Et tu... la maîtrises ? articulai-je.
- Je sais comment ça marche, mais je t'ai dit que seules quelques personnes dans ce monde savent vraiment s'en servir.
- Alors regarde ça...
Kangitsar observa Daniel, se demandant ce que ce fou pouvait bien lui montrer dans son état actuel. Il détestait ce genre de types, si naïfs. On trouve un vieux livre dans un grenier que la milice n'a pas inspecté et on se prend à rêver de puissance et de pouvoir, on pense pouvoir mettre fin à cette dictature, maîtriser la pensée et devenir le maître du monde. « Philosophie », il détestait aussi ce mot, tout le monde le haïssait ici. C'est le terme qu'employait le roi pour caractériser ses opposants de nuisibles, de sorciers, de psychopathes...
Ces pensées furent soudainement interrompues. Les yeux de Daniel se révulsèrent. Il allait retomber dans le coma ? C'était comme lorsque Zéphyre utilisait... Non. Impossible. C'était tout simplement impossible. Ce type serait capable de le faire ? Kangitsar n'eut pas le temps de mettre son bras gauche devant lui pour se protéger, une onde de choc le propulsa avec une violence inouïe contre le mur. Il voulait juste lui montrer, ah, petit con va... L'homme au chapeau se mit à rire. On accouru dans la chambre :
- Bordel Kan' ! Qu'est ce qui se passe ici !?
- ...
- Ca annonce jamais rien de bon quand tu te mets à rire...
[ Note de l'auteur : L'expérience vécue par Daniel au début de ce chapitre se nomme EFM ou NDE pour Expériences aux Frontières de la Mort ou Near Death Experience. C'est tout à fait sérieux et bien réel, je vous invite à regarder les témoignages en cherchant sur Google. Le reste du récit en revanche, n'est bien sûr que pur fiction ]