Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

En Quarantaine


Par : Endless
Genre : Horreur
Statut : C'est compliqué



Chapitre 3


Publié le 04/07/2008 à 14:50:53 par Endless

CHAPITRE QUATRIEME - Survie

Partie I

- Ah ! Ooooh... Putain... YES !

Je venais de m'effondrer par terre, la jambe avec laquelle je tapais sur le sol était résolument enfouie, un étage en dessous. J'avais dû m'égratigner un peu la jambe de cette façon, mais c'est si peu de choses... Je prie le seigneur pour que cela soit une véritable issue... Il n'y a pas plus de lumière en dessous, ma jambe n'atteint pas le sol. Et si c'était le vide ? Et si ce n'était rien de plus qu'un immense trou ? Je mourrais. Ravaler ma salive fut un réflexe, et remonter ma jambe à mon niveau en fut un autre. J'entendrais un grand écho si je gueule dans le vide.

- AAAAAAAAAAAAAALLOOOOOOOOOOOOOOOO ! IL Y A QUELQU'UN ?

Il y avait bien un écho. Mais même en gueulant dans un tunnel, on obtient une sorte d'écho c'est normal. La résonance me disait que ce n'était pas le vide en dessous... mais c'est si approximatif. Bien entendu c'était un silence des plus poignardants aussi là dessous. Il n'y avait pas le moindre signe de vie. Mais si les types qui sont ici fonctionnent dans le même état d'esprit que moi, ils n'auraient pas répondu à mon appel au cas où quelqu'un m'aurait entendu. Chacun fonctionne individuellement je suppose ici, le but de chacun est de sortir et de survivre.
Gab... Marco... je suis sur que vous allez réussir à vous en sortir tout autant que moi. J'ai presque l'impression de me mentir en parlant ainsi de Marco... putain, je suis pas persuadé qu'il survivra dans ce noir. C'est incroyable d'être ici, cette sensation est unique, elle est monstrueuse. Tout est crainte.
Si j'ai ce virus, il ne se manifeste toujours pas, à moins que ce que je vis soit déjà une hallucination. Réfléchir m'empêche d'avancer.
J'attrapais les bords du trou que j'avais créé, et je commençais à me laisser pendre dans ce "vide" hypothétique. J'étirais le plus possible mes pointes de pieds en espérant effleurer un sol, les muscles de mes bras faisaient leur maximum et... une crampe me vint... je vais lâcher prise !!

- AILLE ! AH NOOOOOOOOOOOOOOOON !

Mon cri s'arrêta lorsque je m'étais déjà écrasé sur le sol, à quelques mètres en dessous, la chute ne fut pas longue et j'eus la chance d'atterrir sur mes pieds et mes mains, qui devaient saigner un peu. Le pire c'était mes poignets, qui n'étaient pas du tout préparés sachant que j'avais aucune estimation possible de la longueur de la chute, j'avais affreusement mal aux poignets... En tâtant un peu les alentours, il n'y avait aucun doute, j'étais bien dans un réseau souterrain, un mètre de large ce couloir. Avec du recul, sortir d'ici n'était pas extrêmement difficile, n'importe quel acharné aurait pu réussir. Faut donc que je reste sur mes gardes, je ne pense vraiment pas être le seul à errer dans l'obscurité, et mon seul outil pour repérer quelqu'un est mon ouïe.
En y repensant, j'suis un véritable boulet de gueuler comme un débile depuis tout à l'heure... Ma position est immédiatement révélée si quelqu'un est pas loin.
Mais saloperie... je vis dans l'incertitude. Pour moi cet endroit est un simple réseau souterrain menant à différentes salles où sont enfermés les malades, mais c'est peut-être bien plus complexe que cela. J'ai de plus en plus de mal à respirer, faut pas que je me focalise là dessus, une nouvelle crise est vite arrivée... J'enlevais ce qu'il restait de ma montre de ma chaussure, pour l'attacher autour de mes doigts à la façon d'un poing américain, et je commençais à avancer... silencieusement. La seule chose que je pouvais faire en avançant c'était d'être le plus silencieux possible, tout en écoutant le moindre... bruit... Je viens d'entendre quelque chose c'est certain. C'était très lointain, c'était même pas devant... moi... quelque part autour. Dans un autre couloir peut-être... un petit grognement humain, un poltron aurait fait la même chose... Je serrais la mâchoire, tout en étirant mon visage avec un tas de grimaces... c'est le seul moyen que je trouvais pour me détendre... Je continuais à avancer, indéfiniment. J'eus finalement trouvé une intersection au bout de 5 minutes de marche... Mais si le bruit venait de là ? Le type n'avait pas l'air frais. Oh putain... rien à foutre, faut trouver un chemin, je l'ai bien tué l'autre. Je prenais ce chemin vers la gauche, au bout d'environ 5 mètres, je m'arrêtais, me collant contre le mur, écoutant le plus finement possible... Rien à signaler apparement. Je continuais alors à... DERRIERE MOI ! Dieu du Ciel, quelqu'un me suit ? Je me fais des illu... NAN ! Il y a des bruits derrière moi... PUTAIN ! PUTAIN ! Allez, faut courir ! J'y vois rien, si y a un mur je m'assomme. Attends ! Attends ! Ca se raproche ! On me course, faut que je m'arrête pour le surprendre et que j'lui mette un coup en pleine face !! Voilà, STOP, viens enflure ! Le poing serré et levé, j'attendais que les bruits deviennent très proches pour frapper un grand coup. Ma respiration s'accélère, j'ai si peur putain de merde... Approche, approche, ALLEZ VIENS ! Pourquoi il n'y a plus de bruit ? J'ai encore des larmes à pleurer... c'est ignoble. Je me fais pas des films à ce point ! Ces bruits je les imaginais pas putain. La folie commence déjà à me ronger... Il n'y avait rien derrière ? Je recommence à courir, allez vite, c'est sur qu'il y avait quelqu'un. AAAAAAAAAAAAAH ! Des pas derrière, encore des pas, à rythme très rapide !

- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHH !!

JE PANIQUE !! ENCORE, JE PANIQUE ! J'AI BESOIN D'AIDE, AU SECOURS, ON VA ME TUER ! CE CRI, J'AI PAS PU M'EN EMPÊCHER, JE SUIS PLUS DECOUVERT QUE JAMAIS.
C'est le mal qui me domine, je suis dominé par cette horreur, la glace de la mort, et la mort me chatouille le dos, victorieusement. MON DIEU... Cette machination diabolique... je suis à bout... psychologiquement, je suis déjà mort. Pourquoi ? Parce que le Diable me suit avec un sourire, il n'a aucune respiration, mais il jouit de ma terreur la plus absolue...
COURS PAUL ! FUIS LE DIABLE ! Mais je délire complètement !!

BRRRAAAAAAAC

- GYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHH ! OUCH !

Cette chute de quelques mètres... Je suis tombé où ? En Enfer ? Ma tête a cogné le sol, c'est ma fin qui approche. Je dois me... relever !! Je me battrais jusqu'à la fin contre cette terreur !! Ce sol, c'est du carrelage... Quoi ? Je suis dans une cellule de dingue ?

- NAAAAAN !

- Je vais t'arracher les tripes, sodomite de merde !

MON DIEU ! QUI A DIT CA ? Je suis tombé où bordel de merde ? Quelqu'un est à 2 mètres grand maximum.

- Nan, me touche pas, nan ! PFAAAA !

Je pris un pied dans la hanche, c'est UN TARE !

- J'VAIS TE TUER J'T'AI DIT, PEQUENAUD DE MERDE !

- Nan !

J'enchainais les droites et les gauches les plus violentes que j'ai jamais mises, la hargne la plus terrible me prenait. L'air caressait mes poings, qui étaient de véritables comètes s'écrasant dans sa figure. Ce terme, "instinct de survie" prenait toute son ampleur. Ce dingue tentait de m'attraper, et mon pied gauche tapait le plus fort possible dans son estomac. Je commençais à vouloir lui casser le crâne à coups de boule, mais de rapides maux de têtes me vinrent.

- CASSE-TOI !

Chaque poing que je lui mettais claquait, j'étais un marteau qui s'abattait sur son crâne, le cadran de ma montre s'enfonçait dans ses joues. J'avais pris le dessus. Finalement, j'avais senti avoir percé sa joue droite avec le cadran de ma montre et en ramenant le poing vers moi, quelque chose s'arrachait avec, de la chair j'imagine. Allez Paul, démonte le, fais-en de la purée, j'attrape son crâne avec mes deux mains et je ris, AHAH JE RIS FORT ! Avec mes deux mains qui serrent son crâne, elles l'envoient cogner à toute vitesse sur mon genou. Et son front sur mon genou...

- AHAHAHAH ! AHAH ! AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHAHAHAHAHAHAHAHAHAH ! Tu es humilié, ton crâne est aussi solide qu'une coquille d'oeuf. Si je voulais je pourrais aller chercher ta cervelle et te la faire bouffer !

Il était par terre, cet enculé. Je sautais sur sa figure, les pieds joints, ce qui entraina une chute, comme lorsqu'on fait la terrible erreur de sauter sur un ballon de football. ACHEVE ! ACHEVE ! T'AS LE CRÂNE EN MORCEAUX ! Une énorme puanteur vint envahir la salle, la puanteur de l'autre fois, celle du rat...

- URGHHHHHHHHH !
- BLARGH !!!!!!!

J'avais vomi, mais il n'y avait pas que moi qui avait eu ce haut-le-coeur.

- Il y a encore quelqu'un ici ? UUUURGH ! Que je lui montre ce que c'est d'avoir le front fracturé ?
- NOOOOOOOOOOOOOOOON !! TU L'AS TUE !!

Oui, il y avait bien quelqu'un encore pour se frotter à ma haine. Cette vermine chialait, grosse pédale, c'est toi qui me fais vomir.

- Pourquoi tu pleures ? Hein sous-merde ? Pourquoi t'as un comportement de femmelette ? On est ici pour survivre, pas pour jouer les sentimentaux, viens que j't'explose la cervelle.
- NOOOOOOOOOOOOON ! PAR PITIE !!
- Je n'ai aucune compassion à ton égard, tu n'es rien de plus qu'un asticot sur ma route.

Cet imbécile, j'avais précisément repéré sa position, et je commençais par lui foutre un upercut en pleine tête, cependant exécuté avec mon pied.

- J'espère que t'avais la langue entre les dents quand tu l'as pris, petite pute.
- URGH ! URGH ! URGH ! URGH !

Soit il étouffait, soit il s'était tranché la langue avec ses propres dents, soit le coup avait créé un véritable déséquilibre mental à son égard. Ces bruits étaient ceux d'un malaise intense.

- UUUUURGH... URGH !

Ah putain il souffre... ah... non, ne meurs pas... Tu ne voulais pas me faire mal, qu'est ce qui m'as pris... Calme toi Paul... FRENESIE ! Mon comportement avait été meurtrier, il aurait pu être celui du pire psychopathe ! Qu'est ce que j'ai fait !? Pourquoi j'ai été aussi ignoble avec ces mecs ? Peut-être qu'ils étaient gentils, peut-être qu'ils espéraient comme moi sortir et retrouver leur famille à qui ils tiennent tant. Mon dieu, j'ai fait quoi ? MON DIEU !

- NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !!

Je m'effondrais en pleurant, cognant ma tête contre le sol... pendant ce temps l'homme qui pleurait était encore en train d'agoniser douloureusement. J'attrapais ses mains.

- Pardonnez-moi ! Je ne vaux plus rien, je ne suis qu'un déchet... Par pitié, je ne veux même plus être excusé du carnage que je viens de faire... PUTAIN MAIS JE MERITE MÊME PLUS DE SORTIR D'ICI !
- URGH ! Ecoute moi... Il faut que... URGH ! Il faut que tu te calmes, je vais survivre au coup que tu m'a infligé... URGH ! Et je suis assez... URGH ! habitué à l'odeur...
- Vous êtes conscient !? Par pitié, TENEZ LE COUP !
- Ma bouche est pleine de sang, et ma langue est très endommagé... UUUUURGH ! Mais je vais tenir car tu es encore lucide. URRRRRGH !
- Crache ! Crache tout ce sang ! Je ne sais pas comment t'aider. Je n'ai jamais eu ce comportement durant toute ma vie, j'avais atteint la limite de l'humanité, j'étais devenu un monstre... J'aurais tout fait pour survivre...
- J'en ai rien à foutre, tu viens de tuer mon meilleur ami... Je le connaissais depuis 25 ans, il me serait impossible de survivre à l'heure actuelle en le vengeant. Ecoute-moi...
- Ne parlez pas trop. URGH !
- Je ne te dirais que le stricte nécessaire... URGH ! Tu es là parce que tu es suspecté d'avoir un virus... Darnoy... est une ville de cinglés... J'estimerais le nombre de personnes internées ici à plus d'une centaine...
- Bordel... de merde.
- C'est une sorte d'HP fantôme, notre but est de crever ici. Ils ne t'ont pas exécuté quand tu étais à la surface car le moindre contact est un risque de contamination, et une balle ou quelque chose qui... percerait ton corps dégagerait le virus dans l'atmosphère, il est volatile, et s'introduit par toutes les voies respiratoires.
- Par quoi se manifeste t-il ?
- Les premiers symptômes sont ceux que tu viens de montrer, une hyper-activité destructrice, une violence déraisonnable. A son stade final, UURGH ! cette hyperactivité est constante.
- Y a du monde ici qu'a atteint le stade final ?
- C'est monstrueux, je pense que plus de la moitié des cas enfermés ici ont atteint le stade final.
- Et au bout de combien de temps, on atteint ce stade ?
- Je n'en sais rien, ça fait 3 semaines que je suis ici, et je n'ai eu que quelques pointes de violence. PFUUH !
- Vous perdez beaucoup de sang.
- Ne craignez rien, je tiendrais. Je connais quelqu'un dans le souterrain qui aura énormément d'informations à vous révéler, c'est de lui que je tiens ce peu d'informations. Il saura vous informer sur tout je pense.
- Comment c'est possible ?
- C'était un chercheur, il a été contaminé lors d'un protocole de test d'un remède pour ce virus. Il a côtoyé le gouvernement de Darnoy, tu vas connaitre un tas de choses... URGH ! si tu le rencontres.
- Ou puis-je le trouver ?
- Je te fais la courte échelle, tu remontes, tu passes à gauche, tu continues tout droit, tu prends la deuxième intersection à droite, tu continues tout droit, et en touchant le plafond à un endroit de ce couloir, il y aura un bloc à enlever de son support, il est dans cette cellule. Avant d'entrer dis que c'est Stan qui t'envoie, tu diras aussi le nombre 212. C'est d'accord ? Allez... UUURGH !

L'homme se levait sans doute, à sa voix j'aurais dit qu'il avait une quarantaine d'années, comment faisait-il pour être là depuis trois semaines ? Il n'est pas mort de faim apparemment, voilà qui me rassurait. Ses paroles étaient calmes, je suis pas tombé sur un cinglé...

- Maintenant que tu as tué mon ami, ça signifie que que je me retrouve tout seul ici sans la possibilité de monter à la courte échelle. Quand tu te seras entretenu avec Eric, revenez vite ici avec des médocs si possible.
- Vous en avez !?
- On a beaucoup de choses à t'expliquer, dépêche toi.

Il attrapait ma jambe et commençait à me faire la courte échelle. Je trouvais immédiatement le trou de la sortie au plafond et m'agrippais sur la gauche. De nouveau dans le couloir, je lui adressais quelques paroles réconfortantes, en me tournant vers le trou béant que je ne voyais même pas.

- Je ne pourrais jamais vous remercier suffisamment, je reviens d'un instant à l'autre.

Je commençais à marcher, et à me rappeler de ses indications. Saloperie de couloir, après ce que je viens de vivre, mentalement il est tout de suite assimilé à la peur.
J'enterrais petit à petit mon amour propre. J'avais tué deux personnes en deux jours, dont un innocent, et de la façon la plus haineuse possible... cette pensée était omniprésente... Voilà la deuxième intersection à droite... et après 300 bons mètres de marche en caressant le plafond du couloir, je sentais cette délimitation du bloc de calcaire.

BRAAAC

- Qui vas là ?
- J'suis envoyé par Stan, le nombre 212 !
- Ahahah... ça sent le néophyte. Entre.

Partie II

Néophyte ? Ai-je l'air d'un con ?

- Dorénavant, contente toi de dire "212", ça ira ok ?
- Vous pouvez m'aider à monter s'il vous plait ?
- Démerde toi mon vieux.
- J'ai plus de forces dans les bras, j'suis exténué, j'ai déjà galéré pour soulever le bloc de ta cellule...
- Quelle tafiole, attrape ma main.

C'était une grosse main sèche, celle d'un homme manuel, un bricoleur qui attrapait la mienne et qui m'emporta d'un coup vers le haut. J'aurais jamais imaginé une main comme ça pour un scientifique du gouvernement.

- Merci beaucoup, vous êtes Eric ?
- Remet le bloc à sa place, on n'est sur de rien. C'est bien moi, enchanté.
- Monsieur, j'ai quelque chose d'extrêmement important à vous dire. Je suis ici depuis moins de 24 heures et...
- Ca se voit.
- ... et j'ai rencontré Stan par hasard, dans le noir et dans la panique. J'ai paniqué et j'suis devenu complètement bestial...
- Oh putain...
- J'ai pas tué Stan, mais par contre son ami est mort...
- Putain...
- Je ne sais quoi dire, Stan m'a dit que j'étais sous l'emprise du virus.
- Si c'est le cas, tu es pardonné, c'est dégueulasse de dire ça, mais ce n'est pas totalement ta faute.
- J'ai blessé Stan sur la fin de ma crise, il a pris un coup de pied dans le menton, il saigne de la bouche, sa langue est pas intacte apparemment. Il faut lui venir en aide rapidement. Mais il a encore la forme hein.
- T'as fait fort... J'aimerais pas te voir criser.

J'entendis des claquements, comme des bouteilles de verre qui s'entrechoquent.

- Attends-moi ici je reviens.
- D'accord.
- Le nouveau code est 532.
- Hein ? Euh... ok.

Ouf... Il connaissait maintenant mes pêchés. Je l'entendis descendre dans le couloir puis courir. Cet homme avait une voix douce, on aurait dit qu'il avait apprivoisé les lieux. Et il avait du matériel, médicaments, peut-être de la nourriture. Où est-ce qu'il a pu trouver ça ? Je suis à nouveau seul, pas pour longtemps mais ça me suffit à faire remonter la pression. Je vais jeter un coup d'oeil, ou plutôt un coup de mains dans les alentours pour voir si je peux trouver un truc à bouffer. La salle est minuscule, 2 mètres carré je pense.Par terre il y a quelques cartons, dont un rempli de bouteilles. De la bière !? Boire une bière, quel bonheur, je lui demanderais quand il reviendra, en plus ma gorge est sèche, je ne sécrète plus aucune salive, la seule chose que je pourrais avaler est ma langue... Sa réaction me parait bien louche, son ami est mort et il n'a pas réagi tant que ça, pareil pour Stan, et là il part, me laisse tout seul sans craintes ici... Pourquoi je pense immédiatement à un complot ? Je suis trop paranoïaque... Ca me jouera des tours. J'ai enfin trouvé des alliés et je trouve encore le moyen de stresser...
A moins que je sois naïf, j'ai tué leur ami et ils m'intègrent aussi facilement ? Impossible, si on avait tué Marco ou Gab et que je l'apprenais, j'aurais cogné le mec, même s'il était lucide. Si ils arrivent à deux pour me taper alors que je suis dans ce vieux cul de sac, c'en est fini de moi, faut que je quitte cette salle immédiatement. J'attendrai Eric dans le couloir. Stan m'a pourtant dit qu'il ne pouvait pas monter, qu'il fallait forcément quelqu'un qui reste seul dans la salle en bas pour faire la courte échelle à celui qui voulait sortir... C'est peut-être un mensonge, il y a peut-être un autre moyen de sortir, et de toute façon, si il doit forcément rester quelqu'un dans la salle, ça veut dire qu'il faudra se relayer en permanence, mais quand on aura trouvé la sortie, le dernier qu'était dans cette salle y restera vu qu'il ne pourra pas monter tout seul... En gros, il faut que j'évite le plus possible de redescendre dans cette cellule pour faire la courte échelle à un type.
Des bruits de pas en approche...

- Hé, c'est bien Eric ? chuchotais-je. Allez réponds, me fais pas flipper mec. REPONDS !

Pas de réponse, il est pourtant bien dans le même couloir que moi, ces pas sont à une dizaine de mètres. Putain, putain !




C'est pas lui.

- Gab, Marco, Stan, Eric ? Hé j'te parle.

Et soudain, c'est la panique qui revint, rien ne la déclencha particulièrement. Juste la peur que cette personne que j'aurais vu, si un minimum de lumière nous éclairait, se mette purement et simplement à disjoncter, en un quart de seconde, à être pris de la frénésie du virus. En même temps que je pense cela, ça peut arriver à tout moment, il peut d'un coup se mettre à courir sur moi...
Bon c'est bon, je remonte dans la petite salle en vitesse, vite. Allez, pousse sur tes bras Paul, il peut encore m'attraper les jambes, vite, VITE ! Voilà j'y suis, remettre le bloc sur son support en vitesse et s'asseoir dessus, ALLEZ VITE BORDEL !

BRAC !

C'est fait... Putain...

- Numéro 212.
- Quoi ? C'est qui ?
- Ouvre en vitesse.

Mais le code a changé, c'est 532 maintenant. A tous les coups il rôdait dans le couloir quand j'suis rentré ici pour la première fois, il a entendu que le code d'entrée était 212. Mais il s'est fait piéger, voilà l'utilité de changer de code à chaque fois. Faut pas lui ouvrir.

- Tu vas ouvrir ?

Putain... j'ai un taré sous les fesses, pourvu qu'Eric revienne vite, je pourrais pas le prévenir que ce type est un inconnu. Je ne répondais pas. Quand on parle du loup...

- Qui es tu ? Dégage.

C'était la voix d'Eric.

- Dégage. Je t'ai entendu dire "Numéro 212". Tu n'es pas le mec que je viens de rencontrer. Ouch !

MERDE ! Faut que je lui vienne en aide rapidement, mais comment j'allais reconnaitre qui était l'inconnu dans ce noir ? Si je me trompais et que je tapais sur Eric ? Je suis en position trop délicate pour rentrer dans le combat, et pourtant je dois me racheter de l'horreur que je viens de faire.

- Putain, OUCH ! T'es coriace, petit... PFOUCH !

Il était en position défavorable. Pas le choix, je déplaçais le bloc de pierre et sautait dans le vide, mes pieds cognèrent la tête de quelqu'un, ce qui entraina mon déséquilibre, ma tête cognant sur le mur du couloir, je m'écrasais par terre.

- T'es qui Eric !? T'es lequel !?
- Là !!

Putain, je tapais dans le vide, pour finalement atteindre la nuque de quelqu'un. C'était une chance sur deux.

- C'est toi Eric ?
- Ou... OUCH ! Oui ! Abruti !
- Non c'est moi, l'écoute pas !!

Oh non c'était pas le moment de créer ce dilemme sournois...

- Le code !!
- 212 !
- 532 !!
- SALE ENCULE !!

L'imposteur était bien celui que j'avais frappé à la nuque. Je continuais de plus belle, il était coincé entre nous deux. Je lui mettais des béquilles dans les hanches pour provoquer sa chute et il se retourna sur moi...

- Aaaaaaaargh ! Ah... ah... ah... pfiou...

Ah... ah... il m'a eu ! Ce coup de coude, je peux plus respirer, il l'a bien placé... Je peux plus me battre... Nan ! Il se rue sur moi ! J'y vois rien, au secours ! Au secours ! J'vais crever !

- OUCH !

Il... m'enchaine !!

- E... Eric!! A... l'aide ! Déglingue le !
- Dégage de là PUTAIN !

L'homme m'était passé par dessus. Je suppose qu'Eric venait de lui mettre son pied dans la nuque. Notre ennemi n'était pas malin, il s'était accroupi sur moi pour me tabasser mais du coup il s'était retrouvé dos à Eric qui en avait profité pour shooter dans sa tête.

- Merci, tu m'as...
- Pardon, pousse toi, faut que je l'achève !

Il me passa par dessus, je restais par terre.

PAF ! PAF ! PAF ! PAF !

- C'en est fini pour toi. Merci de m'être venu en aide petit.
- C'est moi qui te... remercie de m'avoir... sauvé la vie. J'ai encaissé les coups... en pleine figure pendant quelques secondes. J'aurais crevé si t'étais pas là.
- Fais gaffe désormais, c'est pas la première fois qu'un rôdeur tente ce genre de chose. Ce mec avait atteint le stade final. Je lui ai fait péter la boite crânienne en l'envoyant sur les murs. Il se relèvera plus.
- Merci...

Il était seul, je pense que l'hypothèse du complot est levée pour le moment, mais j'ai encore une épée de damocles au dessus de la tête tant que j'suis pas de nouveau à la surface de la Terre. Et ne jamais connaitre le visage de ses amis, jamais le visage de ses ennemis, j'vais devenir taré...

- Rassure moi, c'est pas une crise de violence ?
- Non, ne t'inquiètes pas. Je suis là depuis trois semaines moi aussi. L'état final se manifeste au bout de deux mois en moyenne. Remontons pour parler de ça.
Il passait d'abord, puis je montais à mon tour, je m'asseyais dans un coin de la salle, lui dans un autre.

- Tu veux une bière ?
- Dieu Merci ! Bien sur que j'en veux une. Où vous avez trouvé ça ? Elles sont pas périmées ?
- T'as rien à craindre, ça vient de la surface.
- Quoi ?
- Je vais t'expliquer. Avant toute chose, comment t'es arrivé ici ?
- J'suis venu faire le con avec des potes, il y a une entrée dans l'ancienne zone industrielle. On a eu des contacts avec un rat malade et un mec qui avait le virus. En sortant, les flics étaient là pour nous attendre.
- Ouais c'est la seule entrée officielle. Personnellement je l'ai jamais retrouvée. Cet endroit est d'une complexité déconcertante.
- Le type qu'on a rencontré était libre, il se cachait dans le bâtiment en face du hangar, en tout cas il avait trouvé la sortie. Je l'ai tué, j'pense qu'il avait atteint le stade final... J'ai pas envie de croire que j'suis contaminé.
- C'est très dur psychologiquement en effet. Tu peux tirer un trait sur toute la vie que tu aurais voulu mener, excuse moi d'être dur, mais tu ne vivras sans doute pas le Nouvel An, en tout cas, ton état t'empêchera de le fêter.
- Alors pourquoi sortir ? Ca servirait à quoi ? Autant se suicider BORDEL DE MERDE !! J'ai eu des contacts avec ma famille... c'est possible qu'ils soient contaminés ? Et les flics, pourquoi ils prenaient pas plus de mesures quand ils nous ont emmené ?
- Tu l'as vu le gros musclor là ? L'autre connard ?
- Oui.
- Ta famille sera placée elle aussi en Quarantaine si c'est pas déjà fait...
- MAIS ! MON FRERE A 8 ANS !

Cette poussée d'adrénaline me mit les larmes aux yeux, en fait je pleurais une fois de plus... Je venais d'apprendre ce qui ne faisait que renforcer ma culpabilité... C'est en faisant cette connerie d'aller dans un hangar que j'ai créé les funérailles de ma famille. Mon petit frère... Il va devenir un psychopathe !!

- BORDEL !!!
- Ca importe peu le gouvernement. De même pour tous les flics qui ont eu un contact avec toi. Quand ils t'attendaient pour t'embarquer, ils n'étaient pas au courant du risque de contamination, le chef de la police leur a juste dit de patrouiller ici et d'attendre ton retour pour t'embarquer. La police est contenue dans le mensonge, ils ne sont au courant de rien. Les fuites d'informations sont dangereuses, quelqu'un qui est suspecté de détenir une information disparait immédiatement de la circulation, et on lui règle son compte.
- Mais... non... ils ne peuvent pas faire ça... Simon !! Il n'a rien demandé à personne !
- En effet c'est une honte...
- Mais c'est impossible ! Il a 8 ans ! Se retrouver ici... T'imagine la peur d'un gosse ici ? Déjà que je meurs de peur... Et ma mère !!
- T'as des amis ici ?
- Oui, deux. Ils ont été contaminés en même temps que moi.
- Sortir... c'est vrai, pourquoi voulons nous sortir ?.. Je pense que ça a une simple explication, tant que nous vivons nous sommes des hommes, même malades. Nous sommes faits pour vivre dans la lumière, je pense que les conditions dans lesquelles nous sommes agravent nos cas. La folie est vite arrivée lorsqu'on est seul ici.
- J'en étais proche déjà au bout de 10 bonnes heures seul ici.
- Tu développes rapidement une schyzophrénie aigue... c'est tout à fait normal. Sache que vous devrez bientôt me tuer, mon état s'agrave, ma dernière crise remonte à hier, j'ai eu de la chance de tomber sur personne.

Mon dieu... Ce virus est décidément venu des Enfers pour être aussi immonde.

- Et la bouffe, les médocs, t'as eu ça où ?
- Il y a un passage...
- Quoi !?
- Il y a un passage, c'est pas nous qui l'avons créé, ça devait être une bande d'acharnés, dans une petite cellule à un niveau très supérieur. Au plafond un trou a été creusé dans le calcaire, vu ta carrure tu passeras jamais, le trou est petit, il amène à une sorte de sous-sol boueux. Ce sous-sol est complètement fermé, tu pourras seulement trouver une fenêtre de 30 cm sur 80 cm qui t'amène elle même dans une cave inondée, ensuite tu dois monter un escalier, t'arrives dans un hall d'immeuble abandonné. Tu es libre à partir de là. Libre de mourir.
- Comment ça ?
- C'est désormais impossible de sortir.
- Pourquoi ça !?
- La zone a été abandonnée, un petit groupe de 5 immeubles. Le problème c'est que ceux qui ont créé cette sortie se sont retrouvés à l'état final...
- Et merde...
- Comme tu dis, tout ce qu'ils ont su faire c'est un carnage dans la résidence, l'évènement est resté entre les mains du gouvernement, il n'y a pas un seul survivant dans l'immeuble, il n'est même pas nettoyé, les corps sont encore à leur place. Les 4 immeubles alentours ont donc été sinistrés, par risque de contamination massive. Si tu sors ta tête de cet immeuble, t'es mort.
- Pourquoi ?
- Une garnison importante de snipers est installée dans tous les postes observatoires alentours, autrement dit dans les immeubles sinistrés. Ils veillent 24h/24 pour être certains que la sortie n'est pas utilisée.
- Si vous avez réussi ce parcours du combattant, pourquoi vous êtes revenus ?
- On l'a pas réussi, on a juste pris ce qu'il restait dans un appartement de la résidence. On est jamais sortis.
- Et qu'est ce que tu comptes faire maintenant ?

Il y eut un silence assez long, j'étais relativement calme...

- Je veux sortir avant d'avoir atteint l'état final, il n'est plus si loin.

Partie III

La conversation que je venais d'avoir avec Eric m'avait chamboulé... Et le pire dans tout ça c'est que je connaissais l'existence d'une sortie désormais alors que mon petit frère et ma mère allaient se retrouver enterrés vivants ici, sans jamais rien trouver, sans jamais sortir de leur cellule de départ...

- Naaaaaaaaaaaan ! Puuuuuuutain... Naaan ! Maman... Simon...
- Calme toi mon vieux.
- Tu imagines ce que je vis ?
- Je suis dans la même situation.
- Et tu trouves encore l'envie de sortir alors que ta famille périra à jamais dans cet Enfer ?
- Pourquoi tu as combattu tes ennemis jusqu'à maintenant ? Parce que tu es un homme et que tu veux vivre, écoute moi tu n'es responsable de rien. Tu ne savais rien... C'est le gouvernement qui veut ça, c'est pas ta faute.
- Mais en plus il est possible qu'ils ne soient pas contaminés !
- C'est ça qui fait le plus mal... Rien ne prouve que le contact que tu as eu avec eux les a contaminés... J'ai encore des choses à t'apprendre.
- J'en ai rien à foutre.
- Allons, sèche tes larmes, tu es fatigué...
- Mais comment tu peux prendre ça aussi à la légère ? Sale connard ! Ma famille est foutue, c'est pas un simple chagrin !
- Donc tu ne veux pas savoir pourquoi Darnoy est devenu un mini-état totalitaire et entièrement fermé ?
- Simplement parce que les habitants de la ville sont des imbéciles et qu'ils ont voté cela.
- Tu es encore bien un enfant. Croire à des choses pareilles... Tu penses vraiment qu'une ville déclarerait son indépendance et pourrait prospérer ainsi ? Bien sur que non. On n'est plus au Moyen-Age.
- Raconte au lieu de te foutre de ma gueule !
- Darnoy n'a pas déclaré son indépendance.
- QUOI !?
- C'est les Etats-Unis qui ont déclaré l'indépendance de Darnoy. Et puis installer des murs, c'est si inutile, empêcher à la fois l'émigration et l'immigration... Le gouvernement américain a appris l'existence du virus, c'est lui qui a immédiatement pris la décision de nous enfermer, de nous piéger tous, de nous abandonner. De nous laisser pourrir avec le pire virus imaginable. Mais nous sommes entretenus avec de fausses informations, une économie déroutante et une politique des plus bâclées. Nous sommes voués à la maladie, tous depuis que nous sommes enfermés ici.
- Dieu... du ciel.

Tout s'éclaircissait, cette ville complètement dingue à tous les niveaux, tout ce que je ne comprenais pas. J'en avais la chair de poule, depuis 5 ans nous sommes comme dans le Titanic, voués à la mort représentée par ce virus. Cette faucheuse qui nous court après... Et si je parvenais à sortir, je contaminerais un tas de personnes... Tous ces facteurs qui faisaient que j'avais envie de vomir en pensant à ma liberté... Et cependant mon unique but ici était de sortir... C'est comme si ce qui nous poussait à exister, était quelque chose qui nous était en fait insupportable... Ai-je mérité une telle torture psychologique ?.. Moralement je suis déjà mort...

- Ce souterrain est en faveur de Darnoy, il permet à la population de ne pas mourir à une vitesse incroyable. Nous sommes enfermés dans une ville enfermée. A la limite je pourrais dire que le mur de la ville est complètement inutile, mais comme tu l'as dit toi même, certains malades sont à la surface... Ce n'est qu'une question de temps avant que la ville entière ne soit annihilée par le virus. C'est à ce moment que les murs se révèleront utiles pour la population américaine, alors bien moins menacée.
- Bien moins menacée tu dis ? Tu veux dire qu'il y a quand même une infime chance d'arriver de l'autre côté du mur ?
- Je n'en sais rien. Peut-être que le virus pourra arriver de l'autre côté tout seul. Mais trêve de bavardages, tu es fatigué je me trompe ?
- Je suis fatigué mais dormir ici me parait impossible.
- Je te demande de nous faire confiance, tu vas prendre le relais.
- C'est à dire ?
- C'est à ton tour d'être seul dans la cellule, tu vas faire la courte échelle à Stan et tu dormiras dans cette cellule.
- Mais...
- On reviendra te chercher dans 6 heures. Ca sera alors à moi de prendre le relais. Quand tu sortiras Stan te montrera la sortie, vous irez dans la résidence fouiller quelques appartements pour trouver des provisions.
- D'accord, jure moi que tu viendra prendre le relais.
- Je vois que tu as déjà imaginé les situations où l'on te trahirait, tu as raison, je te le jure. Quand vous irez dans la résidence, ne t'approche pas des fenêtres, une balle est vite arrivée. Même si quelques snipers ici n'ont pas réellement suivi de formation, le risque zéro n'existe pas.

Eric avait réussi à me mettre en confiance, cependant dormir dans ce trou, à un niveau inférieur... Et si un taré passait par là et tombait dans la cellule, je serais tout seul contre lui dans mon état ? Pas le choix, j'avais trouvé des amis pour m'en sortir, je devais me restreindre aux mêmes risques qu'eux pour m'en sortir. Cependant j'avais pris une résolution, je ne redescendrais pas une deuxième fois dans cette cellule, après le relai que j'allais faire. Et si l'on me forçait à y retourner, je partirais tout seul, je les laisserais dans leur problématique du relai, le système où quelqu'un périt forcément dans la cellule.

Nous redescendions dans le couloir, toujours rempli du même silence, qui faisait contraste avec le peu de chaleur humaine que je venais de recevoir. Rompre le silence déclarait notre position, tout le monde pense ainsi, c'est pour ça que le silence du souterrain est immortel. Nous n'avions croisé personne sur la route, cela ne m'avait pas empêché de stresser.

- Stan, c'est Eric. Le nouveau prend le relai.
- Attention j'arrive.

Je descendais dans la cellule, complètement envahie par l'odeur que dégageait la charogne de l'homme que j'avais tué. Mon dieu, comment j'allais pouvoir respirer là dedans ? Comment je pouvais rester 6 heures là dedans ? J'allais en crever ! Mais il ne fallait pas réfléchir, j'étais dans la cellule.

- Viens Stan, je te fais la courte.

Son pied vint se poser sur mes deux mains et il attrapa le rebord du trou, pour finalement se hisser dans le couloir.

- Merci Paul, repose toi bien.
- Ca va être impossible mais merci quand même.

Je les entendais partir et j'étais à nouveau seul.


- UUUURGH ! BLAAAAAAARGH !

Putain j'aurais pas dû prendre une bière, l'odeur et la bière, c'est la déjection assurée... J'allais uriner dans un coin de la pièce et m'installer dans le coin opposé, je trébuchais sur le cadavre du pauvre défunt... L'ODEUR... était...

- UUUUURGH !

... plus terrible que jamais. Je vais asphyxier si je ne m'évade pas un minimum de cette atmosphère... Il faut que je m'endorme. Je rentrais mon visage dans mon tee-shirt, l'odeur était atténuée, cette fois mêlée à l'odeur de transpiration que dégageait mon corps crasseux. Me vider l'esprit, dormir, c'est tout ce qui compte... Dor...mir...


Dormir...

... Paul, appelé à la barre pour le meurtre de son petit frère et de sa mère. Paul, la version des faits mise en place par les experts est simple. Tu as tabassé ton frère dans sa chambre, ta montre t'a servie de poing américain, tu as arraché la joue droite de ton petit frère suite à de violents coups de poing dans son visage. On a retrouvé ce morceau de chair entre deux touches du clavier de son ordinateur. Ta mère a entendu des bruits, elle s'est précipitée dans la chambre de ton frère, c'est à ce moment que tu lui as mis un coup de pied en pleine tête, elle fut prise de convulsions synonymes de traumatisme profond, sans aucune pitié tu l'a attrapée par la tête pour la faire cogner quatre fois contre les murs de la chambre. Les tâches de sang qu'on a retrouvé sont identifiables comme nées suite à des chocs violents contre le mur. Ecoute moi Paul, je me lève pour toi... Je viens devant toi, regarde moi dans les yeux, tu t'imagines encore être un être humain après avoir fait ça ? Tout le monde dans ce tribunal a envie de vomir rien qu'en regardant ta face. Je veux juste que tu meurs dans d'atroces souffrances, je ne trouve même pas les mots pour te décrire, tiens je vais te montrer ce que c'est de se frotter à plus fort que soi, prend ça dans ta gueule...

- NAAAAAAAAAAAN ! OUUUUCH !

Que... hein ? J'ai... pas tué... NAN ! J'suis... dans un souterrain j'ai pas...

- OUCH ! Arrête de me taper... monsieur... le juge !! Hein quoi ?

Mais c'est un cauchemar ! Je viens juste de faire un cauchemar mais il y a quelque chose de réel là dedans...

- PFOUCH ! AAAAAAAAAAAAAAAAH LES COUPS SONT REELS ! A L'AIDE !

Un cinglé, un cinglé, un malade, MON DIEU, il est rentré dans la cellule pendant mon sommeil. Il est en train de me tuer !!

- Nooooooooooooon !! Naaaaaaan !!

J'allais devoir encore me montrer tel un animal, me battre pour ma survie... encore hanté par un ignoble cauchemar... Je lui fonçais dessus, tête baissée, je prenais des coups dans les côtes... des coups... vraiment violents... Je me frottais à plus fort que moi... Je...

- OUCH...

Je m'effondrais... Je n'ai plus le courage de vivre sans la lueur d'un espoir... Je veux mourir pour ce que j'ai fais à ma famille...

- TUE MOI ! VAS Y ! OUCH...

J'étais roué de coups... allongé... je pris deux coups dans la tête... adieu... adieu... Oooh... OUCH... le principal... c'est que je ne meurs pas innocent...

- Maman... ARGH... Simon... je vous ai toujours... aimé... NAAAAAAAAN...

Mes larmes les plus chaudes coulaient le long de mes joues... je me vidais de mes dernières larmes avant d'être emporté par la mort... tandis que la chose qui me frappait ne faisait qu'augmenter sa brutalité... la douleur ne baisse pas d'intensité... Eric, Stan... le dilemme du relai est levé... j'y ai mis fin... vous pourrez vous en sortir tous les deux... sans...

- Hé ! Y a du mouvement ! Dépêche, saute !! Y a de la baston ! Paul t'es où ?
- Gh...
- Il est K.O ! Saloperie, tu vas crever pédé !

Je... ne... sentais plus... les coups... Mais... je les entendais encore... On ne me frappait plus.

PAF ! PLAF ! CRAAC ! PLAF !

- Vas-y !! Déchaine toi sur cette saloperie !!
- C'est bon, c'est bon, il est mort ! PAUL ! REPONDS MOI !
- Je... meurs...
- Paul, c'est Stan et Eric, l'autre cinglé est mort ! tu vas survivre ! Ce ne sont que des coups après tout !
- Il a l'air dans un sale état, fais moi la courte échelle, je vais chercher du matos de premier secours !
- Dépêche toi. Tiens bon mec.

La notion... du temps n'existe plus...

- ARGH...

Il est déjà revenu...

- Bois ça ! C'est du sucre, ça va te faire du bien ! Tu as des plaies ?
- Tête... Côtes...
- Enlève son tee-shirt, ah ouais je sens ! Il est ouvert sur le front ! PUTAIN DE MERDE !
- Quelques plaies sur les côtes, c'est assez superficiel à ce niveau. Putain, je reconnais pas la bouteille de désinfectant.
- Celle là, magne toi !
- ARGH...

Ca pique... mais... je vais tenir...

- Il perd beaucoup de sang, mais il va survivre, putain faire du premier secours dans l'obscurité et dans la puanteur...
- Merci...
- Ecoute mec, remet toi vite sur pieds, tu veux la revoir la lumière non ? Tu y vas avec Stan, alors dès que t'es remis vous y allez. Tiens bon !

Merci... ils m'aident, je ne suis pas si inexistant, j'ai l'air important à leurs yeux... j'ai pourtant tué... leur ami... mais j'existe toujours apparemment... je quitte le cauchemar que je viens de vivre... petit à petit... je vais remonter à la surface... je vais emprunter cette faille... ce chemin qui me ramènera sur la terre ferme... alors Paul...

- Paul... TIENS BON...
- Ahah, tu te parles à toi même ? Tu vois que tu as encore envie de vivre.

Peut-être que je vais revoir une journée comme je les aiment. Peut-être que nous pourront ouvrir une fenêtre et humer l'air frais... purger ces poumons, gonflés à bloc de cette pestilentielle odeur de mort... Peut-être que mes yeux vont enfin reservir à quelque chose... peut-être que je verrais le visage de Stan... peut-être... que l'incertitude qui me force à dire "peut-être" n'existera plus. Voilà pourquoi je trouve encore l'envie de vivre.


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