Note de la fic :
[Confédération][3] Semper et Ubique
Par : Gregor
Genre : Science-Fiction, Action
Statut : C'est compliqué
Chapitre 22
Publié le 12/12/2013 à 18:22:24 par Gregor
Les lourds protocoles du Palais imposèrent à l'escouade de patienter plus d'une trentaine de minutes supplémentaires. L'accession récente de Siegfried au poste suprême, sa jeunesse, et la volonté tenace de réforme qu'il chérissait n'avaient pas suffit à venir à bout de la pompe ordonnancé qui régnait entre les murs de béton et de verre de l'écrin du pouvoir central. Flinn, habitué à ce cérémoniel particulier, goûtait à cette joie sans nom du temps perdu, inutile, assis sur la rampe du transporteur. Guillhem, à ses cotés, qui semblait réfléchir avec une concentration toute relative, l'interpella.
- Et maintenant, commandant ?
- Encore un peu de patience, Guillhem. On va nous envoyer quelqu'un d'ici peu.
L'adjudant soupira.
- Vous ne pensez pas que nous avons déjà trop attendu ? Après les caprices de l'amiral Trent, nous …
- Assis, et silence ! Aboya Flinn.
Guillhem ne broncha pas. L'officier reprit, d'une voix calme.
- Nous avons une captive avec nous. Nous sommes un groupe de vingt personne. Pensez bien que la garde rapprochée du Très Saint Magister s'assure que nous ayons pattes blanches avant d'entrer. Personne ne prendrait le moindre risque de commettre une bévue sur ce plan là.
- L'affaire du Commandus Magnus Keller, je présume ?
- Son assassinat a effectivement motivé des critères de vigilance supplémentaire. Mais s'il n'y avait que ça …
Flinn se garda d'ajouter quelque mots que ce soit. Il avait discuté avec Siegfried avant son départ, en tête à tête. Et cet entretien lui avait révélé avec une clarté frappante combien la position du Très Saint Magister était périlleuse. Un cercle fermé de privilégiés et de confidents connaissaient l'étendue du problème de la délicate et friable légitimité de Siegfried, et tous se sentaient investis d'un devoir de silence autour de celle-ci. Naïvement, Flinn espéra que le triomphe dont il était l'instigateur redorerait le blason jeune et pourtant écorné du maître suprême de la Confédération. Une naïveté qui l'étonnait, et qui le plongeait dans d'étranges paradoxes ayant pour traits communs la question du bien , du pouvoir, de la justice et de la loyauté.
Un homme à l'impeccable tenue crème brodée d'or se présenta sur le tarmac. La richesse des tissus qu'il portait laissait deviner avec une certaine aisance une armure de défense fine et soigneusement arrangée sur un corps encore jeune, docile et bien entretenu. Guillhem se leva d'un bond, Flinn se contenta de suivre le mouvement, sans précipitation, fendu d'un large sourire et d'un salut aussi amical que sincère.
- Sergent Do Santos, c'est un plaisir de vous revoir.
- La même chose pour moi, commandant Flinn.
Les deux soldats se serrèrent la main. Guillhem les dévisagea, avant que le Naneyë ne reprenne la parole.
- Sergent, je vous présente l'adjudant de Choire, qui a rejoint notre compagnie sur Prime.
- Adjudant, répondit poliment le sous-officier.
- Sergent...
- Commandant, le Très Saint Magister tenait à vous faire savoir qu'il était disposé à vous recevoir maintenant.
- Bien.
Le jeune sous-officier ouvrit la marche, suivit de Flinn, Guillhem et du reste des Externes, qui avaient vu dans l'arrivée de l'homme la délivrance face à une attente fastidieuse. Tandis qu'ils franchissaient les portes extérieurs du gigantesque bâtiments, Flinn estima nécessaire d'expliquer points de la situation à Guillhem.
- Le sergent Dos Santos est l'héritier d'une dynastie militaire, tout comme vous, adjudant. Il sert les forces de sécurité du Palais depuis quelques années, et j'ai le loisir de le rencontrer à chacune de mes venues. J'ai servi un temps auprès de son père, un fameux Inquisiteur qui officie souvent loin de la Terre.
- C'est votre aide de camp ?
- La situation pourrait le laisser croire, mais c'est simplement l'habitude et l'amabilité du Très Saint Magister à attacher à ses visiteurs réguliers un guide en particulier qui a noué entre nous une relation amicale.
- Un maître et son disciple ?
- Ne dites pas n'importe quoi, adjudant...
Flinn avait assorti cette dernière réponse d'un sourire féroce, que Guillhem trouvait tout aussi étrange qu'adapté.
- Commandant, si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre.
- Bien sûr, sergent.
Le sous-officier se dirigea vers une entrée terne et monolithique, le pas souple. Flinn s'amusa à penser que le jeune homme était un cyborg, mais qu'étrangement les protocoles du palais le noyait sous un flot de tissus et de décorations qui le rendait presque plus humain.
Une salle. Un couloir. Une autre salle, un autre couloir. Le défilement rapide des lieux chargea Guillhem d'une émotion lourde, noble, qu'il traînait au même rythme que ses pas sur l'albâtre du sol. Personne n'osait plus parler, tandis que le sergent Eutrope Do Santos menait le convoi vers sa destination finale. Une dernière série de porte se dressa au détour d'un énième couloir. Deux lourds battants plus noirs que la nuit, contre lesquels le sous-officier frappa fermement. Un instant passa, et les portes s'ouvrirent.
Le hall, majestueux, se découpait comme un vide entre trois murs hauts striés des marbrures d'une pierre rouge et d'aplats blancs et torturés. Une fenêtre, couvrant l'intégralité d'un mur, s'ouvrait sur un jardin sommaire, peuplé de bambous qui s'étageaient le long d'un bassin carré, illuminé, et dont les reflets bleutés jouaient sur les pourtours d'une cour étroite. La nuit venait déposer sur ce décor sec mais monumental son aura de mystère, rendant les rares objets et meubles des lieux aussi somptueux que s'ils avaient été d'or et de pierres précieuses, transformant leurs bois et leurs métaux en un matériau rutilent, irréel, presque divin.
- Très Saint Magister, l'escouade de la Confrérie des Externes, sous le commandement honoraire de monseigneur Flinn, au grade commandant des Saintes Armées et de Noble Clerc, annonça d'une voix grave le sergent Dos Santos.
La foule des habituels jeta son regard, comme une seule bête aux dizaines d'yeux, vers le groupe qui pénétrait dans l'un des lieux les plus prestigieux de la Confédération. Généraux, aide de camp, administratifs, courtisans, marchands, inquisiteurs, cybernautes, moines et serviteurs, tous composaient la toile vivante des fidèles, et tendaient sur le mur un jeu d'ombres où se détachaient une expression, une posture, comme figé dans le temps. La dévotion se lisait dans cette mise en scène, dévotion toute relative où la puissance des militaires venaient trancher avec l'humilité des plus chétifs serviteurs, et dont l'harmonie seule découlait de la présence d'un individu à part. Au milieu de ce décor, la silhouette élancée du Magister Siegfried semblait s'anoblir à chaque instant, porté par un courant invisible qui venaient à caresser la magnificence de son armure, de sa cape, de ses bottes, tout autant que celle de ses traits fin et protégé de l'invariable courroux du temps.
Lorsqu'il vit ses invités, il traversa le vaste espace de la salle où il patientait depuis de longues minutes, et leur adressa un sourire à la fois sincère et discret, ciselé par des années de travail dans ce théâtre de protocole et convenance, sans pour cela qu'il soit moins honnête ou faux que s'il l'adressait à un groupe de connaissance perdues de vues depuis de nombreuses années.
- Le Dieu-Machine vous bénisse.
- C'est un honneur de vous rencontrer, Très Saint Magister. Le Dieu-Machine vous bénisse également, entama Flinn.
- Commandant.
Flinn s'immobilisa dans un parfait salut militaire, avant de poser un genoux à terre.
- Relevez vous, commandant. Votre loyauté me touche, mais vous méritez de rester debout. Vous avez tant fait pour la Confédération, commandant.
- Je n'ai fait qu'assurer ma mission.
- Et vous l'avez exécuté avec brio, commandant.
Le Magister s'écarta, et toisa avec insistance le seule femme du groupe. Lourdement menotté, Miki O'Hara se tenait raide, dardant son regard méprisant vers le jeune homme qui incarnait le pouvoir qu'elle haïssait.
- La captive … Du très bon travail, commandant. Vous et vos hommes méritaient une récompense à la hauteur de la tâche. Vous avez libéré Barnard Prime des démons et chimères qui cette personne tentait d'imposer par la force et le chaos.
- Ainsi donc, le Très Saint Magister de l'Imposture envoie ses sbires plutôt que de faire le travail lui-même ?
Une myriade de canons se braquèrent sur Miki O'Hara. Elle ne cilla pas. Le Magister Sigfried, désarçonné un court instant, se baissa à son niveau.
- Je ne devrais même pas prendre la peine de m'adresser à une félonne dans votre genre. Comprenez bien, madame, que ce qui vous arrive actuellement n'est pas de mon ressort, mais du votre.
- Des paroles ! Railla-t-elle. De belles paroles, et sans …
- Faites la taire, souffla Siegfried.
Les deux Naneyë qui escortait la captive la giflèrent avec force. Un éclat de sang fusa dans la pièce, Miki se retrouva inconsciente.
- Elle sera puni pour sa traîtrise, commenta le Magister.
- Il sera fait selon votre désir, Très Saint Magister, répondit Flinn.
- Les gardes du Palais vont la conduire dans sa cellule. Sa vue est une insulte à notre pouvoir.
Quatre imposants cyborgs se détachèrent de la foule des fidèles, et embarquèrent sans ménagement Miki. La tête ballante, la bouche ouverte, elle laissa derrière elle la trace à demi-effacé de son sang.
- L'escouade qui a permis à Barnard Prime d'être débarrassée de cette menace sera remercié comme il se doit. Je réglerai les détails plus tard, mais soyez assurés, messieurs, que vos efforts n'auront pas été vains. Pour le moment, mes serviteurs s'occuperont de vous. Nous organiserons un triomphe où vous aurez toute votre place.
Les soldats s'inclinèrent respectueusement. Lorsqu'ils se redressèrent, Flinn décocha un long regard à l'adresse à Randir. Il se retira alors silencieusement, suivit par tous les hommes qui composaient le groupe. Guillhem s'apprêtait à les suivre, mais Flinn le retint.
- Que la Confédération soit témoin du courage de ces hommes. Qu'elle soit également attentive à ce qui attend cette traîtresse. Allez, et répandez ma parole là où vous porterons vos pas.
La formule consacrée invita, aussi sûrement que si Siegfried l'avait dit de manière direct, la foule des fidèles à se retirer. Dans un concert de tissus froissés et de bruissement mécaniques, serviteurs comme officiers se courbèrent et reculèrent, jusqu'à laisser tomber sur eux le claquement étouffé de la porte retombant sur le hall. Seuls, les trois hommes restant se regardèrent en silence, de longues secondes. Siegfried se rapprocha davantage, et posa sa main sur l'épaule du Naneyë. La situation relevait d'un certain comique, car Flinn dépassait d'une bonne trentaine de centimètre la stature de son maître. Mais ce simple geste, plus que la reconnaissance du Magister, révélait le lien amicale et ancien qui unissait les deux individus. Flinn avait vu grandir le Magister, et avait d'une certaine façon participé à son éducation. Réciproquement, c'était le père du Magister, Le Commandus Magnus Gregor Mac Mordan, qui avait fait de Flinn un confédéré accompli.
- Et si nous passions aux choses sérieuses ? nota Siegfried.
- Avec plaisir, commenta Flinn.
- Et maintenant, commandant ?
- Encore un peu de patience, Guillhem. On va nous envoyer quelqu'un d'ici peu.
L'adjudant soupira.
- Vous ne pensez pas que nous avons déjà trop attendu ? Après les caprices de l'amiral Trent, nous …
- Assis, et silence ! Aboya Flinn.
Guillhem ne broncha pas. L'officier reprit, d'une voix calme.
- Nous avons une captive avec nous. Nous sommes un groupe de vingt personne. Pensez bien que la garde rapprochée du Très Saint Magister s'assure que nous ayons pattes blanches avant d'entrer. Personne ne prendrait le moindre risque de commettre une bévue sur ce plan là.
- L'affaire du Commandus Magnus Keller, je présume ?
- Son assassinat a effectivement motivé des critères de vigilance supplémentaire. Mais s'il n'y avait que ça …
Flinn se garda d'ajouter quelque mots que ce soit. Il avait discuté avec Siegfried avant son départ, en tête à tête. Et cet entretien lui avait révélé avec une clarté frappante combien la position du Très Saint Magister était périlleuse. Un cercle fermé de privilégiés et de confidents connaissaient l'étendue du problème de la délicate et friable légitimité de Siegfried, et tous se sentaient investis d'un devoir de silence autour de celle-ci. Naïvement, Flinn espéra que le triomphe dont il était l'instigateur redorerait le blason jeune et pourtant écorné du maître suprême de la Confédération. Une naïveté qui l'étonnait, et qui le plongeait dans d'étranges paradoxes ayant pour traits communs la question du bien , du pouvoir, de la justice et de la loyauté.
Un homme à l'impeccable tenue crème brodée d'or se présenta sur le tarmac. La richesse des tissus qu'il portait laissait deviner avec une certaine aisance une armure de défense fine et soigneusement arrangée sur un corps encore jeune, docile et bien entretenu. Guillhem se leva d'un bond, Flinn se contenta de suivre le mouvement, sans précipitation, fendu d'un large sourire et d'un salut aussi amical que sincère.
- Sergent Do Santos, c'est un plaisir de vous revoir.
- La même chose pour moi, commandant Flinn.
Les deux soldats se serrèrent la main. Guillhem les dévisagea, avant que le Naneyë ne reprenne la parole.
- Sergent, je vous présente l'adjudant de Choire, qui a rejoint notre compagnie sur Prime.
- Adjudant, répondit poliment le sous-officier.
- Sergent...
- Commandant, le Très Saint Magister tenait à vous faire savoir qu'il était disposé à vous recevoir maintenant.
- Bien.
Le jeune sous-officier ouvrit la marche, suivit de Flinn, Guillhem et du reste des Externes, qui avaient vu dans l'arrivée de l'homme la délivrance face à une attente fastidieuse. Tandis qu'ils franchissaient les portes extérieurs du gigantesque bâtiments, Flinn estima nécessaire d'expliquer points de la situation à Guillhem.
- Le sergent Dos Santos est l'héritier d'une dynastie militaire, tout comme vous, adjudant. Il sert les forces de sécurité du Palais depuis quelques années, et j'ai le loisir de le rencontrer à chacune de mes venues. J'ai servi un temps auprès de son père, un fameux Inquisiteur qui officie souvent loin de la Terre.
- C'est votre aide de camp ?
- La situation pourrait le laisser croire, mais c'est simplement l'habitude et l'amabilité du Très Saint Magister à attacher à ses visiteurs réguliers un guide en particulier qui a noué entre nous une relation amicale.
- Un maître et son disciple ?
- Ne dites pas n'importe quoi, adjudant...
Flinn avait assorti cette dernière réponse d'un sourire féroce, que Guillhem trouvait tout aussi étrange qu'adapté.
- Commandant, si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre.
- Bien sûr, sergent.
Le sous-officier se dirigea vers une entrée terne et monolithique, le pas souple. Flinn s'amusa à penser que le jeune homme était un cyborg, mais qu'étrangement les protocoles du palais le noyait sous un flot de tissus et de décorations qui le rendait presque plus humain.
Une salle. Un couloir. Une autre salle, un autre couloir. Le défilement rapide des lieux chargea Guillhem d'une émotion lourde, noble, qu'il traînait au même rythme que ses pas sur l'albâtre du sol. Personne n'osait plus parler, tandis que le sergent Eutrope Do Santos menait le convoi vers sa destination finale. Une dernière série de porte se dressa au détour d'un énième couloir. Deux lourds battants plus noirs que la nuit, contre lesquels le sous-officier frappa fermement. Un instant passa, et les portes s'ouvrirent.
Le hall, majestueux, se découpait comme un vide entre trois murs hauts striés des marbrures d'une pierre rouge et d'aplats blancs et torturés. Une fenêtre, couvrant l'intégralité d'un mur, s'ouvrait sur un jardin sommaire, peuplé de bambous qui s'étageaient le long d'un bassin carré, illuminé, et dont les reflets bleutés jouaient sur les pourtours d'une cour étroite. La nuit venait déposer sur ce décor sec mais monumental son aura de mystère, rendant les rares objets et meubles des lieux aussi somptueux que s'ils avaient été d'or et de pierres précieuses, transformant leurs bois et leurs métaux en un matériau rutilent, irréel, presque divin.
- Très Saint Magister, l'escouade de la Confrérie des Externes, sous le commandement honoraire de monseigneur Flinn, au grade commandant des Saintes Armées et de Noble Clerc, annonça d'une voix grave le sergent Dos Santos.
La foule des habituels jeta son regard, comme une seule bête aux dizaines d'yeux, vers le groupe qui pénétrait dans l'un des lieux les plus prestigieux de la Confédération. Généraux, aide de camp, administratifs, courtisans, marchands, inquisiteurs, cybernautes, moines et serviteurs, tous composaient la toile vivante des fidèles, et tendaient sur le mur un jeu d'ombres où se détachaient une expression, une posture, comme figé dans le temps. La dévotion se lisait dans cette mise en scène, dévotion toute relative où la puissance des militaires venaient trancher avec l'humilité des plus chétifs serviteurs, et dont l'harmonie seule découlait de la présence d'un individu à part. Au milieu de ce décor, la silhouette élancée du Magister Siegfried semblait s'anoblir à chaque instant, porté par un courant invisible qui venaient à caresser la magnificence de son armure, de sa cape, de ses bottes, tout autant que celle de ses traits fin et protégé de l'invariable courroux du temps.
Lorsqu'il vit ses invités, il traversa le vaste espace de la salle où il patientait depuis de longues minutes, et leur adressa un sourire à la fois sincère et discret, ciselé par des années de travail dans ce théâtre de protocole et convenance, sans pour cela qu'il soit moins honnête ou faux que s'il l'adressait à un groupe de connaissance perdues de vues depuis de nombreuses années.
- Le Dieu-Machine vous bénisse.
- C'est un honneur de vous rencontrer, Très Saint Magister. Le Dieu-Machine vous bénisse également, entama Flinn.
- Commandant.
Flinn s'immobilisa dans un parfait salut militaire, avant de poser un genoux à terre.
- Relevez vous, commandant. Votre loyauté me touche, mais vous méritez de rester debout. Vous avez tant fait pour la Confédération, commandant.
- Je n'ai fait qu'assurer ma mission.
- Et vous l'avez exécuté avec brio, commandant.
Le Magister s'écarta, et toisa avec insistance le seule femme du groupe. Lourdement menotté, Miki O'Hara se tenait raide, dardant son regard méprisant vers le jeune homme qui incarnait le pouvoir qu'elle haïssait.
- La captive … Du très bon travail, commandant. Vous et vos hommes méritaient une récompense à la hauteur de la tâche. Vous avez libéré Barnard Prime des démons et chimères qui cette personne tentait d'imposer par la force et le chaos.
- Ainsi donc, le Très Saint Magister de l'Imposture envoie ses sbires plutôt que de faire le travail lui-même ?
Une myriade de canons se braquèrent sur Miki O'Hara. Elle ne cilla pas. Le Magister Sigfried, désarçonné un court instant, se baissa à son niveau.
- Je ne devrais même pas prendre la peine de m'adresser à une félonne dans votre genre. Comprenez bien, madame, que ce qui vous arrive actuellement n'est pas de mon ressort, mais du votre.
- Des paroles ! Railla-t-elle. De belles paroles, et sans …
- Faites la taire, souffla Siegfried.
Les deux Naneyë qui escortait la captive la giflèrent avec force. Un éclat de sang fusa dans la pièce, Miki se retrouva inconsciente.
- Elle sera puni pour sa traîtrise, commenta le Magister.
- Il sera fait selon votre désir, Très Saint Magister, répondit Flinn.
- Les gardes du Palais vont la conduire dans sa cellule. Sa vue est une insulte à notre pouvoir.
Quatre imposants cyborgs se détachèrent de la foule des fidèles, et embarquèrent sans ménagement Miki. La tête ballante, la bouche ouverte, elle laissa derrière elle la trace à demi-effacé de son sang.
- L'escouade qui a permis à Barnard Prime d'être débarrassée de cette menace sera remercié comme il se doit. Je réglerai les détails plus tard, mais soyez assurés, messieurs, que vos efforts n'auront pas été vains. Pour le moment, mes serviteurs s'occuperont de vous. Nous organiserons un triomphe où vous aurez toute votre place.
Les soldats s'inclinèrent respectueusement. Lorsqu'ils se redressèrent, Flinn décocha un long regard à l'adresse à Randir. Il se retira alors silencieusement, suivit par tous les hommes qui composaient le groupe. Guillhem s'apprêtait à les suivre, mais Flinn le retint.
- Que la Confédération soit témoin du courage de ces hommes. Qu'elle soit également attentive à ce qui attend cette traîtresse. Allez, et répandez ma parole là où vous porterons vos pas.
La formule consacrée invita, aussi sûrement que si Siegfried l'avait dit de manière direct, la foule des fidèles à se retirer. Dans un concert de tissus froissés et de bruissement mécaniques, serviteurs comme officiers se courbèrent et reculèrent, jusqu'à laisser tomber sur eux le claquement étouffé de la porte retombant sur le hall. Seuls, les trois hommes restant se regardèrent en silence, de longues secondes. Siegfried se rapprocha davantage, et posa sa main sur l'épaule du Naneyë. La situation relevait d'un certain comique, car Flinn dépassait d'une bonne trentaine de centimètre la stature de son maître. Mais ce simple geste, plus que la reconnaissance du Magister, révélait le lien amicale et ancien qui unissait les deux individus. Flinn avait vu grandir le Magister, et avait d'une certaine façon participé à son éducation. Réciproquement, c'était le père du Magister, Le Commandus Magnus Gregor Mac Mordan, qui avait fait de Flinn un confédéré accompli.
- Et si nous passions aux choses sérieuses ? nota Siegfried.
- Avec plaisir, commenta Flinn.