Note de la fic :
L'Echiquier de Papier
Par : Roi_des_aulnes
Genre : Réaliste
Statut : Terminée
Chapitre 1 : Journal Rouge, p1.
Publié le 28/02/2012 à 19:17:12 par Roi_des_aulnes
« 8 décembre 2006,
Ici commence mon journal.
Tout à l'heure, la police est venu chez moi. Ils s’inquiètent de la disparition de Sani. Je ne sais ce qu'elle est devenue, moi non plus. Je pensais qu'elle ne voulait plus me parler, mais apparemment, c'est beaucoup plus grave. Les gendarmes m'ont cru quand je leur ait dit que je n'avais rien à voir avec tout cela. Je m'inquiète, mais je ne peux rien faire. C'est aussi peut-être pour cela que j'écris.
Non. Ce n'est sans doute par seulement pour cela. Arrêtons nous quelques instants, le temps d'exposer ce projet. Ce journal aura deux fonctions : raconter ce que je suis, et devenir ce que je veux être.
C'est du moins ce que j'espère. Ce n'est pas ma première tentative. Depuis que je suis tout petit, j'ai pensé tenir un journal. Quand j'avais quinze ans, et que je tombais amoureux, j'écrivais dans de longs textes pathétiques les grandes parties d'échecs que je pensais mener avec les filles. Les coups, les saluts, les bises que j'avais le courage de faire, et les mots qu'elles m'avaient dit qui pouvaient prêter à interprétation. Ce n'était pas de ces poèmes qui nourrissent encore aujourd'hui les blogs d'adolescents, ces lettres pleines de larmes et de rimes pauvres. Non, c'était de la tactique. Chaque mot futur était dosé, tout regard calculé. Seul, devant mon écran texte, je tissais les infinis échiquiers de l'amour et de la haine, pour que la reine adverse s'écroule, et que son monde tombe à mes pieds.
Mais cela ne durait jamais : j'avais quinze ans. Le manque de courage, les crises de larmes, et cette terrible timidité écroulaient mes patientes citadelles. En face de l'échiquier, je ne trouvais jamais de joueuse à ma hauteur. Peut-être même qu'il n'y avait jamais personne à l'autre bout de la table, et que mes pions avançaient dans le vide.
Cela a peu d'importance aujourd'hui. Les temps ont bien changés. Si aujourd'hui j'écris ce texte, ce n'est pas pour dresser des fous et des dames entre moi et celle qui volait mon cœur. L'échiquier est installé, mais il n'y a pas d'autre adversaire que moi-même.
Je hais la pensée en tant que telle. Ces mouvements qui vous prennent quand vous marchez et qui vous emportent au ciel. La pensée est par nature amnésique, et donc répétitive. A chaque fois que vous croisez le même homme, que vous écoutez la même musique, que vous fumez votre chère cigarette dans le hall de votre immeuble, les mêmes phrases reviennent en vous, infusent votre cœur, et puis disparaissent avant que, d'une façon ou d'une autre, elles puissent vous être utile. Il n'y a aucune logique dans leur déroulement, seulement une vague réaction au milieu et à vos souvenirs.
Or, je suis quelqu'un d'obsessionnel. De profondément obsessionnel. Après mon premier entretien d'embauche, j'ai repensé à l'infini à ce que j'aurais du dire. Quand il m'a serré la main, je n'ai pas souri. Et pendant des nuits et des nuits, le bras fermé contre l'oreiller, je me suis revu et je me suis insulté. Profondément. Profondément. Jusqu'à ce que quand je me lève, le lendemain, épuisé et hagard, je refaisais sombrement le geste, encore, encore, encore.
L'écriture est plus calme. Elle oblige l'évolution. Mieux encore : elle pose les problèmes non comment on les penses, mais comment on les veut. Elle est un acte de volonté, quand la pensée est inconsciente. Et, persuasive, pleine de logique et de froideur, l'écriture cherche les solutions. Et c'est cet élément qui me pousse aujourd'hui à écrire mon journal.
Parce que j'en ai assez. Assez de tout. Je ne veux plus d'une mémoire qui me harcèle du sourire des femmes qui m'ont rejeté: je veux un passé, des éléments institués, une véritable histoire qui s'écrit. Je ne veux plus d'un espoir flou, d'un concours ou d'un métier : je veux un avenir, un avenir tracé, avec la fin et les moyens, je veux une cause et une bataille Je ne veux plus être une ombre qui meurt à l'abri des regards : je veux être une parole. Et je veux peut-être avoir un ami.
C'est pour cela qu'aujourd'hui, je commence ce journal. Et que je compte, cette fois-ci, le mener à bien. Quand je dressais ces longues litanies, quand j'avais quinze ans, je prenais ces textes comme la réalité. Mais ce n'est pas la réalité qui gagne dans l'écriture. C'est la raison. Comme dans une partie d'échec. Le sujet n'est plus une femme ou une conquête : et il n'est pas cet univers absurde qui m'entoure d'une large de vitre de verre. Il est ma vie. Et lentement, lettre par lettre et phrase par phrase, je vais écrire cette âme, et je vais dissoudre les ténèbres qui me plongent dans l'absurde et dans l'obsession, dans le répétitif et l’indétermination. Commençons, cher journal, bâtissons ensemble l'Echiquier de Papier où je pourrais combattre mes ombres et, peut-être, me vaincre moi-même.
Je parlais tout à l'heure de Sani (...) »
Ici commence mon journal.
Tout à l'heure, la police est venu chez moi. Ils s’inquiètent de la disparition de Sani. Je ne sais ce qu'elle est devenue, moi non plus. Je pensais qu'elle ne voulait plus me parler, mais apparemment, c'est beaucoup plus grave. Les gendarmes m'ont cru quand je leur ait dit que je n'avais rien à voir avec tout cela. Je m'inquiète, mais je ne peux rien faire. C'est aussi peut-être pour cela que j'écris.
Non. Ce n'est sans doute par seulement pour cela. Arrêtons nous quelques instants, le temps d'exposer ce projet. Ce journal aura deux fonctions : raconter ce que je suis, et devenir ce que je veux être.
C'est du moins ce que j'espère. Ce n'est pas ma première tentative. Depuis que je suis tout petit, j'ai pensé tenir un journal. Quand j'avais quinze ans, et que je tombais amoureux, j'écrivais dans de longs textes pathétiques les grandes parties d'échecs que je pensais mener avec les filles. Les coups, les saluts, les bises que j'avais le courage de faire, et les mots qu'elles m'avaient dit qui pouvaient prêter à interprétation. Ce n'était pas de ces poèmes qui nourrissent encore aujourd'hui les blogs d'adolescents, ces lettres pleines de larmes et de rimes pauvres. Non, c'était de la tactique. Chaque mot futur était dosé, tout regard calculé. Seul, devant mon écran texte, je tissais les infinis échiquiers de l'amour et de la haine, pour que la reine adverse s'écroule, et que son monde tombe à mes pieds.
Mais cela ne durait jamais : j'avais quinze ans. Le manque de courage, les crises de larmes, et cette terrible timidité écroulaient mes patientes citadelles. En face de l'échiquier, je ne trouvais jamais de joueuse à ma hauteur. Peut-être même qu'il n'y avait jamais personne à l'autre bout de la table, et que mes pions avançaient dans le vide.
Cela a peu d'importance aujourd'hui. Les temps ont bien changés. Si aujourd'hui j'écris ce texte, ce n'est pas pour dresser des fous et des dames entre moi et celle qui volait mon cœur. L'échiquier est installé, mais il n'y a pas d'autre adversaire que moi-même.
Je hais la pensée en tant que telle. Ces mouvements qui vous prennent quand vous marchez et qui vous emportent au ciel. La pensée est par nature amnésique, et donc répétitive. A chaque fois que vous croisez le même homme, que vous écoutez la même musique, que vous fumez votre chère cigarette dans le hall de votre immeuble, les mêmes phrases reviennent en vous, infusent votre cœur, et puis disparaissent avant que, d'une façon ou d'une autre, elles puissent vous être utile. Il n'y a aucune logique dans leur déroulement, seulement une vague réaction au milieu et à vos souvenirs.
Or, je suis quelqu'un d'obsessionnel. De profondément obsessionnel. Après mon premier entretien d'embauche, j'ai repensé à l'infini à ce que j'aurais du dire. Quand il m'a serré la main, je n'ai pas souri. Et pendant des nuits et des nuits, le bras fermé contre l'oreiller, je me suis revu et je me suis insulté. Profondément. Profondément. Jusqu'à ce que quand je me lève, le lendemain, épuisé et hagard, je refaisais sombrement le geste, encore, encore, encore.
L'écriture est plus calme. Elle oblige l'évolution. Mieux encore : elle pose les problèmes non comment on les penses, mais comment on les veut. Elle est un acte de volonté, quand la pensée est inconsciente. Et, persuasive, pleine de logique et de froideur, l'écriture cherche les solutions. Et c'est cet élément qui me pousse aujourd'hui à écrire mon journal.
Parce que j'en ai assez. Assez de tout. Je ne veux plus d'une mémoire qui me harcèle du sourire des femmes qui m'ont rejeté: je veux un passé, des éléments institués, une véritable histoire qui s'écrit. Je ne veux plus d'un espoir flou, d'un concours ou d'un métier : je veux un avenir, un avenir tracé, avec la fin et les moyens, je veux une cause et une bataille Je ne veux plus être une ombre qui meurt à l'abri des regards : je veux être une parole. Et je veux peut-être avoir un ami.
C'est pour cela qu'aujourd'hui, je commence ce journal. Et que je compte, cette fois-ci, le mener à bien. Quand je dressais ces longues litanies, quand j'avais quinze ans, je prenais ces textes comme la réalité. Mais ce n'est pas la réalité qui gagne dans l'écriture. C'est la raison. Comme dans une partie d'échec. Le sujet n'est plus une femme ou une conquête : et il n'est pas cet univers absurde qui m'entoure d'une large de vitre de verre. Il est ma vie. Et lentement, lettre par lettre et phrase par phrase, je vais écrire cette âme, et je vais dissoudre les ténèbres qui me plongent dans l'absurde et dans l'obsession, dans le répétitif et l’indétermination. Commençons, cher journal, bâtissons ensemble l'Echiquier de Papier où je pourrais combattre mes ombres et, peut-être, me vaincre moi-même.
Je parlais tout à l'heure de Sani (...) »
Commentaires
- Daz
29/02/2012 à 22:17:07
neeeeeeeeeeeeed la sweet