Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Les mots de sang


Par : Katseu
Genre : Réaliste, Action
Statut : C'est compliqué



Chapitre 4


Publié le 24/01/2012 à 19:10:54 par Katseu

Aurais-je pu imaginer un jour que je commettrai un acte aussi infâme ? Retrouver une partie de mon cœur dans ces conditions ? Est-ce qu’un jour, j’aurai pu penser que cette épée de la honte et du dégout puisse me déchirer les membres en quelques secondes ? Sur le moment, mes bras et mes jambes refusèrent de m’obéir, je passai les premières secondes à trembler, les dents serrées, une fine goutte de sueur dégoulinant le long de ma joue, je ne pensais plus à rien. J’entendais encore le rire sardonique de mon commandant dont le seul amusement était la douleur que je ressentais actuellement. Juste avant l’effondrement du monde face a des armées impatientes, j’aurai voulu retrouver un peu de dignité. C’était maintenant trop tard. Je priais pour que quelque chose se produise, que je me réveille en sursaut, que tout ceci ne soit qu’un vilain cauchemar.

Soudainement, avant que je puisse effectuer la moindre action, la porte s’ouvrit brusquement. Un soldat en uniforme dont j’ignorais l’identité se présenta en exécutant un garde à vous et leva le menton. Kralis cessa de sourire et se tourna vers lui. Je n’avais qu’une envie : prendre mes jambes à mon cou. M’en aller, m’enfuir le plus loin possible et mourir comme un chien sur ma propre tombe : celle de la honte absolue. Malgré tout mes efforts pour tenter de bouger, j’étais complètement paralysé d’horreur. Le soldat annonça finalement la raison de ma vue tandis que je sentais une légère douleur au cœur.

- Commandant ! Les ennemis parviennent à avancer, nous avons besoin de vous sur le terrain !
- Je vais leur montrer le vrai caractère de la France moi ! S’écria t-il. Esposito, ne bougez pas, je reviens vite.

Le commandant se diriger lentement, très lentement, vers la sortie sans se retourner suivit du soldat inconnu qui ne baissa toujours pas le menton. Sûrement impressionné devant le fait de s’être adressé directement à un commandant, il ne désirait pas faire le moindre faux pas. Sans que je puisse me rendre compte que j’étais resté seul dans la pièce avec le prisonnier, je l’entendis murmurer :

- Fiston…

J’avais cru rêver.

- Fiston… répéta-il rompant l’immense silence qui pesait sur nos épaules

Sur ces paroles pleines d’effort, je plongeai mon regard dans le sien. Le pauvre homme avait les cheveux longs sur la nuque coiffés en arrière, une mine plus qu’affreuse, des tâches de sang qui ornait son visage. Torse nu, les bras en l’air, il semblait agoniser, pouvant cracher son dernier souffle à n’importe quel moment.

- Approche…

Intrigué par tous ces événements, je réussis enfin à mettre un pied devant l’autre. J’avançais vers mon père qui souffrait pendant chaque seconde qui s’écoulait devant nos yeux. Je savais que c’était lui. Je n’avais jamais oublié ce visage. Après 5 ans de séparation, il était resté le même. Je me souviens encore quand j’étais seul dans le jardin en train de jouer avec un pauvre bâton que j’avais ramassé derrière un buisson. J’imaginais des fantômes contre qui je pouvais passer mes nerfs, des ennemis imaginaires que je pouvais repousser à l’aide de mon bâton. Mon père débarquait toujours de nulle part pour me narguer en me tenant par les jambes. Riant aux éclats, je n’avais que d’autre choix que de lui frapper les pieds avec mon arme de bois. Que de souvenirs que j’aimerai tant revivre. Des souvenirs avec de l’amour. Des souvenirs sans guerres.

J’avançais tel que je le pouvais. Quand je fus assez près de lui, il me regarda pendant quelques instants. Je ne sais pas si avec la fatigue, il arrivait à se rendre compte qu’il venait de me retrouver, j’avais bien du mal à me faire à l’idée, moi-même. Je ne l’avais pas revu depuis 5 ans et je le revoyais entre la vie et la mort, torturé et séquestré. Jamais je n’aurai imaginé de pareilles retrouvailles. Son regard plongea dans le mien et malgré la douleur qu’il ressentait, il réussit à m’offrir un magnifique sourire. Je le regardais avec des yeux remplis de bonheur mais également avec un cœur rongé de malheur.

- Je t’aurai reconnu entre mille. M’as t-il soufflé avec peine

Je soutenais mon regard. Je ne le reconnaissais pas comme il était avant mais comme mon père. Celui qui aura sûrement ordonné à son corps de résister à la torture pour espérer avoir l’opportunité de m’adresser la parole. Je ne doutais pas une seule seconde qu’il savait qu’on le transférerait ici pour m’ordonner de l’abattre et que si un miracle se produisait, nous pourrions nous retrouver seuls à seuls.
- Tu as encore les yeux de ta mère. Ces yeux bleus qui m’ont tant fait rêver…

La vision de ma mère me racontant des histoires me revint soudainement en mémoire. Dans mon lit, avant de m’endormir, j’écoutais paisiblement de sa douce voix, les aventures de Bob Morane. Un vieil héros de romans. Aux voyages exotiques, dans lesquels se mêlaient espionnage et combat de sabres, venaient se greffer des mésaventures de science-fiction. Aidé de William Ballantine, le flibustier parcourait vents et marées pour venir à bout de sa quête. L’Ombre Jaune, le génie du mal, le pire ennemi de l’aventurier qui le battaient à maintes reprises grâce a sa volonté de fer. Miss Ylang apportait une touche de féminité dans le groupe d’adversaire de Bob Morane, elle faisait immanquablement songer à une statuette de jade noir, délicatement ouvragée et dont seul le visage eût été taillé dans l'ambre. Ce qui me plaisait particulièrement chez ce personnage, c’était qu’elle était secrètement amoureuse du héros, alors qu’elle le déteste. Je me posais souvent la question : Est-ce que l’on peut aimer une personne que l’on hait ? Par définition, il était évident que non. Mais aimer n’est pas le fait d’être totalement obsédé par une personne ? De vouloir à tout prix être avec cette dernière ? Et si on haïssait tellement un individu de sorte d’avoir à chaque instant des pensées qui vont vers lui et de posséder l’envie d’être près de lui pour lui faire du mal, que son caractère et sa psychologie nous dégoute mais qu’on ai tout de même l’envie de le revoir… Est-ce que l’on pourrait qualifier ceci d’amour ? C’est ce que j’aimais avec Bob Morane, ça me faisait réfléchir, et je réfléchis encore. Sans trouver de réponse.


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