Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

L'enfant de Prypyat


Par : Absolenko
Genre : Action, Polar
Statut : C'est compliqué



Chapitre 1


Publié le 09/03/2015 à 18:16:06 par Absolenko

Chapitre 1 :

Les rues de Kiev semblaient bien vides et calmes en cette fraîche nuit d'avril. Il n'y avait guère que quelques promeneurs sortant leur chien qui dérangeaient la monotonie locale. C'était de plus une nuit sans nuages, les étoiles et la Lune s'élevaient haut dans le ciel, pimpantes et fières, renforçant l'ambiance lunaire qui planait sur la capitale ukrainienne.
Soudain, au coin d'une rue, des roues crissèrent, surprenant un passant jusque-là profondément absorbé par son smartphone. Il eut à peine le temps de relever la tête pour entrevoir une voiture de police remonter la rue à toute vitesse. Sûrement une course poursuite qui se déroulait, rien d'étonnant compte tenu de la hausse de la criminalité qui frappait tout le pays.

- Grouille, Yevhen, grouille !, hurla le flic assis sur le siège passager.
- Je fais aussi vite que je peux, Roman !, répliqua son collègue qui tournait le volant un coup à gauche, un coup à droite.

Le dénommé Roman colla sa tête contre le carreau et plissa les yeux autant qu'il pu, dans le vain espoir d'améliorer sa vue. Ses yeux demeurèrent dans le vide puis une lueur apparut dans ses pupilles. Il eut un mouvement brusque et se retourna vers son camarade. Il s'écria :

- Stooop ! Il est là !

Surpris, Yevhen freina un grand coup. Aussitôt que la voiture fut à l'arrêt, Roman ouvrit la portière et sauta littéralement sur le trottoir. Il entra en trombe dans le fast-food qu'il venait de repérer. Soupirant, mi-amusé mi-exaspéré, Yevhen marcha quant à lui tranquillement vers son ami qui commandait déjà un hamburger.

- Tout ça pour ça, sourit-il une fois arrivé à hauteur de Roman.
- Mon ventre ne sait pas attendre, lui répondit son collègue.

La serveuse lui passa ce qu'il avait commandé.

- T'es sûr que tu ne veux rien ?, s'assura-t-il en payant.
- Ouaip. J'ai pas faim. On devrait retourner à la voiture non ? Tu mangeras à l'intérieur.
- Stresse pas. On n'aura pas besoin de nous ce soir, c'est calme. Ca fait des mois qu'on ne fait que de simples patrouilles.

Subitement intéressée par la conversation, la serveuse du fast-food se pencha sur son comptoir et s'intégra :

- Oh, vous êtes policiers ?
- Ouais, ça se voit pas à nos uniformes ?, répliqua froidement Yevhen.
- Relax, Yev' ! Excusez-le mademoiselle, il a ses règles visiblement, s'excusa Roman avec un grand sourire.

Ronchon, Yevhen se déroba et traîna les pieds jusque la voiture. Il s'assura qu'ils n'avaient reçu aucun appel du commissariat. Non, rien. Roman avait raison, c'était bien calme à Kiev ces temps-ci. Résolu à attendre son ami, il s'adossa à la portière et fixa un point fixe dans le ciel, perdu dans ses pensées.
Roman ne tarda pas à se montrer, il sortit du fast-food avec son dernier hamburger à la main. Yevhen le questionna aussitôt :

- T'as déjà eu son numéro ? Tu t'améliores.
- Nan, elle est mariée.
- Depuis quand ça t'arrête ?
- Depuis que ça a failli coûté ma place au commissariat. C'est bon t'as fini ton interrogatoire ? Tu t'es pris pour un policier ? Et qu'est-ce qu'il t'a pris de lui parler comme ça à la serveuse ?

Roman s'adossa à son tour à la voiture de police.

- Je ne sais pas trop..., répondit Yevhen, un réflexe j'imagine.
- C'est ça ton problème Yev', tu t'enfermes trop sur toi-même.
- N'importe qui le serait à ma place, rétorqua-t-il en serrant les dents.
- Certes, mais ce n'est pas forcément la bonne solution.
- Tu n'as pas connu ce que j'ai vécu, laisse tomber.

Roman donna un léger coup de pied sur le tibia de son partenaire :

- Eh, sans moi tu ne serais même pas là aujourd'hui. Alors un peu de respect !
- Car tu penses m'avoir sauvé la vie ? Tu aurais dû me laisser sauter.

Roman engloutit le dernier morceau de son hamburger en levant les yeux au ciel. Il continua :

- C'est toujours la même chose avec toi. Dès qu'on approche du mois d'avril, t'es pire qu'une huître.
- Trop de mauvais souvenirs..

Soudain, le poste-émetteur de la voiture se mit à s'allumer et une voix grave en sortit :

- Alerte à toutes les unités ! Tentative d'effraction au centre commercial, le suspect s'est enfui en direction de la rue Shevchenko. Je répète...

Roman et Yevhen se regardèrent avec des yeux ronds d'étonnement. Plus réactif que son collègue, Yevhen ouvrit la portière et se mit au volant. Roman le rejoignit et ne put s'empêcher de commenter :

- Putain, je ne savais même pas qu'il marchait encore ce truc ! La rue Shevchenko... C'est à deux pas d'ici !
- Heureusement qu'elle était mariée la serveuse, sinon tu n'aurais pas été sur place. Allez, on fonce !

Yevhen joignit les gestes à la parole et démarra sur les chapeaux de roue. Roman prit le talkie-walkie associé à leur voiture et répondit au commissariat :

- Ici patrouille 2-3-0, sommes en route pour appréhender le suspect.
- Bien reçu patrouille. Où êtes-vous ?
- On est où ?, demanda Roman.
- Avenue Tolstoï, souffla Yevhen.
- Avenue Tolstoï !
- Compris. Le suspect est en voiture et se dirige vers la rue de la révolution, les renseigna le commissariat.

Roman reposa le talkie et se tourna vers son comparse :

- La rue de la révolution. On peut couper sa trajectoire. On le tient !

Yevhen plissa les yeux et se concentra au maximum sur sa conduite, rassemblant tout son sang-froid. Arrivé au bout de la rue Shevchenko, il tourna subitement le volant et dérapa sur le bitume humide. Appuyant sur l'accélérateur, et galvanisé par les encouragements de Roman, il fonça vers le carrefour droit devant et pilonna avec son pied le frein.
La voiture parcourut encore quelques mètres puis se stoppa en plein milieu du carrefour. Yevhen avait magnifiquement calculé son coup.
Sans aucun répit, Roman et Yevhen entendirent un crissement de pneu qui venait de l'extérieur. Et pour cause, une voiture rouge venait de freiner pour éviter la collision.

- C'est notre homme ?, questionna Roman pour lui-même.

La portière de la voiture s'ouvrit brusquement et un homme capuchonné en sortit, essayant de s'enfuir dans le sens opposant et apportant ainsi la réponse à Roman...

- Ah, je crois que oui.

Silencieux car très concentré, Yevhen sortit à son tour et courut à la poursuite du délinquant. Malgré sa quarantaine qu'il venait d'entamer, Yevhen disposait d'une bonne condition physique et d'une endurance conservées. En quelques foulées, il commença à rattraper le voyou, bien trop stressé pour courir efficacement et convenablement.
Sentant qu'il était à distance suffisante, Yevhen sauta en avant et entrava les jambes du suspect d'une manière magistrale. Il le plaqua ensuite durement au sol, mit ses mains derrière son dos et lui mit les menottes.
Roman le rejoignit en courant, visiblement très enjoué :

- Quel plaquage ! Tu ferais un putain de joueur de rugby !
- Ouais, merci de ton aide en tout cas, répliqua Yevhen en souriant malgré tout.
- Tu te débrouillais trop bien. Je n'ai pas ton niveau.

Se prenant au jeu, Yevhen mit son pied sur le dos du voyou, tel un vulgaire trophée de chasse. Puis, reprenant son sérieux, il leva sa prise avec difficulté et la retourna vers lui. Il eut alors un geste de recul, surpris.

- Vo... Volodymyr ?
- Tu le connais ?, s'étonna Roman.

Le jeune homme avait le nez en sang et était assommé. Yevhen l'avait plaqué avec une telle force qu'il n'en est pas ressorti complètement indemne.

- Evidemment que je le connais, c'est le mec de ma fille.
- Yulia sort avec une petite frappe ?
- Oui, ils se sont rencontrés au centre social où elle travaille. On se dispute souvent à son sujet. Elle essaye de me persuader qu'il est bon, au fond de lui-même.

Roman fronça les sourcils :

- Tellement bon qu'il se met à cambrioler des centres commerciaux.
- Ouais, répondit Yevhen en soupirant, mais comme d'hab' elle ne voudra rien entendre. Comme quoi que ce n'est pas lui le coupable mais la société, qu'il est la victime blablabla...

Tout en s’apitoyant sur le choix amoureux de fille, Yevhen embarqua le corps inconscient de Volodymyr à l'arrière de la voiture, avec difficulté.

- Tu sais Yevhen, Yulia a 21 ans. Je pense qu'elle peut faire ses choix toute seule.
- Tu crois qu'une telle relation avec une racaille ça va être bénéfique pour elle ?!, haussa le ton Yevhen en s'asseyant dans la voiture.

Roman le rejoignit sur le siège passager mais n'en démordit pas :

- Mais si elle l'aime ! Oh, après 20 ans à avoir partagé la même voiture de police que toi, je te connais un minimum. Je sais pertinemment que le problème n'est pas les sombres activités de ce cher monsieur dont tu as démonté le nez. Ce qui te fait chier c'est que ta fille ait un autre homme dans sa vie que toi.

Yevhen grogna pour toute réponse. Il démarra le moteur et commença à rouler direction le commissariat. Roman prit le talkie et informa sobrement qu'ils avaient appréhendé l'auteur de l'effraction. Après quelques secondes de silence, Yevhen finit par lâcher :

- Tu fais chier à me connaître aussi bien.
- Que veux-tu ? T'es tellement à fond sur ta fille que tu en deviens prévisible.
- Elle est tout ce qu'il me reste Roman, je ne veux pas qu'elle me quitte.
- Le problème c'est qu'à force de l'étouffer, je suis sûr qu'elle n'attend que ça...
- Dis pas de conneries, siffla Yevhen sans desserrer les dents.
- Un gosse de neuf ans adore être protégé par ses parents. Mais une jeune adulte de 21 ans, ça doit un peu la faire chier à force !

Tout à coup, au beau milieu de la rue, Yevhen freina et fit stopper la voiture. Il se retourna soudainement vers Roman et lâcha :

- On peut arrêter de faire mon procès, s'il te plaît ?, fit-il en lançant à son coéquipier un regard assassin.
- Tu n'avais pas besoin d'arrêter la voiture pour dire ça, répondit Roman en haussant les sourcils.
- Je voulais que ça soit clair.

Il reprit alors sa route sans plus attendre. Roman préféré rester muet le reste du trajet, ne voulant pas aggraver les choses.
Après quelques minutes de route durant lesquelles le silence régnait, la voiture s'arrêta puis se gara devant le commissariat. Yevhen coupa le contact, sortit et alla chercher Volodymyr. En le faisant sortir, il le réveilla. Le délinquant mit plusieurs secondes à comprendre ce qui lui était arrivé et sur sa figure apparut un large sourire ironique :

- Oh, salut beau-papa !
- Ferme ta gueule.

Venant en aide à son coéquipier, Roman mit une petite tape derrière le crâne de Volodymyr pour lui prier de se taire. Ils escaladèrent ensuite les quelques marches puis entrèrent dans le poste de police de la ville de Kiev.

- Major Chevakova, Major Szarszus, les saluèrent un brigadier posté à l'entrée.

Les deux concernés répondirent d'un signe de tête. Yevhen lui tendit ensuite Volodymyr :

- Mets-le moi en garde à vue, ordonna-t-il sèchement.
- A vos ordres, Major Chevakova, fit le bleu, inquiet par le ton cassant de Yevhen.

Sûrement épuisé, Yevhen se dirigea vers son bureau au fond du hall et se laissa tomber sur sa chaise. Roman fit de même. Leurs bureaux étaient en face l'un de l'autre, ayant toujours travaillé ensemble, leur complicité était connue et reconnue au sein du commissariat.
Les deux compères étaient venus à bout de grande nombre d'affaires compliquées qui leur avaient voulus les louanges de leur commissaire et même du maire de Kiev. Ils avaient atteint le grade maximal du corps d'encadrement et d'application et auraient pu même être promu dans le staff de direction si ils n'aimaient pas autant être sur le terrain.
La réussite de ce duo tenait essentiellement sur le travail acharné de Yevhen dû au drame qui a terni sa vie, et sur l'intelligence et la spontanéité de Roman qui savait être lucide quand il le fallait. Et encore une fois, ils avaient réussi ce soir-là.

- On a encore géré, se félicita Roman en mettant ses pieds sur son bureau.
- Mmh, approuva Yevhen dans un râle, pensif.
- Encore en train de te morfondre ? Je sais ce qu'il te manque !
- Quoi donc ?, demanda son ami en levant la tête, ne sachant pas s'il était sérieux ou moqueur.
- Une femme !, répondit Roman, sûr de lui.

Yevhen leva les yeux en l'air. Voilà des années qu'il essayait de lui chercher une compagne.

- Enfin Yevhen, tu n'as pas eu de relation depuis... depuis ce qui est arrivé à... à tu sais qui !
- Zlata était parfaite...
- Elle n'est plus là ! Et ça fait 21 ans ! Et depuis, tu es resté seul, sur-protégeant ta fille unique.
- T'es quand même gonflé de me donner la morale au sujet des femmes. T'as 41 ans et toujours pas marié. Tu ne pourras pas sauter de femelle en femelle jusqu'à ta mort. Je ne vois pas pourquoi je devrais faire comme toi.

Roman fit « non » de la tête et rétorqua :

- Je ne te demande pas de m'imiter. Au contraire, je veux que tu ais une relation sérieuse et durable. Ca te ferait le plus grand bien !

Yevhen ne répondit pas. Au fond de lui-même il savait que son compère avait raison, mais il ne pouvait pas. Il ne voulait pas.

- Je sais pas si j'en ai envie Roman... Pas maintenant.
- Pas maintenant ? T'as 40 ans ! Puis entre nous, tu vas pas me dire que tu n'as pas remarqué la petite Lilya !
- Qui ?
- Celle qui est arrivé il y a un mois, du centre de Dnipropetrovsk. 35 ans, blonde, yeux bleus à te faire frémir les poils de torse...
- T'as l'air bien renseigné à son sujet, sourit Yevhen.
- Ah, mais je te la laisse si tu veux ! Elle n'est pas indifférente à ton sujet, qui plus est.
- Arrête tes conneries.
- Je te jure !, persista Roman, elle te jette pas mal de regards en coin. Crois-moi, j'ai le pif pour ces choses-là ! S'il te plaît, ne laisse pas passer cette occasion. Pour moi !
- Je ne sais pas...

Roman s'enleva de sa chaise et s'agenouilla au sol juste devant Yevhen, il joignit ses mains et regarda celui-ci d'un regard implorant. Yevhen éclata de rire mais se garda bien de répondre.

- T'es con, se contenta-t-il de dire pour échapper à la véritable question.

Soudain, un homme toussa derrière eux. Les deux amis se retournèrent et virent le brigadier de tout à l'heure. A sa vue, Roman se hâta de se lever puis il frappa le stylo que Yevhen tenait dans sa bouche, le faisant valdinguer à terre.

- Voyons, un peu de tenue, hum, se rattrapa-t-il.
- Ne faites pas attention à lui, fit Yevhen, qu'y a-t-il ?
- Le dénommé Volodymyr souhaite vous voir.
- Moi ?, s'étonna Yevhen.
- Exact.
- Qu'est-ce qu'il me veut lui...

Yevhen se leva et emboîta le pas au brigadier. Il se dirigea vers l'escalier qui descendait vers les cellules provisoires. Lorsque Volodymyr le vit arriver, il se leva de sa banquette vint se coller aux barreaux qui le retenaient dans sa petite et miteuse pièce.

- Salut, Yevhen, le salua-t-il.
- Vous vous connaissez ?!, s'étonna le brigadier.
- Je me tape sa fille, répondit sobrement mais efficacement Volodymyr.

Perdant le contrôle de ses nerfs, Yevhen vint empoigner le col de son beau-fils à travers les barreaux et le ramena brutalement vers lui.

- Ne dis plus jamais une chose pareille, compris ?, siffla-t-il entre ses dents.
- Ouais ouais...

Toujours semblant pouvoir exploser à tout moment, il lâcha Volodymyr qui affichait toujours un sourire narquois particulièrement horripilant. Yevhen demanda alors sèchement :

- Pourquoi tu m'as fait venir ?
- Fais-moi sortir.
- De quoi ?, éclata Yevhen d'un rire sans joie.
- J'avais rendez-vous avec ta fille en boîte. Mon absence va profondément la contrarier... Et encore plus lorsqu'elle apprendra que c'est son papa chéri qui m'a injustement retenu.
- Tu te fous de moi ? Tu as essayé de pénétrer illégalement dans le centre commercial et tu le sais. Nous le savons tous très bien ici.
- Je dirais que c'était un malentendu et que tu n'as rien voulu écouter. Ma parole contre la tienne.

Yevhen regarda dans les yeux de Volodymyr qui fit de même, une joute oculaire se déroulant entre les deux. Le brigadier assistait à toute cette scène en silence, interdit. Il ne savait qu'en penser et se demandait s'il devait intervenir ou non. Yevhen étant son supérieur hiérarchique, il s'abstint et se contenta de rester spectateur.
Quant à Yevhen, celui-ci pesait le pour et le contre dans son esprit. Il était clairement en position défavorable dans cette affaire. Il était trop souvent sur le dos de Volodymyr si bien que sa fille pencherait à croire son chéri, qui savait très bien faire l'éternel victime incompris. Même si Volodymyr était manifestement coupable - et il ne s'en cachait pas -, il voulait éviter à tout prix une engueulade avec sa fille. Il obtempéra :

- Bon...

Il se tourna vers le brigadier et lui ordonna :

- Laissez-le sortir.
- De.. qu.. Quoi ?, hallucina le sous-fifre, mais c'est le coupable du centre commercial ! On ne peut le...
- Qui est-ce qui donne les ordres ici ? Je me tiens responsable de sa relâche, vous n'aurez aucun soucis à vous faire. Obéissez juste.
- Euh... Très bien, Major Chevakova.

Encore troublé par la tournure des événements, le brigadier prit ses clefs et ouvrit la cellule. Volodymyr en sortit tout heureux et triomphant. Il huma l'air ambiant et déclara :

- Aaah... Le parfum de la liberté ! Merci beau-papa.

Il tapa légèrement sur l'épaule de Yevhen et remonta dans le hall principal, le brigadier à sa suite. Dans le hall principal, Roman était en train de traîner sur son téléphone portable. Lorsqu'il aperçut le jeune homme qu'ils avaient fait incarcérer dix minutes auparavant, il se leva subitement et accourut à sa rencontre :

- Wowowoh, tu crois aller où comme ça ?, fit-il en arrêtant Volodymyr avec sa main.
- T'as un train de retard, je suis libre.
- Libre ?, répéta Roman, incrédule.

Il se tourna vers le brigadier qui confirma les dires de Volodymyr d'un sec mouvement de tête.

- Oh putain Yevhen..., comprit-t-il.

Tandis que le brigadier ramena l'heureux relâché vers la sortie, Roman se hâta d'aller à la rencontre de son ami qui venait de sortir des cellules de garde à vue. Sa tête renfrognée trahissait des remords mais aussi une impuissance.

- Oula, toi t'as la tête de quelqu'un qui a fait une connerie, fit Roman.
- Je sais très bien ce que j'ai fait, et toi aussi...
- Attends, laisse-moi deviner. Il a parlé de ta fille pour te faire céder ?

Yevhen approuva d'un signe de tête et s'affala sur sa chaise de bureau, tout soupirant.

- Le commissaire va pas apprécier.
- Je sais, Roman. C'est justement ce que je redoute. J'ai relâché un coupable évident pour seul motif qu'il sort avec ma fille.
- Il faut que tu fasses la part des choses. En dehors, Volodymyr est le mec de ta fille. Au boulot, c'est un délinquant comme un autre.
- Soit je me disputais avec ma fille, soit avec mon patron, expliqua Yevhen, j'ai tranché.
- Ouais enfin ta fille n'a pas le pouvoir de te rétrograder...

Sans prononcer un mot, Yevhen se leva, prit son manteau et se dirigea vers la sortie. Roman, hébété, l'interpella :

- Tu pars déjà ?
- Je sens qu'il va me falloir une bonne nuit de repos avant d'affronter Votchyevka demain. Et j'en avais marre de tes réflexions.

Roman soupira et s’assit sur sa chaise tandis que son ami quittait le commissariat. Yevhen avait été d'une humeur massacrante ces derniers jours. Inévitablement, ses yeux se posèrent sur le petit calendrier qu'il accrochait à son écran d'ordinateur et dont il cochait chaque jour au fur et à mesure que l'année avançait. 18 Avril.
Roman n'en voulait même pas à son coéquipier, il était habitué. C'était toujours la même rengaine depuis 21 ans, à chaque fois que l'on approchait du 26 Avril...


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