Assis au comptoir du bar, j'attends ma bière et rien d'autre.
Je suis grand, maigre -dégingandé-. Un bordel brun sur la tête et des yeux bleus avec des valoches en dessous. Un cadavre avec des joues creusées mais avec un certain charme si j'en crois les filles.
Je m'appelle Charles et quitte à faire une association, je serai plus Charles Bukowski que Charles Aznavour. J'aime les filles, la boisson, l'herbe illicite et le malheur humain mais seulement parce que j'en suis un représentant.
A 22 ans, je n'ai eu qu'un petit job de commis de cuisine. J'ai été viré quand un cuisinier m'a chopé en train de sauter une des serveuses derrière un chariot de viennoiseries. Je n'ai jamais eu de relation vraiment stable, a vrai dire, je ne pense pas qu'une fille m'ait aimé plus d'une nuit. Mes amis ne veulent plus me voir parce que je suis un raté et ma seule famille, mes parents, divorcés, sont trop occupés a construire leurs nouvelles familles chacun de leurs cotés.
J'habite un appart' miteux avec des tâches de moisissure au plafond et des lavabos qui crachent de l'eau couleur rouille.
En général a la fin du mois, j'ai les moyens de m'acheter soit du pq, soit des pâtes.
Ce mois ci, exploit, j'ai les moyens de me payer une verre.
Donc, je suis assis au comptoir du bar, j'attends ma bière et rien d'autre mais y'a cette nana qui se ramène et qui pose un cul sur le tabouret d'à côté.
Elle est blonde, liftée, sophistiquée, elle à le double de mon âge -au moins- et un gros diamant à l'annulaire.
Je ne tourne pas la tête mais je sais qu'elle me sourit. Je sais aussi que c'est une femme qui s'ennuie un peu dans sa vie. Normal, son mari(chef d'entreprise bien sur) s'envoie sa secrétaire a longueur de journée et donc, n'a plus envie d'elle. Pourtant elle ne se décide pas à le quitter, ça ferait trop de mal aux enfants et surement qu'elle devrait se remettre à travailler.
Alors elle profite du fait que son connard de mari soit partit -soit disant- en week-end avec des amis, elle vient traîner dans ce bar, pas assez coté pour qu'elle ait une chance d'y croiser une connaissance et elle cherche un gamin qui voudrait bien la sauter, ça tombe sur moi.
- Bonsoir. qu'elle me dit avec un air faussement désinvolte. Christine.
- Bonsoir, Charles.
- Un jeune homme comme vous seul un samedi soir c'est étonnant.
Elle parle comme une catin mondaine.
- Votre cinéma m'intéresse pas, si vous voulez vous faire sauter on y va maintenant mais je pas de ce jeu là, je m'en fous des commodités.
Elle prend un air faussement offusquée alors qu'au fond elle est suffisement excitée par la perspective de l'aventure.
- Vous pourriez être plus poli. Me reproche-t-elle pourtant.
- Et vous, vous pourriez être plus fidèle.
Elle rit, il n'y pas de quoi.
Elle me prend par la main et me traîne hors du bar.
Tant pis pour ma bière.