Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Comment tuer sa mère (en cinq façons) ?


Par : faces-of-truth
Genre : Nawak
Statut : Terminée



Chapitre 4


Publié le 29/05/2010 à 23:07:00 par faces-of-truth

Le soir arrive… Ma mère, depuis la cuisine, nous hèle, Sylvie et moi, pour venir manger.
-À table, c’est prêt !
Je descends lentement, je laisse ma sœur passer devant. J’avoue apprécier la voir de dos -mater le cul d’une gonzesse est typiquement humain, il n’y a rien d’obscène dans cet acte, même s’il s’agit d’un parent ; le véritable crime serait de renier ses pulsions- même si, généralement, je fantasme davantage sur sa potentielle chute dans les marches. Mais ce soir-là, pas question que ma pétasse de frangine nous empêche de partager ce dernier repas.
C’est un peu comme la Cène en quelque sorte : on mange, on boit, on parle et on sait comment ça va finir…
On arrive dans la cuisine, on se dispute pour savoir lequel des deux se lavera les mains le premier, on met de l’eau à côté de l’évier, Maman râle parce que c’est toujours elle qui nettoie nos conneries, je laisse ma sœur « remporter » notre duel, et pendant qu’elle se passe du savon entre les doigts, j’en profite pour bombarder de sel le plat concocté par ma maternelle, trop occupée à ranger des couverts pour me remarquer.
On s’installe. Maman nous sert. Ma sœur remue le plat avec sa fourchette pour qu’il refroidisse, je l’imite. La vieille est tellement conne qu’elle nous dit qu’il est meilleur chaud. Elle a sûrement raison : avec le palais brûlé, on ne se rend pas compte à quel point c’est dégueulasse.
Ma mère se sert une part et la mange. Elle mâche. Son regard trahit sa surprise. Elle reconnaît avoir eu la main un peu lourde sur le sel. Elle remplit son petit verre d’eau et boit à petites gorgées le liquide. Je me force à avaler son repas, je lui dis que c’est bon. Elle se ressert. Elle en est à la moitié de son assiette. Elle verse de nouveau de l’eau dans son verre. Elle savoure chaque goutte. La torture a assez duré. Il est temps d’en finir. Je saisis discrètement mon téléphone portable sous la table, je compose le numéro de la maison et lance l’appel.
La sonnerie. Ta mort t’appelle, Maman. Cette dernière se lève. Elle se dirige vers l’appareil, elle attrape le combiné, elle dit « Allô ? », je raccroche, elle redit « Allô ? » deux fois, elle repose le téléphone sur son socle, elle remarque le paquet avec les bouteilles d’alcool, elle se demande bien ce qu’il fait là, elle distingue le jus d’orange, elle saisit la petite bouteille, elle l’ouvre et boit son contenu à grande gorgées, elle s’essuie la bouche.
Elle distingue alors un autre goût que celui du fruit, elle se met à tousser, elle commence à avoir de petits spasmes, sa gorge la brûle (quelle bonne idée d’avoir ajouté du désinfectant au dernier moment !), elle tombe à genoux, elle tousse de plus en plus fort, ma sœur va la rejoindre, lui pose la stupide question « Maman, tu vas bien ? » alors qu’elle voit très bien que ce n’est pas le cas. La mère n’arrive plus à parler, elle se tord de douleur au sol, elle se frappe la tête en espérant remplacer la douleur du poison par celle de sa future bosse, elle se met à déverser son calvaire sur le parquet, ma sœur hurle de panique, Maman tombe dans son vomi, se retourne, murmure quelque chose en bavant, et devient immobile.
Sylvie met sa main devant la bouche, fond en larmes, n’ose pas toucher le corps, appelle désespérément sa mère en priant pour un miracle. Moi, j’arrive. Je regarde la scène. Bien glauque. Je me dis que ça mériterait une photo pour un magazine gothique.
Ma sœur se retourne vers moi et me dit, en pleurant :
-Elle est morte…
Je regarde ses yeux bleus, humides, elle a l’air vraiment triste.
-Ouais, j’ai vu ça…

-À table, c’est prêt !
Quel beau rêve… Mon imagination venait de m’offrir une vision de ma délivrance prochaine. J’espérai seulement que la réalité serait tout aussi excitante. Je descendis les escaliers à la suite de ma sœur et jetai un rapide coup d’œil à son popotin.
-Arrête de me mater, sale pervers incestueux !
-Je vérifiais juste si tu ne boitais pas. Apparemment, Juju ne t’est pas encore passé dessus…
-Connard.
Nous arrivâmes dans la cuisine. Ma mère nous invita à nous laver les mains et alluma la télévision. Le journal du soir est un vrai purgatoire, à mon sens. On contemple les malheurs des autres pour oublier les nôtres. J’ai perdu mon baladeur MP3 dans le métro et un pédé a dû le ramasser et se marre bien en écoutant mes titres. Bah, c’est rien par rapport à cette pauvre fille qui s’est fait ramoner la chatte par trois queues inconnues d’affilée. Mon poisson rouge est mort. Ce n’est rien comparé à cette famille carbonisée vivante dans une cave lors d’un incendie. Peut-être passerai-je aux infos moi aussi ? On dira « Oh, le pauvre gamin, il fait le deuil de sa mère ». Quelle ironie…
Les chaises traînèrent au sol lorsque nous nous assîmes. Ma frangine remua son plat pour le faire refroidir.
-C’est meilleur quand c’est chaud, dit Maman.
-Oui, comme ça on ne pourra pas critiquer le goût une fois le palais brûlé, répliqua ma sœurette.
Pour une fois, je lui donnais raison. Comme quoi, une blonde, ça peut avoir quelque chose dans le caisson.
-Merci, c’est très gentil de ta part, fit ma mère, vexée.
-Mais, ne le prends pas mal, voyons, je rigolais ! ria Sylvie.
Les premières bouchées. Oui, le goût salé se faisait sentir.
-J’ai peut-être un peu trop forcé sur le sel, reconnut la madre.
-« Peut-être » ? me moquai-je.
-Oui, bon, ça va.
-Heureusement qu’on a de l’eau.
-Et si tu me récitais ton cours de sciences pour voir ?
-Attends, tu veux que je parle en plus ? Je vais mourir de soif et je vais boire comme un trou. Après, je te dis pas la nuit passée à me lever pour faire pleurer le colosse…
Ma sœur éclata de rire.
-« Colosse » ? J’espère que tu n’es pas sérieux ?
-Non, ne me dis pas que tu m’espionnes comme une perverse incest…
-Ah non, ne commencez pas tous les deux ! s’enquit notre maternelle.
Le repas continua, personne ne parlait et je n’eus pas à prouver à ma mère que je n’avais pas ouvert mon livre de bio depuis l’assassinat de Lincoln. Je la voyais se servir continuellement à boire. Il était temps. Je pris mon portable, composai le numéro de la maison et laissai sonner.
-Les vagues d’immigration se faisant de plus en plus importantes, le gouvernement prévoit l’instauration de nouvelles réformes visant à réduire les effectifs de clandestins. Des chiffres inquiétants…
« Mais ta gueule, toi !!! » Le son du téléviseur était plus élevé que celui du fixe au salon et personne ne l’entendit sonner. Ma mère était concentrée sur l’image d’une famille mexicaine noyée dans une barque et ne prêtait aucune attention à l’appel de la pièce d’à côté.
-Princesse Sisi, tu veux bien baisser le son, s’il te plaît ? demandai-je à mon aînée.
-Ne m’appelle pas comme ça, je te l’ai déjà dit ! T’as qu’à le faire toi-même.
Non mais quelle chieuse…
-Au contraire, monte le volume, c’est intéressant, demanda ma cible.
OK, c’en était fini. Elle ne voulait pas mourir aujourd’hui. À moins que… ? Je composai de nouveau le numéro.
-Mais, fis-je alors, c’est pas le téléphone que j’entends ?
À la suite de ma remarque, Maman tendit l’oreille. Elle se leva alors et se précipita dans le salon. Nous n’étions plus que tous les deux, ma sœur et moi. Adieu, Maman.
-Comment t’as pu entendre la sonnerie ? demanda Sylvie. T’es sourd comme un pot.
-Faut croire que j’ai l’ouïe fine.
-Je pense plutôt à une autre chose qui est fine chez toi…
-Allô ? dit ma mère.
Je raccrochai.
-Allô ??
Cette conne... Elle raccrocha. Je l’apercevais depuis la cuisine. Elle remarqua alors le paquet. « Allez, vas-y… » Elle s’en approcha alors, curieuse. Oui !
TULULU ! TULULU ! TULULU !
Notre fixe sonna de nouveau et nous fit sursauter tous les deux, ma madre et moi. Je vérifiai mon appareil, je n’étais pour rien dans cet appel. Ma victime reprit le combiné.
-Allô ? Oui ? Ah, c’est toi ? Ça va ?
Non… Je rêvais…
-C’est toi qui as appelé ? Ah bon ? Je sais pas, ça a raccroché de suite. Enfin bref, je suis contente de t’entendre…
Elle prit une chaise et s’installa. Fin de la partie. Elle passerait la nuit.
-Sylvie, tu m’apportes une bouteille, je te prie ?
Cette dernière s’exécuta et lui offrit plusieurs centilitres qui réduisaient à néant tout mon plan.
-Et jette ce jus d’orange, là, commanda-t-elle. Je ne sais pas ce qu’il fait ici, il doit être vieux. T’es mignonne.
Je contemplais ma sœur verser dans l’évier mon poison. Elle se retourna et me remarqua.
-Quoi ? T’en as pas marre de me regarder ?
J’avais mis beaucoup de zèle dans cette opération. J’avais mis mon intelligence au service de cette cause, et un simple imprévu avait tout balayé en une seconde. J’étais dégoûté. Ma mère allait se brosser les dents ce soir, lire le chapitre suivant de son polar et dormir dans ses draps. Le corbillard dont je rêvais ne viendrait pas se joindre à ma fête, qui avait été injustement annulée.
-Eh, je te cause, ducon !
Je plongeai mon regard dans celui de Sylvie.
-Quoi ?
-Pourquoi tu me regardes sans arrêt comme ça ? Qu’est-ce qui se passe dans ta tête ?
-T’aimerais pas le savoir…
-Je suis sûre que si.
Et elle… Elle en rajoutait une couche… Elle me provoquait… J’étais un enfant qui attendait Noël depuis un an et qui venait d’apprendre que le 25 décembre était repoussé. Je sentis ma gorge se nouer.
-Alors ?
-Pourquoi il faut toujours que tu fasses ta pute quand je suis dans le coin ? T’attends quoi ? Que je te fourre un billet dans la raie ? Va te faire foutre, pétasse. Va te faire foutre ! Je t’emmerde et tu me casses les couilles, connasse !
-T’as révisé tes classiques pour me dire ça ? me railla-t-elle, amusée.
Je quittai la pièce et montai en hâte les escaliers. Je m’enfermai dans ma chambre et me jetai sur le lit. Une larme perla sur ma joue droite. J’y étais presque. Mon orphelinat désiré… Tout avait raté.
J’étais dégoûté. Mais je retenais cependant une chose : ce sentiment que j’avais eu, lorsque je voyais ma mère, telle une souris rampant vers son piège, s’approcher de la potion, était… Comment dire ? Exaltant. Jouissif. Divin. La scène précédant votre affaire. Ce mélange de peur, d’excitation et de plaisir… Je le souhaite à quiconque. Vérifiez par vous-même, et vous verrez que je dis vrai. On en deviendrait vite accro. D’ailleurs, cette soirée avait eu l’effet d’une première dose pour moi. Il m’en fallait une nouvelle. Je me piquerai à nouveau très vite. Et pas plus tard que demain !


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