Note de la fic : Non notée
Publié le 19/08/2013 à 01:18:13 par Pseudo supprimé
Mais pour l'activer il me reste encore beaucoup à faire. Pour assembler mon fusil il me faut avant tout trouver ses constituants. Je pourrai assurément obtenir la plupart des pièces nécessaires à sa fabrication dans la décharge mémorielle devenue ma base tactique, mais je suis certain que pour venir à bout du dieu mouche il me faudra un projectile bien spécial, fait d’un métal hors de portée. Je dispose des partitions de Carnish et je peux les traduire, je sais les lire mais l’essentiel m’échappe. Je connais le mode de fabrication d'une telle balle, du moins en théorie, mais je n’ai pas les pouvoirs permettant de la forger. Selon les paroles de l'oracle, cependant, il existe un être, et un seul, ayant cette capacité. Seulement, cet armurier n’habite aucune des terres que j’ai visitées, ni les plaines désertiques des Carnish, ni l’obscur royaume de l’oubli, ni mon monde originel.
Me voilà de nouveau face à un problème de taille, et je ne peux plus continuer à attendre perpétuellement dans mes ténèbres délectables, le Dieu Mouche est peut-être déjà entrain d’accélérer le rythme, prenant peu à peu de l’avance sur son planning mortel dans le but de pouvoir s’accorder le temps de venir me cueillir. Il me faut agir, prendre l’initiative avant qu’il ne soit trop tard, partir chercher cet armurier qui m’est indispensable, et voilà que survient le dilemme : je dois impérativement avancer mais j’ignore totalement quelle direction prendre. Mon refuge comporte plusieurs tunnels sinueux d’entrée et de sortie, et bien des fois j’ai failli me perdre dans ces labyrinthes obscurs. La dimension des Carnish est voisine de la mienne et le chemin pour y accéder est très court ; pourtant j’ai toujours ressenti une indubitable appréhension au moment de franchir le pas. Il y a bien un risque, même pour un trajet si simple, et c’est pourquoi je n’ai que quelques fois fait la traversée. J’ai longtemps essayé de dessiner une carte pour me repérer dans les allées étroites qui relient ma dimension à bien d’autres, mais les sentiers bougent et se transforment au gré de principes que je ne parviens pas à saisir. Je ne peux pas me lancer au hasard dans un de ces conduits sans même savoir où ils peuvent déboucher. Ce n’est pas simplement l’inconnu, c’est aussi l’inimaginable, et cela est bien plus effrayant. Il existe cependant une alternative.
Les accès à mon refuge sont presque impraticables, et c’est précisément en cela qu’il me protège. En revanche, je suis convaincu que ce qui donne tant de pouvoir au Dieu Mouche sur mon monde originel, c’est justement qu’il existe des passerelles presque rectilignes, des autoroutes directes et sans risques, des fenêtres invisibles aux humains et qui permettent au Dieu Mouche et à ses serviteurs de préserver l’infaillibilité de leur système meurtrier. La solution qui se présente à mes yeux serait donc de retourner sur ma terre natale de laquelle je pourrai couper bien plus facilement à travers les dimensions pour rechercher le forgeron dont j’ai besoin. Seulement il y a plusieurs risques, et ils sont immenses : premièrement je marcherai de nouveau sous la menace de l’œil du Dieu Mouche, balayant constamment chaque parcelle, vérifiant ses calculs et traquant les éventuelles anomalies, et je sais qu’il tirera à vue s’il me repère. Deuxièmement, je serai de nouveau confronté à mes congénères, et étrangement, il m’est difficile de prévoir quelle sera leur réaction à mon contact, tout comme demeure indiscernable, et cela est plus inquiétant encore, ma propre réaction. Je ne dois pas m’aveugler délibérément, il me faut avouer que je ne suis pas totalement libéré de mes chaînes, et il y a surtout une corde sensible dont la vibration puissante pourrait me faire chavirer : la nostalgie de l’humain. Je pourrais passer inaperçu au milieu des foules désenchantées, me frayer un chemin entre les humains comme un courant d’air froid, frôler leur conscience sans y créer de remous et n’être qu’un spectre furtif s’effaçant instantanément des mémoires, pour éviter ce contact synonyme d’un danger d’autant plus grand qu’une partie de moi est attirée vers lui. J’étais le plus insaisissable des hommes et je saurais l’être de nouveau, je pourrais ignorer les bleus et les verts de ces regards que je n’ai pas pu complètement oublier, mais c’est sans compter les partitions de Carnish. C’est un artefact puissant auquel, j’en suis sûr, les humains ne seront pas insensibles. Je peux les sceller tant bien que mal, mais il m’est impossible d’étouffer complètement leur vibration, les regards se tourneront immanquablement vers moi, et je pourrais me rompre et les sceaux pourraient céder. Alors, je ne sais ce qu'il adviendrait de cette puissante énergie que je ne contrôle pas encore.
Au contact des possibilités du réel ces partitions risqueraient bien de s'oxyder à jamais, voir pire encore, elles joueraient leur propre musique en se servant de ce nouveau support, initiant les esprits humains à une dérive flamboyante pour un exil sans fin. Je crois bien hélas que le Dieu Mouche ne puisse tolérer un tel exode, alerté par la moindre note dissonante il est à craindre qu'il détruise d'un tir d'une précision parfaite mon passeport vers la victoire. Je ne suis sûr de rien, mais je ne peux prendre un tel risque. Il est très tentant d'imaginer qu'au lieu de me sauver et d'atteindre solitairement la préséance, je puisse jouer cette musique cantique en boucle pour faire vibrer ma dimension originelle, brouillant par ce fait la visée du réticulé à jamais.
Mais je n'ai pas la prétention de changer ce monde, encore moins l'envie de devenir un anti Dieu Mouche condamné à être un éternel musicien que personne n'écoute. Je n'ai pas cet altruisme en moi, du moins plus maintenant. Et il est trop tard pour essayer de revenir à de meilleurs sentiments. Je n'ai plus aucun sentiment. Je ne suis plus qu'un trafiquant de l'évasion et le goût de mon anomalie est devenue ma raison gardée. Car je sais maintenant que ce n'est pas le Dieu Mouche qui essaye de me faire douter pour en tirer avantage, c'est bien moi qui par un réflexe bien naturel me retourne sans cesse vers l'humain. Il m'est bien trop séduisant de brutaliser l'intervalle qu'il existe entre mon désir de survie bien légitime et l'attrait de ma présence dans le sérail de ce monde qui, dans le fond, est bien le mien. Il y a des souvenirs qui m'accrochent encore à cette magie ordinaire qui ne l'est pas tant que j'ai bien voulu le croire. C'était ça, ce fil que j'avais laissé traîner sans y prendre garde. C'était ce besoin inconscient du souvenir que je n'ai pas pu couper, comme un imprévu, un synonyme de l'erreur que je n'avais pas vu, une complexité secondaire gravée au plus profond de ma chair.
Et voilà, c'est encore de moi dont je m'inquiète, encore moi qui me protège, encore moi qui me balance entre le feu et le sang, entre l'oubli et la présence. Pourtant je n'ai plus d'autre choix que d'aller jusqu'au bout de mon extravagance.
Je n'ai que des informations fragmentaires sur cet armurier, l'oracle m'a laissé plus de questions que de réponses. Je sais que c'est un mercenaire sans état d'âme, un militant acharné du libre échange et que probablement le Dieu Mouche est l'un de ses meilleurs clients. Je pourrais retourner embrasser cette odalisque aux pieds nus pour plus de précision, elle ne peut rien me refuser et je n'ai pas besoin de prendre un ticket temporaire pour la rencontrer. Je suis devenu un de ses amants depuis que j'ai gagné le prix en lui posant une question à laquelle elle n'a pas su répondre. Mais le problème reste entier, je ne peux plus voyager à découvert dans le monde réel qui reste un passage obligé pour l'ailleurs. Je pourrais emprunter les autoroutes des rêves, j'y serais en sécurité même si cela me rallonge. Pourtant j'ai l'intuition qu'il existe un raccourci rare et sans encombres, une route antique calme et sereine, un chemin oublié par tous.
Me voilà de nouveau face à un problème de taille, et je ne peux plus continuer à attendre perpétuellement dans mes ténèbres délectables, le Dieu Mouche est peut-être déjà entrain d’accélérer le rythme, prenant peu à peu de l’avance sur son planning mortel dans le but de pouvoir s’accorder le temps de venir me cueillir. Il me faut agir, prendre l’initiative avant qu’il ne soit trop tard, partir chercher cet armurier qui m’est indispensable, et voilà que survient le dilemme : je dois impérativement avancer mais j’ignore totalement quelle direction prendre. Mon refuge comporte plusieurs tunnels sinueux d’entrée et de sortie, et bien des fois j’ai failli me perdre dans ces labyrinthes obscurs. La dimension des Carnish est voisine de la mienne et le chemin pour y accéder est très court ; pourtant j’ai toujours ressenti une indubitable appréhension au moment de franchir le pas. Il y a bien un risque, même pour un trajet si simple, et c’est pourquoi je n’ai que quelques fois fait la traversée. J’ai longtemps essayé de dessiner une carte pour me repérer dans les allées étroites qui relient ma dimension à bien d’autres, mais les sentiers bougent et se transforment au gré de principes que je ne parviens pas à saisir. Je ne peux pas me lancer au hasard dans un de ces conduits sans même savoir où ils peuvent déboucher. Ce n’est pas simplement l’inconnu, c’est aussi l’inimaginable, et cela est bien plus effrayant. Il existe cependant une alternative.
Les accès à mon refuge sont presque impraticables, et c’est précisément en cela qu’il me protège. En revanche, je suis convaincu que ce qui donne tant de pouvoir au Dieu Mouche sur mon monde originel, c’est justement qu’il existe des passerelles presque rectilignes, des autoroutes directes et sans risques, des fenêtres invisibles aux humains et qui permettent au Dieu Mouche et à ses serviteurs de préserver l’infaillibilité de leur système meurtrier. La solution qui se présente à mes yeux serait donc de retourner sur ma terre natale de laquelle je pourrai couper bien plus facilement à travers les dimensions pour rechercher le forgeron dont j’ai besoin. Seulement il y a plusieurs risques, et ils sont immenses : premièrement je marcherai de nouveau sous la menace de l’œil du Dieu Mouche, balayant constamment chaque parcelle, vérifiant ses calculs et traquant les éventuelles anomalies, et je sais qu’il tirera à vue s’il me repère. Deuxièmement, je serai de nouveau confronté à mes congénères, et étrangement, il m’est difficile de prévoir quelle sera leur réaction à mon contact, tout comme demeure indiscernable, et cela est plus inquiétant encore, ma propre réaction. Je ne dois pas m’aveugler délibérément, il me faut avouer que je ne suis pas totalement libéré de mes chaînes, et il y a surtout une corde sensible dont la vibration puissante pourrait me faire chavirer : la nostalgie de l’humain. Je pourrais passer inaperçu au milieu des foules désenchantées, me frayer un chemin entre les humains comme un courant d’air froid, frôler leur conscience sans y créer de remous et n’être qu’un spectre furtif s’effaçant instantanément des mémoires, pour éviter ce contact synonyme d’un danger d’autant plus grand qu’une partie de moi est attirée vers lui. J’étais le plus insaisissable des hommes et je saurais l’être de nouveau, je pourrais ignorer les bleus et les verts de ces regards que je n’ai pas pu complètement oublier, mais c’est sans compter les partitions de Carnish. C’est un artefact puissant auquel, j’en suis sûr, les humains ne seront pas insensibles. Je peux les sceller tant bien que mal, mais il m’est impossible d’étouffer complètement leur vibration, les regards se tourneront immanquablement vers moi, et je pourrais me rompre et les sceaux pourraient céder. Alors, je ne sais ce qu'il adviendrait de cette puissante énergie que je ne contrôle pas encore.
Au contact des possibilités du réel ces partitions risqueraient bien de s'oxyder à jamais, voir pire encore, elles joueraient leur propre musique en se servant de ce nouveau support, initiant les esprits humains à une dérive flamboyante pour un exil sans fin. Je crois bien hélas que le Dieu Mouche ne puisse tolérer un tel exode, alerté par la moindre note dissonante il est à craindre qu'il détruise d'un tir d'une précision parfaite mon passeport vers la victoire. Je ne suis sûr de rien, mais je ne peux prendre un tel risque. Il est très tentant d'imaginer qu'au lieu de me sauver et d'atteindre solitairement la préséance, je puisse jouer cette musique cantique en boucle pour faire vibrer ma dimension originelle, brouillant par ce fait la visée du réticulé à jamais.
Mais je n'ai pas la prétention de changer ce monde, encore moins l'envie de devenir un anti Dieu Mouche condamné à être un éternel musicien que personne n'écoute. Je n'ai pas cet altruisme en moi, du moins plus maintenant. Et il est trop tard pour essayer de revenir à de meilleurs sentiments. Je n'ai plus aucun sentiment. Je ne suis plus qu'un trafiquant de l'évasion et le goût de mon anomalie est devenue ma raison gardée. Car je sais maintenant que ce n'est pas le Dieu Mouche qui essaye de me faire douter pour en tirer avantage, c'est bien moi qui par un réflexe bien naturel me retourne sans cesse vers l'humain. Il m'est bien trop séduisant de brutaliser l'intervalle qu'il existe entre mon désir de survie bien légitime et l'attrait de ma présence dans le sérail de ce monde qui, dans le fond, est bien le mien. Il y a des souvenirs qui m'accrochent encore à cette magie ordinaire qui ne l'est pas tant que j'ai bien voulu le croire. C'était ça, ce fil que j'avais laissé traîner sans y prendre garde. C'était ce besoin inconscient du souvenir que je n'ai pas pu couper, comme un imprévu, un synonyme de l'erreur que je n'avais pas vu, une complexité secondaire gravée au plus profond de ma chair.
Et voilà, c'est encore de moi dont je m'inquiète, encore moi qui me protège, encore moi qui me balance entre le feu et le sang, entre l'oubli et la présence. Pourtant je n'ai plus d'autre choix que d'aller jusqu'au bout de mon extravagance.
Je n'ai que des informations fragmentaires sur cet armurier, l'oracle m'a laissé plus de questions que de réponses. Je sais que c'est un mercenaire sans état d'âme, un militant acharné du libre échange et que probablement le Dieu Mouche est l'un de ses meilleurs clients. Je pourrais retourner embrasser cette odalisque aux pieds nus pour plus de précision, elle ne peut rien me refuser et je n'ai pas besoin de prendre un ticket temporaire pour la rencontrer. Je suis devenu un de ses amants depuis que j'ai gagné le prix en lui posant une question à laquelle elle n'a pas su répondre. Mais le problème reste entier, je ne peux plus voyager à découvert dans le monde réel qui reste un passage obligé pour l'ailleurs. Je pourrais emprunter les autoroutes des rêves, j'y serais en sécurité même si cela me rallonge. Pourtant j'ai l'intuition qu'il existe un raccourci rare et sans encombres, une route antique calme et sereine, un chemin oublié par tous.