Publié le 09/05/2012 à 13:47:16 par Gregor
Je n'ai jamais tenu d'arme dans ma vie. Et me retrouver avec deux énormes fusils d'une trentaine de kilos chacun est déroutant. Ce n'est qu'un exercice pourtant.
— Prêt, Max ?
— Je crois que oui, Roman.
Je lutte contre l'envie de l’appeler maître. Il me l'a formellement interdit. Ce titre le gêne plus qu'il ne l'honore. Il m'a bien expliqué que cela ne change rien à la relation professorale qui nous unit. Et à cet instant, il se tient à une trentaine de mètres au moins, une cible de la taille d'une pomme flanquée à bout de bras. Je ne peux pas le blesser. Techniquement, j'en suis incapable. Et l'idée de tirer dans sa direction me rend presque malade. Ce n'est pourtant qu'un simple exercice. Il suffit de me concentrer, de centrer le cibleur sur la sphère virtuelle, et de déclencher la commande de tir. Tout est très simple, bien trop simple.
— Maintenant.
Le cibleur trouve sa cible. L'ordre part sans même que je ne le veuille. Une giclée lumineuse s'échappe du canon massif du fusil, et transperce l'espace plus vite que n'importe quel projectile physique. Roman reste un instant ainsi, debout, le bras gauche tendu à l'horizontale. La lumière se dissipe, une chaleur lourde envahit le hangar.
— Parfait. Tes centres coordinateurs sont pleinement opérationnels.
— Et que se serait-il passé si j'avais dévié ?
— Mon bras aurait été réduit à une purée de plasma élémentaire.
Cette simple idée me fait baisser ma garde. Le fusil dans ma main droite se retrouve au niveau du sol.
— Tout va bien, Max, je te le répète.
— Roman, j'aurais pu te tuer !
— Il n'y avait aucune raison d'être aussi tendu. Des sécurités se seraient enclenchées. Mon armure aurait dévié une partie du tir et absorbé une bonne partie du rayonnement. De plus, je n'aurais pas souffert le martyre, et il aurait été très simple de remplacer l'implant.
Il n'a pas tort. Le major Asweltorf l'aurait fait sans problèmes.
— Bon, puisque cette première tentative est concluante, autant attaquer les choses sérieuses.
Il disparaît. Des dizaines de Roman surgissent un peu partout dans l'espace vide du hangar. Hollos ou déplacements hypervéloces ?
— Ce n'est pas juste un exercice à présent. Il va falloir que tu tires sur les cibles et que tu réussisses à me retrouver.
La voix est portée par cinquante visages, parfaitement détendus. Je ne dois surtout pas rester déconcentré. Il n'y a aucune raison d'avoir peur.
— Maintenant, Max !
Le nombre d'apparitions de Roman se multiplie. Mes optiques arrivent à en compter soixante-seize. Chacune possède son propre algorithme de présence, de la milliseconde à la dizaine de secondes. Je ne dois même plus réfléchir, simplement laisser filer les munitions photoniques et faire confiance à mon corps.
Premier tir, la cible est atteinte de plein fouet. Un indicateur visuel m'informe que le taux d'énergie de la sphère est aligné sur une signature identifiable. Il faudra détruire toutes les sphères pour retrouver Roman.
— Trop lent ! Ne baisse pas ta garde !
Premier coup de botte dans le dos. Je vacille, mais tiens bon. Il va me frapper, de plus en plus fort.
Le cibleur clignote de soixante-quinze petits cercles rouges. Je tire. Je sens les sphères disparaître à un rythme effréné. Le temps ralenti, Roman est moins rapide, ou mon esprit a trouvé une tactique d'adaptation efficace. Je comprends que les centres cybernétiques entament une distorsion relativiste du flux d'informations temporel. Roman se retrouve piégé, très facilement, trop facilement. Les cibles tombent en quelques secondes. Roman continue sa danse folle. Il frappe, encore.
— Tes arrières, Max !
La signature énergétique se dégage. Roman émet trop de flux pour devenir invisible. Une longue traînée le suit comme une piste lumineuse. Je sais où me placer pour l'intercepter.
Je cours vers l'ouverture béante du hangar, vide vers l'espace. Je tends mon bras gauche, il le percute violemment. Je ne ralentis pas.
Ce n'est plus un simple exercice. Je dois avoir sa confiance.
— Max, tu as gagné la seconde manche. Voyons la dernière.
Ne ne touchons plus pied-à-terre. Roman a enclenché les répulseurs de son armure, nous filons à bonne vitesse vers l'ouverture. Nous la franchissons. Je suis tétanisé.
Les lueurs bleutées des réacteurs sont loin au dessus de nos têtes, mais elles nous attirent comme une série d'aimants chauffés au-delà du supportable. Nos casques se sont rabattus sur nos têtes.
— Tu as exactement trente-cinq secondes avant que les réacteurs à fusions nous grillent. Bonne chance.
Je ne panique pas. Je suis vidé d'émotion. Je sais quoi faire.
Je nous laisse glisser vers la mort, avant de faire tourner à mon tour mes répulseurs. Nous frôlons à une vitesse de plusieurs milliers de kilomètres par heures les réacteurs, une vague de chaleur nous plombe. Je sens Roman hoqueter de surprise, puis se raviser. Notre trajectoire s'incurve vers la proue du croiseur. Nous repassons au dessus de sa carlingue noire, ici, plongée dans les ténèbres intersidérales. Mon interface optique m'indique que nous nous trouvons dans un système binaire distant de plusieurs centaines d'années-lumières de la Terre. L'information devrait me surprendre, il n'en est rien. Nous continuons notre course folle, avant de nous retrouver sur le flanc bâbord, face à une ouverture du même type que celle du hangar. J'accroche notre vitesse à celle du vaisseau, et pénètre dans le champ de force.
Roman défait son casque. Il transpire, et il sourit.
— je ne pensais pas que tu aurais le culot de le faire. Il m'a fallu trois journées pleines pour apprendre à manier les vols avec l'armure.
— Retire les heures de sommeil que je n'ai pas eues, et je pense que tu auras grosso modo le même tempo, réponds-je, encore trop excité pour tout assimiler.
— Au moins savons-nous que ton corps anticipe et réagit très bien en situation d'urgence. Félicitations, Max. Je pense que tu es prêt à sauter.
— Maintenant ? M'étonné-je.
— Pourquoi attendre ?
Je défais à mon tour mon casque. Il rit de plus belle.
— Tu es blanc comme un linge !
— Peut-être devrais-je me reposer un peu, Roman…
Il retrouve son sérieux, comme si rien ne s’était passé.
— L'urgence est relative, rassure-toi. Et vu notre destination, je pense qu'effectivement, un peu de repos te sera bénéfique.
Commentaires
- Magnus
10/05/2012 à 22:51:27
De rien Martin, mais je tiens à souligner que cela reste avant tout mon ressenti (bon, je pense que tu l'auras compris tout seul, mais je veux pas non plus passer pour le casse-burne de service, je n'ai aucun intérêt à vouloir te casser).
Je comprend aussi l'envie de changer, ça m'est arrivé sur la fin d'AM, jusqu'à ce que j'arrive à la période où je pondais cinq pages par jour jusqu'à la cloture du roman. J'espère qu'il en sera de même pour toi. Puis une fois RM terminé, tu pourras aborder ce récit bien plus sereinement, sans te dire "Je dois encore finir tel ou tel". - Gregor
10/05/2012 à 21:34:15
Ta réflexion, quoique douloureuse à entendre, demeure pertinente.
J'y ai réfléchi de longues heures, et je vais donc mettre en suspens ce texte, pour me consacrer à RM.
Je n'abandonne pas, ceci étant dit. Mais sous cette forme, avec ces erreurs de jugements et le manque de pertinence du récit comme de la syntaxe, il est effectivement sans doute plus sain et correct tant pour les lecteurs que pour moi-même d'arrêter les frais. Temporairement. J'y reviendrais en temps et en heure.
Cela aura été une expérience riche. Pondre une telle quantité en si peu de temps m'a redonner le gout d'écrire, un peu de confiance et quelques certitudes.
Donc Fab, merci. - Magnus
09/05/2012 à 17:30:24
Bon, ça va pas. Soit tu écris au passé, soit au présent de l'indicatif, mais cesse cette escalade de mélanges qui me triture les neurones !
Plus concrètement, je n'arrive pas à accrocher, et c'est bien la première fois que ça m'arrive pour un de tes récits. On dit qu'il ne faut jamais user la corde jusqu'à la ficelle et je crois que c'est exactement ce que tu es en train de faire. En voulant faire de l'exploitation de l'univers d'AE sa propre fin, tu négliges le reste.
Les personnages ont un sérieux problème charismatique à mon goût et ça passe d'abord par les prénoms qui sont d'une banalité affreuse. Je veux dire par là qu'ils ne sont que de simples étiquettes afin de pouvoir les identifier. Il n'y a rien derrière eux, ils n'ont aucune épaisseur.
L'autre souci, c'est que l'on ne sait pas trop où tu veux nous mener. On se croirait à bord d'un navire qui fait du chari-vari, tantôt à gauche, tantôt à droite. Pour les autres, je ne sais pas, mais en ce qui me concerne je suis incapable de me repérer dans ce récit, que ce soit par le biais des personnages qui sont tous des écrans de fumés (ce dont j'ai horreur dans une lecture) que par l'acheminement du récit.
Bref, deux options s'offrent à toi. Où tu entames une sérieuse relecture pour effacer ces défauts tout en te posant une réflexion qui te permettra de définir le fil rouge et ainsi savoir toi-même où tu vas, soit tu laisses tomber et termines d'abord RM, parce qu'entamer un nouveau récit avant la cloture du précédent n'est bon ni pour l'un, ni pour l'autre. Au final, tu te retrouveras avec un projet avorté (RM) et un autre qui sera d'une médiocrité moyenne qu'on oubliera aussitôt.
Je ne dis pas ça pour être méchant, mais là, en te lisant, j'ai eu la nette impression que tu t'étais perdu au milieu d'une brume poisseuse, incapable de t'en sortir. Je veux bien jouer le rôle de phare pour t'indiquer la bonne route, mais maintenant, c'est à toi de voir la solution que tu préfères.