Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

L'Homme Du Temps


Par : MassiveDynamic
Genre : Science-Fiction, Sentimental
Statut : C'est compliqué



Chapitre 3 : L'Homme Et L'Inconnu


Publié le 18/09/2011 à 19:06:50 par MassiveDynamic




"- Alors, t'as trouvé ça comment ?

- Ca m'a tellement retourné le cerveau que j'ai failli en crever. Moi, je m'en branle, mais pour Emma, la pauvre, ça lui a foutu la frousse.

- Bah, c'est les gonzesses ça. Toujours trop sensible.

- Nan, c'est juste l'amour et l'inquiétude, mais tu dois pas connaître. "

Conversation téléphonique avec Théo, l'un de mes amis et accessoirement le dealer qui se charge de vendre les substances les plus étranges du coin. Il tenait absolument à passer me voir. J'avais failli mourir en prenant son produit, par conséquent, il voulait venir me remonter le moral. Mais j'ai beau lui avoir dit que j'en avais pas grand chose à foutre, il s'est quand même mit en route. Sacré Théo.


Nous vivions en plein Paris. J'avais quitté ma province natale pour m'installer ici avec Emma, puisqu'elle comptait faire une grande école, et moi, et bien, j'aspirais à me spécialiser dans les arts. Mais la théorie est toujours plus simple que la pratique. Nous nous sommes retrouvés dans un quatre pièces au prix incroyablement élevé, et les quelques bourses que nous avions obtenus étaient d'une aide dérisoire. J'ai donc du faire du travail à la chaine plusieurs mois pour gagner un peu d'argent, mais la routine commençait à m'aliéner, alors j'ai tout quitté. Emma a conservé son petit boulot de serveuse. Les lundis, mercredis et tous les week-end. Les autres jours, elle allait à la fac. Malheureusement pour nous, il n'y avait pas papa et maman pour nous aider. Ses parents nous ont filé un coup de pouce les premiers mois, et depuis, nous avons appris à nous débrouiller. Enfin, surtout elle. Moi, encore maintenant, je passe la majeure partie de mon temps à jouer à des jeux-vidéos ou bien à zoner avec des potes aussi perdus que moi. J'ai vite abandonné mes plans quand j'ai compris que pour réussir il fallait marcher sur les autres et avoir les bonnes relations. Je n'ai pas perdu mes ambitions, évidemment, elles sont encore là, dans un coin très reculé de mon esprit, embrumées par les choses inutiles que je fais ou consomme.

J'ai rencontré Théo à mon arrivée à Paris. Ce qui m'a tout de suite fait sourire à propos de lui, c'est qu'il avait exactement les mêmes rêves que moi. Des choses démesurées, hors de portée du commun des hommes, qu'il était pourtant persuadé de pouvoir atteindre. Et, finalement, il vend des substances illicites pour gagner sa vie. Alors, oui, au moins, il engrange de l'argent. Mais il se salit les mains avec la mauvaise couche de peinture. Quant à ma vie à moi, en ce moment, elle aurait bien besoin d'une nouvelle couleur.

Emma n'était pas là. Aujourd'hui, c'est la fac. J'allais me tailler la barbe rapidement, laissant pas mal de poils ci et là, tant dans le lavabo que sur mon visage. Ceux qui n'étaient pas tombés sous la lame. Fraîchement habillé, je quittais l'appartement, collé à une petite épicerie, histoire d'aller faire un petit tour. Toujours le même décor, ici. Les gens pressés. Je fis une halte au bureau de tabac et pris deux tickets à gratter, puis j'en profitais pour jouer mes numéros fétiches au loto. Quatre, huit, quinze, seize, vingt-trois, quarante-deux. Puis j'en profitais pour faire quelques rapides courses avant de regagner le chemin de la maison. Théo n'allait pas tarder à arriver.

Dans le hall d'immeuble, Ellen croisa ma route. C'était une charmante voisine. Disons que je lui ai déjà emprunté quelques bouteilles de lait. Juste du lait. Pas plus. Nous échangeâmes de brèves salutations puis chacun reprit son chemin. Je pris mon courrier et remontai les marches vers mon chez moi. Une lettre m'était adressée.

Une fois de retour au bercail, je rangeai rapidement les courses, et j'eus à peine le temps de placer un pack de bière au frigo que l'interphone sonna bruyamment. Le voilà qui arrivait, sur son scooter d'argent, le grand Théo. Il arriva en forme, sans être essoufflé par les quatre étages à monter, et passa ma porte tout fringant. Nous échangeâmes une vive poignée de main puis nous nous mirent assis sur mon canapé. Je posai l'enveloppe sur ma table noire moderne.

"- Alors, ça dit quoi ? Lui lançai-je.

- Bah, la routine. Marie me rend dingue pour que j'arrête de vendre, me dit-il, tout en commençant à rouler une cigarette sur ma table.

- Elle a peut-être pas tout à fait tord. Elle a un emploi, toi tu peux te démerder pour en trouver un, vous êtes plus dans la dèche, t'as plus besoin de ça.

- Attends, tu rigoles ? Tu sais combien je me fais par semaine ? Et ça table sur trois zéros derrière, déjà ! Crois-moi, quand tu as tenu au moins une fois tous les billets que je tiens chaque dimanche soir, tu ne peux pas t'arrêter. C'est juste impossible. "

Il sorti un petit sachet hermétique avec de petites boules vertes. Il se mit à les effriter et à préparer son petit bout de fumette. J'allai nous chercher deux verres d'alcool, lui tendis le sien, puis repris.

" - Si tu veux fumer, c'est à la fenêtre. Sinon, l'odeur va rester, et tu connais Emma. "

Il acquiesa. Je sortis les tickets achetés et me mis à les gratter, pendant que Théo, à la fenêtre, son kick en bouche, me questionna.

" - Alors, il s'est passé quoi au juste ? Me demanda-t-il accoudé à la fenêtre.

- Bah, je te l'ai dit. Mon corps a pas du supporter. C'est bizarre, lui répondis-je, grimaçant à la vision de mes tickets perdant.

- T'es sûr de pas trop avoir forcé dessus au moins ? Lança-t-il crapotant, laissant virer son visage au dégoût.

- J'ai fait comme tu m'as dit. Et puis je m'en branle, c'est bon, j'en suis pas mort. Donc me casse pas les couilles avec ça, j'y ai assez eu le droit avec Emma. "

Mon ton était presque agressif, mais j'étais lassé de toute cette complaisance. J'ouvris ma lettre brutalement et me mis à la lire, craignant une énième facture.

" - Oh putain ! "

M'exclamai-je, attirant l'attention de Théo qui avait la tête penchée vers l'horizon. Il se retourna et me demanda ce qu'il se passait. Je me mis à lire la lettre.

" - Conformément à l'accord signé, le versement sur votre compte de la somme d'un million d'euros a bien eu lieu. Cordialement.

- Hein ?! S'écria Théo, écrasant son cul de joint pour venir me rejoindre.

- Non... On se fout de ma gueule. C'est anonyme. Y'a rien, pas d'expéditeur, pas de nom de société, nada. "

Je fis une boule de la lettre et l'envoya voler dehors. Théo se mit à me résonner.

" - Attends, attends. Appel au moins la banque, ou descend au distributeur, je sais pas, ça te coute rien ! "

Théo bougeait dans tous les sens. Quelle naïveté. Dans un soupir, je me levai et pris mon manteau, tout en enfilant une vieille paire de basket. Je lui dis de m'attendre ici, et j'allai vérifier l'information anonyme à la banque la plus proche. J'eus bien cru m'évanouir quand on m'annonça que mon compte avait bien était crédité d'un million d'euros. Un million. Un putain de million. Dans un premier temps, les sueurs froides et le coeur me fracassant la poitrine furent mes premières réactions. Puis vint le souffle haletant. Je m'appuyais au comptoir pour essayer de reprendre mon calme. La guichetière me demanda à travers la vitre si j'allais bien. Je repris tant bien que mal un semblant de raison, puis je lui demandai de qui étais-je tributaire. Elle me répondit qu'une clause de contrat lui interdisait de me donner le nom du donateur. Je lui rétorquai que je n'avais signé aucun contrat, qu'il y avait sûrement une erreur. Et elle me répondit droit dans les yeux, de sa voix niaise d'employée de banque.

" - Non, aucune erreur n'a été faite, nous avons bien reçu la demande de transfert d'un million d'euros sur le compte de Rode Sersy conformément au contrat qui vous lie à votre affilié. Et au vu de vos pièces d'identités et de votre compte, vous êtes bien Rode Sersy. Je ne peux rien de plus pour vous monsieur. "

Je quittai la banque en panique, regagnant mon domicile. Théo eut la même réaction que moi à l'annonce de ma soudaine richesse. Et il était visiblement aussi perdu que moi. Un million. Pour quoi ? Quel contrat ? On ne donne pas de l'argent gratuitement. Encore moins une telle somme. Je n'avais pas peur de grand chose, encore moins de la mort, mais là, j'avais cet horrible pressentiment que quelque chose de bien pire allait me tomber dessus.


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