Note de la fic :
Publié le 21/10/2009 à 19:58:07 par -AtantoinE-
V
Cela faisait alors un mois que nous nous consultions tous les soirs, dans ce parc. Ce jour-là, les feuilles avaient terminé de se rompre des arbres. La chaleur avait fini de sévir pour laisser définitivement place à l'haleine envoûtante de l'hiver. Le lendemain de notre rendez-vous au cinéma, Tina avait cessé de venir, elle aussi. Elle avait cessé de penser à moi. Elle songeait à autre chose. Je frémissais. C'est son coeur qui avait décidé de s'arrêter. Je ne savais pas qu'elle avait ce genre de problème. A ce moment-là, j'ai eu un frémissement. Je l'imaginais allongée, lasse, les yeux fermés, sereine, en proie aux rêves d'éternité, sous les fleurs posées sur l'herbe verte.
J'ai sursauté. Il ne fallait pas que je pense à ça. Surtout pas.
Tous les jours, je savais qu'elle ne viendrait plus. Je savais que je me retrouverais encore seul, à attendre que quelqu'un vienne s'asseoir à mes côtés. En vain. Je savais tout cela. C'est quelque chose qu'on peut ressentir. Même sans raison apparente, je ne la verrais plus, en tout cas, plus ici. Pourtant, je venais tous les soirs. Ce parc était comme un refuge, je ne pouvais pas finir la journée sans y passer. Aujourd'hui, ce ne sont plus les feuilles, mais la neige. Les flocons de neige qui tombent par terre. Faut-il vraiment qu'il y ait toujours quelque chose qui aille au sol ?
Je rentrais alors chez moi. Je n'ai pas mangé, je n'ai pas regardé si j'avais des messages, je n'ai pas allumé l'ordinateur. Je me suis empressé d'aller dans ma chambre. Encore une fois j'étais dans le noir, dans le silence, seul. Voilà, comme je suis bien. Toute la peine accumulée jusque là était évacuée ici-même. Oui, j'ai pleuré. Comme lorsque j'étais enfant, j'ai pleuré. Mais pas des sanglots forcés, cette fois-ci. Je murmurais des choses, j'exprimais mes pensées à voix basse, à moi-même. Dans l'infinité de ce silence, à Tina. Elle est décidément trop loin.
Mon lit se trouvait au fond de la chambre, j'avais laissé la porte ouverte, qui donnait sur le couloir. Et alors que mes soupirs cessaient peu à peu, je fus réveillé par quelque chose qui me tétanisa. Un petit point lumineux qui traversait l'appartement : L'extrémité incandescente d'une cigarette. J'étais pétrifié d'effroi. Je n'osais plus dire un mot, un souffle, un son, quel qu'il soit. J'observais patiemment ; j'aurais voulu me fondre dans les murs. C'est alors que cette cigarette se dirigea vers le salon au rythme des bruits de pas qui faisaient craquer le vieux plancher. Cette unique source de lumière dans la profondeur insondable de l'obscurité me happait, m'effrayait, m'hypnotisait. Je redoutais à chacun des pas effectués dans ma direction et tentais de garder mon sang froid.
C'est alors que le mystérieux intrus fouilla dans les tiroirs. Ce fut le moment clef, celui qui me mit hors de moi. Ce n'était pas tant le fait qu'un voleur fouine et se serve dans mes affaires qui me gênait. Il n'avait simplement pas choisi le bon endroit pour faire sa basse besogne. Ce tiroir, dans ce bureau ! C'est ici que j'avais écris tant de choses. C'est ici que je m'asseyais tous les soirs, pendant de longues heures, devant une feuille de papier et un stylo. C'est ici même que je pouvais enfin libérer tout l'amour qui restait trop longtemps prisonnier au fond de moi-même. Prisonnier dans un cachot humide et sans couleur, n'ayant jamais vu le jour et ne demandant qu'à être offert à quelqu'un qui saurait le recevoir. Des poèmes, des histoires. Parfois de simples mots. Tous dédiés à Tina. C'était une fille seule, discrète, un peu timide. Il me suffisait de fermer les yeux et penser à elle pour que l'inspiration vienne. C'était plus qu'une envie, c'était un réel besoin. Sans cesse assouvi ; mais qui revenait à la charge dès le lendemain, entraînant une spirale sans fin.
Cela devait rester secret. Tina elle-même ne serait sans doute pas enchantée de lire des choses si sordides.
Je sortis de mon lit et marcha lentement en direction du salon. En posant d'abord mon talon, puis le reste du pied, jusqu'aux orteils, et en faisant basculer mon poids d'une jambe à l'autre, je pus marcher en étouffant mes pas. Le voleur n'eut donc pas l'occasion d'entendre que quelqu'un s'approchait de lui. Il était sans doute trop occupé à lire ces feuilles griffonnées et mal écrites, souillées par tant de peine. Au contraire d'ailleurs. Je l'entendais les déchirer. Il prenait à peine le temps de voir ce qui y figurait qu'il jetait déjà les fractions de feuilles décousues par terre, ou les transformait en boules de papier froissés. Tout ce que j'avais fait ; tout ce pourquoi mon coeur battait jusqu'à présent. C'était une partie de moi qui s'envolait. Je n'hésitais donc plus. J'ouvris adroitement le placard de ma chambre et en sortit une vieille épée en bois. Oui, quand j'étais petit, j'ai toujours rêvé d'avoir ce genre d'objet. Qu'est-ce que j'ai pu jouer avec mes copains d'alors... Aujourd'hui, ces amis sont partis, mais ces jouets, je les garderais encore longtemps.
C'est alors que le mystérieux voleur fit volte-face. Ayant dû entendre un bruit suspect, il sonda le silence un instant. Se croyait-il donc réellement seul, chez moi ? Mon sang se glaça, je ne bougeais plus, les mains crispées sur mon épée. J'attendais qu'il se passe quelque chose : mais rien ne se produisit pendant de longues minutes. Jusqu'au moment où je dû lâcher un soupir. Très léger, presque inaudible, juste histoire de relâcher la pression accumulée en moi. Mais cela suffit. L'intrus éteignit sa cigarette, unique source lumière qui faisait faiblement refléter son visage sombre, puis se mit en route d'un pas décidé vers ma chambre. Je m'apprêtais donc à frapper. Il pénétra dans la pièce et, dans le noir le plus complet, je tentais de voir quelque chose : Je m'écartais d'un pas sur le côté et fit pivoter énergiquement l'épée en bois en direction de la tête. On entendit un bruit sourd très sonore, un souffle, puis un corps qui s'écroule. J'avais visé la nuque. J'ai allumé la pièce quelques secondes. La lumière avait agressé mes yeux déjà habitués à la pénombre.
J'ai éteins. Mais était-ce vraiment pour ne plus être ébloui ? Ou pour fermer les yeux sur ce corps inerte ?
Cela faisait alors un mois que nous nous consultions tous les soirs, dans ce parc. Ce jour-là, les feuilles avaient terminé de se rompre des arbres. La chaleur avait fini de sévir pour laisser définitivement place à l'haleine envoûtante de l'hiver. Le lendemain de notre rendez-vous au cinéma, Tina avait cessé de venir, elle aussi. Elle avait cessé de penser à moi. Elle songeait à autre chose. Je frémissais. C'est son coeur qui avait décidé de s'arrêter. Je ne savais pas qu'elle avait ce genre de problème. A ce moment-là, j'ai eu un frémissement. Je l'imaginais allongée, lasse, les yeux fermés, sereine, en proie aux rêves d'éternité, sous les fleurs posées sur l'herbe verte.
J'ai sursauté. Il ne fallait pas que je pense à ça. Surtout pas.
Tous les jours, je savais qu'elle ne viendrait plus. Je savais que je me retrouverais encore seul, à attendre que quelqu'un vienne s'asseoir à mes côtés. En vain. Je savais tout cela. C'est quelque chose qu'on peut ressentir. Même sans raison apparente, je ne la verrais plus, en tout cas, plus ici. Pourtant, je venais tous les soirs. Ce parc était comme un refuge, je ne pouvais pas finir la journée sans y passer. Aujourd'hui, ce ne sont plus les feuilles, mais la neige. Les flocons de neige qui tombent par terre. Faut-il vraiment qu'il y ait toujours quelque chose qui aille au sol ?
Je rentrais alors chez moi. Je n'ai pas mangé, je n'ai pas regardé si j'avais des messages, je n'ai pas allumé l'ordinateur. Je me suis empressé d'aller dans ma chambre. Encore une fois j'étais dans le noir, dans le silence, seul. Voilà, comme je suis bien. Toute la peine accumulée jusque là était évacuée ici-même. Oui, j'ai pleuré. Comme lorsque j'étais enfant, j'ai pleuré. Mais pas des sanglots forcés, cette fois-ci. Je murmurais des choses, j'exprimais mes pensées à voix basse, à moi-même. Dans l'infinité de ce silence, à Tina. Elle est décidément trop loin.
Mon lit se trouvait au fond de la chambre, j'avais laissé la porte ouverte, qui donnait sur le couloir. Et alors que mes soupirs cessaient peu à peu, je fus réveillé par quelque chose qui me tétanisa. Un petit point lumineux qui traversait l'appartement : L'extrémité incandescente d'une cigarette. J'étais pétrifié d'effroi. Je n'osais plus dire un mot, un souffle, un son, quel qu'il soit. J'observais patiemment ; j'aurais voulu me fondre dans les murs. C'est alors que cette cigarette se dirigea vers le salon au rythme des bruits de pas qui faisaient craquer le vieux plancher. Cette unique source de lumière dans la profondeur insondable de l'obscurité me happait, m'effrayait, m'hypnotisait. Je redoutais à chacun des pas effectués dans ma direction et tentais de garder mon sang froid.
C'est alors que le mystérieux intrus fouilla dans les tiroirs. Ce fut le moment clef, celui qui me mit hors de moi. Ce n'était pas tant le fait qu'un voleur fouine et se serve dans mes affaires qui me gênait. Il n'avait simplement pas choisi le bon endroit pour faire sa basse besogne. Ce tiroir, dans ce bureau ! C'est ici que j'avais écris tant de choses. C'est ici que je m'asseyais tous les soirs, pendant de longues heures, devant une feuille de papier et un stylo. C'est ici même que je pouvais enfin libérer tout l'amour qui restait trop longtemps prisonnier au fond de moi-même. Prisonnier dans un cachot humide et sans couleur, n'ayant jamais vu le jour et ne demandant qu'à être offert à quelqu'un qui saurait le recevoir. Des poèmes, des histoires. Parfois de simples mots. Tous dédiés à Tina. C'était une fille seule, discrète, un peu timide. Il me suffisait de fermer les yeux et penser à elle pour que l'inspiration vienne. C'était plus qu'une envie, c'était un réel besoin. Sans cesse assouvi ; mais qui revenait à la charge dès le lendemain, entraînant une spirale sans fin.
Cela devait rester secret. Tina elle-même ne serait sans doute pas enchantée de lire des choses si sordides.
Je sortis de mon lit et marcha lentement en direction du salon. En posant d'abord mon talon, puis le reste du pied, jusqu'aux orteils, et en faisant basculer mon poids d'une jambe à l'autre, je pus marcher en étouffant mes pas. Le voleur n'eut donc pas l'occasion d'entendre que quelqu'un s'approchait de lui. Il était sans doute trop occupé à lire ces feuilles griffonnées et mal écrites, souillées par tant de peine. Au contraire d'ailleurs. Je l'entendais les déchirer. Il prenait à peine le temps de voir ce qui y figurait qu'il jetait déjà les fractions de feuilles décousues par terre, ou les transformait en boules de papier froissés. Tout ce que j'avais fait ; tout ce pourquoi mon coeur battait jusqu'à présent. C'était une partie de moi qui s'envolait. Je n'hésitais donc plus. J'ouvris adroitement le placard de ma chambre et en sortit une vieille épée en bois. Oui, quand j'étais petit, j'ai toujours rêvé d'avoir ce genre d'objet. Qu'est-ce que j'ai pu jouer avec mes copains d'alors... Aujourd'hui, ces amis sont partis, mais ces jouets, je les garderais encore longtemps.
C'est alors que le mystérieux voleur fit volte-face. Ayant dû entendre un bruit suspect, il sonda le silence un instant. Se croyait-il donc réellement seul, chez moi ? Mon sang se glaça, je ne bougeais plus, les mains crispées sur mon épée. J'attendais qu'il se passe quelque chose : mais rien ne se produisit pendant de longues minutes. Jusqu'au moment où je dû lâcher un soupir. Très léger, presque inaudible, juste histoire de relâcher la pression accumulée en moi. Mais cela suffit. L'intrus éteignit sa cigarette, unique source lumière qui faisait faiblement refléter son visage sombre, puis se mit en route d'un pas décidé vers ma chambre. Je m'apprêtais donc à frapper. Il pénétra dans la pièce et, dans le noir le plus complet, je tentais de voir quelque chose : Je m'écartais d'un pas sur le côté et fit pivoter énergiquement l'épée en bois en direction de la tête. On entendit un bruit sourd très sonore, un souffle, puis un corps qui s'écroule. J'avais visé la nuque. J'ai allumé la pièce quelques secondes. La lumière avait agressé mes yeux déjà habitués à la pénombre.
J'ai éteins. Mais était-ce vraiment pour ne plus être ébloui ? Ou pour fermer les yeux sur ce corps inerte ?