Note de la fic : Non notée
Publié le 30/05/2017 à 07:36:07 par Mati07
Je passe par la trappe du toit et atterri sur le sol du QG. Pas de roulade cette fois, j'ai pas envie d'avoir un autre flash-back. Je me relève et pousse la porte qui donne sur le couloir. Je me dirige à grands pas vers le bureau de Patriarche, je tends la main vers la poignée et manque de prendre la porte en pleine face. Ombre sort du bureau de Patriarche et me regard à la fois surpris et réprobateur.
-Sabre, j'allais t'appeler sur ton communicateur. Patriarche veut te voir.
-Moi aussi, lui répondis-je. Et je dois te voir aussi après.
-Comme tu veux, dit-elle en haussant les épaules. Je serais dans la salle d'entraînement. Tu as une demi-heure.
Elle me laisse entrer dans la pièce et referme la porte derrière moi. J'ai l'impression qu'elle vient de m'enfermer dans une prison. Patriarche se tient devant moi, assis sur la table, l’œil sévère.
-Sabre, dit-il lentement. Ombre vient de m'expliquer ce que vous avez fait aujourd'hui. D'abord, je vous félicite pour avoir récupéré les plans de l'usine pour Dame Élise. Si on continue à coopérer, on pourra former une alliance avec elle. Maintenant, tu vas devoir m'expliquer. Pourquoi ne l'as-tu pas averti que tu as aperçu un Templier ? Tu sais que ça aurait pu vous coûter votre mission, ou pire, vos vies.
-Je... Je ne l'ai pas jugé nécessaire, chef, répondis-je nerveusement, la voix tremblante. Je n'ai pas pensé qu'il serait une menace immédiate.
-Considère chaque Templier comme une menace réelle. Même si tu ne les aperçois que de loin.
-Bien compris, chef. Cela ne se reproduira plus.
-Très bien. As-tu quelque chose à ajouter ? demande-t-il en se levant et en commençant à ranger quelques papiers sur la table.
-En vérité, oui, chef. Je, euh, j'ai croisé ce Templier sur le chemin du retour. Nous nous sommes battus rapidement, mais il a été interrompu par un appel de son Ordre.
-Et tu n'as rien fait ? Tu l'as laissé partir ?
-Oui, chef. Le tuer aurait été... déloyal.
Je ne voyais pas comment le définir autrement. Patriarche lève les yeux au ciel.
-Sabre, nous sommes des Assassins. Nous ne nous battons pas loyalement. As-tu au moins appris quelque chose ?
-Il se nomme David de Fresnes. C'est un Chevalier des Templiers et il se bat très bien avec une épée.
-De Fresnes ? C'est donc un aristocrate... Cela dit, rien d'étonnant, tous les Templiers sont haut placés. Autre chose ?
-Eh bien, monsieur, quelque chose qui devrait vous faire plaisir, continuais-je sans m'empêcher de sourire. J'ai conclu l'alliance avec Él... Dame Élise.
-Quoi ? Comment ?
Patriarche est vraiment surpris, je le vois dans ses yeux. Et je ne peux m'empêcher de sourire de satisfaction : j'ai réussi à surprendre le grand et fort chef des Assassins ! Les autres ne me croiront jamais. Je lui explique donc ce qui s'est passé : la tentative d'empoisonnement d'Arthur, le sauvetage in extremis d’Élise (enfin presque, mais bon, chaque histoire est embellie n'est-ce pas?) et bien sûr, point très délicat, quand je lui ai révélé mon identité. Je m'empresse aussitôt de me justifier, je la connais et elle a prouvé qu'elle était quelqu'un de confiance. Le chef lève une main et je m'interromps aussitôt.
-Sabre, Sabre, il était très imprudent de révéler ton identité à Dame Élise... Mais... (Une lueur malicieuse brille dans son regard, ce qui est assez déconcertant) Je dois avouer que cela nous a facilité les choses. À l'avenir, préviens-moi juste avant de faire ça. Mais je te félicite, ton premier jour en tant qu'Assassin a été brillant, en omettant tes quelques erreurs.
-Et je m'assurerais qu'elles ne se reproduisent plus jamais, Chef, dis-je en m'inclinant.
-Très bien. Félicitations, Sabre. Tu peux aller te reposer, tu l'as bien mérité.
-Merci.
Je me détourne et sors de la pièce, l'air confiant. Je suis soulagé, tout s'est déroulé à peu près comme prévu. Je regarde l'heure : il ne s'est écoulé que dix minutes. J'ai vingt minutes pour rejoindre tranquillement Ombre à la salle d'entraînement. Mais je suis peut-être trop excité de tout lui raconter, c'est sûrement à cause de ça que je suis arrivé au bout de deux minutes à peine. Mince.
J'ouvre doucement la porte. Ombre est là, un shinai à la main, mais elle ne s'entraîne pas. Elle se contente de faire des moulinets d'un air soucieux. Je referme la porte sans bruit et m'approche d'elle dans son dos.
-Tout va bien, Ombre ?
Elle sursaute et se retourne en me donnant un grand coup sur le haut du crâne, ce qui me fait tomber à la renverse et voir des petites étoiles.
-Sabre ! s'exclame-t-elle.
-Oui, c'est moi... C'est ta manière de reconnaître les gens ?
Elle se redresse avec un sourire aux lèvres.
-Exactement.
-Je m'en souviendrais. J'éviterai de t'approcher de trop près à partir de maintenant.
Elle rit doucement avant de se baisser en me tendant la main. Elle a rit. Ombre. Je n'en crois pas mes oreilles. Et je remarque qu'elle a l'air étrangement soulagée. Sûrement le coup qu'elle m'a donné qui lui a fait du bien, je suis sûr qu'elle voulait me frapper depuis que je lui ai révélé l'existence du Templier.
J'attrape sa main et elle me tire sur pied pour la deuxième fois de la journée. Elle me lance un regard qui veut dire « Alors, raconte-moi tout. » mais je ne lui dit rien pour la faire mariner un peu.
-Bon, Sabre, tu ne vas pas rester planté là, soupire-t-elle en croisant les bras. Si tu es ici, j'en conclus que le chef ne t'a pas renvoyé de l'Ordre. Que s'est-il passé ? Tu avais l'air mal parti pourtant.
-Merci du soutien ! lui dis-je avec une fausse moue.
Je lui raconte donc, et encore une fois, je ne peux m'empêcher de sourire devant sa surprise. Je crois que je ne m'en lasserais jamais. Je termine enfin mon récit et attends sa réaction.
-Donc, fini-t-elle par dire lentement, tu restes parmi nous ?
-Ne me dit pas que tu t'inquiétais ? je lui demande avec un sourire moqueur.
-Pas du tout ! J'avais juste peur que ça retombe sur moi. Je suis un peu ta responsable maintenant que le chef t'a mis en équipe avec moi. Hé, tu es blessé ! Tu t'es fais ça comment ? Contre le Templier ?
Je jette un coup d’œil à ma blessure à l'épaule. C'est un peu plus profond que ce que je pensais, et la douleur commence à revenir. J'y porte la main et la ramène devant mes yeux : ils sont tachés de sang.
-Viens, je vais te recoudre ça.
-Quoi ? Je préférerais voir une vraie infirmière !
-Tu oublies que je maîtrise les aiguilles ! Je vais te réparer en deux secondes, tu va voir.
-Pari tenu.
Elle repose son shinai et sort de la salle d'entraînement. Je la suis jusqu'à l'infirmerie, où elle m'invite à m'asseoir sur un tabouret. Elle fait chauffer l'aiguille, l'attache au fil et m'approche.
-J'espère que tu n'as pas peur des aiguilles, me dit-elle.
-Si tu permets, je vais dire adieu à mon bras... Juste au cas où.
-Va te faire voir, répond-elle avec un sourire. À ta place je dirais pas ça, tu sais de quoi je suis capable avec des aiguilles.
-On va déjà voir si tu es capable de recoudre les gens.
Elle approche l'aiguille de la plaie et je ne peux m'empêcher de fermer les yeux. Je sens quelque chose percer ma peau, suivi d'une légère douleur et de l'impression qu'on tire le bord de ma plaie. En fait, c'est ça le plus douloureux, je m'attendais à pire.
-Bon, et ce Templier, comment tu as dit qu'il s'appelait déjà ?
-David de Fresnes.
-Voilà. J'espère que tu l'as un peu blessé quand même.
-Non, je n'ai pas réussi à l'atteindre. Il est drôlement agile. Mais j'avais l'impression qu'il n'était pas à l'aise avec son épée.
-Comment ça ?
-Comme si... Il retenait ses coups.
-Désolée.
-Pourquoi ?
-Eh bien, commence-t-elle tout en continuant de refermer ma plaie, figures-toi qu'il existe des choses déshonorantes pour des épéistes. Que son adversaire retienne ses coups, par exemple, ou alors se faire frapper dans le dos.
Je ne dis rien. C'est vrai, maintenant qu'elle le dit. Je me demande pourquoi ce type retenait ses coups contre moi alors qu'il semblait avoir un minimum d'honneur. Je veux dire, il m'aurait tué avant de partir, non ? Il aurait très bien pu me frapper en passant à côté de moi. Pourquoi est-ce qu'il ne l'a pas fait ?
Quand j'y pense, si j'avais su dès le départ à propos de ce conflit entre Assassins et Templiers, je me demande si j'aurais accepté de les rejoindre. Et si oui... Quel camp aurais-je choisi ? Comment savoir lequel a raison ou non, lequel se bat vraiment pour ses idées, lequel protège vraiment le peuple ? Non, non, je n'ai pas le droit de douter. J'appartiens aux Assassins, et j'y appartiendrais jusqu'à la mort.
-Ombre ?
-Mmh ?
-Si je peux me permettre... C'est quoi ton vrai prénom ? Et pourquoi tu as rejoins les Assassins ?
J'ai peur de l'avoir énervée à nouveau. Elle s'arrête, mais apparemment plus pour réfléchir que de colère. Elle pose une main sur mon épaule, au-dessus de la plaie à moitié refermée.
-Je les ai rejoint parce que... Eh bien, disons que c'est de famille.
-Tes parents sont des Assassins ?
-Eh oui. Enfin, « étaient » serait plus appropriés. Ils sont morts.
-Oh, désolé.
-T'en fais pas. J'avais onze ans à ce moment, et c'est l'Ordre qui m'a recueilli.
-Dis-moi... Est-ce que tu... Enfin, est-ce que tu aurais accepté si c'était l'autre Ordre qui t'avait recueilli ? Les Templiers ?
Elle rit, mais c'est un rire jaune. Rien à voir avec son rire de tout à l'heure. Je me sens mal à l'aise. Je n'aurais pas dû lui demander ça.
-Jamais. Et je ne dis pas ça parce que j'ai toujours été dans l'Ordre des Assassins. Je préférerais mourir plutôt que de les rejoindre. Mais je vois ce que tu veux dire, tu te demandes ce qui nous différencie d'eux, pas vrai ?
-Eh bien, euh... On peut dire ça. Mais je ne songe pas à quitter les Assassins, hein !
-Ne t'en fais pas, beaucoup sont passés par là. Tu devras trouver la réponse par toi-même. Ah, et quant à mon nom, je te le dirais... Un jour, peut-être.
-Roh, aller, tu connais le mien !
Elle ne me répond pas et continue de me recoudre en silence. Elle finit enfin. Tant mieux, je ne sens plus mon épaule. Et je sens toute la fatigue de la journée retomber sur moi d'un coup, à tel point que je me demande si je vais arriver à me traîner jusqu'à chez moi.
-Bon, eh bien, Sabre, on se revoit demain, me dit Ombre d'un air enjoué. On aura sûrement des nouvelles de Dame Élise.
-Il va falloir être prêts, lui répondis-je. À demain, Ombre.
Elle me sourit avant de sortir. Bizarre cette fille, vraiment. Pendant toute ma formation, elle était froide et ne laissait jamais paraître aucun sentiment, et maintenant elle est... Eh bien, humaine, en fait. Je me hâte vers les vestiaires, prend une rapide douche, enfile mes vêtements de civil et sors du QG sous un ciel sombre et brumeux.
-Sabre, j'allais t'appeler sur ton communicateur. Patriarche veut te voir.
-Moi aussi, lui répondis-je. Et je dois te voir aussi après.
-Comme tu veux, dit-elle en haussant les épaules. Je serais dans la salle d'entraînement. Tu as une demi-heure.
Elle me laisse entrer dans la pièce et referme la porte derrière moi. J'ai l'impression qu'elle vient de m'enfermer dans une prison. Patriarche se tient devant moi, assis sur la table, l’œil sévère.
-Sabre, dit-il lentement. Ombre vient de m'expliquer ce que vous avez fait aujourd'hui. D'abord, je vous félicite pour avoir récupéré les plans de l'usine pour Dame Élise. Si on continue à coopérer, on pourra former une alliance avec elle. Maintenant, tu vas devoir m'expliquer. Pourquoi ne l'as-tu pas averti que tu as aperçu un Templier ? Tu sais que ça aurait pu vous coûter votre mission, ou pire, vos vies.
-Je... Je ne l'ai pas jugé nécessaire, chef, répondis-je nerveusement, la voix tremblante. Je n'ai pas pensé qu'il serait une menace immédiate.
-Considère chaque Templier comme une menace réelle. Même si tu ne les aperçois que de loin.
-Bien compris, chef. Cela ne se reproduira plus.
-Très bien. As-tu quelque chose à ajouter ? demande-t-il en se levant et en commençant à ranger quelques papiers sur la table.
-En vérité, oui, chef. Je, euh, j'ai croisé ce Templier sur le chemin du retour. Nous nous sommes battus rapidement, mais il a été interrompu par un appel de son Ordre.
-Et tu n'as rien fait ? Tu l'as laissé partir ?
-Oui, chef. Le tuer aurait été... déloyal.
Je ne voyais pas comment le définir autrement. Patriarche lève les yeux au ciel.
-Sabre, nous sommes des Assassins. Nous ne nous battons pas loyalement. As-tu au moins appris quelque chose ?
-Il se nomme David de Fresnes. C'est un Chevalier des Templiers et il se bat très bien avec une épée.
-De Fresnes ? C'est donc un aristocrate... Cela dit, rien d'étonnant, tous les Templiers sont haut placés. Autre chose ?
-Eh bien, monsieur, quelque chose qui devrait vous faire plaisir, continuais-je sans m'empêcher de sourire. J'ai conclu l'alliance avec Él... Dame Élise.
-Quoi ? Comment ?
Patriarche est vraiment surpris, je le vois dans ses yeux. Et je ne peux m'empêcher de sourire de satisfaction : j'ai réussi à surprendre le grand et fort chef des Assassins ! Les autres ne me croiront jamais. Je lui explique donc ce qui s'est passé : la tentative d'empoisonnement d'Arthur, le sauvetage in extremis d’Élise (enfin presque, mais bon, chaque histoire est embellie n'est-ce pas?) et bien sûr, point très délicat, quand je lui ai révélé mon identité. Je m'empresse aussitôt de me justifier, je la connais et elle a prouvé qu'elle était quelqu'un de confiance. Le chef lève une main et je m'interromps aussitôt.
-Sabre, Sabre, il était très imprudent de révéler ton identité à Dame Élise... Mais... (Une lueur malicieuse brille dans son regard, ce qui est assez déconcertant) Je dois avouer que cela nous a facilité les choses. À l'avenir, préviens-moi juste avant de faire ça. Mais je te félicite, ton premier jour en tant qu'Assassin a été brillant, en omettant tes quelques erreurs.
-Et je m'assurerais qu'elles ne se reproduisent plus jamais, Chef, dis-je en m'inclinant.
-Très bien. Félicitations, Sabre. Tu peux aller te reposer, tu l'as bien mérité.
-Merci.
Je me détourne et sors de la pièce, l'air confiant. Je suis soulagé, tout s'est déroulé à peu près comme prévu. Je regarde l'heure : il ne s'est écoulé que dix minutes. J'ai vingt minutes pour rejoindre tranquillement Ombre à la salle d'entraînement. Mais je suis peut-être trop excité de tout lui raconter, c'est sûrement à cause de ça que je suis arrivé au bout de deux minutes à peine. Mince.
J'ouvre doucement la porte. Ombre est là, un shinai à la main, mais elle ne s'entraîne pas. Elle se contente de faire des moulinets d'un air soucieux. Je referme la porte sans bruit et m'approche d'elle dans son dos.
-Tout va bien, Ombre ?
Elle sursaute et se retourne en me donnant un grand coup sur le haut du crâne, ce qui me fait tomber à la renverse et voir des petites étoiles.
-Sabre ! s'exclame-t-elle.
-Oui, c'est moi... C'est ta manière de reconnaître les gens ?
Elle se redresse avec un sourire aux lèvres.
-Exactement.
-Je m'en souviendrais. J'éviterai de t'approcher de trop près à partir de maintenant.
Elle rit doucement avant de se baisser en me tendant la main. Elle a rit. Ombre. Je n'en crois pas mes oreilles. Et je remarque qu'elle a l'air étrangement soulagée. Sûrement le coup qu'elle m'a donné qui lui a fait du bien, je suis sûr qu'elle voulait me frapper depuis que je lui ai révélé l'existence du Templier.
J'attrape sa main et elle me tire sur pied pour la deuxième fois de la journée. Elle me lance un regard qui veut dire « Alors, raconte-moi tout. » mais je ne lui dit rien pour la faire mariner un peu.
-Bon, Sabre, tu ne vas pas rester planté là, soupire-t-elle en croisant les bras. Si tu es ici, j'en conclus que le chef ne t'a pas renvoyé de l'Ordre. Que s'est-il passé ? Tu avais l'air mal parti pourtant.
-Merci du soutien ! lui dis-je avec une fausse moue.
Je lui raconte donc, et encore une fois, je ne peux m'empêcher de sourire devant sa surprise. Je crois que je ne m'en lasserais jamais. Je termine enfin mon récit et attends sa réaction.
-Donc, fini-t-elle par dire lentement, tu restes parmi nous ?
-Ne me dit pas que tu t'inquiétais ? je lui demande avec un sourire moqueur.
-Pas du tout ! J'avais juste peur que ça retombe sur moi. Je suis un peu ta responsable maintenant que le chef t'a mis en équipe avec moi. Hé, tu es blessé ! Tu t'es fais ça comment ? Contre le Templier ?
Je jette un coup d’œil à ma blessure à l'épaule. C'est un peu plus profond que ce que je pensais, et la douleur commence à revenir. J'y porte la main et la ramène devant mes yeux : ils sont tachés de sang.
-Viens, je vais te recoudre ça.
-Quoi ? Je préférerais voir une vraie infirmière !
-Tu oublies que je maîtrise les aiguilles ! Je vais te réparer en deux secondes, tu va voir.
-Pari tenu.
Elle repose son shinai et sort de la salle d'entraînement. Je la suis jusqu'à l'infirmerie, où elle m'invite à m'asseoir sur un tabouret. Elle fait chauffer l'aiguille, l'attache au fil et m'approche.
-J'espère que tu n'as pas peur des aiguilles, me dit-elle.
-Si tu permets, je vais dire adieu à mon bras... Juste au cas où.
-Va te faire voir, répond-elle avec un sourire. À ta place je dirais pas ça, tu sais de quoi je suis capable avec des aiguilles.
-On va déjà voir si tu es capable de recoudre les gens.
Elle approche l'aiguille de la plaie et je ne peux m'empêcher de fermer les yeux. Je sens quelque chose percer ma peau, suivi d'une légère douleur et de l'impression qu'on tire le bord de ma plaie. En fait, c'est ça le plus douloureux, je m'attendais à pire.
-Bon, et ce Templier, comment tu as dit qu'il s'appelait déjà ?
-David de Fresnes.
-Voilà. J'espère que tu l'as un peu blessé quand même.
-Non, je n'ai pas réussi à l'atteindre. Il est drôlement agile. Mais j'avais l'impression qu'il n'était pas à l'aise avec son épée.
-Comment ça ?
-Comme si... Il retenait ses coups.
-Désolée.
-Pourquoi ?
-Eh bien, commence-t-elle tout en continuant de refermer ma plaie, figures-toi qu'il existe des choses déshonorantes pour des épéistes. Que son adversaire retienne ses coups, par exemple, ou alors se faire frapper dans le dos.
Je ne dis rien. C'est vrai, maintenant qu'elle le dit. Je me demande pourquoi ce type retenait ses coups contre moi alors qu'il semblait avoir un minimum d'honneur. Je veux dire, il m'aurait tué avant de partir, non ? Il aurait très bien pu me frapper en passant à côté de moi. Pourquoi est-ce qu'il ne l'a pas fait ?
Quand j'y pense, si j'avais su dès le départ à propos de ce conflit entre Assassins et Templiers, je me demande si j'aurais accepté de les rejoindre. Et si oui... Quel camp aurais-je choisi ? Comment savoir lequel a raison ou non, lequel se bat vraiment pour ses idées, lequel protège vraiment le peuple ? Non, non, je n'ai pas le droit de douter. J'appartiens aux Assassins, et j'y appartiendrais jusqu'à la mort.
-Ombre ?
-Mmh ?
-Si je peux me permettre... C'est quoi ton vrai prénom ? Et pourquoi tu as rejoins les Assassins ?
J'ai peur de l'avoir énervée à nouveau. Elle s'arrête, mais apparemment plus pour réfléchir que de colère. Elle pose une main sur mon épaule, au-dessus de la plaie à moitié refermée.
-Je les ai rejoint parce que... Eh bien, disons que c'est de famille.
-Tes parents sont des Assassins ?
-Eh oui. Enfin, « étaient » serait plus appropriés. Ils sont morts.
-Oh, désolé.
-T'en fais pas. J'avais onze ans à ce moment, et c'est l'Ordre qui m'a recueilli.
-Dis-moi... Est-ce que tu... Enfin, est-ce que tu aurais accepté si c'était l'autre Ordre qui t'avait recueilli ? Les Templiers ?
Elle rit, mais c'est un rire jaune. Rien à voir avec son rire de tout à l'heure. Je me sens mal à l'aise. Je n'aurais pas dû lui demander ça.
-Jamais. Et je ne dis pas ça parce que j'ai toujours été dans l'Ordre des Assassins. Je préférerais mourir plutôt que de les rejoindre. Mais je vois ce que tu veux dire, tu te demandes ce qui nous différencie d'eux, pas vrai ?
-Eh bien, euh... On peut dire ça. Mais je ne songe pas à quitter les Assassins, hein !
-Ne t'en fais pas, beaucoup sont passés par là. Tu devras trouver la réponse par toi-même. Ah, et quant à mon nom, je te le dirais... Un jour, peut-être.
-Roh, aller, tu connais le mien !
Elle ne me répond pas et continue de me recoudre en silence. Elle finit enfin. Tant mieux, je ne sens plus mon épaule. Et je sens toute la fatigue de la journée retomber sur moi d'un coup, à tel point que je me demande si je vais arriver à me traîner jusqu'à chez moi.
-Bon, eh bien, Sabre, on se revoit demain, me dit Ombre d'un air enjoué. On aura sûrement des nouvelles de Dame Élise.
-Il va falloir être prêts, lui répondis-je. À demain, Ombre.
Elle me sourit avant de sortir. Bizarre cette fille, vraiment. Pendant toute ma formation, elle était froide et ne laissait jamais paraître aucun sentiment, et maintenant elle est... Eh bien, humaine, en fait. Je me hâte vers les vestiaires, prend une rapide douche, enfile mes vêtements de civil et sors du QG sous un ciel sombre et brumeux.