Note de la fic :
Six semaines en Allemagne | Réécriture |
Par : Non-Lus
Genre : Réaliste
Statut : C'est compliqué
Chapitre 9 : Vodka et suppléments
Publié le 30/01/2017 à 12:20:06 par Non-Lus
Les cris du réveil retentirent. Dans la douleur, je cognai de toutes mes forces l'insupportable appareil, avant de me rendormir aussitôt. Quelques minutes plus tard, c'était au tour de mon père d'accueil de s'alarmer. "Retard ! Retard !" Scandait-il en allemand. Je sautai du lit et me préparai en à peine dix minutes. Dévalant les couloirs à toute allure et claquant la porte, mes efforts ne suffirent pas. Devant moi, l'arrière du bus disparaissait peu à peu dans la brume matinale. Mais pourquoi donc ma mère avait choisi cet endroit, bon sang. Je rentrai vers la maison, en murmurant quelques plaintes. Au seuil du bâtiment, je remarquai la fille de Friedrich, amusée de m'avoir vu courir. Elle me proposa de me conduire, en précisant que cela était « exceptionnel ».
Le trajet fut silencieux, faute de se comprendre. À l'avenir, je devais faire en sorte de ne plus rater ce bus, pour éviter de ce genre de malaise. Sa voiture s'arrêta devant le SprachInstitut et j'y sortis le plus vite possible. Je n'étais pas du matin. Vraiment. Je m'en souvenais encore, dans mon ancienne école, lorsque je rasais les murs du hall principal. Il y avait toujours un professeur pour me repérer et m'expliquer à quel point il était gravissime de ne pas respecter l'horaire.
Mais ici, rien de tout ça. L'établissement était vide de tout surveillant. Se pouvait-il que cela ne soit pas si... Grave !? Je frappai trois fois contre la porte, avant de l’ouvrir lentement. J'y découvris notre professeur habituel, à peine surpris, qui donnait son cours sans se laisser interrompre. Au fond de la classe, bien alignés, mes camarades francophones. Nicolas et Seb manigançaient quelque chose sur un téléphone portable, pendant que Gilles se laissait distraire par la fenêtre. Amandine écrivait consciencieusement sur son cahier et Célia, les bras croisés, se contentait de remarquer ma présence. Elle me suivait du regard, jusqu'à ce que je rejoigne ma place. À peine installé, elle me prit à partie instantanément.
— Il parait que t'es rentré dans leur délire hier.
Elle parlait de notre escapade dans le centre commercial. Je me rappelai de sa conversation avec Nicolas, qui se conclut par son départ dans une rage refoulée. Célia était contrariée, je le remarquai.
— J'ai pas vraiment volé...
— Tu devrais pas trainer avec Nicolas, c'est un con.
Nicolas tourna la tête et regarda Célia avec brutalité.
— C'est toi la conne !
Avant qu'elle ne puisse répondre, le professeur coupa leur début de dispute, en annonçant qu'il était l'heure de se mettre par groupe.
Elle forma elle-même les équipes, pour nous contraindre à ne parler que l'allemand. Au programme : raconter notre week-end. Sous l'impulsion de l’instituteur, un des Américains se présenta à moi. Je distinguai ses cheveux blonds se battre le long de ses joues. Son visage, un peu bouffi, s’étirait grâce au grand sourire qu’il m’adressait. Il portait un jean rouge et un t-shirt multicolore qui trahissait une personnalité atypique. Après m'avoir serré la main, il s'assit et débuta l’exercice, en me posant des questions. Étrangement, je commençais à mieux saisir la langue. Une fois traduite, la conversation donnait quelque chose comme cela :
— Qu'as-tu fait le week-end passé ?
— Je suis arrivé en Allemagne. Et... Voilà...
— Tu es censé parler plus !!
— Mon allemand n'est pas assez bon, désolé. In english, maybe ?
Il se retourna, pour s’assurer que le professeur ne l'écoutait pas, et se mit à parler en anglais.
— Moi aussi, avant, je détestais ce genre de truc.
— Ah oui ?
— On s'y fait.
— Mhh.
Le professeur s'approcha de nous. L'Américain prétendit alors qu'il répondait à l'une de mes questions.
— Le week-end passé, je suis allé au centre-ville, c'était très intéressant. J'ai beaucoup aimé. Le week-end passé, je suis allé au musée. C'était très intéressant. J'ai beaucoup aimé.
Sans remarquer le stratagème, le professeur s'éloigna, en acquiesçant de la tête notre conversation.
— Au fait, moi c'est Luke.
— Florian, enchan…
À côté de nous, résonna le son violent d'une claque sur une joue, m’empêchant de finir ma phrase. Nos pupilles se tournèrent vers la source de l'action, apercevant ainsi Nicolas qui se frottait lentement le visage, tandis que Célia lui lançait un regard noir. Le professeur s'agita devant les deux élèves, en ordonnant qu'ils restent pendant la pause du matin.
Lorsque la sonnerie retentit, nous nous levions tous pour rejoindre la cour. Je décidai cette fois-ci de rester avec Luke. Un de ses amis, américain, était assis sur le sol. Il nous observait en train d’arriver, à travers ses cheveux hirsutes. Il portait un simple t-shirt et un jean, qui débordait sur de vieilles chaussures de sport.
En le rejoignant, il nous serra la main, suivi d’un bref « I’m Thomas » qui sortit de sa bouche.
Puis, Thomas se leva et montra du doigt un terrain vague, juste à côté de l'école. Je pris conscience que nous étudions dans une zone particulière : à l’intersection de résidences, centres commerciaux et de ce grand terrain vague, entouré de vieux bâtiments industriels. « C'était là-bas ? », dit Luke, étonné. Thomas bougea simplement la tête pour confirmer.
— C’est un repère à drogués Thomas, sérieux…
Luke, remarquant que je ne disais rien, pris la peine de m’expliquer. Thomas était un fêtard. Il ne supportait pas de passer la nuit à la maison. Le paradis, selon lui, c’était le whisky, les filles, et la musique très forte. Alors, il sillonnait la ville tous les soirs, à la recherche des meilleurs endroits où faire la fête. Hier, Thomas avait déniché cet emplacement sordide. Il ignora le commentaire de Luke et conclut simplement : « J’ai cru voir… Marine ».
— Là-bas !? Impossible que cette bourgeoise y traîne !
— Pourtant elle lui ressemblait.
Luke se tourna vers moi, en précisant :
— Elle était à ta place, dans notre classe. Mais elle est partie sans rien dire à personne. On pensait qu’elle était rentrée dans son pays.
Soudain, Nicolas sortit du bâtiment, en ouvrant de toutes ses forces la porte d'entrée. Enragé, il hurla « Non mais quelle PUTE ! », avant s'approcher de Gilles, Seb et Amandine, de l'autre côté de la cour. « Elle ne rate rien dans cette école en tout cas », commenta Thomas, blasé par cette scène. Puis, ils se mirent à discuter de leur vie aux USA.
Je souris poliment, et me détournai de leur groupe pour comprendre ce qui était en train de se passer là-bas. Je voyais Nicolas, rouge de fureur, expliquer l'injustice (selon lui) qu'il venait subir. Il se mit à nous raconter une histoire étrange au sujet d'un commentaire déplacé sur Célia qui se serait conclu par une baffe, et une remise à l'ordre par le professeur. Célia apparut à son tour, elle passa à côté de nous en ne regardant qu'Amandine. Cette dernière la suivit sans se poser de question. Entre garçons, Seb en profita pour prendre la parole.
— Tu as dû effacer ses photos de ton portable ?
Nicolas se contenta de soupirer.
— Que veux-tu... J'ai bien fait de la quitter de toute façon.
Visiblement embarrassé, il s'avança vers les escaliers et nous fit signe de le suivre. Gilles osa alors l'interpeller sur le fait qu'il restait une leçon d'une heure à l'institut d'Allemand, mais tout le monde l'ignora. Nous sortîmes de la cour pour rejoindre le centre-ville. Je repensai à ces Américains, qui ne s'étaient pas fatigués à parler avec Nicolas. Pendant que nous marchions, Seb s'adressa à moi.
— Tu parles aux Américains ?
— Heu... Oui.
— Ils restent beaucoup entre eux d'habitude, c'est étonnant !
Au moment de traverser un des ponts de la cité, le groupe changea de direction, pour s'approcher d'un magasin où l'on pouvait louer des bateaux à pédale. Nicolas s'assit sur l'un d'eux. Qu'est-ce qu'on faisait ici ? Seb, qui remarquait mon air intrigué, m’interpella.
— Je t'ai dit, il n'y a rien à faire ici, alors aujourd'hui...
Nicolas le coupa instantanément.
— Seb et moi on prend ce bateau, désolé Flo t'es avec Gilles !
Le propriétaire du magasin surgit des locaux et discuta quelques minutes avec Nicolas en allemand. Je n'y comprenais pas grand-chose, mais soudain, ils embarquèrent et nous nous retrouvions tous à naviguer sur le fleuve. Malgré son arrogance, je devais admettre que Nicolas avait un certain art pour manipuler son entourage. La preuve, il jouait sur son portable pendant que Seb pédalait tout seul.
— Gilles ? On est pas sensé payer pour utiliser les bateaux ?
— T'inquiètes, Nicolas régale, comme à chaque fois.
Voilà donc la raison de son succès. Je savais maintenant pourquoi Gilles laissait Nicolas l'oppresser. Tout le monde y gagnait. Et je participais désormais à ce jeu, en étant présent sur l'embarcation.
Quelques minutes sur le fleuve suffirent pour que la barque de Seb et Nicolas se cogne contre l'arrière de notre bateau. Le choc fit balancer nos deux corps, de gauche à droite. Gilles ne réagissait pas. Pourtant, leur intention de nous faire tomber à l'eau était claire. J'ordonnai à Gilles de suivre ma cadence, en pédalant de toutes mes forces. Notre barque prit lentement un virage, en direction de nos assaillants.
Nous foncions vers eux, jusqu'à ce que les coques s'entrechoquent. Nicolas ricana et hurla à Seb de recommencer, en nous lançant un regard provocant. Face à face, nos barques s'apprêtèrent à subir une nouvelle collision. Au loin, nous entendîmes le propriétaire qui criaient en allemand.
« C'est bon, ta gueule ! » lui aboyait Nicolas. La violence du choc, cette fois, propulsa nos corps contre le volant du petit bateau. Nos plaintes de douleur s'étouffèrent dans l'odieux rire de Nicolas. Nous retournions ensuite au magasin, vers le patron qui, témoin de la scène, était furieux. Lorsque nous rendîmes les embarcations, Nicolas arracha cinquante euros de son porte-monnaie. « En supplément », ajouta-t-il, sans même regarder le patron. Ce dernier se retourna, en bafouillant quelques bribes de mécontentement.
Après cela, nous quittions l'endroit, pour rejoindre un bar branché de la ville. Je posai les yeux sur ses murs, teintés de lumières rouge et jaune. Les petites tables étaient entourées de sièges au design contemporain et le bar transparent, au fond, révélait les serveuses habillées volontairement de façon aguicheuse.
Nicolas leva le bras pour attirer ces dernières. Lorsque l'une d'elles s'approcha, il se contenta d'énoncer le mot « Vodka » ce qui fit apporter une bouteille entière à notre table. Pourtant, nous étions tous mineur mais, ici, cela ne semblait pas avoir d’importance. Il insista pour nous l'offrir, ce qui ne dérangea ni Seb, ni Gilles. Nous recevions ainsi chacun un verre, rempli à moitié du spiritueux. Seb en profita pour m'adresser un coup de coude.
— Aïe ! Qu'est-ce qu'il y a !?
— T’as failli couler notre bateau !
— Vous avez commencé...
Seb rigola, avant de lever son verre, le boire et de le déposer bruyamment sur la table.
— J'ai une bouteille chez ma famille d'accueil, je la prendrai aussi demain.
Heureux d'entendre la nouvelle, Nicolas déversa la bouteille de Vodka dans nos verres. « Je croyais que c'était samedi, la fête ? », ajoutai-je, perplexe. Seb leva son verre encore une fois, pour que nous inciter à en faire autant, et Nicolas me fit une tape sur l'épaule.
— Tu sauras qu'ici, on ne fait pas la fête que le week-end.
Nous buvions tous d’un seul coup.
— C’est quoi le programme ?
— Oh... Tu verras bien !
Et, les verres se remplirent à nouveau.
Le trajet fut silencieux, faute de se comprendre. À l'avenir, je devais faire en sorte de ne plus rater ce bus, pour éviter de ce genre de malaise. Sa voiture s'arrêta devant le SprachInstitut et j'y sortis le plus vite possible. Je n'étais pas du matin. Vraiment. Je m'en souvenais encore, dans mon ancienne école, lorsque je rasais les murs du hall principal. Il y avait toujours un professeur pour me repérer et m'expliquer à quel point il était gravissime de ne pas respecter l'horaire.
Mais ici, rien de tout ça. L'établissement était vide de tout surveillant. Se pouvait-il que cela ne soit pas si... Grave !? Je frappai trois fois contre la porte, avant de l’ouvrir lentement. J'y découvris notre professeur habituel, à peine surpris, qui donnait son cours sans se laisser interrompre. Au fond de la classe, bien alignés, mes camarades francophones. Nicolas et Seb manigançaient quelque chose sur un téléphone portable, pendant que Gilles se laissait distraire par la fenêtre. Amandine écrivait consciencieusement sur son cahier et Célia, les bras croisés, se contentait de remarquer ma présence. Elle me suivait du regard, jusqu'à ce que je rejoigne ma place. À peine installé, elle me prit à partie instantanément.
— Il parait que t'es rentré dans leur délire hier.
Elle parlait de notre escapade dans le centre commercial. Je me rappelai de sa conversation avec Nicolas, qui se conclut par son départ dans une rage refoulée. Célia était contrariée, je le remarquai.
— J'ai pas vraiment volé...
— Tu devrais pas trainer avec Nicolas, c'est un con.
Nicolas tourna la tête et regarda Célia avec brutalité.
— C'est toi la conne !
Avant qu'elle ne puisse répondre, le professeur coupa leur début de dispute, en annonçant qu'il était l'heure de se mettre par groupe.
Elle forma elle-même les équipes, pour nous contraindre à ne parler que l'allemand. Au programme : raconter notre week-end. Sous l'impulsion de l’instituteur, un des Américains se présenta à moi. Je distinguai ses cheveux blonds se battre le long de ses joues. Son visage, un peu bouffi, s’étirait grâce au grand sourire qu’il m’adressait. Il portait un jean rouge et un t-shirt multicolore qui trahissait une personnalité atypique. Après m'avoir serré la main, il s'assit et débuta l’exercice, en me posant des questions. Étrangement, je commençais à mieux saisir la langue. Une fois traduite, la conversation donnait quelque chose comme cela :
— Qu'as-tu fait le week-end passé ?
— Je suis arrivé en Allemagne. Et... Voilà...
— Tu es censé parler plus !!
— Mon allemand n'est pas assez bon, désolé. In english, maybe ?
Il se retourna, pour s’assurer que le professeur ne l'écoutait pas, et se mit à parler en anglais.
— Moi aussi, avant, je détestais ce genre de truc.
— Ah oui ?
— On s'y fait.
— Mhh.
Le professeur s'approcha de nous. L'Américain prétendit alors qu'il répondait à l'une de mes questions.
— Le week-end passé, je suis allé au centre-ville, c'était très intéressant. J'ai beaucoup aimé. Le week-end passé, je suis allé au musée. C'était très intéressant. J'ai beaucoup aimé.
Sans remarquer le stratagème, le professeur s'éloigna, en acquiesçant de la tête notre conversation.
— Au fait, moi c'est Luke.
— Florian, enchan…
À côté de nous, résonna le son violent d'une claque sur une joue, m’empêchant de finir ma phrase. Nos pupilles se tournèrent vers la source de l'action, apercevant ainsi Nicolas qui se frottait lentement le visage, tandis que Célia lui lançait un regard noir. Le professeur s'agita devant les deux élèves, en ordonnant qu'ils restent pendant la pause du matin.
Lorsque la sonnerie retentit, nous nous levions tous pour rejoindre la cour. Je décidai cette fois-ci de rester avec Luke. Un de ses amis, américain, était assis sur le sol. Il nous observait en train d’arriver, à travers ses cheveux hirsutes. Il portait un simple t-shirt et un jean, qui débordait sur de vieilles chaussures de sport.
En le rejoignant, il nous serra la main, suivi d’un bref « I’m Thomas » qui sortit de sa bouche.
Puis, Thomas se leva et montra du doigt un terrain vague, juste à côté de l'école. Je pris conscience que nous étudions dans une zone particulière : à l’intersection de résidences, centres commerciaux et de ce grand terrain vague, entouré de vieux bâtiments industriels. « C'était là-bas ? », dit Luke, étonné. Thomas bougea simplement la tête pour confirmer.
— C’est un repère à drogués Thomas, sérieux…
Luke, remarquant que je ne disais rien, pris la peine de m’expliquer. Thomas était un fêtard. Il ne supportait pas de passer la nuit à la maison. Le paradis, selon lui, c’était le whisky, les filles, et la musique très forte. Alors, il sillonnait la ville tous les soirs, à la recherche des meilleurs endroits où faire la fête. Hier, Thomas avait déniché cet emplacement sordide. Il ignora le commentaire de Luke et conclut simplement : « J’ai cru voir… Marine ».
— Là-bas !? Impossible que cette bourgeoise y traîne !
— Pourtant elle lui ressemblait.
Luke se tourna vers moi, en précisant :
— Elle était à ta place, dans notre classe. Mais elle est partie sans rien dire à personne. On pensait qu’elle était rentrée dans son pays.
Soudain, Nicolas sortit du bâtiment, en ouvrant de toutes ses forces la porte d'entrée. Enragé, il hurla « Non mais quelle PUTE ! », avant s'approcher de Gilles, Seb et Amandine, de l'autre côté de la cour. « Elle ne rate rien dans cette école en tout cas », commenta Thomas, blasé par cette scène. Puis, ils se mirent à discuter de leur vie aux USA.
Je souris poliment, et me détournai de leur groupe pour comprendre ce qui était en train de se passer là-bas. Je voyais Nicolas, rouge de fureur, expliquer l'injustice (selon lui) qu'il venait subir. Il se mit à nous raconter une histoire étrange au sujet d'un commentaire déplacé sur Célia qui se serait conclu par une baffe, et une remise à l'ordre par le professeur. Célia apparut à son tour, elle passa à côté de nous en ne regardant qu'Amandine. Cette dernière la suivit sans se poser de question. Entre garçons, Seb en profita pour prendre la parole.
— Tu as dû effacer ses photos de ton portable ?
Nicolas se contenta de soupirer.
— Que veux-tu... J'ai bien fait de la quitter de toute façon.
Visiblement embarrassé, il s'avança vers les escaliers et nous fit signe de le suivre. Gilles osa alors l'interpeller sur le fait qu'il restait une leçon d'une heure à l'institut d'Allemand, mais tout le monde l'ignora. Nous sortîmes de la cour pour rejoindre le centre-ville. Je repensai à ces Américains, qui ne s'étaient pas fatigués à parler avec Nicolas. Pendant que nous marchions, Seb s'adressa à moi.
— Tu parles aux Américains ?
— Heu... Oui.
— Ils restent beaucoup entre eux d'habitude, c'est étonnant !
Au moment de traverser un des ponts de la cité, le groupe changea de direction, pour s'approcher d'un magasin où l'on pouvait louer des bateaux à pédale. Nicolas s'assit sur l'un d'eux. Qu'est-ce qu'on faisait ici ? Seb, qui remarquait mon air intrigué, m’interpella.
— Je t'ai dit, il n'y a rien à faire ici, alors aujourd'hui...
Nicolas le coupa instantanément.
— Seb et moi on prend ce bateau, désolé Flo t'es avec Gilles !
Le propriétaire du magasin surgit des locaux et discuta quelques minutes avec Nicolas en allemand. Je n'y comprenais pas grand-chose, mais soudain, ils embarquèrent et nous nous retrouvions tous à naviguer sur le fleuve. Malgré son arrogance, je devais admettre que Nicolas avait un certain art pour manipuler son entourage. La preuve, il jouait sur son portable pendant que Seb pédalait tout seul.
— Gilles ? On est pas sensé payer pour utiliser les bateaux ?
— T'inquiètes, Nicolas régale, comme à chaque fois.
Voilà donc la raison de son succès. Je savais maintenant pourquoi Gilles laissait Nicolas l'oppresser. Tout le monde y gagnait. Et je participais désormais à ce jeu, en étant présent sur l'embarcation.
Quelques minutes sur le fleuve suffirent pour que la barque de Seb et Nicolas se cogne contre l'arrière de notre bateau. Le choc fit balancer nos deux corps, de gauche à droite. Gilles ne réagissait pas. Pourtant, leur intention de nous faire tomber à l'eau était claire. J'ordonnai à Gilles de suivre ma cadence, en pédalant de toutes mes forces. Notre barque prit lentement un virage, en direction de nos assaillants.
Nous foncions vers eux, jusqu'à ce que les coques s'entrechoquent. Nicolas ricana et hurla à Seb de recommencer, en nous lançant un regard provocant. Face à face, nos barques s'apprêtèrent à subir une nouvelle collision. Au loin, nous entendîmes le propriétaire qui criaient en allemand.
« C'est bon, ta gueule ! » lui aboyait Nicolas. La violence du choc, cette fois, propulsa nos corps contre le volant du petit bateau. Nos plaintes de douleur s'étouffèrent dans l'odieux rire de Nicolas. Nous retournions ensuite au magasin, vers le patron qui, témoin de la scène, était furieux. Lorsque nous rendîmes les embarcations, Nicolas arracha cinquante euros de son porte-monnaie. « En supplément », ajouta-t-il, sans même regarder le patron. Ce dernier se retourna, en bafouillant quelques bribes de mécontentement.
Après cela, nous quittions l'endroit, pour rejoindre un bar branché de la ville. Je posai les yeux sur ses murs, teintés de lumières rouge et jaune. Les petites tables étaient entourées de sièges au design contemporain et le bar transparent, au fond, révélait les serveuses habillées volontairement de façon aguicheuse.
Nicolas leva le bras pour attirer ces dernières. Lorsque l'une d'elles s'approcha, il se contenta d'énoncer le mot « Vodka » ce qui fit apporter une bouteille entière à notre table. Pourtant, nous étions tous mineur mais, ici, cela ne semblait pas avoir d’importance. Il insista pour nous l'offrir, ce qui ne dérangea ni Seb, ni Gilles. Nous recevions ainsi chacun un verre, rempli à moitié du spiritueux. Seb en profita pour m'adresser un coup de coude.
— Aïe ! Qu'est-ce qu'il y a !?
— T’as failli couler notre bateau !
— Vous avez commencé...
Seb rigola, avant de lever son verre, le boire et de le déposer bruyamment sur la table.
— J'ai une bouteille chez ma famille d'accueil, je la prendrai aussi demain.
Heureux d'entendre la nouvelle, Nicolas déversa la bouteille de Vodka dans nos verres. « Je croyais que c'était samedi, la fête ? », ajoutai-je, perplexe. Seb leva son verre encore une fois, pour que nous inciter à en faire autant, et Nicolas me fit une tape sur l'épaule.
— Tu sauras qu'ici, on ne fait pas la fête que le week-end.
Nous buvions tous d’un seul coup.
— C’est quoi le programme ?
— Oh... Tu verras bien !
Et, les verres se remplirent à nouveau.