Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Le jour où je suis devenu prof !


Par : Salmanzare
Genre : Sentimental
Statut : Terminée



Chapitre 8


Publié le 03/07/2009 à 18:18:25 par Salmanzare

Je reprend mes esprits. Faut pas que je sois con. Cette fille a l'air bien gentille, l'héberger chez moi n'apporterait que son lot d'ennui. Je lui tends un paquet de mouchoir.

- Je ne peux pas. Ce n'est une solution pour personne.
- ...
- Je te raccompagne ?
- Je préfère pas...

Elle part en courant. J'ai fais mon possible, dois je m'en vouloir ? Je n'étais même pas obligé de m'arrêter. Et pourtant, je me sens mal à l'aise. J'espère que c'est le bon choix.


JEUDI

Je suis arrivé tôt ce matin. Pour découvrir l'école. J'avais envie de sentir la vie dans ce vieux bâtiment. C'est plutôt une belle architecture, mais qui se soucie de ce genre de détail ? A part moi... C'est agréable de se promener, le parc est plutôt joli.

Je regarde autour de moi. Rien n'a vraiment changé ici depuis que j'étais élève. Seul les têtes, la hiérarchie, le personnel. Mais ce bâtiment reste le même. Immuable, inscrit dans le temps. Il nous survivra. On est pas grand chose. Je me sens nostalgique, le petit garçon en moi s'emballe.

Je m'allonge dans l'herbe, les élèves n'arriveront pas avant une heure de toute façon. Pourquoi ne pas faire un somme rapide.

Soudain, une ombre me cache le soleil. Je me relève, il y a un vieil homme qui se tient au dessus de moi. Je lui souris.

- Bonjour Monsieur.

Il ne me répond pas et s'assied à côté de moi. Il sort une pipe et commence à la bourrer de tabac. Je regarde admiratif ses gros doigts tenir religieusement l'allumette. Une odeur acre se dégage. Elle me rappelle mon grand-père. Je me sens bien. Le vieil homme regarde vers l'horizon, les yeux perdus dans le vague. Silencieux.

- Je comprends. Moi aussi j'aime cet établissement. J'y ai passé un demi siècle. J'en ai vu défilé du monde. Je me sens chez moi.

Il y a de l'amour dans ses mots. Cet homme est heureux. Alors moi aussi, je me sens mieux à côté de lui.

- J'étais élève ici.
- Oui, je me souviens. Un ptit gars discret.
- Je m'appelle Jack.
- Moi c'est Pascal. Si jamais t'as besoin d'aide, je suis là. Je connais l'endroit comme ma poche.
- Merci beaucoup.
- Bon, j'ai du travail moi.

L'homme me serre la main. La pipe toujours coincé entre les dents, il repart en chantant en espagnol. Pascal, si ce lycée a une âme : c'est bien grâce ce gars. Il fait partie de l'établissement. Une légende vivante et tangible.

- Tout va bien Jack ?

Je me retourne. C'est Charles, le directeur des études qui s'approche de moi. L'air cordial, toujours habillé sur son 31. Impeccable.

- Tout va bien Monsieur.
- Alors votre classe ?
- Et bien pas grand chose à dire pour l'instant. Il semble plutôt calme. D'ailleurs, la plupart semble très intelligents.
- Je ne dis pas le contraire. Et c'est peut-être pour ça qu'ils nous rejettent.
- Pour ma part, je n'ai pas encore à me plaindre.
- Vous n'avez pas vu la voiture du professeur de maths.
- Mauvais état ?
- Je ne suis même pas certain qu'elle puisse rouler de nouveau un jour. Il a eu le malheur de les traiter de fils à papa.
- Faut croire que j'ai eu de la chance jusque là alors.
- Ce sont des enfants bien au fond. Je suis persuadé qu'il est possible de les aider à aller mieux.
- Je suis uniquement professeur de français.
- Pour être franc, j'ai appuyé votre candidature. Vous êtes jeune, je me suis dit qu'il pourrait s'identifier à vous. Et puis tous les professeurs ayant de l'expérience ont échoué. Alors pourquoi ne pas vous donnez une chance de réussir.
- Je vous remercie mais vous me surestimer. Et puis, je n'ai encore rien vu de si terrible de leur part.
- Méfiez-vous Jack, c'est toujours lorsque l'on ne s'y attends pas qu'on se prend des coups.
- Je tacherais de m'en souvenir Monsieur le directeur.
- Vous n'arriverez décidément pas à arrêter le « vous » ?
- Je vais avoir du mal Monsieur.
- Allez, ne soyez pas en retard pour votre cours.

Je remercie le directeur et me sauve en direction de ma salle de classe. Les élèves commencent à affluer. Bousculades, rires, moqueries... Ils se font la bise, se regarde du coin de l'oeil.

J'arrive dans ma classe et constate avec surprise que tous les élèves sont déjà à leur place. Assis, les affaires en dehors des sacs. Ils ne bougent pas, ne parlent pas. C'est étrange comme ambiance.

- Bonjour à tous.

Pas de réponse. Personne ne bouge. Ça devient limite angoissant. On va finir de regarder le film de la dernière fois, ça va les réveiller !

- J'ai prévu de mettre la fin d'American Beauty.

Toujours aucune réponse.

- Non ? Bon, et bien je pense qu'on va faire autre chose alors. Sortez le poly sur le roman et la nouvelle.

Personne ne bouge. Ils me regardent avec des yeux fixes. Ça va me rendre fou. Je peux pas faire cours dans des conditions pareilles.

Je commence à lire le poly dans ce qui semble être une ignorance totale de mon existence. Ils se contentent de fixer un point imaginaire. Cela dure une heure. Une heure où personne ne bouge, personne ne prononce un seul mot. La sonnerie retentit, ils se lèvent et sortent.


Je suis là, au milieu de la classe. Et je regarde, incrédule mes élèves sortir.

J'ai du mal à comprendre.


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