Note de la fic : Non notée
Publié le 19/08/2013 à 01:17:38 par Pseudo supprimé
Un mal de chien me prend à l'estomac alors que je me réveille difficilement. Face contre terre, je me souviens de ce que je viens de voir. Ce gars a tué le père Winston, mais je l'ai vu, il avait plus rien d'humain, mais ça reste un meurtre putain ! Je suis dans un noir quasi-complet et tente de me relever mais je constate que mes bras sont attachés du poignet au coude dans mon dos, me forçant à me redresser comme un serpent. Mon cœur bat et la température de mon corps se met à augmenter sous l'influence du stress, ce tueur m'a foutu un coup pour m’assommer et ... Où suis-je ? Il m'a emmené avec lui ?! Pendant combien de temps j'ai été inconscient ?! Merde, merde, j'arrive pas à réfléchir, il faut que je me calme. J'essaye de réguler ma respiration et en profite pour jeter un œil autour de moi. Mes yeux se sont habitués à l'obscurité et je peux distinguer des habits pendus à des cintres tout autour de moi grâce aux rayons lunaires qui passent par une petite fenêtre. Je me met à avancer tant bien que mal, me servant de ma tête afin de repousser les vêtements qui me gênent dans ma progression. Je tombe finalement face à la porte et tente de l'ouvrir avec mon épaule, mais je n'y arrive pas. J'utilise ma bouche et réussit à abaisser la poignée avant de tomber en avant, poussant la porte et m'heurtant la gencive contre la poignée avant de m'écraser face contre terre après avoir raté trois marches.
J'ai mal au menton et aux côtes, je cherche à me redresser, m'asseyant sur mes talons avant que mon regard ne se pose sur lui. Il est assis sur un fauteuil en bois, dont les accoudoirs et le dossier sont recouverts d'un tissu rouge. Mais ce qui me choque, c'est ce qui l'entoure. Contre chaque mur de la pièce est collé une gigantesque étagère en bois, remplie de livres ! Il doit bien y avoir des milliers de bouquins ici ! C'est pas possible d'avoir autant de livres, où j'ai foutu les pieds ?! Mon regard se repose sur l'assassin qui semble enfin me prêter attention en levant le nez de l'épais ouvrage qu'il tient entre les mains. Un regard indifférent et il se lève après avoir posé son livre et placé un marque-page. Il marche avec assurance, de son être se dégage une aura. Une aura mêlant charisme, froideur et respect.
La lumière tamisée me permet de contempler le meurtrier de mieux en mieux à mesure qu'il s'approche de moi. Des cheveux blonds mi-longs lui tombent un peu sur le front avant qu'il ne les balaye de la main. Assez grand, rasé de près. Je ne saurais lui donner un âge précis. Un col roulé noir et un pantalon rouge avec des chaussures noires. Il s'accroupie devant moi et là mon cœur s'arrête de battre, mon sang se glace. Ses yeux, ses grands yeux vairons me transpercent de part en part. Son œil droit d'un bleu tellement clair qu'il passerait pour gris tandis que son oeil gauche était d'un marron, qui contrastant avec le bleu, semble rouge sang. Ce contraste me met tellement mal à l'aise que je ne peux plus bouger, ni parler. Je sens que des frissons parcourt mon corps, me donnant la chair de poule. Je réussi à peine à soutenir son regard qu'il se lève avant de se mettre dans mon dos. Mon cœur est à ce moment là à peu de choses d'éclater, je sens la mort se rapprocher de moi. Il desserre les sangles qui lient mes bras et les enlève, avant de repartir vers son bureau et de s'installer afin de reprendre sa lecture. Je me relève, déconcerté, et me frotte les membres engourdis afin de stimuler ma circulation sanguine.
Je regarde tout autour de moi et mon regard vagabonde jusqu'à atterrir sur les quatre colonnes de pierre qui soutiennent un étage. Le bois est le matériel dominant de cette pièce, les couleurs sont chaudes. Des vases anciens sont posés sur des colonnes, un piano est placé près d'un canapé rouge et une peinture est accrochée au mur, je l'ai déjà vue... Mona Lisa ! Mais ça ne peut être la vraie, si ?! Je m'en approche et la contemple sans oser la toucher. Comment est-ce qu'il a pu se la procurer ? D'un coup mon estomac me serre et je sens à nouveau des sueurs froides dans l'ensemble de mon corps et me tourne brusquement vers mon ravisseur. Je suis en compagnie d'un tueur et je trouve rien de mieux à faire que de regarder une peinture ?! Je recule par peur et me plaque contre une armoire, attirant l'attention de l'assassin. Son regard froid se pose à nouveau sur moi tandis que ma gorge se serre. Il se lève et s'approche de moi, d'une démarche calme, semblable à un félin. D'un soudain élan de courage, je m'exclame.
- Pourquoi je suis ici ? Dis-je en bafouillant.
Son regard reste posé sur moi et ses lèvres bougent.
- Je ne pouvais pas te tuer, alors je t'ai emmené avec moi, déclare-t-il calmement.
Il est maintenant devant moi, bien campé sur ses deux jambes, me regardant dans les yeux. Avec ses yeux de monstres. J'avale ma salive afin de le questionner à nouveau.
- Pourquoi ne pas m'avoir tué alors ?
- Parce que je ne tue pas les gens qui ne le méritent pas.
Il tend son bras vers moi et mon corps a pour réflexe de se contracter et de se relâcher violemment. Mon cœur bat à grandes impulsions, tellement que j'ai l'impression de sentir mon sang s'écouler dans chacune de mes veines. Sa main s'approche de moi et finit par se saisir d'un livre posé sur l'étagère contre laquelle je suis cramponné. Il en regarde la couverture d'un air neutre avant de me fixer à nouveau.
- Un problème ? Demande-t-il le plus naturellement du monde.
- Putain mais qu'est ce que je fous la ?! dis-je en hurlant.
À peine ma phrase fini que je regrette de m’être emporté. Je me vois déjà une balle entre les deux yeux et mon cœur semble s'accorder à ma mort prochaine car il a l'air de s’être arrêté de battre. L'assassin me regarde avec plus d'intérêt et laisse tomber son bras le long de son corps, tout en y tenant l'ouvrage fermement.
- Je ne tue pas les innocents mais tu as vu mon visage. J'ai donc du faire un choix, voila pourquoi tu es là.
Mon cœur se remet à battre et je me calme un peu.
- Et que comptes-tu faire de moi ? Dis-je la gorge serré.
Il ferme les yeux lentement et se met à marcher jusqu'à son bureau afin d'y poser son ouvrage. Il revient vers moi en se passant la main dans les cheveux.
- Deux options s'offrent à toi : Je peux t'effacer la mémoire, au prix d'une énorme souffrance et il se peut que ta mémoire soit supprimée plus que convenu, sans compter les différents troubles mentaux qui peuvent s'en suivre, dit-il sans montrer la moindre trace d'émotions.
Dans ma tête, les mots résonnent. Je ne veux pas perdre mes souvenirs ou devenir fou, c'est hors de question !
- Et l'autre option, c'est quoi ?
- Tu deviens mon élève.
- Hein ? Excuse-moi, je suis pas sur d'avoir bien compris ? Dis-je un peu perdu.
- Je te formerai à combattre, à survivre, à tuer.
Mon corps se met à chauffer, mon cœur est comme un tambour, mon esprit se brouille.
- Mais aucune de tes options ne me convient, je suis pas un tueur et je tiens à mes souvenirs ! Donc si je décide de partir maintenant, qu'est ce que tu vas faire, hein, vu que tu ne tues pas les innocents ?!
Il me fixe et semble me jauger alors que je me concentre pour empêcher mes jambes de trembler.
- Je ne ferai rien.
Mon esprit s'embrouille un peu plus et je le fixe avec des grands yeux, je m'attendais à tout sauf à ça.
- Tu ne feras rien ? Repeté-je dubitativement.
- Rien. Cependant il se peut que des gens comprennent que tu as disparu avec moi et vu que tu seras toujours en vie, ils t'enlèveront, toi et tes proches. Avant de les torturer sous tes yeux, dans l'espoir que tu leur dises où je réside et malheureusement, je ferai en sorte que tu n'aies rien à leur répondre. Es-tu prêt à prendre ce risque ?
C'est pas possible, il doit blaguer. Non, non, non !
- Et alors, si je reste ici et que je ne peux pas revoir mes proches sans les mettre en danger, autant crever maintenant !
- Justement non. Si tu acceptes ma proposition, des gens protègeront tes proches et tu pourras les voir autant de fois que ton emploi du temps te le permettra.
- Et qu'est-ce qui me dit que c'est pas un mensonge tout ca ?! Que c'est pas juste pour me garder ici hein ?!
Ma voix s'élève à mesure que je parle alors que mon interlocuteur reste de marbre.
- Parce que si j'en avais eu envie, je t'aurai tué à l'instant même où tu as posé les yeux sur moi.
Il marque un point... Je suis pris entre deux feux, tuer ou être tué. Mes envies de tremblements s'arrêtent, mon cœur ralentit, j'essaye de me calmer et tente de réfléchir.
- Et ma vie dans tout ça, j'dois la laisser en suspens, l'effacer ?! Dis-je plus calmement, mais toujours avec une certaine rage.
- Non. Ta vie restera la même, sauf que pour tes proches, tu auras eu une offre d'emploi en or et tu seras muté dans un autre pays. Tu pourras même reverser une partie de ton argent à ceux de ta famille.
- A part ma grand-mère, je n'ai aucune famille... Confessé-je d'un air pensif.
- Dans ce cas accepte, et lorsque tu seras assez fort pour protéger tes proches de gens qui leur voudraient du mal, tu pourras partir.
Il se montre drôlement prévenant, c'en est presque suspect.
- Imaginons que j'accepte, être un assassin doit comporter son lot de risques, non ?!
- Bien sur.
- Donc si je meurs, on fait comment, hein ?! Dis-le moi !
- Tant que tu seras avec moi, il n'y aura aucune chance que tu meurs.
- Et alors ?! On sera pas collés l'un à l'autre 24 heures sur 24 !
- C'est pour ça que je te formerai. Tu deviendras capable de détruire tout ceux qui te voudront du mal.
- Mais je veux détruire personne moi, je veux juste mener une vie normale !
- Dans ce cas rentre chez toi, cependant si jamais tu te retrouves dans une situation où tes proches ou toi êtes blessés, tu ne pourras t'en prendre qu'a toi même.
Sa voix monocorde résonne en moi et trouble mes convictions. Des images de tortures m'apparaissent en tête et je secoue la tête afin de les effacer. J'ai beau dire ce que je veux, il a raison, si quelque chose leur arrivait, je m'en voudrais à vie.
- Si je reste avec toi, rien ne lui arrivera, c'est sur ? Demandé-je fébrilement.
- Oui, j'y veillerai personnellement.
- Alors j'ai pas vraiment le choix...
Je lui tend la main afin de conclure notre accord. Il reste à me regarder l'espace d'une seconde avant de me la serrer.
- Je m’appelle ...
- Stop. Règle n°1 : Ne jamais dévoiler sa vraie identité, à qui que ce soit. Il faudra donc que l'on te trouve un nom sous lequel tu opéreras, dit-il en m'interrompant. Enchanté, je suis Hyde.
Il semble chaleureux, mais aucun sourire ne s'est posé sur ses lèvres. Je ne ressens aucune émotion se dégager de lui tant il est calme.
- Viens avec moi, on va voir si on peut te programmer, déclare Hyde en tournant les talons.
- Me programmer ? Comment ça ? M'interrogé-je en lui courant presque après.
- Tu verras, mais j'espère que tu as une bonne résistance à la douleur.
Il traverse la salle et ouvre une porte en bois qui donne sur un escalier que nous descendons. À l'étage inférieur, un autre salon avec un poste d'holovision, un canapé d'angle ébène et une seule étagère, de pas plus de cinquante centimètres de haut, contenant pas plus de trente livre sur deux étages. Une cuisine ouverte est collée au salon, séparée par un comptoir en bois devant lequel deux tabourets sont posés. Trois autres portes sont présentes mais toutes closes. Mon désormais professeur se tourne vers une porte plus épaisse que les autres, probablement celle d'entrée. Il l'ouvre et je vois... Des statues et des lampadaires ?! Je lève le nez et remarque un toit relativement haut, s'étirant à perte de vue.
- On n'est pas à l’extérieur, c'est quoi ce bordel ?
- On est au Manoir, notre QG.
- Notre ? Y'en a d'autres des comme toi ?
- Oui, mais il n'y a que Héphaïstos et moi-même qui vivons ici.
- Héphaïstos ?
- Oui, c'est lui le programmeur.
Tout ça m'intrigue et à mesure que le temps passe, mon esprit se met à vagabonder, imaginant les différents membres de cette organisation. Mais l'image du vieux Edgar vient troubler ma réflexion, me faisant réfléchir sur Hyde.
- Dis-moi, qu'est ce qui est arrivé au vieux Edgar ?
- Que veux-tu dire par là ? Dit-il en s’arrêtant.
- Quand je suis sorti pour voir ce qu’était ce bruit, je l'ai vu par terre... Mais c'était pas lui, c’était un gros truc à la peau sombre, puis il a changé d'apparence en quelques secondes et là je t'ai vu, en train de lui ouvrir la poitrine...
- C'est drôle que je n'ai pas remarqué ta présence, se dit-il en levant les yeux au ciel. Je t'expliquerais tout en détail plus tard, ne t'inquiète pas.
Il reprend sa route et me pousse à marcher à mon tour. J'arrive pas à cerner ce gars, on dirait que rien ne le touche. Nous arrivons à un carrefour auquel nous prenons la droite. Le silence m'oppresse et au moment où je me décide à le briser, Hyde prend la parole.
- Parle-moi de toi. Quel âge as-tu ?
- 22 ans, dis-je un peu surpris.
- Étudiant ?
- Oui.
- Dans quel domaine ?
- Le droit.
- Il y a une université de droit dans une aussi petite ville ?
- Non, j'étais venu rendre visite à ma grand mère.
- Je vois.
Les bruits de nos pas continuent la conversation à notre place tandis que je réfléchis.
- Et toi, tu as de la famille ? dis-je, poussé par ma curiosité.
- Non, je n'ai plus personne.
L'espace d'un instant, j'ai cru entendre de l'émotion dans sa voix. Il aurait donc des émotions ? Je veux en savoir plus sur lui mais malheureusement, au moment où je me décide à le questionner, nous arrivons devant une porte avant qu'il ne prenne la parole.
- On y est.
Il ouvre la porte qui donne sur un long et large couloir éclairé par la lumière de la lune qui passe par des fenêtres de taille moyenne en arche incrusté dans le mur. Il y a une lumière au loin et un claquement résonne dans cet vaste pièce. Hyde se met à avancer et je le suis.
- Attention où tu mets les pieds, me dit-il.
En m'enfonçant dans la pièce, je comprends pourquoi il me dit ça. Au sol, des vis, des clous, des clés et autres ustensiles traînent. Sur les côtés reposent des objets aux formes diverses et variées dont je ne peux saisir ni l'utilité ni l'usage. À mesure que nous nous approchons, je peux distinguer la source de lumière et de bruit. Un homme approchant la quarantaine tapote sur un clavier matériel d'un ordinateur à écran holographique. Il porte des lunettes à monture noires ainsi qu'un casque lui couvrant les oreilles. Des cheveux bruns à peine coiffés et une barbe de quelques jours. Il n'a qu'un T-Shirt blanc ainsi qu'un large pantalon bleu et est pieds nus. Ses doigts bougent très vite, parcourant le clavier sans le regarder, une danse informatique qu’Héphaïstos semble connaître par cœur. Nous sommes devant son bureau, mais il ne semble pas nous prêter attention, comme si il ne nous voyait pas.
- Héphaïstos, dit Hyde.
Le programmeur ne bouge pas d'un poil, ne semblant pas l'avoir entendu. Hyde pose la main sur le meuble en métal, un petit flash apparaît et au même moment, Héphaïstos lâche un petit cri avant de nous lancer un regard. Hyde lui fait un signe de la main et le vieil homme enlève son casque et remonte ses lunettes avant de se lever pour nous saluer.
- Hyde ! Comment ça va ? S'eclame-t-il d'un air enthousiaste en le prenant dans ses bras. C'est qui le gamin ?
Hyde se tourne à trois quarts vers moi, alors que le programmeur me fixe.
- C'est mon protégé.
- Ton protégé ?! S'esclaffe-t-il. Toi, t'as décidé de former quelqu'un ?!
Il s'approche de moi, amenant son visage à quelques centimètres du mien, me permettant de sentir son souffle alcoolisé et de remarquer les rougeurs sur ses joues et son nez, preuves de son ivresse. Il me fixe, m'examinant sous toutes les coutures, allant jusqu'à me tourner autour.
- Il a rien de spécial pourtant celui-là, marmonne-t-il. Comment t'en es venu à le choisir lui ?
- Il a vu mon visage.
Un sourire surpris se pose sur le visage de l'ivrogne avant de s'élargir en un rictus presque fou.
- Dis-moi, tu sais que t'as de la chance d'être encore en vie toi ?! Me souffle-t-il en ricanant.
Un sentiment de gêne me gagne avant que Hyde n'intervienne.
- Je suis pas là pour que tu lui fasse peur, j'ai besoin que tu le programmes.
- Le programmer ? Tu l'as même pas entrainé et tu veux que je le programme ?! Regarde-le un peu ! Il va clamser sur la chaise !
- Fais ce que je te dis.
Il me regarde de haut en bas, alors que je suis perdu dans leur discussion, avant de revenir à son collègue et de hausser les épaules en secouant la tête.
- C'est toi qui vois... Se résigne-t-il. Suivez-moi.
Il se tourne et se met à marcher sans s'inquiéter des objets pouvant le blesser. Je lance un regard à Hyde qui me le rend, comme pour me dire de lui faire confiance. On arrive finalement en face d'un siège rouge relié à un ordinateur.
- Enlève ton haut, me demande Héphaïstos alors qu'il s'affaire sur son ordinateur, ensuite assis-toi sur le fauteuil.
Je regarde le programmeur d'un air surpris, interrogeant le tueur du regard. Il s'approche de moi tandis que Héphaïstos tapote sur son clavier.
- Héphaïstos va lancer un programme. Ce programme va prendre toutes tes caractéristiques, tels que ton poids et ta taille, pour déterminer ce pour quoi tu es doué. Épée, arc, poings, armes à feu, le programme le trouvera et t'implanteras le maximum de choses que tu peux supporter, donc tu auras une formation au combat en accéléré.
Un sourire parcourt mon visage, c'est aussi rapide et simple que ça ?
- Mais c'est pas aussi simple que ça. De ce siège vont surgir de multiples aiguilles, plus ou moins grosses, qui vont se loger dans ta colonne vertébrale et dans ton crâne, envoyant des informations à ton corps sous forme d'impulsions électriques.
À cette nouvelle, mon enthousiasme dégringole mais je tente de rester impassible.
- Je te le dis maintenant, tu t'apprêtes à expérimenter la douleur la plus intense à laquelle tu devras jamais faire face. Cette douleur sera tellement intense que tu t'en souviendras durant des années, probablement jusqu'à ta mort, mais à côté de ça, ta résistance à la douleur connaîtra une augmentation exponentielle... Explique-t-il calmement.
- Si il crève pas ! Hurle le programmeur.
La peur m'envahit, une peur différente de celle que je ressentais plus tôt, la peur de l'inconnu. Hyde me regarde dans les yeux d'un air concerné pour une fois.
- Je suis prêt, programme-moi, dis-je dans un élan de courage.
J'enlève ma chemise noire et m'assoie sur le siège, déterminé. Héphaïstos me regarde d'un air surpris avant de secouer la tête lentement tandis que Hyde se relève. Le programmeur appuie sur une série de boutons et mon siège s'élève. Le fauteuil se met soudain à adopter mes courbes, vibrant, avant que des arcs en fer n'encerclent mes chevilles, mes poignets, mes avants-bras et mes cuisses. Je sens le métal froid contre ma peau, me donnant la chair de poule. Je respire aussi calmement que possible alors que le vieil homme boit au goulot une bouteille de vin rouge en me fixant du coin de l’œil, je lui fais un signe de tête et il pose la bouteille. Il s'essuie la bouche avec sa manche et repose ses lunettes sur son nez avant que ses doigts ne se remettent à pianoter. D'un coup je sens une dizaine de piques me transpercer la peau et se planter dans mon épine dorsale. Une autre se loge à la base de mon crâne, me paralysant totalement.
La douleur est intense, j'ai l'impression que la peau de mon dos est sur le point de craquer laissant mon squelette sortir de sa chrysalide tel un papillon sanglant. La douleur se propage à l'ensemble de mon corps et celui-ci se crispe. Je suis immobilisé par la douleur, cette douleur intense qui m'aurait fait pleurer si j'avais pu. J'aurais versé un torrent de larmes jusqu'à les noyer, à m'en dessécher, à teindre l'eau de mon propre sang. J'ai mal, j'ai peur. Peur de mourir, peur de ne pas les revoir, peur de la laisser seule, Mamie ! Mon corps convulse et je sens une douleur dans mon cœur.
- Putain, il nous fait une crise cardiaque ! Crie le programmeur.
Hyde s'approche de moi et pose sa main sur ma poitrine en me fixant dans les yeux. Une douleur aiguë me traverse, attirant mon corps vers l'avant, mais je sens mon cœur repartir. Je convulse toujours alors que la programmation continue. J'ai l'impression que ma peau est en train de brûler, je veux hurler mais ma mâchoire est verrouillée. J'ai la sensation d’être consumé de l'intérieur, mon corps entier me démange et ne me répond plus. Hyde me fixe avec son regard calme tandis que mon corps s'agite dans tout les sens, j'ai l'impression qu'il me teste. La douleur ne fait qu'augmenter, j'en arrive à regretter d’être né et souhaiter de mourir afin d'abréger cette ignoble souffrance. J'ai la désagréable sensation que mes os sont en train de craquer et qu'ils transpercent ma peau. Pourquoi j'ai accepté de faire ça ?! J'aurai du me tuer, ça aurait été plus rapide ! Les pulsations électriques m'empêchent de m'évanouir et me forcent à supporter cette épreuve. Mon esprit se met à s'effacer, ma capacité de réflexion annihilée par la douleur. Soudain des images défilent devant mes yeux, une tonne de choses que je n'arrive pas à saisir. Je suis absorbé par ce que je vois mais ne peux le comprendre, comme un enfant devant un film. Tout s'enchaîne très vite et mon corps convulse une dernière fois dans un soubresaut intense où la douleur atteint son paroxysme. À ce moment là, j'ai l'impression de mourir, que mon corps pèse une tonne. Je me met à trembler de moins en moins fort, à mesure que la douleur baisse. Je sens les pics métalliques se retirer de mon corps mais la douleur persiste. Je sens quelque chose se coller aux endroits perforés alors que les attaches métalliques s'enlèvent d'elles-même. Mon esprit est complètement vide et mon corps encore rigide de douleur. Le programmeur me regarde d'un air surpris et heureux avant de revenir à son ordinateur.
- Résultat de la programmation : Connaissances afin de survivre en milieu sauvage. Perfectionnement dans les arts du corps-à-corps, maîtrise de la lutte gréco-romaine, de la boxe thaïlandaise, du Ju-jitsu Brésilien, du karaté Kyokushinkai et Jiseido et perfectionnement de la maîtrise du Judo style Kosen. Intégration des bases du maniement d'armes à feu, maîtrise du combat au sabre. Élément de prédilection au combat : Corps-à-corps. Injection du sang démoniaque dans la moelle épinière : Résultat concluant, adhésion au système immunitaire. Constat des fonctions vitales du sujet : Opérationnelles. Durée de la programmation : 1 minute 32.09 , déclare-t-il d'une traite.
Du sang démoniaque ? Et la programmation n'a durée qu'une minute et demi, c'est tout ? Ça m'a paru une éternité. Je peux à peine penser sans ressentir un mal de crâne intense. Héphaïstos pivote sur sa chaise, relevant ses lunettes en lâchant un puissant soupir.
- Et bah dis-moi, le petit il en a dans le ventre hein ! J'ai bien cru qu'il allait nous claquer entre les doigts, dit l'homme en ricanant avant de boire à nouveau son jus de raisin alcoolisé. Félicitations, on vient de créer un monstre !
Hyde s'approche de moi et me tire du siège afin de me mettre debout. Il me tient par les épaules tandis que mes jambes se relâchent légèrement, bien que restant rigides comme un piquet. Je ne tiens même pas debout, comme si j'étais ivre ou drogué.
- Tu peux parler ? Me demande Hyde.
J'essaye d'ouvrir la bouche, mais ma mâchoire est toujours crispée. Sous la frustration, j'hoche la tête négativement.
- Je vois, dans ce cas, écoute-moi bien, ton corps est en train d'assimiler toutes les informations reçues, voila pourquoi tes muscles sont aussi rigides. Au fil des jours, tu te sentiras mieux et la douleur s'estompera. D'ici quelques heures tu devrais pouvoir ouvrir la bouche. Le sang qui t'a été injecté servira à booster tes capacités physiques, cela prendra cependant un certain temps avant que ton corps ne s'y habitue, donc fais attention à ce que tu feras lorsque tes membres iront mieux. Compris ?
J’acquiesce et le vois me regarder.
- Bien... Dans ce cas, bon courage.
Il me met un puissant coup au foie, me coupant la respiration et me pliant en deux. Je tombe vers lui mais il me retient alors que je perd peu à peu connaissance.
- On se revoit dans un mois.
J'ai mal au menton et aux côtes, je cherche à me redresser, m'asseyant sur mes talons avant que mon regard ne se pose sur lui. Il est assis sur un fauteuil en bois, dont les accoudoirs et le dossier sont recouverts d'un tissu rouge. Mais ce qui me choque, c'est ce qui l'entoure. Contre chaque mur de la pièce est collé une gigantesque étagère en bois, remplie de livres ! Il doit bien y avoir des milliers de bouquins ici ! C'est pas possible d'avoir autant de livres, où j'ai foutu les pieds ?! Mon regard se repose sur l'assassin qui semble enfin me prêter attention en levant le nez de l'épais ouvrage qu'il tient entre les mains. Un regard indifférent et il se lève après avoir posé son livre et placé un marque-page. Il marche avec assurance, de son être se dégage une aura. Une aura mêlant charisme, froideur et respect.
La lumière tamisée me permet de contempler le meurtrier de mieux en mieux à mesure qu'il s'approche de moi. Des cheveux blonds mi-longs lui tombent un peu sur le front avant qu'il ne les balaye de la main. Assez grand, rasé de près. Je ne saurais lui donner un âge précis. Un col roulé noir et un pantalon rouge avec des chaussures noires. Il s'accroupie devant moi et là mon cœur s'arrête de battre, mon sang se glace. Ses yeux, ses grands yeux vairons me transpercent de part en part. Son œil droit d'un bleu tellement clair qu'il passerait pour gris tandis que son oeil gauche était d'un marron, qui contrastant avec le bleu, semble rouge sang. Ce contraste me met tellement mal à l'aise que je ne peux plus bouger, ni parler. Je sens que des frissons parcourt mon corps, me donnant la chair de poule. Je réussi à peine à soutenir son regard qu'il se lève avant de se mettre dans mon dos. Mon cœur est à ce moment là à peu de choses d'éclater, je sens la mort se rapprocher de moi. Il desserre les sangles qui lient mes bras et les enlève, avant de repartir vers son bureau et de s'installer afin de reprendre sa lecture. Je me relève, déconcerté, et me frotte les membres engourdis afin de stimuler ma circulation sanguine.
Je regarde tout autour de moi et mon regard vagabonde jusqu'à atterrir sur les quatre colonnes de pierre qui soutiennent un étage. Le bois est le matériel dominant de cette pièce, les couleurs sont chaudes. Des vases anciens sont posés sur des colonnes, un piano est placé près d'un canapé rouge et une peinture est accrochée au mur, je l'ai déjà vue... Mona Lisa ! Mais ça ne peut être la vraie, si ?! Je m'en approche et la contemple sans oser la toucher. Comment est-ce qu'il a pu se la procurer ? D'un coup mon estomac me serre et je sens à nouveau des sueurs froides dans l'ensemble de mon corps et me tourne brusquement vers mon ravisseur. Je suis en compagnie d'un tueur et je trouve rien de mieux à faire que de regarder une peinture ?! Je recule par peur et me plaque contre une armoire, attirant l'attention de l'assassin. Son regard froid se pose à nouveau sur moi tandis que ma gorge se serre. Il se lève et s'approche de moi, d'une démarche calme, semblable à un félin. D'un soudain élan de courage, je m'exclame.
- Pourquoi je suis ici ? Dis-je en bafouillant.
Son regard reste posé sur moi et ses lèvres bougent.
- Je ne pouvais pas te tuer, alors je t'ai emmené avec moi, déclare-t-il calmement.
Il est maintenant devant moi, bien campé sur ses deux jambes, me regardant dans les yeux. Avec ses yeux de monstres. J'avale ma salive afin de le questionner à nouveau.
- Pourquoi ne pas m'avoir tué alors ?
- Parce que je ne tue pas les gens qui ne le méritent pas.
Il tend son bras vers moi et mon corps a pour réflexe de se contracter et de se relâcher violemment. Mon cœur bat à grandes impulsions, tellement que j'ai l'impression de sentir mon sang s'écouler dans chacune de mes veines. Sa main s'approche de moi et finit par se saisir d'un livre posé sur l'étagère contre laquelle je suis cramponné. Il en regarde la couverture d'un air neutre avant de me fixer à nouveau.
- Un problème ? Demande-t-il le plus naturellement du monde.
- Putain mais qu'est ce que je fous la ?! dis-je en hurlant.
À peine ma phrase fini que je regrette de m’être emporté. Je me vois déjà une balle entre les deux yeux et mon cœur semble s'accorder à ma mort prochaine car il a l'air de s’être arrêté de battre. L'assassin me regarde avec plus d'intérêt et laisse tomber son bras le long de son corps, tout en y tenant l'ouvrage fermement.
- Je ne tue pas les innocents mais tu as vu mon visage. J'ai donc du faire un choix, voila pourquoi tu es là.
Mon cœur se remet à battre et je me calme un peu.
- Et que comptes-tu faire de moi ? Dis-je la gorge serré.
Il ferme les yeux lentement et se met à marcher jusqu'à son bureau afin d'y poser son ouvrage. Il revient vers moi en se passant la main dans les cheveux.
- Deux options s'offrent à toi : Je peux t'effacer la mémoire, au prix d'une énorme souffrance et il se peut que ta mémoire soit supprimée plus que convenu, sans compter les différents troubles mentaux qui peuvent s'en suivre, dit-il sans montrer la moindre trace d'émotions.
Dans ma tête, les mots résonnent. Je ne veux pas perdre mes souvenirs ou devenir fou, c'est hors de question !
- Et l'autre option, c'est quoi ?
- Tu deviens mon élève.
- Hein ? Excuse-moi, je suis pas sur d'avoir bien compris ? Dis-je un peu perdu.
- Je te formerai à combattre, à survivre, à tuer.
Mon corps se met à chauffer, mon cœur est comme un tambour, mon esprit se brouille.
- Mais aucune de tes options ne me convient, je suis pas un tueur et je tiens à mes souvenirs ! Donc si je décide de partir maintenant, qu'est ce que tu vas faire, hein, vu que tu ne tues pas les innocents ?!
Il me fixe et semble me jauger alors que je me concentre pour empêcher mes jambes de trembler.
- Je ne ferai rien.
Mon esprit s'embrouille un peu plus et je le fixe avec des grands yeux, je m'attendais à tout sauf à ça.
- Tu ne feras rien ? Repeté-je dubitativement.
- Rien. Cependant il se peut que des gens comprennent que tu as disparu avec moi et vu que tu seras toujours en vie, ils t'enlèveront, toi et tes proches. Avant de les torturer sous tes yeux, dans l'espoir que tu leur dises où je réside et malheureusement, je ferai en sorte que tu n'aies rien à leur répondre. Es-tu prêt à prendre ce risque ?
C'est pas possible, il doit blaguer. Non, non, non !
- Et alors, si je reste ici et que je ne peux pas revoir mes proches sans les mettre en danger, autant crever maintenant !
- Justement non. Si tu acceptes ma proposition, des gens protègeront tes proches et tu pourras les voir autant de fois que ton emploi du temps te le permettra.
- Et qu'est-ce qui me dit que c'est pas un mensonge tout ca ?! Que c'est pas juste pour me garder ici hein ?!
Ma voix s'élève à mesure que je parle alors que mon interlocuteur reste de marbre.
- Parce que si j'en avais eu envie, je t'aurai tué à l'instant même où tu as posé les yeux sur moi.
Il marque un point... Je suis pris entre deux feux, tuer ou être tué. Mes envies de tremblements s'arrêtent, mon cœur ralentit, j'essaye de me calmer et tente de réfléchir.
- Et ma vie dans tout ça, j'dois la laisser en suspens, l'effacer ?! Dis-je plus calmement, mais toujours avec une certaine rage.
- Non. Ta vie restera la même, sauf que pour tes proches, tu auras eu une offre d'emploi en or et tu seras muté dans un autre pays. Tu pourras même reverser une partie de ton argent à ceux de ta famille.
- A part ma grand-mère, je n'ai aucune famille... Confessé-je d'un air pensif.
- Dans ce cas accepte, et lorsque tu seras assez fort pour protéger tes proches de gens qui leur voudraient du mal, tu pourras partir.
Il se montre drôlement prévenant, c'en est presque suspect.
- Imaginons que j'accepte, être un assassin doit comporter son lot de risques, non ?!
- Bien sur.
- Donc si je meurs, on fait comment, hein ?! Dis-le moi !
- Tant que tu seras avec moi, il n'y aura aucune chance que tu meurs.
- Et alors ?! On sera pas collés l'un à l'autre 24 heures sur 24 !
- C'est pour ça que je te formerai. Tu deviendras capable de détruire tout ceux qui te voudront du mal.
- Mais je veux détruire personne moi, je veux juste mener une vie normale !
- Dans ce cas rentre chez toi, cependant si jamais tu te retrouves dans une situation où tes proches ou toi êtes blessés, tu ne pourras t'en prendre qu'a toi même.
Sa voix monocorde résonne en moi et trouble mes convictions. Des images de tortures m'apparaissent en tête et je secoue la tête afin de les effacer. J'ai beau dire ce que je veux, il a raison, si quelque chose leur arrivait, je m'en voudrais à vie.
- Si je reste avec toi, rien ne lui arrivera, c'est sur ? Demandé-je fébrilement.
- Oui, j'y veillerai personnellement.
- Alors j'ai pas vraiment le choix...
Je lui tend la main afin de conclure notre accord. Il reste à me regarder l'espace d'une seconde avant de me la serrer.
- Je m’appelle ...
- Stop. Règle n°1 : Ne jamais dévoiler sa vraie identité, à qui que ce soit. Il faudra donc que l'on te trouve un nom sous lequel tu opéreras, dit-il en m'interrompant. Enchanté, je suis Hyde.
Il semble chaleureux, mais aucun sourire ne s'est posé sur ses lèvres. Je ne ressens aucune émotion se dégager de lui tant il est calme.
- Viens avec moi, on va voir si on peut te programmer, déclare Hyde en tournant les talons.
- Me programmer ? Comment ça ? M'interrogé-je en lui courant presque après.
- Tu verras, mais j'espère que tu as une bonne résistance à la douleur.
Il traverse la salle et ouvre une porte en bois qui donne sur un escalier que nous descendons. À l'étage inférieur, un autre salon avec un poste d'holovision, un canapé d'angle ébène et une seule étagère, de pas plus de cinquante centimètres de haut, contenant pas plus de trente livre sur deux étages. Une cuisine ouverte est collée au salon, séparée par un comptoir en bois devant lequel deux tabourets sont posés. Trois autres portes sont présentes mais toutes closes. Mon désormais professeur se tourne vers une porte plus épaisse que les autres, probablement celle d'entrée. Il l'ouvre et je vois... Des statues et des lampadaires ?! Je lève le nez et remarque un toit relativement haut, s'étirant à perte de vue.
- On n'est pas à l’extérieur, c'est quoi ce bordel ?
- On est au Manoir, notre QG.
- Notre ? Y'en a d'autres des comme toi ?
- Oui, mais il n'y a que Héphaïstos et moi-même qui vivons ici.
- Héphaïstos ?
- Oui, c'est lui le programmeur.
Tout ça m'intrigue et à mesure que le temps passe, mon esprit se met à vagabonder, imaginant les différents membres de cette organisation. Mais l'image du vieux Edgar vient troubler ma réflexion, me faisant réfléchir sur Hyde.
- Dis-moi, qu'est ce qui est arrivé au vieux Edgar ?
- Que veux-tu dire par là ? Dit-il en s’arrêtant.
- Quand je suis sorti pour voir ce qu’était ce bruit, je l'ai vu par terre... Mais c'était pas lui, c’était un gros truc à la peau sombre, puis il a changé d'apparence en quelques secondes et là je t'ai vu, en train de lui ouvrir la poitrine...
- C'est drôle que je n'ai pas remarqué ta présence, se dit-il en levant les yeux au ciel. Je t'expliquerais tout en détail plus tard, ne t'inquiète pas.
Il reprend sa route et me pousse à marcher à mon tour. J'arrive pas à cerner ce gars, on dirait que rien ne le touche. Nous arrivons à un carrefour auquel nous prenons la droite. Le silence m'oppresse et au moment où je me décide à le briser, Hyde prend la parole.
- Parle-moi de toi. Quel âge as-tu ?
- 22 ans, dis-je un peu surpris.
- Étudiant ?
- Oui.
- Dans quel domaine ?
- Le droit.
- Il y a une université de droit dans une aussi petite ville ?
- Non, j'étais venu rendre visite à ma grand mère.
- Je vois.
Les bruits de nos pas continuent la conversation à notre place tandis que je réfléchis.
- Et toi, tu as de la famille ? dis-je, poussé par ma curiosité.
- Non, je n'ai plus personne.
L'espace d'un instant, j'ai cru entendre de l'émotion dans sa voix. Il aurait donc des émotions ? Je veux en savoir plus sur lui mais malheureusement, au moment où je me décide à le questionner, nous arrivons devant une porte avant qu'il ne prenne la parole.
- On y est.
Il ouvre la porte qui donne sur un long et large couloir éclairé par la lumière de la lune qui passe par des fenêtres de taille moyenne en arche incrusté dans le mur. Il y a une lumière au loin et un claquement résonne dans cet vaste pièce. Hyde se met à avancer et je le suis.
- Attention où tu mets les pieds, me dit-il.
En m'enfonçant dans la pièce, je comprends pourquoi il me dit ça. Au sol, des vis, des clous, des clés et autres ustensiles traînent. Sur les côtés reposent des objets aux formes diverses et variées dont je ne peux saisir ni l'utilité ni l'usage. À mesure que nous nous approchons, je peux distinguer la source de lumière et de bruit. Un homme approchant la quarantaine tapote sur un clavier matériel d'un ordinateur à écran holographique. Il porte des lunettes à monture noires ainsi qu'un casque lui couvrant les oreilles. Des cheveux bruns à peine coiffés et une barbe de quelques jours. Il n'a qu'un T-Shirt blanc ainsi qu'un large pantalon bleu et est pieds nus. Ses doigts bougent très vite, parcourant le clavier sans le regarder, une danse informatique qu’Héphaïstos semble connaître par cœur. Nous sommes devant son bureau, mais il ne semble pas nous prêter attention, comme si il ne nous voyait pas.
- Héphaïstos, dit Hyde.
Le programmeur ne bouge pas d'un poil, ne semblant pas l'avoir entendu. Hyde pose la main sur le meuble en métal, un petit flash apparaît et au même moment, Héphaïstos lâche un petit cri avant de nous lancer un regard. Hyde lui fait un signe de la main et le vieil homme enlève son casque et remonte ses lunettes avant de se lever pour nous saluer.
- Hyde ! Comment ça va ? S'eclame-t-il d'un air enthousiaste en le prenant dans ses bras. C'est qui le gamin ?
Hyde se tourne à trois quarts vers moi, alors que le programmeur me fixe.
- C'est mon protégé.
- Ton protégé ?! S'esclaffe-t-il. Toi, t'as décidé de former quelqu'un ?!
Il s'approche de moi, amenant son visage à quelques centimètres du mien, me permettant de sentir son souffle alcoolisé et de remarquer les rougeurs sur ses joues et son nez, preuves de son ivresse. Il me fixe, m'examinant sous toutes les coutures, allant jusqu'à me tourner autour.
- Il a rien de spécial pourtant celui-là, marmonne-t-il. Comment t'en es venu à le choisir lui ?
- Il a vu mon visage.
Un sourire surpris se pose sur le visage de l'ivrogne avant de s'élargir en un rictus presque fou.
- Dis-moi, tu sais que t'as de la chance d'être encore en vie toi ?! Me souffle-t-il en ricanant.
Un sentiment de gêne me gagne avant que Hyde n'intervienne.
- Je suis pas là pour que tu lui fasse peur, j'ai besoin que tu le programmes.
- Le programmer ? Tu l'as même pas entrainé et tu veux que je le programme ?! Regarde-le un peu ! Il va clamser sur la chaise !
- Fais ce que je te dis.
Il me regarde de haut en bas, alors que je suis perdu dans leur discussion, avant de revenir à son collègue et de hausser les épaules en secouant la tête.
- C'est toi qui vois... Se résigne-t-il. Suivez-moi.
Il se tourne et se met à marcher sans s'inquiéter des objets pouvant le blesser. Je lance un regard à Hyde qui me le rend, comme pour me dire de lui faire confiance. On arrive finalement en face d'un siège rouge relié à un ordinateur.
- Enlève ton haut, me demande Héphaïstos alors qu'il s'affaire sur son ordinateur, ensuite assis-toi sur le fauteuil.
Je regarde le programmeur d'un air surpris, interrogeant le tueur du regard. Il s'approche de moi tandis que Héphaïstos tapote sur son clavier.
- Héphaïstos va lancer un programme. Ce programme va prendre toutes tes caractéristiques, tels que ton poids et ta taille, pour déterminer ce pour quoi tu es doué. Épée, arc, poings, armes à feu, le programme le trouvera et t'implanteras le maximum de choses que tu peux supporter, donc tu auras une formation au combat en accéléré.
Un sourire parcourt mon visage, c'est aussi rapide et simple que ça ?
- Mais c'est pas aussi simple que ça. De ce siège vont surgir de multiples aiguilles, plus ou moins grosses, qui vont se loger dans ta colonne vertébrale et dans ton crâne, envoyant des informations à ton corps sous forme d'impulsions électriques.
À cette nouvelle, mon enthousiasme dégringole mais je tente de rester impassible.
- Je te le dis maintenant, tu t'apprêtes à expérimenter la douleur la plus intense à laquelle tu devras jamais faire face. Cette douleur sera tellement intense que tu t'en souviendras durant des années, probablement jusqu'à ta mort, mais à côté de ça, ta résistance à la douleur connaîtra une augmentation exponentielle... Explique-t-il calmement.
- Si il crève pas ! Hurle le programmeur.
La peur m'envahit, une peur différente de celle que je ressentais plus tôt, la peur de l'inconnu. Hyde me regarde dans les yeux d'un air concerné pour une fois.
- Je suis prêt, programme-moi, dis-je dans un élan de courage.
J'enlève ma chemise noire et m'assoie sur le siège, déterminé. Héphaïstos me regarde d'un air surpris avant de secouer la tête lentement tandis que Hyde se relève. Le programmeur appuie sur une série de boutons et mon siège s'élève. Le fauteuil se met soudain à adopter mes courbes, vibrant, avant que des arcs en fer n'encerclent mes chevilles, mes poignets, mes avants-bras et mes cuisses. Je sens le métal froid contre ma peau, me donnant la chair de poule. Je respire aussi calmement que possible alors que le vieil homme boit au goulot une bouteille de vin rouge en me fixant du coin de l’œil, je lui fais un signe de tête et il pose la bouteille. Il s'essuie la bouche avec sa manche et repose ses lunettes sur son nez avant que ses doigts ne se remettent à pianoter. D'un coup je sens une dizaine de piques me transpercer la peau et se planter dans mon épine dorsale. Une autre se loge à la base de mon crâne, me paralysant totalement.
La douleur est intense, j'ai l'impression que la peau de mon dos est sur le point de craquer laissant mon squelette sortir de sa chrysalide tel un papillon sanglant. La douleur se propage à l'ensemble de mon corps et celui-ci se crispe. Je suis immobilisé par la douleur, cette douleur intense qui m'aurait fait pleurer si j'avais pu. J'aurais versé un torrent de larmes jusqu'à les noyer, à m'en dessécher, à teindre l'eau de mon propre sang. J'ai mal, j'ai peur. Peur de mourir, peur de ne pas les revoir, peur de la laisser seule, Mamie ! Mon corps convulse et je sens une douleur dans mon cœur.
- Putain, il nous fait une crise cardiaque ! Crie le programmeur.
Hyde s'approche de moi et pose sa main sur ma poitrine en me fixant dans les yeux. Une douleur aiguë me traverse, attirant mon corps vers l'avant, mais je sens mon cœur repartir. Je convulse toujours alors que la programmation continue. J'ai l'impression que ma peau est en train de brûler, je veux hurler mais ma mâchoire est verrouillée. J'ai la sensation d’être consumé de l'intérieur, mon corps entier me démange et ne me répond plus. Hyde me fixe avec son regard calme tandis que mon corps s'agite dans tout les sens, j'ai l'impression qu'il me teste. La douleur ne fait qu'augmenter, j'en arrive à regretter d’être né et souhaiter de mourir afin d'abréger cette ignoble souffrance. J'ai la désagréable sensation que mes os sont en train de craquer et qu'ils transpercent ma peau. Pourquoi j'ai accepté de faire ça ?! J'aurai du me tuer, ça aurait été plus rapide ! Les pulsations électriques m'empêchent de m'évanouir et me forcent à supporter cette épreuve. Mon esprit se met à s'effacer, ma capacité de réflexion annihilée par la douleur. Soudain des images défilent devant mes yeux, une tonne de choses que je n'arrive pas à saisir. Je suis absorbé par ce que je vois mais ne peux le comprendre, comme un enfant devant un film. Tout s'enchaîne très vite et mon corps convulse une dernière fois dans un soubresaut intense où la douleur atteint son paroxysme. À ce moment là, j'ai l'impression de mourir, que mon corps pèse une tonne. Je me met à trembler de moins en moins fort, à mesure que la douleur baisse. Je sens les pics métalliques se retirer de mon corps mais la douleur persiste. Je sens quelque chose se coller aux endroits perforés alors que les attaches métalliques s'enlèvent d'elles-même. Mon esprit est complètement vide et mon corps encore rigide de douleur. Le programmeur me regarde d'un air surpris et heureux avant de revenir à son ordinateur.
- Résultat de la programmation : Connaissances afin de survivre en milieu sauvage. Perfectionnement dans les arts du corps-à-corps, maîtrise de la lutte gréco-romaine, de la boxe thaïlandaise, du Ju-jitsu Brésilien, du karaté Kyokushinkai et Jiseido et perfectionnement de la maîtrise du Judo style Kosen. Intégration des bases du maniement d'armes à feu, maîtrise du combat au sabre. Élément de prédilection au combat : Corps-à-corps. Injection du sang démoniaque dans la moelle épinière : Résultat concluant, adhésion au système immunitaire. Constat des fonctions vitales du sujet : Opérationnelles. Durée de la programmation : 1 minute 32.09 , déclare-t-il d'une traite.
Du sang démoniaque ? Et la programmation n'a durée qu'une minute et demi, c'est tout ? Ça m'a paru une éternité. Je peux à peine penser sans ressentir un mal de crâne intense. Héphaïstos pivote sur sa chaise, relevant ses lunettes en lâchant un puissant soupir.
- Et bah dis-moi, le petit il en a dans le ventre hein ! J'ai bien cru qu'il allait nous claquer entre les doigts, dit l'homme en ricanant avant de boire à nouveau son jus de raisin alcoolisé. Félicitations, on vient de créer un monstre !
Hyde s'approche de moi et me tire du siège afin de me mettre debout. Il me tient par les épaules tandis que mes jambes se relâchent légèrement, bien que restant rigides comme un piquet. Je ne tiens même pas debout, comme si j'étais ivre ou drogué.
- Tu peux parler ? Me demande Hyde.
J'essaye d'ouvrir la bouche, mais ma mâchoire est toujours crispée. Sous la frustration, j'hoche la tête négativement.
- Je vois, dans ce cas, écoute-moi bien, ton corps est en train d'assimiler toutes les informations reçues, voila pourquoi tes muscles sont aussi rigides. Au fil des jours, tu te sentiras mieux et la douleur s'estompera. D'ici quelques heures tu devrais pouvoir ouvrir la bouche. Le sang qui t'a été injecté servira à booster tes capacités physiques, cela prendra cependant un certain temps avant que ton corps ne s'y habitue, donc fais attention à ce que tu feras lorsque tes membres iront mieux. Compris ?
J’acquiesce et le vois me regarder.
- Bien... Dans ce cas, bon courage.
Il me met un puissant coup au foie, me coupant la respiration et me pliant en deux. Je tombe vers lui mais il me retient alors que je perd peu à peu connaissance.
- On se revoit dans un mois.