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Le Cycle Des Calepins Oubliés


Par : Tacitus42
Genre : Science-Fiction, Action
Statut : Terminée



Chapitre 5 : L'enfer de Lilith


Publié le 07/02/2012 à 11:10:41 par Tacitus42

3. L’enfer de Lilith.


C’est pourtant précisément là que ce genre de malade commet la pire des erreurs de jugement en essayant de s’arroger le pouvoir absolu : l’orgueil finit toujours par ressurgir.
La contraindre totalement ne servait strictement à rien en définitive.

Ce qui est atroce à dire, c’est qu’il faut toujours une carotte à l’âne si vous voulez qu’il avance (parce qu’il finit par mourir sinon de toute façon).
Mais ce salaud a cru bon de la manger devant un bourrin rendu fou par la faim.

Dans un premier temps, il s’est contenté de le laisser en pâture à ses mignons sous les yeux de sa belle…
Oui : parce qu’ils étaient sodomites aussi. Foutus pour foutus, tant qu’à griller en enfer, je suppose qu’ils pouvaient se permettre de tout essayer avant.

Mais la chose eut un contre effet : Lilith était trop souvent passée par là. Voir son amant se faire molester de la sorte ne pouvait que les rapprocher d’avantage. Elle priait juste pour qu’ils ne le tuent pas et mettait en garde s’ils devaient jamais y venir.

Pour autant, le père lui assura bien qu’il n’attenterait pas aux jours de leur nouveau captif (mais moyennant quelques conditions cependant).
Je crois qu’elle aurait accepté de tout endurer pourvu que son amant puisse vivre (même s’il était peu probable qu’elle puisse à nouveau lui parler un jour).
Et le père joua là-dessus.

Comme promis, ils ne tuèrent pas le jeune homme.
On lui creva néanmoins les yeux et on exigea de Lilith qu’elle garde le silence en sa présence quoiqu’il arrive.
Le père avait prétexté, en aparté, qu’aucun mal ne lui serait fait à elle, tant que le garçon continuerait de lui renouveler sa loyauté.

Mais pour que son idée abjecte se concrétise, il fallait obtenir de lui une soumission rapide et l’on s’aperçu rapidement que la torture ou le viol ne menaient nulle part.

Il refusait de renier ses sentiments (même s’ils étaient récents) quelque fut l’intensité de la douleur infligée.

Le viol d’entrée de jeu avait clairement été une erreur de calcul.
Une fois ce cap dépassé, il était peu de choses qui pouvaient avoir d’emprise sur ce jeune homme (d’autant qu’ils pouvaient toujours le violenter après leur petit manège), le père de Lilith a du s’en rendre compte.

Quoiqu’il en soit, ce petit con (l’amant de Lilith en l’occurrence : pour en revenir à lui et même si je ne suis pas convaincu que ce soit une bonne idée), bien que prisonnier, bien que violé, bien que torturé et malgré ses quinze ans, demeurait pour sûr, un vrai loup alpha.
Ils ne sont pas plus dangereux, simplement plus opportunistes (ce qui l’a perdu d’ailleurs) et plus endurants (enfin, théoriquement) moins physiquement que mentalement pour le reste (le physique sans le mental n’étant rien dans un engagement direct pour s’octroyer les faveurs du sexe opposé).
Et parvenir à tuer quatre hommes lors de son incursion pour sauver une simple demoiselle le prouve bien.

Nota bene : Oui, je sais : elle dix ans, lui quinze, ce n’est pas franchement bien vu (même à l’heure actuelle : c’est dire). Mais bon, en ces temps-là…
Et puis on n’est franchement plus à ça près surtout (j’ai vu bien pis dans ma jeunesse qui plus est)…
Après tout, ils étaient tous les deux mineurs et génétiquement sans parenté (ce qui était nouveau pour Lilith) …

Le problème, c’est qu’il s’est juste fritté avec une meute d’adultes dirigés par une ordure de chien enragé : il ne pouvait pas s’en sortir tout seul.

Il avait beau tenir le cap, ça ne pouvait pas durer.
Mais il leur a fallu trois autres jours de tortures pour le faire craquer.

Quand on est pris et damné, l’illusion de l’amour pour le quel on a combattu (et déjà souffert) est souvent le seul phare pour s’y retrouver dans une brume épaisse. Difficile de discerner clairement la lueur diffuse mais si on a la chance de l’apercevoir, il vaut mieux ne pas la perdre de vue si on ne veut pas se perdre tout court.
Alors je suppose qu’on a joué sur cette peur en particulier.

Le jeune garçon savait que sa dame avait du passer par là ou qu’il n’y avait aucun espoir pour qu’il puisse lui éviter de passer par là à nouveau.
Mais elle vivait encore…
Je me demande toujours aujourd’hui (si cette histoire est vraie) comment on peut s’accrocher à la valeur de la vie en pareille circonstance (surtout quand il ne s’agit pas de la sienne et quand ça ne repose sur aucun lien durablement établi).

On lui a simplement dit qu’on la tuerait s’il ne reniait pas ses sentiments.

Il n’y avait pas besoin de quoique ce soit d’autre.
Il a objecté, s’est mis à gémir puis à fini par pleurer de désespoir des larmes mêlées de sang.
Il n’avait pas vraiment le choix : il devait bien sentir que ça finirait mal…
Alors puisqu’il était foutu après tout…

Il était contraint d’aller dans leurs sens s’il y avait une chance qu’elle s’en sorte, elle (sinon, ils risquaient de les tuer tous les deux)…
Du moins, c’est sans doute ce qu’il devait se dire.

Et finalement, au bout de leurs lentes minutes de persuasions, il s’est résigné à mentir pour le bien de cette jeune dame…
Laquelle était présente.

A posteriori elle en a toujours parlé, dit-on, avec une profonde rage.
Elle n’aurait pas prononcé un mot : ses proches ne l’auraient pas permis de toute façon.

Elle a du attendre en silence qu’il la condamne (en pensant agir dans son intérêt). Je crois qu’elle aurait mille fois préféré mourir pour une vérité dite que souffrir pour un mensonge d’amour.

Le père s’est immédiatement empressé d’ironiser et de lui dire à quel point il était désolé.
Mais bien que le jeune homme allait répondre de son méfait et de sa duplicité, il était nécessaire qu’elle comprenne l’utilité du châtiment qu’il lui réservait (prétextant que s’il ne faisait rien, elle allait fatalement recommencer un jour ou l’autre).
Selon lui, il fallait qu’elle comprenne à quel point elle avait été idiote…

(Comme si c’était de sa faute).

Les tortures qui s’en suivirent ont compté parmi les peines les plus dures dans l’état de Lilith.
Elle a d’ailleurs dû les subir une seconde fois à l’époque où elle-même était maîtresse du Treizième. Mais elle l’a fait fièrement, de son plein gré, pensant sincèrement que se plier à la loi était la meilleure leçon à tirer de cette pénible expérience (qu’avait exigé son père à l’origine)…

Il y a de ces gens, j’vous jure : comme s’il y avait à apprendre de la barbarie du genre humain (si ce n’est qu’il vaut mieux se méfier du moindre de ses représentants).

Par miracle, elle n’a pas fait de fausse couche.
Mais pour information, à sa mort, l’imagerie tridimensionnelle de sa dépouille a mis à jour d’anciennes escarres, vestiges des lacérations vaginales datant vraisemblablement de ces deux époques et qui corroborent son récit (et ce n’étaient pas les seules cicatrices bien entendu).
Elle précisa toutefois qu’elle n’avait pas été pénétrée directement par aucun de ses tortionnaires (ni à l’époque de sa capture, ni durant les neuf mois qui ont suivi).
Raison pour laquelle, on peut être pratiquement formel sur la paternité de sa première « portée » comme elle l’appelait elle-même…
Mais je suppose là encore que le terme lui vient de son paternel : Lilith pouvait-elle comprendre qu’il se foutait directement d’elle ?

Enfin, le pire (je suppose), est sans doute qu’on est tout à fait en droit de lui en vouloir à elle aussi, après tout ce qu’elle a fait subir à ses pairs (malgré tout ce qu’elle a vécu).
Mais ce n’est pas moi de lui jeter la première pierre (pas après toutes les mochetés que j’ai vues dans ma propre enfance, que j’ai tolérées durant mon adolescence ou que j’accepte en partie maintenant en tant qu’adulte sous le couvert du cynisme)…
Enfin, je suis de mauvaise foi aussi : je casserai bien du sucre sur sa tronche un peu plus tard.

Pour lors, ce qui l’avait vraiment détruite (et c’est d’ailleurs devenu la peine maximale sous son autorité), c’est qu’à son retour de sa semaine de souffrances, ils l’ont joyeusement castré devant elle…
Pour qu’elle ne recommence plus (même si elle ne se payait jamais le luxe d’être idiote).

En définitive, je crains qu’elle n’ait espéré que ses souffrances pussent prendre fin. Qu’elle s’imaginait même prendre les restes de son amant perdu et entamer « quelque chose ».
Qu’on les aurait laissé tranquilles tous les deux après tout ce qu’ils avaient endurés.

Elle n’aurait pas pleuré (toujours selon elle, mais je la crois).
Elle serait restée silencieuse étouffant sans doute sa rage montante du mieux qu’elle le pouvait à moins que la mort de l’âme ne l’ait cueillie avant l’heure.

Sa haine devint alors sans borne et dirigée contre tous. Envers les gens du clan bien sûr, contre l’humanité en générale mais aussi à l’encontre de cet eunuque qui avait tout gâché.
Elle aurait préféré être morte plutôt que d’endurer le meurtre systématique de chacun de ses espoirs : cet abruti qui gisait devant elle lui avait interdit cette fin par faiblesse sentimentale et pour quoi ?
Pour endurer encore et toujours tout le reste, avec la certitude désormais de demeurer toute seule à jamais.

Elle aurait pu se contenter de l’eunuque (elle en a eu beaucoup par la suite), mais son orgueil venait de naître.

Elle n’était plus capable de se rendre compte qu’il n’y était pour rien : son abruti de père avait pris sa décision depuis longtemps, bien avant leur rencontre (mais cette fois, il avait fait une erreur de calcul qui allait lui être fatale).

On ne l’a plus touchée par la suite. Elle a de facto cessé de demander de l’alcool pendant sa grossesse (moins pour sa progéniture que pour éviter tout embêtement) et elle s’est mise à chercher dehors sa pitance avec l’aide de quelques femmes qui avaient fini par lui accorder leur pitié.
Personne n’aurait cru bon d’en rajouter une couche : ils avaient fini de s’amuser avec elle. Ils pensaient que l’endoctrinement avait été efficace et qu’elle ne s’éloignerait jamais bien loin.
Elle avait même la permission de son père (lui-même croyant faire preuve de grandeur d’âme).
Mais il ne voyait rien venir. En secret, elle ruminait sa vengeance.
Elle accoucha dans l’indifférence totale, loin du camp. Et jusqu’à ce jour, on ne savait pas ce qu’il était advenu de sa progéniture.

Elle est finalement revenue comme tout le monde s’y attendait…
Et pendant les deux ans qui suivirent son accouchement, les choses ont pu paraître revenir à la normale.
Le jeune homme était maintenu en vie (pour l’exemple) et servait toujours d’objet sexuel occasionnel. La mère de Lilith venait fréquemment lui apporter à manger.

Comme je l’ai dit, Lilith a eu le temps d’avoir un enfant de son père.
La consanguinité n’aurait pas eut de prise sur leur fils, mais ça n’a pas empêché Lilith de se venger sur lui pour tous les méfaits du pasteur après sa mort.
D’autant que le père semblait s’y être attaché (c’était un garçon après tout), et même si le pauvre enfant n’échappa pas non plus à ses lubies occasionnelles, le pater le cajolait souvent (pensant compenser peut-être).
En tous les cas, l’attachement (difficile de parler d’amour paternel) qu’il avait pour lui l’avait même poussé à se rapprocher de sa fille (du moins, c’est ce qu’il pensait).

Mais à l’aube de son treizième anniversaire, Lilith avait choisi de s’offrir elle-même son premier véritable cadeau.

Son père était sobre…
Lilith a confessé par la suite que c’était une des raisons pour lesquelles elle avait eu peur qu’il ne se doute de quelque chose (et qu’il se refuse).
Mais la demoiselle Lilith savait se montrer très convaincante (selon les gens du camp, elle était très douée en la matière : aucun d’eux n’a compris qu’elle préparait son coup depuis trois ans).

La suite est vachement dégueu (mais à la mesure de tout le reste).

Elle a attendu le bon moment : pas trop tôt (pour que le sang affluant s’écoule plus vite) et pas trop tard non plus (pour qu’il ne puisse pas éprouver le moindre plaisir).

Lilith aurait alors refermé ses puissantes mâchoires (qu’elle avait entraînées sur la viande crue treize ans durant).
Le porc s’est simplement vidé très lentement de son sang en se tordant de douleur.

Une gâterie mortelle en somme…



Ouais, ouais, je sais : c’est immonde (mais j’assume…

Enfin, à moitié peut-être)…

Ca faisait longtemps que ça lui pendait au nez de toute façon (tôt ou tard ça devait bien lui retomber sur la trogne)…

Enfin (et tant qu’on y est), certains mecs devraient réfléchir à deux fois avant d’essayer de refourguer leur bistouquette à la bouche de leur(s) bourgeoise(s)…

Paraît qu’après ça, dans le Treizième et suite à l’avènement de Lilith, « se faire sucer » a acquis autant de signification que l’image de l’épée de Damoclès (le côté poétique en moins je suppose).

Et le vieux cochon, même s’il ne disait « oui » qu’en proférant force menaces et non sans s’être muni d’une arme au préalable - sans doute savait-il déjà ce qu’il risquait - pour le coup, a eu le tort de baisser sa garde (estimant que ses mesures seraient à jamais suffisantes).

Son couteau ne lui a servi a rien. L’homme est resté en état de choc plusieurs instants avant de réaliser que Lilith s’était saisie de la lame.
Elle l’a de suite dissuadé de porter les mains à son sexe (dans l’espoir d’endiguer l’hémorragie).

Elle avait encore le bout de chair molle en bouche et mâchonnait amoureusement en regardant le regard terrifié de son paternel contrit par la douleur, se braquer sur elle.
Lilith devait encore avoir la bouche barbouillée de sang avant d’en avaler le contenu, lorsqu’elle a entendu les suppliques de son père.
Elle se serait alors parée de son plus beau sourire de carnassier, (une expression qu’on ne lui connaissait pas encore)…

Puis elle l’aurait éventré lentement et froidement avant qu’il ne meure (pour qu’il ne parte pas non plus du simple épuisement de ses forces).



Mais pour tout vous dire, je crois, moi, que cette petite histoire ne tient pas debout…

Il est vraisemblablement bien mort d’un rapport intime dégénérant (c’est dans son style : il sera mort comme il a vécu en somme).
Mais je le vois plutôt crever assez vite, ne se rendant pas compte de ce qui était en cours : ce qui a du profondément la frustrer, elle.
Elle aura peut-être même pleuré de rage (contrairement à ce que veut le mythe) en voyant qu’elle n’avait rien gagné d’autre (après tout ce qu’elle a du endurer par sa faute).
Et par la suite, elle n’aurait pas continué dans cette voie, à mon sens, si elle avait eu entière réparation. C’est sans doute pour ça qu’elle ne s’est pas contentée de le tuer.
Cette histoire n’est vraisemblablement que son propre fantasme de vengeance : c’est la description exacte de ce qu’elle comptait lui faire subir pour satisfaire entièrement ses pulsions de colère refoulée.

Mais il est rare qu’un plan se déroule comme prévu : elle a pu paniquer, il s’est peut-être vidé de son sang trop vite ou plus probablement, il est resté en état de choc jusqu’à sa mort et n’a pas pu réaliser réellement ce qui lui arrivait.
Cet idiot se serait alors mis hors d’atteinte à jamais de la vendetta personnelle de sa fille (par simple contrecoup de la mesure punitive). Pour tout le monde, il aurait mieux valu que ce connard se reprenne juste assez pour les affaires de Lilith.

Enfin bon…

Je ne prétends pas non plus me mettre à la place de celle qui allait devenir la souveraine du treizième secteur. Si elle affirmait que c’était vrai, après tout…

Elle était peut-être effectivement devenue foncièrement sadique (vas savoir)…
Surtout que ce serait alors le seul mensonge qu’elle aurait pondu (selon les sources dont nous disposons).

Je ne connais pourtant pas non plus beaucoup de nanas qui se seraient ventées d’avoir buté un mec en lui taillant une pipe…
Et même si Lilith n’avait aucune gêne pour ce genre de chose - elle avait compris très tôt que le sexe est la pire des armes et avait appris durement à en tirer tous les avantages - il fallait que son récit se termine « bien » (si on peut dire).
Que la morale soit « la vengeance paye » si vous voulez : endoctrinement oblige.

Mais si mon hypothèse est la bonne, elle se serait mise hors-la-loi (puisqu’elle n’a pas invoqué le droit de mensonge auquel elle avait accès) et aurait pu encourir la peine de mort : par décapitation je crois…
A moins que ce ne fut par pendaison ?

Je suppose que c’était plutôt la pendaison, vu que la sentence a une connotation sexuelle.
C’est d’ailleurs l’origine d’une vieille croyance selon laquelle la racine de mandragore poussait sous l’échafaud (comme me l’avait dit ma femme qui a toujours été vachement calée - entre autre - en botanique et qui tenait cette information de sa mère, qui lui a tout appris en la matière)…
Paraît que la racine (de forme prétendument humaine pour la raison qui suit) poussait précisément sous le pendu parce qu’il fertiliserait la terre de sa dernière éjaculation…
Paraît aussi que le sang afflue massivement dans les parties génitales lors d’une strangulation (chose que j’ignorais à l’époque).

Pour info, on retrouve pas mal de mortes, une écharpe autours du cou, à cause de ce genre de pratique sexuelle douteuse.
Et on a retrouvé pas mal de gars atterrés à cause de ce qu’il avaient faits (bien que la demande était souvent expressément issue de leurs compagnes la plupart du temps et s’il y avait écharpe tout du moins)…
Ceux-là crèvent gentiment en détention (surtout parce qu’ils ne sont pas les criminels en puissance capables de survivre en milieu carcéral). Ceux qui n’appellent pas les secours ou ne signalent pas la mort de leur gonzesse auraient, eux, une chance de survivre en prison (même s’ils n’y vont pas souvent)…

Mais je continue de croire qu’assumer ses actes…
C’est beau !
(J’essaye de m’en convaincre tout du moins).

Pour en revenir à Lilith, un mensonge serait en tout cas une des meilleures raisons pour expliquer la disparition de tous les témoins gênants présents à l’époque des faits, mais ça n’aurait pas beaucoup de sens.
A moins qu’on n’ait pas tous les éléments (ce qui est possible aussi) ou que le droit de mensonge cité ne soit entré en vigueur que postérieurement à l’époque où elle a monté cette histoire.

Bah, pour ce que ça change…

Quoiqu’il en soit, pratiquement tous les hommes du camp devaient avoir subi le même sort (et ceux qui n’y étaient pas passé allaient subir une fin bien pire).
Il faut savoir que le bâtiment entier et ses dépendances étaient insonorisés (comme toutes les baraques aux normes de n’importe quel secteur du reste).
Aucun de ceux qui ont crié n’aurait pu être entendu (une ironie que les dames du camp ne pouvaient qu’apprécier à sa juste valeur je suppose).

Et la légende veut que le soir même, Lilith ait profité de l’occasion de son treizième anniversaire, pour convier ses sanglantes comparses à un bien étrange banquet.
Pour la première fois de sa vie, elle allait goûter à de la chair préparée (et bien cuite qui plus est)…
Mais de la chair humaine en l’occurrence.

Quand elle était petite, son père disait pour lui faire peur, les soirs où il était passablement éméché, qu’il existait des démons qui couraient le long des rues à la nuit tombée et qui dévoraient la viande des petites filles comme elle.
Il prétendait aussi qu’il en faisait partie.
Mais à sa connaissance, Lilith ne l’avait jamais vu agir de la sorte : il voulait juste la terroriser…
(Bien mal lui en prit).

Il paraît que le cœur était servi en dessert…
Mais seule Lilith osa manger le sien : celui de son père (qui était cru qui plus est).

Les femmes ont toutes fini par rallier la petite pour participer à cette orgie macabre en définitive.
Par la suite, on a appris que de ses compagnes de l’époque, aucune n’avait survécu. Elles ont toutes été éliminées au fur et à mesure à un moment ou un autre (certaines ont bien tenté de devancer Lilith mais sans succès).

Quoiqu’il en soit, elles ont célébré cette nuit par le sacrifice de la mère de Lilith (brûlée vive) et de son eunuque d’amant (qu’elle égorgea elle-même).

On dit qu’il aurait souri juste avant de mourir en entendant la voix de sa belle et les rires de femmes en guise de fond sonore (mais son expression naïve a vite fait place à un rictus de souffrance et d’incompréhension).
Il est le seul, dont elles n’aient pas entamé les restes : elles lui auraient même offert une sépulture chrétienne (entre deux plaques en polymère je suppose parce qu’il n’y a pratiquement pas de terre à l’intérieur du dôme).

Et elles ont clôturé leur sauterie en trinquant « à Dieu » (pour honorer une habitude de leurs défunts tortionnaires) ou adieu en l’occurrence.

Comme je l’ai dit, l’histoire de Lilith n’appartenait alors qu’à la liste des faits divers du treizième secteur.
Mais la dame est rapidement devenue très influente…
S’alliant de toutes les manières possibles avec de puissants seigneurs et précipitant leur chute pour présider à la vie de leurs sujets de la manière que tout le monde sait, tissant bientôt des liens occultes avec des fraternités oubliées qui détenaient encore les clefs du savoir et dont l’usage pervers ne tarda pas à faire des ravages.

La citée, que la petite troupe de Lilith ne représentait pas encore, avait contre elle son isolement et celui du reste du monde à son encontre.
Et pour parachever son œuvre, elle a sciemment répandu les bacilles et autres germes responsables d’épidémies qu’on pensait à jamais disparues…
Pour décimer ceux qui ne se soumettaient pas et contraindre les autres à accepter sa loi (dispensant elle-même vaccins et antibiotiques contre la loyauté de ses ouailles).

En fin de compte, le lieu qu’était le treizième secteur fut rapidement englouti dans la tourmente et l’indifférence pour faire place à l’enfer selon Lilith.


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