Note de la fic :
Publié le 25/09/2012 à 01:34:31 par faces-of-truth
La première fois que Billy avait entendu parler de l’homme qui hantait ces bois, le jeune garçon avait tout d’abord éclaté d’un rire venant droit du cœur. Ce n’étaient que des balivernes ; encore de nouvelles histoires à dormir debout soigneusement élaborées par les parents pour leur faire peur, à eux les enfants, en prévention d’une éventuelle bêtise. Il n’en avait que faire de ces légendes abracadabrantes sur des fantômes affamés ou des loups-garous enragés. Mais son opinion changea brusquement le jour où il découvrit de ses propres yeux qu’il s’agissait d’une terrifiante vérité.
Billy avait vu, une nuit où il voulait espionner la belle Justine, quelque chose se mouvoir vers l’océan d’arbres qui entourait son village. Il s’était approché avec défiance et curiosité vers ce qui semblait être un animal, lorsqu’il découvrit un homme, immense, famélique, vêtu d’un long manteau noir et d’un chapeau de la même couleur. Il quittait le tas de maisons et disparaissait dans le biome.
A partir de ce jour-là, Billy avait ressenti une peur inextinguible à l’égard de cette créature. Il n’arrivait plus à dormir la nuit, et était persuadé que le moindre craquement de brindilles dehors était un signe qui trahissait Sa présence derrière sa fenêtre. Ses cauchemars se faisaient de plus en plus nombreux ; il se voyait poursuivi dans la forêt par l’Homme au chapeau noir, ce dernier ne se déplaçait pas en marchant : ses pieds glissaient sur le sol dans un bruit atroce, proche du grincement. Mais il était persuadé que la réalité était bien plus horrible que ce que ses songes lui laissaient percevoir.
Il entendait les autres enfants en parler avec crainte. Ils ajoutaient à la légende des détails épouvantables dont il ignorait la source. L’Homme aurait par le passé enlevé un nombre conséquent d’enfants ; il aurait pénétré dans leurs chambres, et les aurait longuement observés sans faire un bruit avant de les saisir dans ses bras maigres et les entraîner avec lui dans la forêt. On n’aurait retrouvé que les squelettes de ses victimes.
Billy avait la chair de poule à chaque fois qu’il était fait mention de cette abomination qui errait dans les environs. Il demanda un soir à ses parents pourquoi tous les papas du village ne prenaient pas les fusils pour aller le chasser, mais ils refusèrent d’aborder le sujet. Billy en conclut avec effroi qu’ils étaient aussi terrifiés que lui l’était, et que tout réconfort venant des adultes n’état en aucun cas véridique.
La jolie Justine ne semblait, elle, pas aussi angoissée que le reste du village. Elle en était au contraire amusée ; Billy ne comprenait pas comment elle faisait pour rester si sereine. Un jour, il entama la discussion en quête de réponse, et elle se contenta de lui répondre qu’il n’était pas méchant. Il était même son ami. Le jeune garçon sentit un frisson parcourir son échine quand elle raconta qu’elle l’appelait tous les soirs à la fenêtre pour qu’il vienne la rejoindre. Elle lui avait aussi donné un nom : Tommy.
Billy la saisit par les épaules et l’enjoignit à ne surtout pas recommencer. Mais quelle folie ! C’était elle qui le faisait venir ! L’Homme au chapeau noir allait surement s’en prendre à un moment ou un autre à Justine ! Elle le repoussa avec agacement, mais il insista et elle finit par capituler. Billy était amoureux de Justine. Il n’était pas question que ce monstre lui fasse le moindre mal. Lorsqu’elle le quitta, elle murmura que « de toute façon, il partait cette nuit ». Elle lui avoua qu’elle lui donnait à manger depuis sa fenêtre et qu’elle aimait parler avec lui.
Une fois rentré chez lui, Billy ne se sentait pas à l’aise dans ses souliers ; le timbre de voix de sa chérie était éloquent : elle se moquait de lui et passerait outre sa promesse. Mais que devait-il faire alors ? Il resta muet toute la soirée, plongé dans un débat intérieur intense. Il ne pouvait pas laisser Justine seule aux prises de la créature. Et si ce qu’elle lui avait raconté était vrai, il lui rendrait sa dernière visite ce soir et quitterait ainsi la région. A cette pensée, Billy fut convaincu qu’il l’emmènerait avec elle. Et ça, il n’en était pas question !
La nuit-même donc, à l’heure où tout le village était assoupi, il s’évada en toute discrétion de sa chambre par la fenêtre et atterrit pieds nus sur l’herbe. Il se dirigea alors avec circonspection vers la maison de Justine. Il se dissimula dans des frondaisons et se mit à attendre au milieu des ténèbres, bercé par le chant de la brise nocturne et des oiseaux insomniaques. Attendre. Attendre. Attendre encore.
Au bout d’une heure à peu près, alors que ses paupières se faisaient trop lourdes pour lutter contre le sommeil, il entendit non loin de lui des bruits de pas et de feuillages remués. Il retint sa respiration avec horreur. L’Homme approchait !
Et puis il le vit. La bête sortit de la forêt et s’avança à pas lents et allongés vers la fenêtre de la chambre de Justine. Il portait toujours son long manteau noir ainsi que son chapeau. Billy remarqua qu’il tenait quelque chose dans sa main droite, mais il ne vit pas distinctement de quoi il s’agissait. Ce devait être une sacoche. L’être n’était qu’à trois mètres de la maison de sa chérie lorsque celle-ci ouvrit ses volets en silence. Il avait eu raison de ne pas lui faire confiance.
Elle lui tendit une petite poche qu’il saisit avec délicatesse. Elle se pencha vers lui et semblait lui chuchoter ce que Billy se damna de ne pouvoir entendre. L’Homme se tenait droit et la dominait d’un bon mètre et demi. Il resta immobile quelques instants sans rien faire. Qu’allait-il se passer ?! Soudain, il sortit un objet d’un sac et le donna à la fillette. Le jeune observateur aurait payé un grand nombre de billes pour en connaître la nature. Elle le contempla un long moment, puis posa ses yeux sur l’Homme. Alors, elle tendit ses bras et il l’attrapa en la serrant contre elle.
Billy bondit aussitôt de sa cachette et se précipita vers eux. Le monstre était en train de l’enlever, exactement comme il l’avait présagé ! Il avait été si bête, il aurait dû davantage la surveiller ! Ce qui était en train de se passer était entièrement de sa faute. Il poussa un cri et ordonna à la bête de laisser Justine tranquille.
L’Homme reposa la fillette et le contempla. Billy put enfin voir son visage. Celui-ci ressemblait davantage à un tableau dont la peinture avait coulé, mais il avait la forme et les quelques caractéristiques de celui d’un humain. Justine lui jeta un regard inquisiteur et lui fit signe de se taire tout en le hissant dans sa chambre. Elle regarda à nouveau son étrange compagnon et lui dit qu’il était l’heure qu’il parte. Billy remarqua que l’Homme avait une besace remplie de nourriture. Il interrogea Justine sur ce qu’il se passait et elle lui montra la photographie que l’individu lui avait offerte quelques secondes plus tôt. Sur le cliché se trouvaient deux enfants. L’un était un bébé, et l’autre était plus âgé, mais semblait malade.
Justine lui expliqua qu’elle donnait à manger à l’Homme tous les soirs parce qu’il préparait un long voyage. Et il lui avait promis qu’avant de partir, il lui révélerait son identité en remerciement. D’un geste enjoué, elle désigna le bébé en précisant que c’était elle ; l’enfant à ses côtés était Tommy. Il avait contracté une maladie très grave étant petit, et celle-ci s’était manifestée sur son corps. N’ayant aucunement les moyens de le soigner et le voyant dépérir jour après jour, son père et sa mère avaient pris une décision qui avait anéanti leur existence : ils avaient voulu mettre fin à son calvaire. Mais l’enfant comprenant son sort avait pris la fuite la nuit précédant l’acte et n’était jamais revenu. Il était donc, à leurs yeux, mort de faim ou de soif dans la forêt. Les parents cachèrent son existence à leur petite fille, trop jeune pour se souvenir de quoi que ce soit, et le reste du village avait juré de garder le secret. Sa présence dans la forêt avait été interprétée comme étant celle d’un démon vindicatif engendré par le crime envisagé. En vérité, il avait vécu dans la honte et la peur d’être rejeté tout ce temps, caché dans le biome. Jusqu’à ce qu’il parle avec elle… Avec Justine. Aujourd’hui, il partait, son sac riche en provisions, vers le monde, vers une nouvelle vie ; là où il trouverait sa place.
Une larme perla sur la joue rose de Justine et elle contempla son grand-frère disparaître à reculons dans les arbres sombres et lui rendre un dernier au revoir de la main. Billy en eut la gorge nouée. La fillette à ses côtés renifla dans un sanglot de joie.
La porte de sa chambre s’ouvrit et sa maman les découvrit tous les deux, main dans la main, à fixer les bois. Justine se tourna vers elle en riant, les yeux humides, et lui déclara que Tommy était heureux maintenant, et que la vie qu’il méritait allait enfin commencer. La femme mit un petit moment à saisir ce que sa fille venait de lui dire. Tommy… ? Comprenant alors, les pupilles de la mère se posèrent avec stupeur et chagrin sur les hauts arbres. Elle posa sa main sur sa bouche et pleura en silence. En voulant le délivrer du mal qui le rongeait, elle avait éloigné son petit et l’avait condamné à la solitude. Mais c’était fini. Il ne serait plus rejeté. Quelque part en ce monde, il finirait par être accepté. Et c’était tout le bien qu’elle voulait pour son enfant.
Il était libre à présent.
Billy avait vu, une nuit où il voulait espionner la belle Justine, quelque chose se mouvoir vers l’océan d’arbres qui entourait son village. Il s’était approché avec défiance et curiosité vers ce qui semblait être un animal, lorsqu’il découvrit un homme, immense, famélique, vêtu d’un long manteau noir et d’un chapeau de la même couleur. Il quittait le tas de maisons et disparaissait dans le biome.
A partir de ce jour-là, Billy avait ressenti une peur inextinguible à l’égard de cette créature. Il n’arrivait plus à dormir la nuit, et était persuadé que le moindre craquement de brindilles dehors était un signe qui trahissait Sa présence derrière sa fenêtre. Ses cauchemars se faisaient de plus en plus nombreux ; il se voyait poursuivi dans la forêt par l’Homme au chapeau noir, ce dernier ne se déplaçait pas en marchant : ses pieds glissaient sur le sol dans un bruit atroce, proche du grincement. Mais il était persuadé que la réalité était bien plus horrible que ce que ses songes lui laissaient percevoir.
Il entendait les autres enfants en parler avec crainte. Ils ajoutaient à la légende des détails épouvantables dont il ignorait la source. L’Homme aurait par le passé enlevé un nombre conséquent d’enfants ; il aurait pénétré dans leurs chambres, et les aurait longuement observés sans faire un bruit avant de les saisir dans ses bras maigres et les entraîner avec lui dans la forêt. On n’aurait retrouvé que les squelettes de ses victimes.
Billy avait la chair de poule à chaque fois qu’il était fait mention de cette abomination qui errait dans les environs. Il demanda un soir à ses parents pourquoi tous les papas du village ne prenaient pas les fusils pour aller le chasser, mais ils refusèrent d’aborder le sujet. Billy en conclut avec effroi qu’ils étaient aussi terrifiés que lui l’était, et que tout réconfort venant des adultes n’état en aucun cas véridique.
La jolie Justine ne semblait, elle, pas aussi angoissée que le reste du village. Elle en était au contraire amusée ; Billy ne comprenait pas comment elle faisait pour rester si sereine. Un jour, il entama la discussion en quête de réponse, et elle se contenta de lui répondre qu’il n’était pas méchant. Il était même son ami. Le jeune garçon sentit un frisson parcourir son échine quand elle raconta qu’elle l’appelait tous les soirs à la fenêtre pour qu’il vienne la rejoindre. Elle lui avait aussi donné un nom : Tommy.
Billy la saisit par les épaules et l’enjoignit à ne surtout pas recommencer. Mais quelle folie ! C’était elle qui le faisait venir ! L’Homme au chapeau noir allait surement s’en prendre à un moment ou un autre à Justine ! Elle le repoussa avec agacement, mais il insista et elle finit par capituler. Billy était amoureux de Justine. Il n’était pas question que ce monstre lui fasse le moindre mal. Lorsqu’elle le quitta, elle murmura que « de toute façon, il partait cette nuit ». Elle lui avoua qu’elle lui donnait à manger depuis sa fenêtre et qu’elle aimait parler avec lui.
Une fois rentré chez lui, Billy ne se sentait pas à l’aise dans ses souliers ; le timbre de voix de sa chérie était éloquent : elle se moquait de lui et passerait outre sa promesse. Mais que devait-il faire alors ? Il resta muet toute la soirée, plongé dans un débat intérieur intense. Il ne pouvait pas laisser Justine seule aux prises de la créature. Et si ce qu’elle lui avait raconté était vrai, il lui rendrait sa dernière visite ce soir et quitterait ainsi la région. A cette pensée, Billy fut convaincu qu’il l’emmènerait avec elle. Et ça, il n’en était pas question !
La nuit-même donc, à l’heure où tout le village était assoupi, il s’évada en toute discrétion de sa chambre par la fenêtre et atterrit pieds nus sur l’herbe. Il se dirigea alors avec circonspection vers la maison de Justine. Il se dissimula dans des frondaisons et se mit à attendre au milieu des ténèbres, bercé par le chant de la brise nocturne et des oiseaux insomniaques. Attendre. Attendre. Attendre encore.
Au bout d’une heure à peu près, alors que ses paupières se faisaient trop lourdes pour lutter contre le sommeil, il entendit non loin de lui des bruits de pas et de feuillages remués. Il retint sa respiration avec horreur. L’Homme approchait !
Et puis il le vit. La bête sortit de la forêt et s’avança à pas lents et allongés vers la fenêtre de la chambre de Justine. Il portait toujours son long manteau noir ainsi que son chapeau. Billy remarqua qu’il tenait quelque chose dans sa main droite, mais il ne vit pas distinctement de quoi il s’agissait. Ce devait être une sacoche. L’être n’était qu’à trois mètres de la maison de sa chérie lorsque celle-ci ouvrit ses volets en silence. Il avait eu raison de ne pas lui faire confiance.
Elle lui tendit une petite poche qu’il saisit avec délicatesse. Elle se pencha vers lui et semblait lui chuchoter ce que Billy se damna de ne pouvoir entendre. L’Homme se tenait droit et la dominait d’un bon mètre et demi. Il resta immobile quelques instants sans rien faire. Qu’allait-il se passer ?! Soudain, il sortit un objet d’un sac et le donna à la fillette. Le jeune observateur aurait payé un grand nombre de billes pour en connaître la nature. Elle le contempla un long moment, puis posa ses yeux sur l’Homme. Alors, elle tendit ses bras et il l’attrapa en la serrant contre elle.
Billy bondit aussitôt de sa cachette et se précipita vers eux. Le monstre était en train de l’enlever, exactement comme il l’avait présagé ! Il avait été si bête, il aurait dû davantage la surveiller ! Ce qui était en train de se passer était entièrement de sa faute. Il poussa un cri et ordonna à la bête de laisser Justine tranquille.
L’Homme reposa la fillette et le contempla. Billy put enfin voir son visage. Celui-ci ressemblait davantage à un tableau dont la peinture avait coulé, mais il avait la forme et les quelques caractéristiques de celui d’un humain. Justine lui jeta un regard inquisiteur et lui fit signe de se taire tout en le hissant dans sa chambre. Elle regarda à nouveau son étrange compagnon et lui dit qu’il était l’heure qu’il parte. Billy remarqua que l’Homme avait une besace remplie de nourriture. Il interrogea Justine sur ce qu’il se passait et elle lui montra la photographie que l’individu lui avait offerte quelques secondes plus tôt. Sur le cliché se trouvaient deux enfants. L’un était un bébé, et l’autre était plus âgé, mais semblait malade.
Justine lui expliqua qu’elle donnait à manger à l’Homme tous les soirs parce qu’il préparait un long voyage. Et il lui avait promis qu’avant de partir, il lui révélerait son identité en remerciement. D’un geste enjoué, elle désigna le bébé en précisant que c’était elle ; l’enfant à ses côtés était Tommy. Il avait contracté une maladie très grave étant petit, et celle-ci s’était manifestée sur son corps. N’ayant aucunement les moyens de le soigner et le voyant dépérir jour après jour, son père et sa mère avaient pris une décision qui avait anéanti leur existence : ils avaient voulu mettre fin à son calvaire. Mais l’enfant comprenant son sort avait pris la fuite la nuit précédant l’acte et n’était jamais revenu. Il était donc, à leurs yeux, mort de faim ou de soif dans la forêt. Les parents cachèrent son existence à leur petite fille, trop jeune pour se souvenir de quoi que ce soit, et le reste du village avait juré de garder le secret. Sa présence dans la forêt avait été interprétée comme étant celle d’un démon vindicatif engendré par le crime envisagé. En vérité, il avait vécu dans la honte et la peur d’être rejeté tout ce temps, caché dans le biome. Jusqu’à ce qu’il parle avec elle… Avec Justine. Aujourd’hui, il partait, son sac riche en provisions, vers le monde, vers une nouvelle vie ; là où il trouverait sa place.
Une larme perla sur la joue rose de Justine et elle contempla son grand-frère disparaître à reculons dans les arbres sombres et lui rendre un dernier au revoir de la main. Billy en eut la gorge nouée. La fillette à ses côtés renifla dans un sanglot de joie.
La porte de sa chambre s’ouvrit et sa maman les découvrit tous les deux, main dans la main, à fixer les bois. Justine se tourna vers elle en riant, les yeux humides, et lui déclara que Tommy était heureux maintenant, et que la vie qu’il méritait allait enfin commencer. La femme mit un petit moment à saisir ce que sa fille venait de lui dire. Tommy… ? Comprenant alors, les pupilles de la mère se posèrent avec stupeur et chagrin sur les hauts arbres. Elle posa sa main sur sa bouche et pleura en silence. En voulant le délivrer du mal qui le rongeait, elle avait éloigné son petit et l’avait condamné à la solitude. Mais c’était fini. Il ne serait plus rejeté. Quelque part en ce monde, il finirait par être accepté. Et c’était tout le bien qu’elle voulait pour son enfant.
Il était libre à présent.
Commentaires
- Droran
25/09/2012 à 01:57:00
Toutes ces années d'attente pour ça ?
Mais c'est pas mal