Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Second Hope


Par : Squiller
Genre : Réaliste, Fantastique
Statut : C'est compliqué



Chapitre 2


Publié le 09/01/2012 à 22:06:03 par Squiller

Fabio correspond précisément au genre de personne qui me soule. Extraverti, arrogant et bon vivant, il était sorti avec une amie commune d'Adrianne et moi et avait rompu il y a deux ans de cela. L'amie a ensuite changé de lycée, et nous avons perdu contact, mais Fabio, lui, est resté. Et c'est précisément ce qui est ennuyeux chez ce garçon. Il reste. Il colle. Il est présent, omniprésent, et il ne manque jamais de le faire remarquer.
Pas spécialement méchant, juste TROP heureux de vivre. Le genre de garçon qui est appréciable "à petites doses", comme le dit Adrianne.

Et là, il est derrière son écran depuis exactement 7 minutes, et le voilà qui m'annonce qu'il sait ce que je ne sais pas et ce qui me torture depuis des heures : que s'est-il passé hier soir après 23h30 ?
Ma réponse se veut convaincante :
"Sérieux ? Envoie"

Mais ce n'est pas si simple. Fabio a la mauvaise manie de prendre à la légère ce que les gens prennent au sérieux, et inversement.

"Tu me donne combien ? :p"

Quel con. Il se rend pas bien compte qu'il tient entre ses doigts ce que je désire le plus depuis mon réveil.
Énervé, j'envoie :

"Mec, abuse pas, j'ai pas la tête à ça, alors balance ce que tu sais maintenant, ou va te faire foutre."

"Hého, t'énerve pas mon enfant :D"

Ta gueule. Dis.

"Tu te souvient de Mélissa, la bonasse dans notre classe de seconde ?"

Oh, merde. Des souvenirs commencent à remonter. Elle était là, à la soirée. Je la vois devant un lit rouge.

"T'as voulu la baiser mec ! Elle t'as chauffé comme pas possible ! :)"

"C'est des conneries !"

"J'ai une vidéo ! ;)"

"Tu nous a espionnés ??"

A mesure que la discussion avance, la pression de ma main sur la sourie augmente. Si j'étais en face de Fabio actuellement, je pense que je serais capable d'être exceptionnellement très violent.

"Malheureusement, il s'est rien passé :("

Mais ferme la, donne moi cette putain de vidéo ...

"Allez, ma mère gueule, je descend. Je t'envoie la vid'"

Quelques instants après, une vidéo de 1 minute et quelques apparaît. On y voit la tête de Fabio regardant l'objectif de la caméra, puis la chambre des parents d'Adrianne, filmée par une porte ouverte.
Je me vois, en caleçon, devant Mélissa, qui me parle.
Plus la vidéo progresse, plus je commence à me rappeler de tout.
Bien que la conversation soit inaudible, chaque seconde de vidéo me fait revivre la scène comme si j'y était.



Mélissa est en face de moi, d'un air déçu.

"Oh, je te parle Victor !"

Cette conne ne s'était même pas souvenu de mon prénom. Mais j'avais laissé pisser. Pour une raison incompréhensible, elle m'avait dragué sur les coups de 23h, et j'avais décidé de ne pas laisser passer ma chance. On était monté ensemble dans la chambre des parents, et là une énorme migraine m'avait pris.

"Tu fais quoi là ? tu veux plus coucher ?"

Ma tête tournait comme pas possible, et c'était comme si j?assistai à la scène d'un point de vue extérieur. J'entendais ce qu'elle disait, mais je n'arrivait plus à parler. J'avais l'impression qu'un marteau piqueur me perçait la tête.

"T'as la trouille ? T'es puceau, c'est ça ?"

Mais ferme la, idiote, me dis-je devant l'écran.

Peu après, Mélissa remet sa veste sur ses épaules d'un air résigné, regarde dans ma direction et lance :

"Je pensais que t'étais devenu moins con avec le temps, mais les geeks comme toi, ça change jamais"

Et je la vois me décrocher une gifle qui me fait tomber sur le lit. Je déduit par mon inertie que le mal de crâne ne m'a par la suite pas laissé l'opportunité de me relever. La vidéo se termine sur une image de Mélissa se barrant par la fenêtre. On entends des voix dehors. Elle avait encore dû s'inviter à la fête, comme elle l'a toujours fait, et ses amies l'attendaient dehors.
D'un autre côté, je vois mal Adrianne inviter cette pouffe.

Adrianne. Elle aussi m'a envoyé un mail.
Décidant de laisser un battement pour digérer cette soirée, je ferme les yeux et met mon visage dans mes mains.

"Thomas, descends, il faut qu'on parle !"

Merde, il est pas l'heure du repas pourtant.
Je me lève de ma chaise, mais cédant à mon envie, j'ouvre avant le mail d'Adrianne.

"Appelle-moi vite"

Je n'ai pas le temps d'être énervé, paniqué ou de m'imaginer tous les scénarios imaginables comme à mon habitude, car on m'appelle une seconde fois.
"J'arrive, Maman !"
Je ferme la page facebook et descends les escaliers.



"Ton père et moi, ça ne va pas bien en ce moment"
Ma mère, d'habitude colorée et pétillante, me fait presque peur. Son sourire est tombée, et laisse place à un masque limite macabre. Ses yeux sont fuyants, pâles. Elle me semble affaiblie et à bout de souffle.
Je suis sur le cul, là. Il y a 10 minutes, ma mère m'engueulait pour des raisons plus ou moins valables, et là ... elle m'annonce quoi ?
"Je suis désolé si je suis sur les nerfs en ce moment ... je pense qu'on va se séparer"
Merde, il faut que je trouve quelque chose à répondre, et vite.
"Je ... comment vous en êtes venus à parler de ça ? demandai-je.
- On a eu une discussion plus ou moins longue, à la suite d'une petite dispute, hier soir. C'est pas la première fois que ça arrive, tu sais bien"
Après un temps, elle déglutit et reprends :
"Je crois qu'il y a une liaison."

Les bras m'en tombent. Mon père, une liaison ?
Ma mère me coupe dans mes pensées :
"Mais tu n'en parle à personne, hein ? chuchota-t-elle en mettant un doigt sur ma bouche. Pour l'instant, ce n'est qu'une hypothèse."
Mes parents vont se séparer. Et ce, à cause de mon père, qui aurait une liaison.
"Mais, bafouillai-je, pourquoi tu me dis ça à moi ... maintenant ? Tu aurais pu ...
- Je sais, m'interrompit-elle, ça peut paraître étrange. Tu es la seule personne à qui j'en ai parlé pour le moment. Mais tout à l'heure, j'ai réalisé que tu n'étais plus un enfant lorsque tu m'a parlé. J'ai vu ton visage, il était ... plein de détermination."
Je ne trouve rien à dire. Qu'est-ce qu'elle m'invente, là ?
"Tu es responsable, maintenant, avoua-t-elle en enfonçant ses yeux bleus profondément dans les miens. Tu as des envies, des projets, et je suppose que je ne peux rien à cela. Ton visage, quand tu m'a engueulée, était si ... différent."
Tu me fais quoi là, Maman ? Je suis on ne peut plus crevé. Je m'apprête à démentir, mais en voyant les yeux mouillés de larmes de ma mère, je me décide finalement à la serrer dans mes bras.
La pauvre doit être à bout.
"Tu veux que je fasse la cuisine, ce soir ? demandai-je.
- Je n'ai pas faim.
- Allez, je vais te faire un truc bon avec les restes, tu va voir."



Le repas se déroule sans encombre. Mon père n'est pas là, et mes petites soeurs mangent avec entrain sans se soucier de l'état de ma mère, qui cache rudement bien son jeu. Des regards et sourires complices de cette dernière me rassurent et me rappelle à quel point j'aime malgré tout cette famille.
Pourquoi diable mon con de père a-t-il choisi d'aller voir ailleurs ? ...

Je me souviens soudainement d'Adrianne.

Prétextant un coup de fil urgent, je quitte la table et sors dans mon jardin avec le téléphone fixe.
Adrianne décroche aussitôt.

"Thomas ! J'attendais ton coup de fil.
- Je vois ça, ris-je. Alors, c'est quoi ton problème ?
- Déconne pas mec, c'est différent cette fois.
- Dis moi, il est bientôt 20 heures, t'es pas à table ? Tes parents sont à cheval sur les horaires d'habitude.
- Ils sont pas rentrés ce soir ! lance-t-elle avec une sorte de panique camouflée.
- Comment ? lâchai-je étonné.
- Je sais pas, ils sont pas là, j'ai essayé de les joindre mais ils répondent pas à leur portable ...
- Calme toi, si ça se trouve ils sont juste coincés chez leurs amis dans un trou paumé ou le réseau passe pas ...
- Oui, peut-être, j'en sais rien, c'est pas pour ça que je t'appelle.
- Hein ? Ce serait pour quoi alors ?
- Hier soir vers minuit, tu te rappelle de rien n'est-ce pas ?"
Elle quelque chose derrière la tête, me dis-je.
"Non, enfin maintenant si, pourquoi ça ?
- Tu as eu une migraine, n'est-ce pas ?
- Euh ... pas que, mais effectivement, avouai-je, étonné du ton essoufflé d'Adrianne. On aurait dit qu'elle avait découvert quelque chose d'incroyable.
- Écoute, demain tu fais quelque chose ?"



Demain, 10 heures, dans le square le plus proche de chez nous. Adrianne ayant hérité de la manie des horaires de ses parents, j'arriverais en avance.

Actuellement, bien qu'elle semble avoir quelque chose de très important à me dire et que ses parents soient portée disparus, ça me semble égal. Les miens sont sur le point de divorcer, et ça me tue. Rien ne semblait pouvoir prévoir cette situation, rien. Ils semblaient amoureux, heureux, complets.



"Bonne nuit" me lance ma mère tandis que je monte les escaliers vers ma chambre.
Peu habitué à tant d'affection soudaine, je répond maladroitement : "Euh, ouais ! Bonne nuit aussi."

Vie de merde. Autant de vanité me blasent. C'est quoi, le délire ?
Si la vie, c'est autant d'emmerdes, pour finalement arriver à un point ou on vit une illusion d'amour pendant quelques temps avant d'être malheureux, puis fatigué, puis vieux, puis mort, OÙ est l'intérêt de se lancer dans une telle aventure ?
Je m'allonge sur le dos et commence à regarder pour la énième fois les défauts de mon plafond.
Mes parents se séparent ...
Moi qui ait toujours eu une vie de famille assez poussée, le fait d'imaginer vivre avec des parents séparés VOIRE remariés me déboussolent.
Au pire, ça finira chez le psy. Au mieux, je serais en frustration sexuelle. J'avoue avoir du mal à choisir.
Si seulement il existait un moyen de sortir de toute cette inutilité, de rompre cette chaine inexorable qui est naissance-vie barbante-mort lente ?
Je donnerais n'importe quoi pour changer de vie, pour recommencer à zéro.
Pour avoir ne serait-ce qu'un second espoir de partir, de partir loin, loin de cette progression mal calculée.
"Vie je t'en supplie !" énonçai-je seul à voix basse.



Une vibration de mon portable.
Sans grande espérance, je jette un oeil.

"Coucou, c'est Arthur ! :) C'est une amie d'Adrianne qui m'a donné ton numéro."

Vie, va te faire foutre.


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